Question de M. BOUCHET Gilbert (Drôme - Les Républicains) publiée le 02/01/2020

M. Gilbert Bouchet attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences pour la filière viticole de la décision de l'organisation mondiale du commerce (OMC) portant sur le montant des mesures de rétorsion que les États-Unis pourront imposer à l'Union européenne dans le cadre du contentieux engagé par les États-Unis en 2004 visant les avances remboursables accordées à Airbus par la France, l'Allemagne, l'Espagne et le Royaume-Uni. En effet les États-Unis peuvent augmenter leurs droits de douane sur une série de produits européens à hauteur de 7,5 milliards de dollars par an. Ce qui se traduit, depuis le 18 octobre 2019, par des droits de douane additionnels de 10 % sur certains aéronefs civils et de 25 % sur d'autres produits dont les vins. Cette sanction aboutit au paradoxe suivant : alors que la filière viticole est totalement étrangère à ce conflit les sanctions financières de l'ordre de 300 millions de dollars sont supérieures à celles dues par le secteur aéronautique dont la somme n'excède pas 200 millions de dollars. Certes l'Union européenne a fait appel de cette sanction mais dans l'attente du jugement la filière viticole se trouve fortement fragilisée craignant à terme la faillite de nombreuses maisons. Aussi, il lui demande ce qu'il entend mettre en œuvre pour sauver cette filière injustement pénalisée par cette décision de l'OMC et si le secteur aéronautique, largement bénéficiaire et à l'origine de ce conflit douanier ne pourrait, par solidarité, contribuer à rembourser les sommes payées indûment par les professionnels du vin.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 27/02/2020

Depuis le 18 octobre 2019, les États-Unis imposent des droits de douane supplémentaires sur de nombreux produits français et européen dans le cadre du contentieux à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) impliquant les avances remboursables versées par quatre États européens à Airbus. La France figure parmi les principaux pays touchés par ces sanctions, le secteur aéronautique et celui des vins étant les deux concernés. Le Gouvernement s'est mobilisé dès le début tant pour relayer auprès des autorités américaines sa volonté de négocier que pour atténuer les conséquences dommageables des mesures américaines dès lors qu'elles avaient été décidées, en particulier pour soutenir la filière viticole, particulièrement touchée par ces sanctions. La négociation est en effet la seule option permettant d'éviter une escalade encore plus dommageable pour les intérêts économiques français et européens. La Commission européenne mandatée par les États Airbus dont la France, cherche à négocier depuis plusieurs mois avec les Américains un accord amiable. Cet accord porte en premier lieu sur des mesures permettant à l'Union européenne (UE) et aux Etats-Unis de se mettre en conformité avec les décisions de l'OMC, ce qui se traduit du côté de la France par une augmentation des taux de remboursement des avances octroyées par le passé à Airbus pour le développement de certains modèles d'avions. Il doit également comporter des engagements relatifs à l'encadrement du financement du secteur aéronautique à l'avenir. Les discussions les plus récentes entre les deux parties se sont révélées constructives même s'il faudra encore plusieurs mois avant de conclure un accord. L'UE a été condamnée par l'OMC pour les avances remboursables accordées à Airbus mais les États-Unis l'ont été aussi pour les aides accordées à Boeing. D'ici juin 2020, l'UE devrait donc, à son tour, être autorisée à prendre des sanctions contre les Etats-Unis. L'UE fera tout pour éviter cette escalade, l'objectif étant d'obtenir une solution mutuellement bénéfique tant pour l'Union européenne que pour les Etats-Unis, qui se traduirait par le retrait des sanctions. Si la voie de la négociation ne devait pas porter ses fruits, le Gouvernement serait favorable à l'activation de contre-mesures sur les produits américains. Dans l'attente, des mesures d'accompagnement sont nécessaires pour la filière viticole. Un plan de soutien a été élaboré, en lien avec les professionnels concernés, afin de limiter et de contrebalancer les risques de pertes sur le marché américain consécutives à ces mesures de rétorsion commerciales. Il comporte d'une part un volet européen qui a fait l'objet d'un courrier du ministre de l'agriculture et de l'alimentation Didier Guillaume, contenant des demandes précises formulées à la Commission européenne le 31 octobre 2019, auquel Phil Hogan, alors Commissaire à l'Agriculture a répondu le 22 novembre 2019, et d'autre part un volet national. Le ministre de l'agriculture a encore eu l'occasion de relayer ce message à l'occasion du Conseil Agriculture à Bruxelles, conjointement avec son collègue espagnol, le 16 décembre 2019 Le Gouvernement est conscient que toutes ces mesures, indispensables, ne sauront compenser la gravité des pertes immédiates et brutales qui mettent en péril la survie même de certaines entreprises viticoles. C'est pourquoi le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a adressé un deuxième courrier, le 13 décembre 2019, à M. Janusz Wojciechowski, nouveau Commissaire européen à l'agriculture, afin de solliciter dans les meilleurs délais la création d'un fonds de compensation, financé par des fonds européens, pour éviter des défaillances d'entreprises. Par ailleurs, il a été également demandé qu'au-delà des premières flexibilités accordées, la Commission puisse permettre aux opérateurs d'abandonner ou de modifier en profondeur des opérations en cours de réalisation, sans sanctions financières, et que ces mêmes opérations puissent être financées à hauteur de 80 %. Sur le volet européen, à la suite des demandes formulées par le Gouvernement, l'accent est mis sur des actions d'information et de promotion des produits touchés par les sanctions américaines, le programme de travail pour 2020 relatif à des actions d'information et de promotion concernant les produits agricoles, adopté par la Commission le 18 novembre 2019, met l'accent sur les campagnes de promotion dans les marchés tiers, en leur allouant la majorité des fonds disponibles. En outre, une flexibilité accrue dans la réalisation et la gestion des opérations de promotion dans le cadre des programmes nationaux d'aide au secteur pour tous les opérateurs concernés est autorisée à titre dérogatoire. Il s'agit de donner la possibilité aux opérateurs qui le souhaitent de changer les marchés de destination de leurs opérations de promotion déjà approuvées et de l'autre modifier leur programme plusieurs fois par an pour lancer des appels à demande de soutien. L'UE a également fait part de sa disponibilité pour augmenter son taux de financement des opérations de promotions, afin d'alléger le poids financier de campagnes pour les opérateurs. Sur le volet national, les pouvoirs publics renforceront en 2020 la promotion des vins français dans les pays tiers et la communication sous la bannière « France » pour en améliorer la lisibilité. Cela se traduit par le doublement en 2020 du budget de la promotion « Business to Consumer » des vins français développée aux Etats-Unis, par le renforcement des actions de promotion « Business to Business » conduites par Business France et par l'organisation d'opérations collectives de promotion à l'export pour accompagner les exportateurs de vins français dans 38 marchés à potentiel en 2020. Les opérateurs dont le chiffre d'affaire est inférieur à 500 millions d'Euros qui souhaitent diversifier leurs débouchés à l'export pourront mobiliser les outils de soutien financier public à l'export délivrés par Bpifrance Assurance export au nom et pour le compte de l'État, et en particulier à l'assurance-prospection. Enfin, des mesures de bienveillance seront mises en œuvre pour les entreprises qui rencontreraient des difficultés financières liées aux sanctions commerciales américaines (délais de paiement, remises, etc...) et des consignes ont été passées en ce sens au réseau de la Direction générale des Finances publiques. 

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