Question de M. MORISSET Jean-Marie (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 20/02/2020

Question posée en séance publique le 19/02/2020

M. Jean-Marie Morisset. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, c'est avec une grande émotion que mon collègue Philippe Mouiller et moi-même vous posons cette question d'actualité, à la suite du drame qui s'est produit à l'hôpital psychiatrique de Thouars, dans le département des Deux-Sèvres, le jeudi 13 février dernier.

Dans le cadre de son travail, Élodie, jeune infirmière de 31 ans, mère de deux enfants en bas âge, a succombé à un coup de couteau mortel donné par un patient. Ayons en ce moment une pensée pour sa famille, ses proches, ses collègues de travail et l'ensemble des salariés du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, que le délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie est venu rencontrer le lendemain du drame.

Beaucoup de questions se posent quant aux conditions dans lesquelles il s'est déroulé. Une enquête judiciaire est bien entendu en cours, mais nous pouvons d'ores et déjà pointer les nombreuses insuffisances qui touchent cet établissement.

Comme partout en France, les services de psychiatrie sont engorgés, la sécurité n'y est plus assurée, la qualité des soins n'est satisfaisante ni pour les patients ni pour ceux qui les délivrent, les conditions de travail sont parfois indignes et le personnel est à bout de souffle.

Ce drame met en lumière, monsieur le ministre, les insuffisances du nombre de personnels, le manque de moyens en matériels, ainsi que les besoins en termes de formations.

Bien qu'élevées au rang de priorité par votre gouvernement dans le cadre du plan national Ma santé 2022, la psychiatrie et la santé mentale restent les parents pauvres du secteur de la santé, alors que le nombre de personnes prises en charge explose.

Nous ne pouvons plus nous contenter de constats, de diagnostics, de conclusions, de rapports. Il convient maintenant d'agir de manière urgente et concrète.

Monsieur le ministre, à la suite de votre prise de fonctions, vous avez prévu de vous rendre dans les prochains jours sur le site de Thouars. Le personnel du centre hospitalier appréciera votre démarche.

Quelles sont les mesures d'urgence que vous pensez lui annoncer pour éviter que ce type de drames ne se reproduise ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 20/02/2020

Réponse apportée en séance publique le 19/02/2020

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, permettez-moi de partager avec vous et votre collègue l'émotion réelle qui anime l'ensemble de la communauté médicale, ce qui inclut l'ensemble des soignants et des cadres administratifs.

Sans vouloir raconter mon histoire personnelle, il se trouve que, pendant mon internat de médecine à Grenoble, j'ai travaillé pendant six mois comme interne dans un service de psychiatrie.

M. Gérard Longuet. C'est émouvant !

M. Olivier Véran, ministre. J'y ai vu la difficulté de l'exercice au quotidien, la richesse du contact avec les malades, avec parfois des gens qui sont dans une situation de délire et souffrent de pathologies psychiatriques extrêmement lourdes, de pathologies psychotiques ou de dépressions extrêmement graves. Il s'agit d'un exercice si particulier de la médecine qu'il présente parfois des situations de dangerosité, dont les conséquences sont intolérables, je vous rejoins parfaitement sur ce point.

Vous l'avez souligné, le délégué ministériel à la santé mentale s'est rendu sur les lieux. J'ai annoncé hier que je le ferai également, sans presse, pour rencontrer les équipes hospitalières, discuter et faire le point sur ce traumatisme, qui reste, je l'imagine, immense, quelques jours après le drame qui a touché cette jeune infirmière, mère de famille de 31 ans.

Vous posez la question des moyens accordés à la santé mentale dans notre pays. Il ne faut pas se mentir, la santé mentale a été trop longtemps le parent pauvre de la médecine dans notre pays, avec des établissements de santé vétustes et des équipes qui manquent de médecins. Voilà dix ans, près de 1 500 postes de psychiatres étaient déjà vacants dans les hôpitaux, non pas par manque de budget, mais par manque de psychiatres, eu égard à la démographie médicale.

C'est la raison pour laquelle des mesures très importantes ont été prises en faveur de la santé mentale, à savoir une augmentation du budget de 80 millions d'euros pour la seule année 2019 et de 140 millions d'euros pour l'année 2020. Nous sommes en train de finaliser les projets territoriaux de santé mentale, qui seront prêts d'ici au début de l'été 2020. Des mesures importantes ont été prises et budgétées dans le cadre du dernier budget de la sécurité sociale.

Je vous le garantis, le Gouvernement a pris à bras-le-corps le sujet de la santé mentale. J'espère que vous l'aurez compris, il s'agit aussi d'une question personnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour la réplique.

M. Jean-Marie Morisset. Il y a plus de dix ans, la commission des affaires sociales s'est penchée sur la psychiatrie. Les rapports ont été nombreux, ainsi que les auditions des ministres. Ils ont abouti aux mêmes conclusions, vous nous en avez fait part, la psychiatrie reste le parent pauvre du secteur de la santé. La réalité est alarmante.

Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour revoir l'organisation de la santé mentale sur le terrain et donner les moyens budgétaires suffisants pour prendre en compte le quotidien de nos soignants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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