Question de M. ALLIZARD Pascal (Calvados - Les Républicains) publiée le 09/04/2020

M. Pascal Allizard attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances à propos de la situation dans la filière des appellations d'origine protégées (AOP) fromagères.
Il rappelle que cette filière, non délocalisable, est génératrice d'emplois. Elle contribue à l'activité économique et au maintien de l'agriculture dans les territoires ruraux de France, comme c'est particulièrement le cas en Normandie.
Les quatre filières fromagères AOP normandes, camembert de Normandie, Pont-L'Évêque, Livarot et Neufchâtel, sont largement impactées par les conséquences de la crise sanitaire liée au Covid-19 avec des baisses de commandes de 40 à 90 %. Les petites structures sont les plus fragiles.
Aujourd'hui, du lait est jeté et certains craignent de devoir détruire les stocks de leurs productions fromagères.
Des inquiétudes émergent à propos de la prime de l'État jugée insuffisante et inadaptée mais aussi du chômage partiel. Certains opérateurs des filières AOP verraient leurs dossiers de demande de chômage partiel pour leurs salariés régulièrement refusés.
Par conséquent, il souhaite savoir quelles dispositions le Gouvernement compte prendre pour assurer la survie de cette filière importante pour les territoires français et répondre aux inquiétudes de ses acteurs.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/09/2020

La crise sanitaire actuelle a des impacts importants pour de nombreuses filières agricoles et agroalimentaires. C'est notamment le cas de la filière laitière, et en particulier pour les petites entreprises fromagères, souvent dans des filières sous indication géographique (IG), et les producteurs laitiers fermiers, dont l'activité est si importante pour le patrimoine et l'économie des territoires. Ces filières font face à des difficultés liées à des pertes de débouchés, compte tenu de la fermeture d'une majorité du secteur de la restauration hors domicile, de celle d'un nombre important de marchés, et de l'orientation des achats alimentaires vers des produits de première nécessité et moins d'achats festifs par les consommateurs. En outre, la période de forte production laitière (du fait du pic de collecte annuel) aggrave la problématique. Au niveau local, des réorganisations de collecte du lait et de leurs débouchés ont été mises en place pour optimiser les capacités de valorisation du lait, avec notamment la mobilisation de certaines grandes entreprises, en particulier coopératives. Il convient de saluer la solidarité exemplaire qui s'exerce dans la filière laitière et permet d'atténuer les difficultés rencontrées par les plus petites entreprises pour lesquelles les alternatives sont réduites. De plus, des efforts sont entrepris par les enseignes de grande distribution pour maintenir ouverts les rayons à la coupe et préserver la diversité des produits proposés aux consommateurs. Les fromages sous IG maillent l'ensemble du territoire, avec une production souvent issue de très petites entreprises (TPE) et de petites et moyennes entreprises (PME), dont certaines qui apparaissent durement touchées par la crise. C'est bien pour préserver ce type d'entreprise que le Gouvernement a annoncé des mesures immédiates de soutien, dont peuvent bénéficier les exploitations agricoles et les entreprises de transformation, notamment les TPE et PME. Le détail de ces mesures est disponible sur le site du ministère de l'économie et des finances : www.economie.gouv.fr/coronavirus-soutien-entreprises. De plus, le ministre chargé de l'agriculture a porté au niveau européen la nécessité d'activer des mesures de gestion des marchés. Il était en effet indispensable que la Commission européenne active ces outils et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a mobilisé l'ensemble des partenaires européens pour porter conjointement cette demande. Concernant la filière laitière et fromagère, il s'agissait en particulier d'activer une aide financière au stockage privé. La France jugeait également pertinent de déclencher l'article 222 du règlement OCM unique, qui permet aux interprofessions et aux organisations de producteurs de mener des actions concertées en vue de contribuer à la stabilisation des marchés. Pour le secteur laitier, la Commission européenne a apporté des réponses en proposant fin avril 2020 d'activer pour 6 mois, à compter du 1er avril, l'article 222 pour le lait pour permettre la planification de la production et des mesures de stockages privés pour la poudre de lait écrémé, le beurre et l'ensemble des fromages, sous indication géographique ou non. Au niveau national, le ministère chargé de l'agriculture a travaillé avec les services de l'institut national de l'origine et de la qualité pour mettre en place une procédure rapide pour permettre aux fromages sous IG qui le souhaitent d'adapter temporairement leur cahier des charges pour faire face à la crise actuelle. Il s'agit pour eux de pouvoir continuer à bénéficier de leur appellation, malgré les évolutions des conditions de production compte tenu de la crise actuelle (en permettant la congélation d'une partie des volumes sous forme de caillé ou de fromages en blanc par exemple), tout en veillant à préserver ce qui fait la typicité de ces fromages. Le ministère chargé de l'agriculture travaille également avec le conseil national des appellations d'origine laitières sur l'évolution des dispositifs de régulation de l'offre (RRO) de fromages sous IG déjà mis en œuvre pour huit des fromages sous appellation, ou à la mise en place de telles règles pour de nouveaux fromages pour permettre une meilleure maîtrise de l'offre de ces derniers. Les RRO pour les appellations fromagères qui le souhaitent pourront par exemple prévoir une application saisonnière temporaire avec l'établissement de références mensuelles ou trimestrielles. Les services du ministère de l'agriculture assureront une gestion rapide des dossiers qui seront déposés, en lien avec ceux du ministère de l'économie et des finances. Avec la crise, la situation des populations les plus précaires se détériore et les besoins de soutien augmentent, en particulier en ce qui concerne les besoins alimentaires. Les producteurs et les entreprises de la filière font régulièrement preuve de solidarité en donnant une partie de leurs productions pour les personnes les plus démunies. Ces dons, qui peuvent être effectués par les producteurs ou par les entreprises de transformation, bénéficient d'une défiscalisation à hauteur de 60 % ou 75 % du don, en fonction des conditions réglementaires prévues par le code général des impôts. L'ensemble du Gouvernement, dont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation pour l'ensemble des filières agricoles et apporter les solutions appropriées le plus rapidement possible. La propagation mondiale du covid-19 place le monde entier dans une situation inédite avec un double défi, sanitaire et économique auquel il convient de faire face collectivement.

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