Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 07/05/2020

M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur que traditionnellement, pour être élu au premier tour lors d'un scrutin à deux tours, il faut obtenir à la fois la majorité des suffrages et le quart des électeurs inscrits. L'exigence du quart des inscrits a cependant été supprimée pour les élections municipales dans les communes de 1000 habitants ou plus. En raison de l'épidémie de Covid-19 qui a entraîné une abstention massive, de très nombreuses listes ont été élues au premier tour, avec un très faible pourcentage des électeurs inscrits. Cela porte atteinte à la légitimité du résultat des élections concernées comme le montrent les quelques exemples ci-après : - Gérald Darmanin, La République en marche (LREM), ministre de l'action et des comptes publics, à Tourcoing avec 15,05 % des inscrits ; - Jean Leonetti (Les Républicains - LR), ancien ministre, à Antibes avec 15,60 % des inscrits ; - Franck Riester (Agir), ministre de la culture, à Coulommiers avec 17,03 % des inscrits ; - Natacha Bouchart (LR), ancienne sénatrice, à Calais avec 18,29 % des inscrits ; - Michèle Tabarot (LR), député, au Cannet avec 18,38 % des inscrits ; - Hubert Falco (LR), ancien ministre, à Toulon avec 18,52 % des inscrits… Sans remettre en cause les résultats déjà acquis en mars 2020, il lui demande, si pour l'avenir, l'exigence du quart des électeurs inscrits au premier tour pourrait être rétablie pour toutes les élections.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 03/09/2020

Conformément aux dispositions de l'article L. 262 du code électoral, introduites par la loi n° 82-974 du 19 novembre 1982 modifiant le code électoral et le code des communes relative à l'élection des conseillers municipaux et aux conditions d'inscription des Français établis hors de France sur les listes électorales, dans les communes de 1 000 habitants et plus, le recueil de la majorité absolue des suffrages exprimés est la seule condition pour qu'une liste soit élue dès le premier tour. À l'inverse, un quorum est nécessaire pour l'élection d'un candidat dès le premier tour dans les communes de moins de 1 000 habitants, puisqu'il doit recueillir la majorité absolue des suffrages exprimés représentant au moins le quart des électeurs inscrits (article L. 253 du code électoral). Cette différence est liée au mode de scrutin. Le droit électoral français prévoit cette condition de quorum au premier tour pour les élections au scrutin majoritaire, qu'il soit uninominal (élections législatives), binominal (élections départementales) ou plurinominal (élections municipales dans les communes de moins de 1 000 habitants). À l'inverse, aucune condition de participation n'est prévue pour les scrutins proportionnels (élections municipales dans les communes de 1 000 habitants et plus, élections régionales, élections à l'Assemblée de Corse, élections à la métropole de Lyon, etc.). La dichotomie existante pour les élections municipales se retrouve aux élections sénatoriales. Les départements les moins peuplés ont une élection au scrutin plurinominal majoritaire avec un nombre de voix à recueillir fixé au quart des électeurs inscrits pour être élu au premier tour (art. L. 294), tandis que les plus peuplés ont une élection au scrutin proportionnel de liste, à un seul tour, sans quorum (art. L. 295 du code électoral). Le scrutin de liste avec répartition à la proportionnelle prend ainsi appui sur les seuls suffrages exprimés, précisément dans un souci de pluralisme. Y ajouter une condition liée au nombre d'inscrits est soit superflu si ce taux d'abstention est bas, soit contradictoire avec l'objectif de pluralisme s'il est trop élevé. Imposer le recueil d'un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits au premier tour pour que l'élection soit acquise dès ce tour ne garantit en outre pas plus la « légitimité » de l'élection au second tour où aucun quorum n'est imposé. Enfin, dans sa décision du 17 juin 2020 (décision n° 2020-850 QPC, Mme Patricia Weber), le Conseil constitutionnel a rappelé qu'il avait déjà déclaré les dispositions de l'article L. 262 conformes à la Constitution dans une précédente décision n° 82-146 DC du 18 novembre 1982. Au regard de ces éléments et considérant le caractère exceptionnel du contexte sanitaire dans lequel s'est déroulé le premier tour des élections municipales et communautaires du 15 mars 2020, le Gouvernement n'envisage pas à ce stade de revenir de manière générale sur cette distinction classique du droit électoral français, ni de proposer en particulier une modification des dispositions de l'article L. 262 du code électoral relatif au mode de scrutin applicable aux communes de 1 000 habitants et plus.

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