Question de M. ALLIZARD Pascal (Calvados - Les Républicains) publiée le 11/06/2020

M. Pascal Allizard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur à propos des conséquences des trafics de stupéfiants.
Il rappelle que l'observatoire de la délinquance et des réponses pénales a publié les résultats de l'enquête « Cadre de vie et sécurité 2019 ».
Ce document met en relief les conséquences sur le cadre de vie des Français et le sentiment d'insécurité. Ainsi, pour l'année 2019, près d'un quart des personnes de 14 ans et plus ont déclaré avoir observé, dans leur quartier ou leur village, des phénomènes de consommation ou de trafic de drogue au cours des douze derniers mois.
La plupart du temps, les personnes témoins de ce type de phénomènes ont déclaré que des individus avaient occupé des lieux du quartier ou du village pour consommer de la drogue.
De fait, les activités de consommation ou de trafic empiètent de plus en plus sur l'espace public, en zone urbaine comme en milieu rural, perturbent le fonctionnement social et pénalisent les habitants de territoires concernés.
Après la parenthèse de décroissance durant le confinement, tout porte à croire que les activités illicites vont reprendre de manière intense pour assurer le réapprovisionnement des dealers et consommateurs, comme en attestent de récentes saisies de produits stupéfiants par les autorités.
Par conséquent, il souhaiterait connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pour éviter une explosion des trafics, facilitée par la prochaine réouverture des frontières de l'Europe, et permettre aux habitants de se réapproprier leurs quartiers occupés par des vendeurs et consommateurs de stupéfiants.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 01/10/2020

La lutte contre les stupéfiants constitue une priorité de l'action gouvernementale. Elle implique une approche globale et coordonnée de l'ensemble des acteurs concernés (forces de l'ordre, autorité judiciaire, élus locaux, bailleurs sociaux, acteurs associatifs, éducation nationale, etc.). Au-delà des enjeux de santé publique, l'enracinement des trafics et l'appropriation de certains lieux par les dealers conduisent au développement de l'économie souterraine, aux trafics d'armes, aux règlements de comptes, à des violences et nuisances de toutes sortes. Ils nourrissent un sentiment d'insécurité et souvent d'abandon pour les habitants des quartiers concernés. Face à cette situation, les forces de l'ordre sont mobilisées. Pour donner un nouvel élan à cette action, le Président de la République avait annoncé en mai 2018 l'élaboration d'un plan de mobilisation générale. Pour moderniser et adapter les méthodes face aux évolutions du marché de la drogue et aux modes d'action des trafiquants, il était également devenu nécessaire d'adapter le dispositif de la lutte anti-drogue pour gagner en lisibilité, en coordination, en capacités de pilotage et d'anticipation et donc en efficacité. Le plan national de lutte contre les stupéfiants a été lancé le 17 septembre 2019. Articulé autour de 55 mesures et 6 objectifs majeurs, il vise avant tout au démantèlement des réseaux et à la saisie d'avoirs criminels en traitant tous les niveaux du narco-trafic, du petit deal au trafic international. Le plan national permet une action forte et interministérielle, basée sur des capacités accrues d'analyse et de stratégie, de pilotage et d'intervention, tant au niveau central que territorial. Le plan d'action s'est notamment traduit par la création, le 1er janvier 2020, d'un nouvel Office anti-stupéfiants (OFAST), doté d'antennes territoriales. Placé sous l'autorité du directeur central de la police judiciaire, il dispose d'un fonctionnement interministériel associant l'autorité judiciaire et l'ensemble des services concernés (police, gendarmerie, douane, secrétariat général de la mer, etc.). Chargée de l'élaboration de l'état de la menace, l'OFAST a aussi une vocation opérationnelle, soit en conduisant en propre des enquêtes portant sur des trafics d'envergure internationale, soit en travaillant dans le cadre de saisines conjointes avec les services territoriaux de la police ou de la gendarmerie. La lutte contre les stupéfiants est également une priorité de la police de sécurité du quotidien (PSQ), notamment dans les quartiers de reconquête républicaine (QRR). Dans le cadre de la PSQ, les secteurs les plus exposés aux trafics et à l'économie souterraine bénéficient de renforts humains et matériels avec la création, en 2018, des QRR où les préfets et procureurs de la République travaillent ensemble au sein de cellules de lutte contre les trafics spécialement créées pour démanteler les réseaux et les points de deal. L'occupation de la voie publique par la police et la gendarmerie nationales constitue un autre enjeu des QRR, qui répond à une forte attente des habitants et permet de mieux lutter contre la délinquance et les nuisances provoquées par la drogue. Par ailleurs, le dispositif des « cellules du renseignement opérationnel sur les stupéfiants » (CROSS), initialement expérimenté à Marseille à partir de 2015, est en cours de déploiement dans l'ensemble des départements. En « décloisonnant », il permet de renforcer la coopération et l'échange de renseignements criminels entre les différents services de police afin de mieux démanteler les réseaux. Douane et gendarmerie sont parties prenantes de ce dispositif. La mobilisation de l'ensemble des acteurs, qui s'inscrit dans un plan global de lutte contre les stupéfiants dans toutes ses composantes est déterminante : la répression de l'usage illicite de stupéfiants en fait également pleinement partie. Mesure de simplification de la procédure pénale, l'amende forfaitaire délictuelle étendue à la répression de l'usage illicite de stupéfiant est issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Après un déploiement progressif, à compter du 16 juin 2020 sur les ressorts des tribunaux judiciaire de Rennes, Créteil, Lille et Marseille, la forfaitisation de l'usage de stupéfiant est généralisée, au 1er septembre 2020, à l'ensemble du territoire national. La lutte contre les trafics et l'offre de stupéfiants ne peut se concevoir sans la mise en œuvre concomitante d'une stratégie de lutte contre la demande et les usages. Le plan national de mobilisation contre les addictions 2018-2020, piloté par la mission interministérielle de lutte contre les drogues et conduites addictives, s'inscrit en complémentarité de l'action répressive des forces de l'ordre.

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