Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains-R) publiée le 02/07/2020

M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le montant différencié de la dotation globale de fonctionnement par habitant.
« Liberté, égalité, fraternité » telle est la devise de la République, une et indivisible. Or, dans la réalité, ce serment ne s'applique lors de la répartition des dotations de l'État entre les villes et les campagnes plus isolés.
Plus de deux ans après le dépôt de la question écrite n° 03013, le ministère l'informe le 18 juin 2020 (p. 2820), que la distinction du montant de la dotation se justifie entre 64,46 euros quand la population est égale ou inférieure à 500 habitants et 128,93 euros quand la population est égale ou supérieur à 200 000 habitants. Pourtant, la rationalisation des charges voudrait que celles des villes soient bien mieux partagées que celles à la campagne. Si cette réflexion de l'exécutif devait être menée jusqu'au bout, il propose alors que le calcul des impôts sur le revenu varie en fonction du lieu de résidence, puisque les habitants en milieu rural utilisent bien moins de service public de proximité, faute de disponibilité.
Au nom de la solidarité nationale, il souhaite savoir si le Gouvernement compte revoir son algorithme en apportant plus d'égalité, d'équité et d'humanité dans le versement de la dotation globale de fonctionnement.

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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales


Réponse du Ministère auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales - Ville publiée le 22/07/2020

Réponse apportée en séance publique le 21/07/2020

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1239, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Olivier Paccaud. « Liberté, égalité, fraternité », telle est la devise de la République, une et indivisible. Or, dans la réalité, cet idéal reste verbal et s'évanouit lors de la répartition des dotations de l'État entre les villes et les campagnes.

Ainsi, lorsqu'une commune de moins de 500 habitants bénéficie d'une dotation globale de fonctionnement, ou DGF, calculée sur une base personnelle de 64,46 euros, une ville dont la population dépasse 200 000 habitants reçoit 128,93 euros par personne. Est-ce juste ?

Cette différence, une véritable iniquité, est justifiée par vos services au nom des « charges de centralité » que doivent assumer les territoires plus peuplés, qui accueillent plus de services administratifs et commerciaux.

Certes, les ruraux viennent chercher à la ville les services qu'ils n'ont pas, ou surtout plus, chez eux. Mais n'oublions pas que la loi du nombre aboutit pratiquement toujours à des coûts moyens d'investissement bien inférieurs en zone urbaine.

Raccorder les 150 logements de l'immeuble d'un quartier au réseau d'assainissement d'une grande ville se révèle ainsi souvent moins onéreux qu'installer l'assainissement dans un hameau de 10 maisons. Cette problématique est d'ailleurs valable pour tous les réseaux : eau, électricité, téléphonie, fibre. Péréquation rime ainsi avec illusion en matière de soutien d'État aux territoires.

Si les habitants des campagnes sont égaux devant l'impôt avec les urbains, ils ne le sont pas en termes de retour fiscal et d'offre de services. Les ruraux sont donc de bons contribuables, mais des citoyens de seconde zone. Au pays de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, est-ce cohérent et acceptable ?

En respectant la logique de votre administration, ne faudrait-il pas que l'impôt sur le revenu varie en fonction du lieu de résidence, puisque les habitants en milieu rural utilisent bien moins de services publics de proximité, faute de disponibilité ?

Au nom de la solidarité nationale et de la justice territoriale, quand le Gouvernement révisera-t-il son algorithme, en apportant plus d'équité et de bon sens dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la question de l'emploi d'un coefficient variant de 1 à 2 au sein de la dotation forfaitaire des communes.

La question consiste à déterminer comment rendre compte, objectivement, des charges supportées par une commune dans son attribution de DGF. L'analyse économétrique conclut que les charges croissent avec la population. C'est ce qui explique pourquoi, au sein de la dotation forfaitaire, le gain d'un habitant conduit à un gain de dotation forfaitaire variant de 64 euros à 129 euros.

Cet écart n'est pas apparu par hasard : il est fondé sur des travaux scientifiques conduits par des universitaires et plusieurs fois actualisés et confirmés. Le Gouvernement a publié un rapport détaillé sur la question l'année dernière, rappelant l'ensemble de ces analyses.

Pour vous en convaincre davantage, monsieur le sénateur, je vais prendre deux exemples, qui, j'en suis certaine, vous parleront.

Est-ce que l'on peut dire que, par habitant, le niveau des charges contraintes supportées par la commune de Compiègne, soit un peu plus de 41 000 habitants, est le même que celui de communes voisines de 500 ou de 1 000 habitants ? Objectivement, la réponse est non, car il n'est tout simplement pas imaginable de ne pas prendre en compte les coûts, réels et objectifs, induits par la démographie dans la répartition des concours financiers de l'État.

Par ailleurs, ce coefficient n'est qu'un critère parmi d'autres. Vous avez dû consulter la répartition de la DGF 2020 pour un certain nombre de communes de votre département de l'Oise. Vous avez dû constater que le niveau de la DGF totale ne varie pas du simple au double selon la population d'une commune, preuve que bien d'autres critères sont pris en compte et tendent à assurer, concrètement, une répartition équitable des concours de l'État. C'est le cas, par exemple, dans la dotation de solidarité rurale, la DSR.

Depuis 2017, le montant global de la DGF a été stabilisé, et la DSR a crû de 90 millions d'euros par an chaque année. De même, la dotation d'équipement des territoires ruraux, la DETR, a atteint depuis 2018 un niveau de plus de 1 milliard d'euros par an, soit un seuil jamais atteint par le passé.

Enfin, nous avons lancé l'agenda rural, issu d'un travail de terrain, et ses nombreuses mesures en faveur de la ruralité et des habitants comme de ses élus.

Au regard de ces éléments, vous voyez bien, monsieur le sénateur, que le Gouvernement ne se désintéresse pas du tout de la question de la ruralité.

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.

M. Olivier Paccaud. Certes, le Gouvernement ne se désintéresse pas de la ruralité, j'en suis conscient. Néanmoins ce mode de calcul ne convient pas aux ruraux.

Il existe une véritable ségrégation – je pèse mes mots –, qui s'illustre par ce chiffre qui va de 1 à 2. Ce n'est pas la DSR qui le comblera, même si les maires qui bénéficient d'un peu de DETR ou DSR en sont satisfaits. Il convient de faire des calculs un peu plus justes !

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