Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 12/11/2020

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la date de notification d'un acte ou d'une décision en cas d'absence du destinataire.
En l'absence de dispositions spécifiques prévues par la loi, le juge a estimé qu'en cas d'absence du destinataire le jour où lui est notifié un acte ou une décision par une lettre recommandée avec accusé de réception, la date de notification est fixée au jour du retrait du pli au bureau de poste si ce retrait est intervenu dans les 15 jours de la première présentation (Conseil d'État, Président de la Section du Contentieux, du 9 novembre 1992, 132878, mentionné aux tables du recueil Lebon).
Ce délai de 15 jours doit donc être inclus dans les délais légaux prévus par la loi, ce qui peut être particulièrement contraignant pour l'autorité qui notifie.
En particulier, dans le cadre d'une procédure de déclaration préalable, le délai d'instruction est de 1 mois à compter de la réception en mairie d'un dossier complet ce qui est déjà court. Ce délai est d'autant plus difficile à tenir dans certaines périodes (congé, absence de personnel, …). En intégrant cette période de notification, il ne resterait aux communes que 15 jours pour instruire et prendre une décision, ce qui n'est pas adapté au fonctionnement d'une commune.
Par ailleurs, il peut conduire à des dérives, certains pétitionnaires pouvant être tentés d'utiliser ce délai pour obtenir une réponse favorable. En effet, l'absence de réponse dans le délai fixé par la loi vaut décision tacite de non-opposition.
Aussi, il lui demande s'il compte modifier cette règle notamment lorsqu'elle s'applique à des délais courts comme c'est le cas pour les déclarations préalables.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 01/07/2021

Les actes administratifs sont portés à la connaissance de leurs destinataires et des tiers par des procédés de publicité qui correspondent soit à une publication, soit à une notification. Ces conditions de publicité de l'acte affectent sa date d'entrée en vigueur et le délai de recours contentieux. La preuve de la date de la publication ou de la notification d'un acte incombe à l'administration (CE, 23 sept. 1987, ministre du travail c/ Sté « Ambulances 2000). S'agissant plus particulièrement des actes individuels, la méthode de notification la plus classique consiste en l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Souvent exigée par les textes, cette méthode garantit, en effet, la remise de la décision à son destinataire et procure, grâce à l'avis de réception retourné à l'expéditeur, une preuve de la notification (CE 15 nov. 2019, Ministre de l'Action et des comptes publics, n° 420509). Dans cette hypothèse, la date effective de notification est alors celle de la présentation à l'intéressé du courrier, même dans le cas où il est refusé par ce dernier (CE 10 février 1975, Delle Vivaudou, Lebon 101). En cas d'absence, l'intéressé dispose d'un délai de 15 jours calendaires à compter du lendemain du jour de dépôt de l'avis de passage pour récupérer le pli (article 3.2.8 des conditions générales de vente applicables aux prestations courrier-colis). Si le courrier est retiré dans ce délai, la date de notification retenue est alors celle du retrait du pli (CE, 2 mai 1980, Ibazizene ; CE, 14 novembre 2005, Bensalem). A défaut pour le destinataire de l'avoir récupéré dans ce délai de quinze jours, le courrier est alors renvoyé à son expéditeur. Dans cette situation, la date de notification retenue est celle du dépôt de l'avis de passage par le service postal lors de la présentation au domicile (CE, 24 avril 2012, Ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, n° 341146). Ce dispositif de notification apparait comme un compromis équilibré dans la mesure où il permet de se prémunir contre les éventuelles pratiques qui consisteraient à s'abstenir volontairement de venir retirer le courrier tout en laissant, dans le même temps, un délai suffisant et raisonnable aux administrés réellement placés dans une situation d'indisponibilité pour venir récupérer un courrier. Dans le cas où la réglementation prévoit un délai d'instruction - comme c'est le cas en matière de déclaration préalable - le Conseil d'Etat a jugé qu'il incombe alors à l'administration, lorsque sa décision est parvenue au pétitionnaire après l'expiration de ce délai, d'établir la date à laquelle le pli accompagnant sa décision a régulièrement fait l'objet d'une première présentation à l'adresse de l'intéressé avant l'expiration du délai d'instruction. Cette preuve peut résulter des mentions précises, claires et concordantes figurant sur les documents, le cas échéant électroniques, remis à l'expéditeur conformément à la réglementation postale. Elle peut également résulter d'une attestation circonstanciée du prestataire ou d'autres éléments de preuve établissant que le courrier a bien été présenté au destinataire dans les délais légaux (CE, 29 janvier 2014, Commune de Soignolles-en-Brie, n° 352808). Ainsi, le fait de se fonder, dans cette hypothèse, sur la date de première présentation du pli permet de neutraliser le comportement du demandeur tenté de retarder la remise effective du courrier. En tout état de cause, le développement des procédures par voie dématérialisée devrait indéniablement faciliter les échanges avec les administrés, y compris s'agissant de cette problématique relative à la notification des décisions. L'article R 423-48 du code de l'urbanisme prévoit ainsi qu'en matière d'autorisation d'urbanisme, sous réserve de son accord, le demandeur peut se voir adresser les notifications par la voie électronique. La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique prévoit, en ce sens, que les communes dont le nombre total d'habitants est supérieur à 3 500 doivent disposer d'une téléprocédure spécifique leur permettant de recevoir et d'instruire sous forme dématérialisée les demandes d'autorisation d'urbanisme déposées à compter du 1er janvier 2022 (article L. 423-3 du code de l'urbanisme). Par conséquent, il n'est pas envisagé de modifier cette règle en l'état.

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