Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 06/05/2021

M. Hervé Maurey interroge M. le ministre de l'intérieur sur le droit de dérogation des préfets aux normes réglementaires.
Après deux ans d'expérimentation, le droit de dérogation des préfets aux normes réglementaires a été généralisé et pérennisé par le décret n° 2020-412 du 8 avril 2020 relatif au droit de dérogation reconnu au préfet.
Ce droit de dérogation autorise, sous certaines conditions, les préfets à déroger à des normes nationales dans les sept domaines suivants identifiés par le décret : subventions, concours financiers et dispositifs de soutien en faveur des acteurs économiques, des associations et des collectivités territoriales ; aménagement du territoire et politique de la ville ; environnement, agriculture et forêts ; construction, logement et urbanisme ; emploi et activité économique ; protection et mise en valeur du patrimoine culturel ; activités sportives, socio-éducatives et associatives.
Aussi, il souhaiterait connaître le bilan qu'il fait de la mise en œuvre de cette disposition, un an après sa généralisation, et aimerait des éléments quantitatifs permettant d'évaluer son effectivité (par domaine, par département, etc.).

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 22/07/2021

A la date du 25 mai 2021, la généralisation du droit de dérogation reconnu au préfet par le décret n° 2020-412 du 8 avril 2020 a donné lieu à la prise de 88 arrêtés préfectoraux. Sur ces 88 arrêtés, 62 ont été pris par des préfets de département, 6 par des préfets d'outre-mer et 20 par des préfets de région. Cela concerne 24 préfectures de départements, 3 préfectures d'outre-mer et 6 préfectures de régions. Les préfets ayant le plus recouru au droit de dérogation sont ceux de la Sarthe (11 arrêtés), de la région Centre–Val-de-Loire (10 arrêtés), de la Vendée (10 arrêtés), de l'Oise (5 arrêtés), de la région Pays de la Loire (4 arrêtés), du Loir-et-Cher (4 arrêtés), de Mayotte (4 arrêtés), de l'Eure (4 arrêtés) et de la Saône-et-Loire (4 arrêtés). La très grande majorité des arrêtés de dérogation concerne les subventions, concours financiers et dispositifs de soutien en faveur des acteurs économiques, des associations et des collectivités territoriales (70), puis l'emploi et l'activité économique (7), l'environnement, l'agriculture et les forêts (6) et la construction, le logement et l'urbanisme (6). La prévalence des arrêtés de dérogation concernant les questions de subventions et de dotations s'explique par le fait que c'est l'un des domaines où le pouvoir réglementaire est le moins encadré par le pouvoir législatif. Il est donc plus aisé de déroger aux normes réglementaires. S'agissant des bénéficiaires, 51 sont des communes (soit plus de 58 %). Seuls 2 arrêtés bénéficient directement à une entreprise, et 1 à un particulier. Ce point est cependant à nuancer dans la mesure où une aide à l'investissement d'une collectivité pourra bénéficier in fine à un acteur économique. La procédure prévue dans la circulaire du Premier ministre du 6 août 2020 relative à la dévolution au préfet d'un droit de dérogation aux normes réglementaires est globalement bien respectée. Chaque arrêté préfectoral de dérogation devant faire l'objet d'une analyse de l'administration centrale, les préfets saisissent la direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT) du ministère de l'Intérieur de leur projet d'arrêté afin que celle-ci saisisse la direction d'administration centrale concernée. Sur les 139 saisines de la DMAT, 84 dossiers ont fait l'objet d'un avis de l'administration centrale compétente. Les dossiers n'ayant pas fait l'objet d'un avis s'expliquent soit par l'absence de réponse de l'administration centrale dans le délai de 15 jours, soit par l'abandon du projet par la préfecture à la suite d'échanges préalables avec la DMAT. Parmi ces 84 avis rendus par les administrations centrales, 33 avis défavorables ont été rendus. Si les préfets ne sont pas liés à l'avis rendu par l'administration centrale, dès lors que l'avis défavorable est circonstancié, il est constaté qu'ils écartent souvent le recours au droit de dérogation. Globalement, ces avis défavorables des administrations centrales s'expliquent : - du fait du caractère législatif des dispositions auxquelles il est souhaité déroger in fine, les dispositions réglementaires n'étant après analyse qu'une déclinaison de principes fixés par la loi dans ces cas-ci : c'est le cas des matières techniques comme l'environnement, dans lequel les dispositions réglementaires sont très encadrées par la loi ; - par l'incompatibilité de la dérogation avec les engagements européens de la France, compte-tenu de la prégnance du droit de l'Union européenne dans certaines matières (environnement et agriculture, à titre principal) ou la provenance des fonds alimentant certaines subventions qu'il est souhaité attribuer en mobilisant le droit de dérogation. Le champ des matières concernées fixées par le décret n'a pas vocation à s'élargir à court terme. En effet, le bilan réalisé à l'issue de l'expérimentation ne démontrait pas une demande des préfets en ce sens.

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