Question de Mme CONWAY-MOURET Hélène (Français établis hors de France - SER) publiée le 15/07/2021

Mme Hélène Conway-Mouret attire l'attention de Mme la ministre des armées sur les conséquences du projet de label écologique de l'Union européenne pour les produits financiers sur la base industrielle et technologique de défense (BITD) française et européenne.
En effet, la Commission européenne prépare actuellement un label écologique européen pour les produits financiers. Selon le rapport du centre commun de recherche de la Commission, cet « Ecolabel » exclurait « les entreprises impliquées dans la production et/ou le commerce d'armes conventionnelles et de produits militaires pour le combat, si elles tirent plus de 5 % de leurs revenus de ces activités ». Or, l'obtention de ce label n'est pas qu'incitatif. Il donne des objectifs vertueux en matière de respect de l'environnement à l'ensemble de nos industriels.
La légitimité de l'introduction et du renforcement de critères sociaux et environnementaux européens, à la fois nécessaires et bienvenus, est indiscutable. Toutefois, l'exclusion des entreprises de défense fragiliserait d'autant plus notre BITD, en réduisant encore davantage la capacité de ces dernières à obtenir des financements de la part des banques, déjà rendue difficile par une interprétation « extensive » des normes en matière de responsabilité sociale et environnementale (sur laquelle la sénatrice avait déjà interpellé la ministre des armées dans une question écrite – n° 15936). En outre, l'entrée en vigueur d'un tel texte serait contradictoire avec les objectifs affichés de la Commission européenne, qui d'un côté financerait la recherche et le développement par le biais du fonds européen de défense et de l'autre, exclurait les entreprises de défense de ce label écologique.
Elle souhaiterait donc connaître l'état d'avancement de ce projet, ainsi que le positionnement du ministère des armées sur ces enjeux.

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Réponse du Ministère des armées publiée le 20/01/2022

Le projet de label écologique de l'Union européenne (UE) pour les produits financiers vise à étendre l'écolabel (label écologique de l'UE) prévu par le réglement 66/2010/UE et actuellement applicable à des produits de consommation, aux produits financiers mis à disposition des particuliers, afin de les inciter à investir dans des activités économiques durables sur le plan environnemental. Ce projet s'inscrit dans le cadre du plan d'action lancé par la Commission européenne en mars 2018, intitulé « Financer la croissance durable », qui comprend dix principales mesures. La première d'entre elles est la création d'une « Taxonomie européenne », qui doit permettre d'encadrer le marché des produits financiers durables. Ainsi, le projet d'extension du label écologique aux produits financiers s'insère plus largement dans le cadre des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) développés par l'UE afin d'atteindre l'objectif de transition vers une économie à faible émission de carbone, résiliente et circulaire, conformément au Green Deal de l'UE, puis d'atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. Le Centre commun de recherche (CCR), service scientifique interne à la Commission européenne, a publié un quatrième rapport technique en mars 2021 proposant des critères pour définir les produits financiers couverts par l'écolabel et les critères d'octroi de celui-ci. Les produits tels que les assurances-vie et les livrets d'épargne devraient respecter des critères environnementaux, sociaux et éthiques stricts pour être éligibles au bénéfice de l'écolabel. Dans ce rapport, il est proposé que les entreprises qui tirent plus de 5 % de leurs revenus d'activités dans la production et/ou le commerce d'armes conventionnelles et de produits militaires pour le combat soient exclues du bénéfice de ces fonds labélisés, conformément au troisième critère sur les aspects sociaux et de gouvernance du rapport. Si ce critère venait à être retenu in fine par la Commission européenne (puis par les Etats membres), les conséquences négatives pour la BITD française et européenne, en termes d'image voire d'accès au financement, pourraient être importantes, sans que ce label reflète les efforts majeurs de cette industrie en matière environnementale, énergétique et climatique. Dès lors, la France a demandé que ce critère soit supprimé. Il est en effet doublement incohérent. Premièrement parce que considérer que les activités de défense seraient non durables ou non socialement responsables est méconnaître qu'avant d'assurer le développement durable il faut assurer la sécurité des personnes. Deuxièmement parce qu'alors que l'Union Européenne s'est dotée de nombreux outils (Coopération structurée permanente, Fonds européen de défense…) pour favoriser l'émergence d'une industrie de défense européenne performante, il est dans le même temps absurde de chercher à réduire les solutions de financements privés de la même industrie. Pour toutes ces raisons, le ministère des Armées, en lien étroit avec le ministère de l'économie, des finances et de la relance, le secrétariat général aux affaires européennes, mais également la DG DEFIS (industries de défense et espace) de la Commission européenne, suit très attentivement les évolutions de ce quatrième rapport technique du CCR, au même titre que l'ensemble des initiatives européenne qui, prises en application de critères ESG dans le cadre de la finance durable, seraient susceptibles d'avoir un impact sur la BITD française et européenne. C'est à travers un engagement collectif que nous serons le plus à même d'aboutir à un texte cohérent avec l'ensemble des ambitions de l'Europe.

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