Question de M. ANGLARS Jean-Claude (Aveyron - Les Républicains-A) publiée le 14/07/2022

M. Jean-Claude Anglars attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le fonctionnement de l'institut national de la propriété industrielle (INPI) au regard des indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux ainsi que le nom des collectivités territoriales dont la protection a été consacrée par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

Il revient à cette institution d'instruire et de valider les demandes d'indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux (IGPIA) et d'informer les collectivités de toute possible atteinte à leur nom par des marques sur demande de ces dernières. Un certain nombre de produits ont été reconnus à ce jour comme IG dont la porcelaine de Limoges ou le grenat de Perpignan. Des questions se posent cependant concernant l'instruction des dossiers par l'INPI.

Récemment, un groupement de couteliers quasi exclusivement situés dans le Puy-de-Dôme a déposé une demande d'IG PIA pour le couteau Laguiole. Cette demande est concurrente de celle déposée par un autre groupement exclusivement situé en Aveyron et qui souhaite protéger le couteau de Laguiole, couteau originaire de la commune éponyme du nord Aveyron.
Au regard de cette situation dont les contours n'ont pas été précisés par la loi, il conviendrait de demander des éclaircissements à l'INPI sur la procédure que l'institut suivra dans cette situation afin de protéger les intérêts des demandeurs et ceux des consommateurs.

Accepter une demande d'indication géographique déposée par un groupement non originaire et lointain de la dénomination revendiquée pose question au regard de la doctrine des indications géographiques et plus précisément des indications géographiques des produits industriels et artisanaux actuellement reconnus. Cette ouverture risque d'avoir une influence négative sur les futurs dossiers d'IG PIA dont le dispositif est encore en devenir.

Aussi, il l'interroge sur la validité d'une demande d'indication géographique et son acceptabilité lorsqu'elle est réalisée sans en informer la principale collectivité concernée.
Il lui demande s'il peut expliciter les obligations de l'INPI en tant qu'institut garant des droits de propriété intellectuelle et, notamment, le devoir d'information envers les collectivités concernées par le dépôt d'un dossier d'IG eu égard à la protection de nom des collectivités territoriales consacré par la loi relative à la consommation.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 24/11/2022

La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation définit les principes généraux applicables aux indications géographiques et a été complétée par le décret n° 2015-595 du 3 juin 2015 fixant les modalités de la procédure. Ces textes règlementent très précisément la procédure, tant en termes d'obligation de consultation que de délais. Ils définissent et encadrent le travail de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), chargé de l'instruction des demandes d'indications géographiques. Les critères d'analyse sur lesquels se base l'INPI pour prononcer l'homologation sont listés exhaustivement dans la loi : la représentativité des opérateurs au sein de l'organisme de défense et de gestion, le nom de l'indication géographique, le produit concerné, la délimitation de la zone géographique proposée, les caractéristiques attribuables à la zone définie, le processus de production, l'identité de l'organisme de défense et de gestion et son mode de financement, les modalités et périodicité des contrôles, les obligations déclaratives, les sanctions éventuelles en cas de non-respect du cahier des charges, les éléments d'étiquetage et le cas échéant les engagements en matière sociale et environnementale. Comme le souligne monsieur le Sénateur, la démonstration du lien entre le produit et le territoire fait partie des éléments attendus. L'INPI dispose, sans préjudice des textes applicables, d'une marge d'appréciation, dans la mesure où il existe une grande diversité dans les produits couverts et dans la structuration des filières. Ainsi, le nom géographique repris dans une IG n'est pas nécessairement en corrélation rigide avec des limites territoriales des collectivités locales concernées. Ainsi, en matière vinicole, l'AOP Bourgogne couvre le département du Rhône et l'AOP Champagne une partie de l'Aisne. La doctrine admet donc de manière unanime que le critère prédominant est la qualité finale du produit, soit le critère principal recherché par le consommateur. Toutes les demandes éligibles sont examinées par l'INPI selon ces critères, après la réalisation d'une enquête et d'une consultation publiques, permettant à tous les acteurs qui le souhaitent d'exprimer leurs observations et leurs avis, afin que ceux-ci puissent être pris en compte dans l'analyse. À ce titre, toutes les collectivités territoriales sont systématiquement consultées par l'INPI et disposent d'un délai de deux mois à partir de l'ouverture de l'enquête publique pour faire part de leurs éventuelles remarques. Pour assurer la transparence du processus, la synthèse de l'enquête et de la consultation publiques fait l'objet d'une publication en cours de procédure sur le site internet de l'INPI. Au-delà de cette consultation systématique des collectivités territoriales sur les demandes d'indications géographiques, l'INPI propose aux collectivités territoriales, qui le souhaitent, un mécanisme d'alerte sur les demandes d'enregistrement de marques contenant leur dénomination. Pour en bénéficier, il suffit de s'inscrire gratuitement sur le site internet de l'INPI et d'indiquer les noms pour lesquels l'alerte est souhaitée. Ce dispositif permet aux collectivités territoriales d'être informées des dépôts de marques qui les concernent, afin de pouvoir faire valoir leurs droits, si elles considèrent que ces demandes portent atteinte à leur image. Dans le cas de Laguiole, le syndicat aveyronnais du couteau de Laguiole a déposé auprès de l'INPI, le 24 novembre 2020, une demande d'homologation de cahier des charges pour l'IG « Couteau de Laguiole ». L'analyse conduite par l'INPI sur la base des enquêtes publiques a amené à un refus de cette demande. Dans le même temps, la demande d'homologation de cahier des charges pour l'IG « Couteau Laguiole », déposée par l'association Couteau Laguiole Aubrac Auvergne, le 10 novembre 2021 a été validée le 23 septembre 2022 au regard de l'analyse menée par l'INPI en s'appuyant sur l'enquête et la consultation publiques. En cas de contestation, des recours peuvent être formés contre cette décision dans un délai d'un mois, à compter de cette décision.

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