Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 14/07/2022

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les graves dommages causés par une surconsommation précoce de boissons sucrées.
Une enquête menée par Médiacités à Lille et publiée le 10 juin 2022 révèle l'ampleur de ce phénomène, devenu un problème majeur de santé infantile dans les Hauts-de-France.
Les professionnels de santé et de la petite enfance les appellent des « bébés Coca ». Ce surnom n'a rien de charmant et cache même une triste réalité : il s'agit de jeunes enfants (moins de six ans) qui souffrent déjà de dents de lait tachées, noircies, cariées ou de travers parce qu'ils consomment des boissons sucrées en importante quantité, parfois au biberon. Certains parents, souvent en grande précarité sociale, croient bien faire et ne mesurent pas les conséquences délétères. En effet, le sucre ainsi ingéré détruit durablement la dentition naissante des tout-petits.
Démunis, les professionnels concernés militent pour une interdiction des boissons sucrées aux enfants de moins de 6 ans, et/ou un étiquetage dissuasif, à l'instar de ce qui se pratique pour protéger les femmes enceintes.
En conséquence, il lui demande comment il entend lutter contre les ravages dus à une surconsommation précoce de boissons sucrées.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 06/10/2022

D'après les données de l'étude individuelle nationale des consommations alimentaires (INCA 3) réalisée en 2015 par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), les sucres représentent près de la moitié des glucides consommés (57 %) chez les enfants dont 7 % apportés par les boissons sucrées. Le taux de consommateurs des boissons sucrées augmente avec l'âge : de 43 % chez les 1-3 ans, il passe à près de 64 % chez les 7-10 ans.  On constate qu'il est également fonction du niveau socio-culturel des parents, les enfants consommateurs de boissons sucrées sont moins nombreux lorsque le niveau d'étude du représentant légal de l'enfant est plus élevé. Selon l'étude ESTEBAN réalisée en 2015 par Santé publique France, la consommation de boissons sucrées chez les enfants reste élevée : plus d'un tiers en consomment au-delà de la recommandation d'un demi-verre par jour.  Or, la consommation excessive de boissons sucrées contribue de façon importante à augmenter l'apport énergétique quotidien et ainsi au risque de maladies chroniques (diabète de type 2, divers cancers, maladies cardio-vasculaires, etc.). Les comportements acquis dans l'enfance persistant le plus souvent à l'âge adulte, les enfants constituent une cible prioritaire des mesures de prévention du Programme national nutrition santé (PNNS).  Diverses actions sont alors mises en œuvre afin d'agir sur les comportements alimentaires d'une part, mais également sur l'environnement alimentaire pour faciliter les choix favorables à la santé d'autre part.  En 2021, Santé publique France a publié les nouvelles recommandations nutritionnelles pour les enfants de moins de 3 ans sur la base des rapports d'expertise de l'Anses et du Haut Conseil de la santé publique.  Ainsi il est indiqué que « la seule boisson recommandée est l'eau » et « d'éviter toutes les boissons sucrées, dont tous les types de jus de fruits, tous les sodas et les sirops ». Dans son avis relatif à la révision des repères alimentaires pour les enfants de 4 à 17 ans publié en octobre 2020, le HCSP recommande de limiter la consommation de boissons sucrées et au goût sucré (dont les boissons édulcorées). Leur consommation doit rester exceptionnelle, et être limitée à 1/2 verre par jour avant 11 ans, en privilégiant dans cette catégorie les jus de fruits.  Les nouvelles recommandations actualisées pour les enfants de 4 à 17 ans seront diffusées d'ici fin 2022 par Santé publique France. Il est également prévu dans le PNNS 4 d'étendre l'éducation à l'alimentation et à l'activité physique et sportive de la maternelle au lycée, afin de sensibiliser en milieu scolaire les enfants et les adolescents à l'adoption de comportements favorables à la santé.  Parmi les autres stratégies mises en place, la loi de finances n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 a institué pour 2012 une taxe nutritionnelle sur les boissons contenant du sucre ajouté quelle que soit la quantité, ainsi que pour les boissons contenant des édulcorants de synthèse.  En 2018, cette taxe a été modifiée dans le cadre du projet de loi de finances de la Sécurité sociale, afin de moduler la taxe de 2012 selon la teneur en sucres dans la boisson. Une évaluation de l'impact de cette mesure sur la diversification de l'offre, sur les ventes et les choix alimentaires est nécessaire pour tirer les enseignements de ce type de stratégie et constitue une des actions du PNNS 4. Des travaux de recherche sont donc menés actuellement afin d'évaluer l'effet de cette taxe soda sur l'offre en boissons sucrées et édulcorées mais également sur la demande et les niveaux de consommation des ménages.  Enfin, la loi du 20 décembre 2016, dite « Loi Gattolin », interdit la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique. Concernant les chaînes privées, les éditeurs, les annonceurs et les producteurs se sont engagés en 2009 dans une démarche d'autorégulation à travers la signature d'une charte visant à promouvoir une alimentation et une activité physique favorable à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision, et dont les engagements ont été renouvelés en 2014 et 2020.  Le Gouvernement sera particulièrement attentif aux résultats de l'évaluation de la charte alimentaire de 2020 concernant les objectifs de réduction de l'exposition des enfants à la publicité pour les aliments trop gras, trop sucrés, trop salés. 

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