Question de Mme PONCET MONGE Raymonde (Rhône - GEST) publiée le 21/07/2022

Mme Raymonde Poncet Monge attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation de plus de 150 enfants français et de leurs mères, retenus dans les camps de détention de Al Hol et de Roj au nord-est de la Syrie.

Sous le contrôle des forces kurdes, ces camps comptent plus de 64 000 personnes, dont la plupart sont des femmes et des enfants. Jusqu'à récemment, 200 enfants français et leurs mères étaient détenus dans ces camps où leurs conditions de vie sont effroyables, et ce, depuis trois ans. En 2021, 97 femmes et enfants européens sont rentrés dans leurs pays respectifs, dont 7 enfants français seulement. Le 5 juillet 2022, un rapatriement de 35 enfants et de 16 mères a été effectué en France. Il faut espérer que cela signe le début du rapatriement de tous les enfants et de leurs mères, ainsi que la fin d'une politique inhumaine au « cas par cas ». Selon les Nations unies, des centaines de personnes détenues – dont au moins la moitié sont des enfants – sont déjà mortes ces trois dernières années, notamment en raison de l'insalubrité, du manque de soins médicaux ou encore de l'insécurité. Le 8 février 2021, une vingtaine d'experts indépendants des droits de l'homme des Nations unies ont exhorté 57 pays, dont la France, à rapatrier les enfants et les femmes enfermés dans « les camps sordides » du nord-est syrien. Le Parlement européen a voté une résolution en ce sens. De nombreux pays ont agi : Belgique, Finlande et Danemark ont décidé de rapatrier l'ensemble de leurs ressortissants, alors que leur situation sécuritaire est comparable à la nôtre. Au Parlement français les déclarations se sont multipliées, par voie de presse ou sous forme de questions écrites. La commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), chargée de conseiller les autorités françaises et de contrôler les engagements internationaux de la France a, dans un avis rendu à l'unanimité en assemblée plénière, le 16 décembre 2021, appelé « une fois de plus », dans les termes les plus impératifs, le Gouvernement « à procéder au rapatriement sans délai de ces enfants et du parent présent auprès d'eux », position adoptée également par les deux derniers défenseurs des droits. Le 24 février 2022, le comité des droits de l'enfant des Nations unies a condamné la France concernant son refus de rapatrier les enfants français détenus dans les camps syriens, déclarant que cela « viole leur droit à la vie » ainsi que leur « droit à ne pas subir de traitements inhumains et dégradants ». Plusieurs victimes des attentats du 13-Novembre soutiennent ces rapatriements. Pour cause, il s'agit d'honorer l'État de droit et la justice française. La France est tenue de respecter ses engagements au titre de la convention internationale aux droits de l'enfant qu'elle a ratifiée. Ces enfants ne sont coupables de rien mais plus certainement doublement victimes, du choix de leurs parents d'abord et de l'abandon de leur pays ensuite. Cette indignité doit cesser. Concernant leurs mères, ces femmes font l'objet d'une procédure judiciaire antiterroriste en France. Lors du débat de l'entre-deux tours présidentiel, le Président de la République a déclaré : « La protection de l'enfance sera au cœur des cinq années qui viennent ».

C'est pourquoi elle lui demande d'agir rapidement pour le rapatriement de l'ensemble de ces enfants ainsi que de leurs mères afin qu'elles soient jugées.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 29/09/2022

La situation des personnes qui se trouvent actuellement détenues ou retenues dans le Nord-Est syrien fait l'objet d'un suivi détaillé. Les personnes adultes, hommes et femmes, ont pris la décision de rejoindre Daech et de se battre dans une zone de guerre. Il convient, dans ce contexte, d'assurer la lutte contre l'impunité des crimes commis par les combattants de Daech qui doivent être jugés au plus près des lieux où ils ont perpétré leurs crimes. C'est à la fois une question de sécurité et un devoir de justice à l'égard des victimes. Cette position est étroitement concertée avec ceux de nos partenaires européens qui sont également concernés. La France s'est toujours efforcée de prendre en compte l'intérêt supérieur des enfants qui, à  la différence de leurs parents, n'ont pas choisi de rejoindre l'Irak et la Syrie. Ils n'ont pas choisi de rejoindre la cause d'une organisation terroriste. Ils sont passés de l'enfer de Daech à la vie dans ces camps. C'est la raison pour laquelle la priorité des autorités françaises est de ramener ces enfants. Les opérations de rapatriement sont extrêmement difficiles à mener, car il s'agit d'une zone de guerre, encore très dangereuse, sur laquelle le gouvernement n'exerce aucun contrôle effectif. Dès que cela est possible, le gouvernement organise de telles opérations mais cela demande un travail de négociation et de préparation très ardu. Depuis 2019, cette position a conduit le gouvernement à procéder à des opérations successives de rapatriement qui ont permis le retour de 35 enfants français. Le 5 juillet 2022, une nouvelle opération a permis le rapatriement de 35 mineurs français supplémentaires et de 16 mères retenus dans les camps du nord-est de la Syrie. Lorsque le rapatriement des enfants impliquait le retour de leur mère et que les conditions sur le terrain le rendaient possible, celui-ci a pu être organisé, dès lors qu'elles l'acceptaient en toute connaissance de cause. Plusieurs mères refusent la proposition qui leur est faite, que leurs enfants puissent retourner en France avec elle. L'intégralité des mères rapatriées ont été, dès leur arrivée sur le sol français, remises aux autorités judiciaires, soit au titre d'un mandat d'arrêt – auquel cas elles ont été placées directement en détention – soit au titre d'un mandat de recherche pour être placées en garde à vue puis en détention, dans l'attente de leur jugement. L'application rigoureuse de la loi pénale est de mise. Les enfants ont fait l'objet d'un suivi médical particulier et d'une prise en charge par les services sociaux. Malgré les difficultés de ces opérations, la détermination et les efforts du gouvernement restent intacts pour les mener à bien.

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