Question de M. ALLIZARD Pascal (Calvados - Les Républicains) publiée le 04/08/2022

M. Pascal Allizard attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères à propos de l'intensification de la répression en Birmanie.
Il rappelle que les élections démocratiques en Birmanie en novembre 2020 ont conduit à une large victoire du parti de la ligue nationale pour la démocratie.
Cette victoire a été confisquée par un coup d'État militaire, le 1er février 2021, par lequel l'armée a pris le pouvoir en force et proclamé l'état d'urgence.
Malgré le consensus en cinq points adopté par l'association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), la condamnation du coup d'État par les membres du G7 et les sanctions de l'Union européenne, la situation n'a cessé de se dégrader.
Le Sénat a adopté à l'unanimité une résolution visant à une reconnaissance du Gouvernement d'unité nationale birman formé par l'opposition à la junte.
Depuis, la répression contre la population civile et les membres des mouvements d'opposition à la junte s'intensifie. Aux nombreux morts s'ajoutent des milliers de personnes emprisonnées arbitrairement dont certaines condamnées à mort.
Le 25 juillet 2022, la junte a annoncé avoir procédé aux premières exécutions capitales depuis plusieurs décennies et qui visaient des opposants au régime militaire.
Par conséquent, alors que la France vient de condamner officiellement ces exécutions, il souhaite connaitre les actions concrètes mises en œuvre par le Gouvernement, en lien avec la communauté internationale et le Gouvernement d'unité nationale, pour rétablir la démocratie en Birmanie et sanctionner le régime militaire illégal.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 20/10/2022

La situation sécuritaire et humanitaire en Birmanie, qui retient toute notre attention, ne cesse de se dégrader depuis le coup d'État du 1er février 2021 : au 5 septembre, plus de 2 200 personnes ont été tuées par les forces armées et de sécurité et plus de 12 000 demeurent détenues, dont la Conseillère pour l'État, Aung San Suu Kyi, et le Président de la République, Win Myint. Récemment, de nouvelles peines ont été prononcées contre ces deux représentants politiques, dans le cadre de procédures judiciaires arbitraires, menées par une justice aux mains de la junte birmane. La France a condamné, dans les termes les plus fermes, chacune de ces décisions, qui témoignent du mépris des généraux birmans pour la volonté du peuple, qui s'est exprimée démocratiquement lors des élections générales du 8 novembre 2020. Les affrontements sur l'ensemble du territoire, y compris en zones de peuplement bamar, ont conduit plus d'1,3 million de personnes à fuir leurs habitations selon les données les plus récentes du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Cette situation a plongé la Birmanie dans une grave crise humanitaire. Plus de 14 millions de personnes ont désormais besoin d'une assistance humanitaire selon les estimations du Programme alimentaire mondial. L'annonce de la mise à exécution de la condamnation à mort de quatre opposants politiques, le 25 juillet dernier, est un signe supplémentaire de l'effroyable fuite en avant du régime issu du coup d'État. La France a très fermement condamné cette décision, tant au niveau national qu'avec ses partenaires du G7 et de l'Union européenne (UE). Nous avons, par ailleurs, soutenu une expression du Conseil de sécurité des Nations unies le 27 juillet dernier, qui a démontré l'unité de la communauté internationale dans la dénonciation de ces horreurs et a conduit à l'appel à une cessation immédiate des violences. La France se tient, depuis le premier jour, aux premiers rangs de la réponse européenne à cette crise. Notre approche est double : d'une part, adopter des sanctions à l'encontre des responsables des violences, des atteintes à l'État de droit et à la démocratie, ainsi qu'à l'encontre des entités et des personnes qui facilitent ces violations ; d'autre part, épargner, autant que possible, les populations civiles, qui sont les premières victimes de cette crise. En ce sens, le Conseil des affaires étrangères de l'UE a adopté quatre paquets de sanctions, chacun en réponse à une nouvelle escalade dans l'horreur. Elles ciblent un total de 51 individus et de 10 entités économiques, dont les deux principaux conglomérats militaires, MEC et MEHL, ainsi que leurs 34 filiales détenues à plus de 50 %, qui opèrent dans des secteurs aussi diversifiés que le commerce, la finance ou les pierres précieuses. Parmi les entités désignées, figurent également des entreprises publiques des secteurs du bois et des pierres précieuses et MOGE, l'entreprise publique du secteur des hydrocarbures, que l'UE est la seule à avoir sanctionnée. Face à la dégradation continue de la situation, la réaction européenne n'est pas figée et la France se réserve la possibilité de prendre des mesures supplémentaires, le cas échéant, en lien avec ses partenaires de l'UE. La France a suspendu tout soutien financier ou matériel susceptible de bénéficier à la junte ou à toute entité publique ou privée sous son contrôle, dans le cadre de la revue de son aide au développement. En parallèle, la France et l'UE ont accru l'aide humanitaire au bénéfice de la population birmane. En 2022, la France a doublé son aide alimentaire programmée en faveur de la population birmane par rapport à 2021 et a augmenté de 50 % son soutien financier aux projets des ONG qui opèrent sur le terrain, y compris dans certaines zones difficiles d'accès comme l'État Chin. La France est également le troisième contributeur bilatéral aux actions du HCR en 2022. Cette aide s'ajoute au 27 millions d'euros d'aide humanitaire que l'UE mobilise cette année pour la Birmanie. La France continue de soutenir les efforts de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), qui tient un rôle central dans l'établissement d'un processus de sortie de crise. La position de fermeté exprimée lors de la réunion des ministres des affaires étrangères de l'Association à Phnom Penh, au début du mois d'août, est soutenue par la France, y compris le refus d'inviter des représentants politiques de la Birmanie aux sommets de l'ASEAN. La France reste attentive aux positions de l'ASEAN pour les prochaines rencontres politiques. La ministre de l'Europe et des affaires étrangères est pleinement mobilisée sur la crise en Birmanie. Elle l'évoque très régulièrement avec les acteurs susceptibles de jouer un rôle dans sa résolution.

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