Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 13/10/2022

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation de la santé périnatale en France.
Santé publique France a publié, le 20 septembre 2022, un « Rapport de surveillance de la santé périnatale en France ». Il s'agit de la première description globale de l'état de la santé périnatale, rassemblant les indicateurs clés et leurs évolutions sur la période 2010-2019.
Si la prise en charge s'avère d'un niveau à la fois élevé et stable, le rapport constate toutefois de grandes inégalités territoriales. Il repère également certaines évolutions préoccupantes. La précarité des mères semble ainsi s'aggraver, marquée par une légère baisse des accouchements couverts par l'assurance maladie, et par davantage de mères en situation irrégulière disposant de l'aide médicale d'État et de mères sans abri. Les pathologies maternelles en cours de grossesse et en post-partum sont en hausse, notamment les troubles hypertensifs et le diabète gestationnel. Enfin, alors que le taux de mortalité maternelle n'a pas diminué significativement, la mortalité néonatale augmente de 0,2 point en métropole et demeure deux fois plus élevée en outre-mer.
En conséquence, il lui demande comment améliorer encore la prise en charge de la santé périnatale, afin d'inverser ces tendances alarmantes.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 08/06/2023

La santé périnatale recouvre - au sens de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) - la période qui va de la 28ème semaine de grossesse au 7ème jour de vie. S'agissant de la mortalité périnatale et néonatale, nous disposons de plusieurs indicateurs de santé pour cette période, dont les définitions sont les suivantes : La mortalité périnatale concerne les décès entre 22 semaines d'aménorrhée (SA) et 6 jours de vie. Elle regroupe : - la mortinatalité (enfants nés sans vie à partir d'un âge gestationnel minimal de 22 SA ou un poids de plus de 500 g) ; - la mortalité néonatale précoce (décès entre 0 et 6 jours). La mortalité néonatale concerne, quant à elle, les décès entre 0 et 27 jours, rapportés aux naissances vivantes. Elle est composée de la mortalité néonatale précoce (décès entre 0 et 6 jours) et de la mortalité néonatale tardive (décès entre 7 et 27 jours). Dès 2018, le rapport Euro-Peristat portant sur les données 2015 a mis en évidence une stagnation en France de la mortalité néonatale (2,4 %) alors qu'il y a une tendance à la baisse dans les autres pays, plaçant la France au 22ème rang européen. En 2021, la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) a publié pour la première fois une analyse des indicateurs de mortalité néonatale précoce et de mortalité périnatale à partir de la seule source du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI). L'observation de la mortalité périnatale montre une stabilité sur la période entre 2014 et 2019. Parmi les facteurs pouvant expliquer cette stabilité, sont évoqués la prématurité - facteur de risque majeur de mortinatalité et mortalité néonatale - et l'évolution des facteurs de risques maternels qui influent sur cette mortalité : un âge plus élevé des mères à l'accouchement, des naissances multiples plus nombreuses, l'hypertension, le diabète, l'obésité et la consommation de tabac, ainsi que le contexte socio-économique. Cependant, il est nécessaire d'améliorer la qualité du recueil des indicateurs et de mieux analyser les causes de décès afin de comprendre les mécanismes et d'expliquer les évolutions observées sur la mortalité néonatale et périnatale. C'est dans cet objectif que différentes actions ont été engagées. L'actualisation en juillet 2021 de l'Instruction ministérielle (DREES/DGS/DGOS) de 2011 portant sur la qualité du système d'enregistrement de la mortinatalité avec un élargissement à la surveillance de la mortalité périnatale pour prendre en compte la mortalité néonatale précoce a défini deux axes de travail : améliorer la qualité du codage dans le PMSI pour mieux identifier les naissances et les circonstances de décès en cas de mortinatalité ; mettre en place une démarche qualité autour de la mortalité périnatale, en lien avec les acteurs de terrain afin de mieux identifier les causes de décès. Dans ce cadre, un groupe de travail national co-piloté par le ministère chargé de la santé (DREES/DGS/DGOS) a été relancé en 2021. Il associe les représentants des sociétés savantes de gynécologie-obstétrique, néonatologie et des sages-femmes, de la fédération française des réseaux de santé en périnatalité, de départements d'information médicale, d'agences régionales de santé (ARS), de l'agence de biomédecine, de Santé publique France et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale. Un document d'harmonisation des définitions est en validation et des travaux sur la mise en place d'une démarche qualité en lien avec les revues de morbidité et mortalité (RMM) sont en cours. S'agissant de la santé des mères, l'enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles 2013-2015 (ENCMM) a montré pour la France un ratio de mortalité maternelle se situant à un niveau faible, dans la moyenne des pays comparables, à 8,1 pour 100 000 décès pour la mortalité limitée à 42 jours (définition OMS). D'après cette enquête, les maladies cardiovasculaires et le suicide constituent aujourd'hui les deux premières causes de mortalité maternelle. En effet, la mortalité par hémorragie obstétricale, longtemps la première cause de mortalité maternelle, a été divisée par deux en quinze ans, sous l'effet d'une politique volontariste d'amélioration de la qualité des soins obstétricaux et d'anesthésie-réanimation obstétricale. En complément de ces indicateurs, les données issues des enquêtes nationales périnatales (ENP) réalisées à intervalles réguliers permettent également d'apprécier l'état de santé maternelle et infantile pendant la période périnatale. Les résultats de la 6ème ENP ont été publiés en octobre 2022 pour la métropole avec pour la première fois un suivi aux 2 mois de l'enfant et un appariement à venir avec les données du système national des données de santé (SNDS). Ces résultats permettent également d'évaluer dans le champ de la prévention et de la prise en charge les actions de politiques publiques issues de la stratégie nationale de santé et d'orienter les travaux nécessaires pour répondre aux besoins de la population dans le champ de la santé périnatale. Un rapport pour chaque territoire ultra-marin est attendu au cours du premier semestre 2023 et apportera un éclairage sur les spécificités territoriales. Les principaux constats de l'ENP 2021 sont les suivants : pendant la grossesse, plusieurs indicateurs témoignent d'une amélioration de la santé des femmes et des mesures de prévention mais des progrès restent à faire dans plusieurs domaines et notamment en ce qui concerne l'obésité (14,4 % vs 11,8 % en 2016), le surpoids (23 % vs 19,9 %) et la santé mentale ; un taux de prématurité stable (7 %) alors même que l'âge maternel continue d'augmenter (âge moyen à 30,9 ans et augmentation significative des >35 ans) ; des accouchements moins médicalisés mais des gestes de réanimation plus fréquents ; le suivi post-partum à 2 mois révèle une symptomatologie de dépression du post-partum chez 1 femme sur 6. En matière de prévention et de lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé, il convient d'agir sur les déterminants comportementaux pouvant agir sur l'obésité, le surpoids, la survenue de maladies chroniques dont le diabète de type 2, ou la survenue de diabète gestationnel, en facilitant l'accès généralisé à une alimentation satisfaisante pour la santé et à la pratique d'une activité physique régulière qui doit rester une des priorités de santé, et ce, dès le plus jeune âge. La prévention cardiovasculaire agit sur les déterminants multifactoriels du risque et constitue un enjeu majeur pour les femmes en âge de procréer. Les « rendez-vous de prévention », prévus par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 contribueront à une démarche active de promotion de la santé. Parmi les leviers et actions déjà engagés, il convient de souligner la lutte contre la sédentarité (Plan national nutrition santé - PNNS4), le plan santé mentale avec les mesures des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie ainsi que l'entretien post natal précoce pour dépister la dépression postpartum. Par ailleurs, face à la forte progression de la fréquence du diagnostic de diabète gestationnel constatée dans les enquêtes ENP depuis 2010, le ministère de la santé a saisi la HAS sur l'évaluation des stratégies de dépistage de diabète gestationnel, dont notamment les critères diagnostiques en vigueur depuis 2010. Enfin, la stratégie nationale de santé a fait de la période des « 1 000 premiers jours de l'enfant » un enjeu de santé publique et une priorité portée par le Gouvernement dans le « Plan Priorité Prévention » 2018-2022, marquant une évolution du pilotage politique dans une approche transversale. En synergie avec les plans et stratégies existantes, ce plan a permis une coordination des actions en interministériel. Dans le champ de la prévention, il s'agit notamment de poursuivre l'accompagnement au déploiement de l'entretien prénatal précoce (EPP) devenu obligatoire depuis le 1er mai 2020 et moment clé dans l'entrée des 1 000 premiers jours de l'enfant. Les données nationales montrent que 60 % des femmes ont bénéficié d'un EPP en 2021. Il conviendra également d'analyser les résultats de l'expérimentation (article 51) du « Référent Parcours Périnatalité » en vue d'une généralisation. Cette expérimentation, menée dans quatre territoires dont un départements et région d'Outre-mer (DROM) (la Guyane), vise à limiter les ruptures de parcours du suivi périnatal, notamment chez les personnes en situation de vulnérabilité. En outre-mer, le programme réunionnais de nutrition et de lutte contre le diabète (PRND) 2020-2023 est soutenu dans la déclinaison ultra-marine du Plan national nutrition santé 2019-2023. Par ailleurs, tous les DROM ont contractualisé avec l'Etat dans le cadre de la stratégie nationale prévention - protection de l'enfance (SNPPE), leur permettant de renforcer les moyens de leurs services de PMI.

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