Question de M. BRISSON Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) publiée le 03/11/2022

M. Max Brisson appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales sur les notions de continuité territoriale et de contiguïté, dans le cadre d'un projet de création de commune nouvelle entre deux communes.

L'article L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit qu'une commune nouvelle peut être créée en lieu et place de communes contiguës.

Selon la jurisprudence administrative, la présence d'un cours d'eau ne porte pas, par elle-même, atteinte au principe de la continuité territoriale qui s'apprécie au regard de contiguïté des limites administratives.

Le Conseil d'État en décide d'ailleurs ainsi en matière d'intercommunalité. Il considère dans sa décision du CE-communauté de communes du Val-de-Drôme/préfets de l'Ardèche et de la Drôme que la seule circonstance que les communes intéressées soient séparées par un fleuve « n'est pas de nature à faire regarder le territoire de la communauté de communes qu'elles constituent comme n'étant pas d'un seul tenant et sans enclave ».

En conséquence, la circonstance qu'un cours d'eau sépare deux communes ne leur interdirait pas de fusionner au sein d'une commune nouvelle.

Toutefois, les articles L. 2213-2 et L. 5214-1 du CGCT laissent une ambiguïté sur l'interprétation à donner aux notions de contiguïté territoriale, utilisée notamment lors de la création de communes nouvelles, et la notion de « territoire d'un seul tenant et sans enclave », utilisée à l'occasion de création d'établissement public de coopération intercommunale.

Sur ce point, plusieurs exemples démontrent que ces deux notions disposent d'une définition différente. Ainsi, des communes appartenant à une même communauté de communes n'ont pas été autorisées à fusionner car elles n'étaient pas contiguës. Il en ressort qu'il est possible que deux communes appartiennent à un territoire formant un seul tenant et sans enclave, sans pour autant pouvoir fusionner du fait de ne pas être contiguës.

La décision du Conseil d'État ne permettant pas de définir précisément la notion de contiguïté territoriale, pourtant retenue dans les critères de création de communes nouvelles, il interroge le Gouvernement sur le sens précis de cette notion et s'il est possible de fusionner deux communes séparées par un domaine public fluviale ou maritime.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 03/08/2023

Une commune nouvelle, comme le prévoit l'article L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), est créée « en lieu et place de communes contiguës ». La contiguïté, qui est une exigence légale, n'est toutefois pas définie par le législateur. Pour mieux appréhender cette notion, un parallèle peut être fait avec le droit applicable à la création ou à l'extension du périmètre des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), et en particulier avec la notion de continuité territoriale. Les communautés de communes (article L. 5214-1 du CGCT), les communautés urbaines (article L. 5215-1 du CGCT), les communautés d'agglomération (article L. 5216-1 du CGCT) et les métropoles (article L. 5217-1 du CGCT) regroupent plusieurs communes « d'un seul tenant et sans enclave ». L'article L. 5210-1-2 du CGCT prévoit que « lorsque le représentant de l'Etat dans le département constate qu'une commune n'appartient à aucun établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou crée une enclave ou une discontinuité territoriale au sein du périmètre d'un tel établissement public, il définit, par arrêté, un projet de rattachement de cette commune à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, en tenant compte du schéma départemental de coopération intercommunale ». La notion de continuité territoriale applicable aux EPCI à fiscalité propre est appréciée de manière souple dans la jurisprudence administrative. Il a ainsi été jugé que la seule circonstance que des communes soient séparées par un fleuve n'est pas de nature à faire regarder le territoire de la communauté de communes qu'elles constituent comme n'étant pas d'un seul tenant et sans enclave, comme le prescrit l'article L. 5214-1 précité (CE, 3 oct. 2003, Communauté de communes du Val de Drome c/ Préfets de l'Ardèche et de la Drôme, n° 250825). En l'espèce, la communauté de communes était traversée par le Rhône, inclus dans le domaine public fluvial de l'Etat. De la même manière, le fait que des communes n'aient qu'un seul point de « contiguïté » au centre d'un lieu-dit, au sein d'une forêt, n'est pas de nature à faire regarder le territoire d'une communauté d'agglomération comme n'étant pas d'un seul tenant au sens des dispositions de l'article L. 5216-1 susmentionné (CAA Douai, 22 juin 2004, Commune d'Acquigny c/ Communauté d'agglomération Seine-Eure, n° 01DA00616). Dans le cadre d'une question écrite (JO Sénat du 20 août 2009, page 2007), le ministre de l'intérieur a indiqué qu'il ressortait de la jurisprudence administrative que « [des] contraintes naturelles (…) ne suffisent pas à s'opposer à la constitution [d'] établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, dès lors qu'elles n'empêchent pas la réalisation des objectifs impartis à ces groupements par la loi et ne sont pas de nature à faire obstacle à la réalisation d'un projet commun de développement et d'aménagement du territoire dont ils ont la charge ». Une analyse circonstanciée doit donc être conduite. Par analogie avec le régime applicable aux EPCI, la seule circonstance que deux communes soient « séparées » par un cours d'eau ne fait pas obstacle en tant que telle à la création d'une commune nouvelle, la condition de continuité territoriale et donc de contiguïté pouvant être remplie. Dans les deux hypothèses, domaine public fluvial ou maritime, une analyse au cas par cas devrait être réalisée pour vérifier si la condition de contiguïité est remplie.

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