Question de M. CHARON Pierre (Paris - Les Républicains) publiée le 17/11/2022

M. Pierre Charon attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté sur le rapport 2021 de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).

Ce rapport met en lumière l'amplification et les mutations actuelles du phénomène sectaire et la nécessité de le combattre. La Miviludes constate depuis 2020 un accroissement de l'offre sectaire. La crise due à la pandémie de covid-19 a instauré un climat anxiogène qui a contribué à déstabiliser les personnes vulnérables.

En 2021, la Miviludes a reçu 4 020 saisines, soit 33,6 % de plus qu'en 2020 (86,1 % de plus qu'en 2015) et traité 3 118 saisines, surtout des signalements (56 %), des demandes d'avis (16 %) et des échanges institutionnels (7 %).

Parmi les dossiers traités, beaucoup portent sur des mouvements clairement identifiés. 700 dossiers concernent les questions de santé, dont 70 % les pratiques de soins « non conventionnelles ». En outre, la mission s'inquiète de voir se développer en France un certain nombre de nouveaux mouvements.

Dans le cadre de ses missions, la Miviludes coordonne l'action préventive mais aussi répressive des pouvoirs publics contre les dérives sectaires. Pour mieux les combattre, elle dispose depuis mai 2021 de moyens accrus.

Or sur les 4 000 saisines, seules 20 ont donné lieu à des signalements à la justice, au titre de l'article 40 du code de procédure pénale qui veut que toute autorité constituée soit tenue de prévenir le procureur de la République s'il a connaissance d'une infraction.

Il lui demande ses intentions pour lutter réellement contre le phénomène sectaire et poursuivre devant la justice les milliers de manipulateurs identifiés par la Miviludes.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé de la citoyenneté publiée le 02/02/2023

Les dérives sectaires portent atteinte à la liberté de conscience, ainsi qu'à l'intégrité physique et psychique de l'individu. Elles ont des effets délétères sur la cohésion sociale en raison de leur dynamique d'isolement et de marginalisation. Le Gouvernement a fait de la lutte sans relâche contre les individus et mouvements qui en sont à l'origine une priorité de son action. Il faut tout d'abord rappeler que la France est l'un des rares pays à avoir mis en place un dispositif de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Depuis sa création, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) joue un rôle moteur dans la détection et la lutte contre les différentes formes d'emprise et de manipulation, qui se renouvellent sans cesse, investissent des domaines nouveaux et montrent ainsi que la vigilance en la matière demeure absolument indispensable. L'intégration, en 2020, de la MIVILUDES au ministère de l'Intérieur et des Outre-mer a constitué un facteur déterminant de relance et de fortification de la Mission interministérielle. Placée sous l'autorité du Secrétaire général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR), la MIVILUDES fait partie d'une structure de nature interministérielle et elle bénéficie désormais d'une plus grande proximité et de liens resserrés avec les services d'enquête (police et gendarmerie) et les services de renseignement. Par ailleurs, le rattachement au SG-CIPDR a permis à la Mission interministérielle de bénéficier de moyens de fonctionnement accrus en profitant pleinement des services généraux du SG-CIPDR (services administratifs et financiers, RH, informatique, communication, logistique, etc.), ainsi que de la délégation à l'information et à la communication du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer (DICOM). L'action conjuguée des différents services de l'État contribue à améliorer sensiblement la lutte contre les mouvements sectaires, notamment par la mise en place d'un processus d'information et de suivi des signalements opérés auprès de l'autorité judiciaire, pour une meilleure prise en charge des victimes, ainsi que par les multiples formations de sensibilisation réalisées par la MIVILUDES pour un meilleur repérage des dérives sectaires et des pratiques déviantes (2 000 personnes sensibilisées en 2021). Il convient de préciser que lorsque la MIVILUDES effectue un signalement à la Justice, au titre de l'article 40 du code de procédure pénale, elle regroupe, le cas échéant, plusieurs saisines concernant des faits commis par un même individu ou groupe à caractère sectaire afin de transmettre au procureur de la République compétent le maximum d'informations concernant les faits qui lui sont signalés. Les 20 signalements à l'autorité judiciaire réalisés en 2021 ne correspondent donc pas à 20 saisines reçues par la MIVILUDES. De surcroît, le Gouvernement a décidé de doter la politique publique de lutte contre les dérives sectaires de moyens budgétaires sensiblement accrus, ce qui a ainsi permis le lancement, en 2021 et en 2022, d'un appel à projets doté d'un million d'euros à chaque fois pour financer les associations d'aide aux victimes et soutenir des initiatives nationales et locales permettant d'améliorer la connaissance du phénomène sectaire et la sensibilisation de nos concitoyens. Face aux constats portés par la MIVILUDES d'un phénomène sectaire en constante augmentation et qui évolue (notamment en s'appuyant sur Internet et les réseaux sociaux et en investissant toujours davantage le domaine de la santé et du bien être), et parce que les dérives sectaires causent des dommages visibles et invisibles à la société, le Gouvernement entend adapter l'organisation et la réponse de l'État pour accentuer la lutte contre le phénomène sectaire. A cet effet, le secrétariat d'Etat chargé de la Citoyenneté auprès du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer organisera les premières assises nationales des dérives sectaires dans les prochaines semaines. Ces assises réuniront l'ensemble des acteurs concernés par la lutte contre les dérives sectaires : les services de l'Etat, les associations d'aide aux victimes, les parlementaires, les experts du domaine et des personnalités qualifiées au niveau national et au plan européen, des acteurs centraux comme les plateformes de santé et les plateformes numériques. L'objectif des premières assises des dérives sectaire est de constituer un espace d'échanges et de débats afin : D'initier un dialogue de fond sur le sujet afin de circonscrire précisément les contours idéologiques et opérationnels des phénomènes sectaires en France ; De contribuer à une meilleure connaissance des dérives sectaires par les acteurs institutionnels mais aussi par l'ensemble de l'opinion publique ; De constituer une feuille de route claire sur plusieurs années avec des mesures fortes permettant de lutter contre le développement du phénomène sectaire sur le territoire national.

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