Question de Mme HARRIBEY Laurence (Gironde - SER) publiée le 22/12/2022

Mme Laurence Harribey attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la situation catastrophique du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan.

Cet établissement dépasse les 200 % d'occupation, les conditions de vie des détenus y sont indignes, comme l'avait souligné le contrôleur général des lieux de privation de liberté dans son avis du 13 juillet 2022.

De leur côté, les personnels arrivent à bout de forces : un surveillant a à charge 90 détenus au lieu de 40.

Le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan n'est malheureusement pas un cas isolé.

Elle lui demande où en est l'avancée des nouveau chantiers annoncés et ce qu'il prévoit pour relancer l'attractivité des métiers pénitentiaires.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 25/01/2023

Réponse apportée en séance publique le 24/01/2023

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, auteure de la question n° 325, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Laurence Harribey. Madame la ministre, 72 836 prisonniers en France : c'est le nouveau nombre record dépassé au mois de décembre. Cette mécanique d'incarcération de masse se poursuivra tant que l'on ne se penchera pas sur l'extension du champ pénal et qu'on ne réfléchira pas à une nouvelle ingénierie de la sanction.

Les 15 000 nouvelles places promises dans les établissements pénitentiaires ne permettront pas d'améliorer la situation. Elles vont servir à enfermer des gens, mais n'assureront pas le respect du principe de l'encellulement individuel, on le sait.

À Gradignan, en Gironde, le centre pénitentiaire est actuellement surpeuplé à 200 %. Les incidents et les accidents s'y multiplient. Quand les nouveaux locaux seront disponibles, le taux d'occupation s'élèvera à 120 %, ce qui reste considérable. Il y a là matière à réflexion.

Quelle est votre analyse, madame la ministre ? Que peut-on dire de la situation à Gradignan ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, le garde des sceaux Éric Dupond-Moretti regrette de ne pouvoir être présent ce matin et m'a priée de vous fournir les éléments suivants en réponse à votre question.

Il vous en remercie, car elle lui donne l'occasion de réaffirmer le projet porté par le Gouvernement de mettre en œuvre des conditions de détention plus dignes, mais aussi de meilleures conditions de travail pour nos agents pénitentiaires. Ce sont les objectifs du plan immobilier pénitentiaire, qui prévoit la construction de 15 000 places de prison. La moitié des établissements seront sortis de terre en 2024.

Dans votre département, c'est un établissement tout neuf de 600 places qui est en cours de construction à Bordeaux-Gradignan. Il permettra de réduire le taux de surpopulation carcérale de l'établissement actuel. Les travaux ont débuté au mois d'avril 2021 par la construction d'un premier bâtiment, qui sera mis en service au premier trimestre 2024. Un second bâtiment sera mis en service en 2026.

Au-delà des nouvelles constructions, le budget alloué aux établissements pénitentiaires s'élève à plus de 130 millions d'euros par an depuis cinq ans, soit le double de ce qui leur était alloué précédemment.

Je veux enfin rendre hommage aux surveillants pénitentiaires, troisième force de sécurité intérieure de notre pays, qui font un travail formidable, dans des conditions difficiles. Au-delà des paroles, il y a les actes. C'est pourquoi des mesures sont mises en œuvre afin de renforcer l'attractivité du métier de surveillant pénitentiaire.

La fusion des grades de surveillant et de brigadier entrée en vigueur en 2022 offre aux surveillants un déroulement de carrière plus linéaire, avec une revalorisation indiciaire à la clé. Des revalorisations de l'indemnité pour charges pénitentiaires (ICP) ont également été mises en œuvre en 2021, en 2022 et en 2023.

Enfin, et surtout, le Gouvernement a annoncé une réforme statutaire d'envergure du statut de surveillant dans le cadre de la nouvelle mandature. Elle constituera une réponse efficace au problème d'attractivité des métiers pénitentiaires.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour la réplique.

Mme Laurence Harribey. Merci, madame la ministre.

J'avais déjà alerté le garde des sceaux dans une question orale il y a quelques mois. Depuis lors, au quotidien, pour les surveillants de cet établissement, rien n'a changé !

Certes, une nouvelle construction est en cours, mais elle permettra seulement, je l'ai dit, de réduire le taux d'occupation à 120 %, contre 200 % aujourd'hui. Construire des murs n'est donc pas suffisant. Nous demandons depuis un certain temps – et, avec ma collègue Marie Mercier, nous le demanderons une nouvelle fois dans le rapport sur les services pénitentiaires d'insertion et de probation que nous présenterons prochainement – une refonte totale de la profession. Les annonces faites par le garde des sceaux récemment comportaient un « trou dans la raquette » à cet égard.

Vous évoquez une révision du statut de surveillant, elle est la bienvenue. J'espère que nous pourrons travailler ensemble sur cette question.

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