Question de M. MEURANT Sébastien (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 01/12/2022

M. Sébastien Meurant interroge Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'état actuel des informations relatives aux fuites relevées le 26 septembre 2022 sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2 reliant la Russie et l'Allemagne. Dernièrement, la Suède, qui enquêtait au titre du passage des gazoducs dans ses eaux territoriales, a conclu sans surprise à un sabotage, sans mentionner, semble-t-il (au moins publiquement) les auteurs de ce dernier. Le Danemark et le consortium Nord Stream poursuivent de leur côté leurs propres enquêtes. S'agissant d'une question de la plus haute importance pour l'approvisionnement énergétique européen (l'Allemagne dépend du gaz russe à 30 % environ et, du fait des accords européens, la France, qui est pourtant sensiblement moins dépendante au gaz en général et au gaz russe en particulier, devrait être tenue d'approvisionner l'Allemagne en électricité durant l'hiver, au risque de mettre en péril ses propres ressortissants, ménages, entreprises et collectivités), il serait utile que la représentation nationale soit tenue au courant de l'avancée des différentes enquêtes. D'autant que ce sabotage pourrait bien constituer un acte de guerre, non pas seulement contre la Russie, mais potentiellement aussi contre l'Union européenne.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 29/12/2022

Les projets Nord Stream et Nord Stream 2 relient la Russie à l'Allemagne et sont chacun constitués de 2 gazoducs qui ont été touchés par l'acte de sabotage du 26 septembre 2022. Le premier projet, Nord Stream, a été mis en service en 2012. Il appartient à la société Nord Stream AG, dont Gazprom détient 51%, les sociétés allemandes Wintershal Dea et Uniper 15,5% chacune, et la société néerlandaise Gasunie 9%, tout comme Engie. Le second projet, Nord Stream 2, appartient à la société Nord Stream 2 AG, détenue à 100% par Gazprom qui exploite ce projet.Basée en Suisse, la société Nord Stream 2 AG a été créée pour mener à bien le projet, depuis sa planification jusqu'à son exploitation, en passant par sa construction. Gazprom a financé la moitié du projet, d'un coût total de 10 milliards d'euros. L'autre moitié a été financée grâce aux prêts de 5 entreprises européennes – la néerlandaise Shell, les allemandes Wintershall Dea et Uniper, l'autrichienne OMV, et Engie – qui ont  chacune octroyé environ 1 milliard d'euros. Ces entreprises européennes agissaient dans le cadre de ce projet comme de simples financiers et n'étaient donc pas co-détentrices de l'infrastructure. En revanche, l'entrée en vigueur des sanctions américaines et européennes envers la Russie, en réponse à son agression à l'encontre de l'Ukraine, a exposé ces entreprises, dont Engie en tant que prêteur, à un risque de crédit - pour un montant de 987 millions d'euros s'agissant de l'entreprise française. Ce risque s'est matérialisé le 1er mars 2022 avec le dépôt de bilan de Nord Stream 2 AG, faisant suite à l'entrée en vigueur des sanctions américaines et européennes, le même jour. Les actes de sabotage qui ont touché cette infrastructure ont été à plusieurs reprises dénoncés par les autorités françaises, à titre national, au niveau européen comme au sein de l'OTAN. La Ministre de l'Europe et des affaires étrangères s'est exprimée publiquement à ce sujet dès le 27 septembre 2022, immédiatement après s'être entretenue avec ses homologues danois et suédoise, concernés au premier chef par ces attaques intervenues dans leur zone économique exclusive. La Ministre a notamment indiqué que, sur la base des éléments disponibles au moment de cette intervention, un certain nombre d'indices convergents conduisaient à écarter la piste accidentelle et qu'il semblait très probable qu'une intervention délibérée ait occasionné ces explosions.   Nous avons toute confiance dans les autorités suédoises et danoises, chargées d'enquêter sur l'origine de ces incidents. Les incidents ayant eu lieu dans les zones économiques exclusives suédoises et danoises, les autorités de ces deux pays sont seules autorisées à diligenter les enquêtes permettant d'établir leur origine. Le 18 novembre dernier, le procureur en charge de l'enquête préliminaire menée en Suède a conclu que les explosions touchant Nord Stream 2 relevaient effectivement du sabotage. Selon le parquet suédois, les analyses réalisées démontreraient des traces d'explosifs sur plusieurs objets découverts sur place. Les résultats de ces enquêtes devraient permettre d'identifier les auteurs de ces incidents qui, s'ils s'avéraient criminels, les exposeraient à une poursuite devant la justice pénale.

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