Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 01/12/2022

M. Hervé Gillé attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement sur la révision à la baisse des objectifs de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (dite loi SRU) en termes de mixité sociale par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (dite 3DS).
La présidente de l'union sociale de l'habitat annonçait lors de la promulgation de cette loi que l'État organisait « sa propre impuissance » en matière de logements sociaux et de mixité sociale.
En effet, la loi 3DS rend plus flexible les contraintes de la loi SRU afin que celles-ci s'adaptent mieux à l'hétérogénéité des situations locales. Ainsi, les communes n'ayant pas encore atteint les objectifs de logements sociaux sur leur territoire bénéficient d'un aménagement sous forme rattrapage triennal. Ce rattrapage se fait dans le cadre d'une contractualisation avec l'État : les contrats de mixité sociale (CMS) ; cette contractualisation créé une dérogation aux objectifs de droit commun pour les communes s'y engageant, sur une durée maximale de trois périodes triennales. De plus, ces CMS peuvent être établis à une échelle intercommunale, ce qui contredit l'objectif initial de la loi SRU d'égalité de traitement entre communes.
Alors que la majoration du prélèvement de solidarité en cas de carence de logements sociaux, procédure établie par la loi SRU ne suffisaient pas à contraindre les communes concernées à revoir leur politique locale de mixité sociale, la loi 3DS supprime la possibilité pour le préfet de prendre en charge la gestion du contingent communal de logements sociaux attribués aux ménages via le dispositif du droit au logement opposable (DALO).
D'une part, la loi 3DS a rendu les communes carencées moins exposées aux sanctions du fait de la possible contractualisation avec l'État. D'autre part, les sanctions auxquelles s'exposent ces dernières communes ne sont pas accentuées et la capacité d'intervention des préfets est affaiblie.
Cette révision à la baisse des objectifs de la loi SRU par la loi 3DS les rend plus facilement atteignables, au détriment même de la mixité sociale sur le territoire de chaque commune. Dès lors, la loi 3DS permet à davantage de communes de ne pas être sanctionnées en raison de leur carence en logement social. La politique du logement ne peut être guidée par un affaiblissement des critères par lesquels elle est évaluée, affaiblissement qui ne traduirait que « l'impuissance » de la puissance publique en la matière.
Ainsi, il lui demande quelles mesures il envisage pour contraindre les communes à poursuivre les objectifs de la loi SRU sans que ces objectifs soient revus à la baisse.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement publiée le 02/03/2023

L'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « SRU », constitue un socle de la politique en faveur de la mixité sociale depuis vingt ans. Moteur essentiel de la production de logement social, ce dispositif participe significativement au rééquilibrage et à la diversification de l'offre de logements sur le territoire national : depuis 2001, la moitié des 1.8 millions de nouveaux logements locatifs sociaux ont été financés en communes déficitaires SRU. La loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS », a apporté les ajustements nécessaires pour pérenniser un dispositif SRU plus soutenable sur les territoires connaissant de forts besoins. Au moyen d'une réforme réaliste mais ambitieuse, le législateur s'est attaché à offrir un cadre plus souple, adapté aux réalités des territoires, et à consolider les effets de la carence pour les communes ne mobilisant pas les efforts nécessaires. Pour favoriser une meilleure adaptation du dispositif SRU aux contextes locaux, la loi a prévu la possibilité de modérer de façon temporaire les objectifs de production dans le cadre d'une contractualisation entre l'Etat, la commune et l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et formalisée par la signature d'un contrat de mixité sociale. Ce dernier constitue un élément-clé du nouveau dispositif SRU mis en œuvre par la loi 3DS, permettant de mettre en place les conditions d'un dialogue renouvelé entre l'Etat et les collectivités territoriales, et lorsque cela se justifie, d'adapter le rythme de rattrapage du déficit pour les communes les plus en difficultés, sans renier l'ambition de construction de logements sociaux. En effet, la modération des objectifs de rattrapage ne revêt en rien un caractère automatique : elle est issue d'une analyse partagée sur les difficultés rencontrées et les engagements mesurables des collectivités territoriales en faveur du logement social. En outre, au début de l'année 2023, il reviendra aux préfets de réaliser le bilan de la période triennale 2020-2022 et d'apprécier l'état des réalisations avec les objectifs de rattrapage affectés aux communes concernées par le dispositif. Cette analyse pourra aboutir, pour celles qui ne sont pas en capacité de mettre en avant des motifs ou difficultés justifiant la non-atteinte des objectifs, au prononcé d'un constat de carence. En ce sens, les préfets seront particulièrement attentifs à la bonne volonté des collectivités et, après cette période de crise sanitaire, aux efforts menés pour relancer la production sociale, en particulier dans les territoires où le développement de la construction a repris. Le dispositif SRU reste donc un pilier essentiel des politiques de l'habitat auquel le Gouvernement reste pleinement attaché. A ce titre, il veillera à mettre en œuvre efficacement les évolutions portées par la loi 3DS et s'assurera du respect, par chaque territoire, de ses obligations.

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