Question de Mme LINKENHELD Audrey (Nord - SER) publiée le 23/11/2023

Question posée en séance publique le 22/11/2023

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

Mme Audrey Linkenheld. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Voilà quelques jours, l'association Secours catholique-Caritas titrait son État de la pauvreté en France de 2023 : Pauvreté : Les femmes en première ligne.

En février dernier, la Fondation Abbé Pierre soulignait, dans son rapport annuel, l'existence du mal-logement au féminin.

Or les violences sociales rendent les femmes particulièrement vulnérables en cas de violences conjugales.

Chaque année, 210 000 femmes subissent les coups de leur conjoint ou de leur ex-conjoint dans notre pays et, depuis janvier dernier, 121 d'entre elles sont mortes, parce que notre société n'a pas su les protéger.

Je le rappelle, chaque femme victime de violences effectue en moyenne six départs infructueux avant de partir définitivement.

Partir quand le conjoint ne peut être évincé est difficile pour de multiples raisons. Par exemple, il faut assumer seule toutes les dépenses avec un salaire inférieur en moyenne de 25 % à celui des hommes.

Il faut aussi savoir où aller. Une femme sur six a besoin d'un hébergement. Or, quand l'offre de logements abordables et adaptés est insuffisante, ce sont les femmes victimes de violences qui en font les frais.

Les collectivités le savent bien, et les maires font face à de multiples demandes sociales qui se télescopent et les obligent à gérer d'abord la pénurie.

Tant que nos services publics essentiels - le logement, la santé et l'insertion - continueront d'être dégradés et délaissés par l'État, les femmes resteront captives de ces déserts médicaux, immobiliers et sociaux.

Aussi, madame la ministre, quand allez-vous prendre conscience que les victimes, mais aussi les nombreux élus locaux et toutes les femmes - et les hommes - qui marcheront le 25 novembre prochain, lors de la vingt-quatrième journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, attendent que la grande cause que vous défendez se traduise, en réalité, par une réorientation profonde de la politique du logement et de la solidarité ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE-K et GEST.)

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Réponse du Ministère auprès de la Première ministre, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations publiée le 23/11/2023

Réponse apportée en séance publique le 22/11/2023

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Mme Bérangère Couillard, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Madame la sénatrice Linkenheld, votre préoccupation est également la nôtre.

Voilà désormais six ans que nous agissons avec une réelle vigueur en matière de lutte contre les violences faites aux femmes.

Vous avez raison, les femmes, en particulier celles de notre pays, gagnent moins que les hommes et se retrouvent, in fine, dans des situations parfois plus précaires.

Une femme victime de violences conjugales peut accomplir en moyenne sept départs infructueux de son domicile - vous avez évoqué six départs, madame la sénatrice, mais, quoi qu'il en soit du chiffre exact, c'est déjà beaucoup trop.

Nous souhaitons accélérer les départs des femmes de leur domicile et les mettre à l'abri avec leurs enfants. Pour cela, vous le savez, nous avons d'ores et déjà développé de nombreux dispositifs.

De nombreuses lois ont été votées ici - cinq lors du premier quinquennat du Président de la République - et de nombreux dispositifs ont été mis en place, ayant trait aussi bien au recueil de la parole des femmes et à une meilleure protection de ces dernières qu'à une meilleure sanction et au traitement des auteurs des violences.

Pour favoriser le départ des femmes de leur domicile, nous avons doublé, depuis 2017, les capacités de l'hébergement d'urgence, pour atteindre plus de 10 000 places.

Nous accompagnons les femmes également grâce au pack nouveau départ, qui sera disponible dans cinq départements pilotes. Ainsi, un agent de la caisse d'allocations familiales (CAF), coordinateur, facilitera leur départ avec l'aide des associations locales.

Les féminicides adviennent malheureusement souvent lors de la séparation. Aussi est-il indispensable d'éviter aux femmes d'accomplir, en moyenne, non pas sept départs infructueux de leur domicile, mais bien moins, pour sauver des vies.

Enfin, nous allons mettre en place l'aide universelle d'urgence dans l'ensemble des départements français, car, vous l'avez souligné, madame la sénatrice, les contraintes financières empêchent souvent les femmes de quitter leur domicile.

Or l'objectif de l'ensemble des dispositifs que nous déployons est bien de les aider à partir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour la réplique.

Mme Audrey Linkenheld. Madame la ministre, en réalité, vos positions budgétaires contredisent vos déclarations de principe.

C'est pourquoi notre groupe déposera un amendement qui visera à créer les milliers de places d'hébergement, attendues par les associations, pour les deux mille enfants à la rue, pour les femmes et pour les familles mal-logées. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

M. Rachid Temal. Bravo !

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