Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 03/10/2024
M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur le rapport rendu par l'inspection générale de la justice à la suite de l'attaque du convoi pénitentiaire au péage d'Incarville du 14 mai 2024.
Avant son évasion qui a coûté la vie à deux agents pénitentiaires, Mohamed AMRA a été détenu dans plusieurs établissements pénitentiaires dont Paris la Santé, Marseille, et la maison d'arrêt d'Évreux. Le rapport souligne une défaillance dans le partage d'informations concernant ce prisonnier entre les autorités judiciaires et les échelons interrégionaux ou locaux de l'administration pénitentiaire. En l'occurrence, si la direction interrégionale des services pénitentiaires Grand-Ouest et la cellule du renseignement pénitentiaire de Marseille étaient informées que Mohamed AMRA aurait mis un contrat sur la tête d'un surveillant pénitentiaire, la maison d'arrêt d'Évreux et la cellule du renseignement rennaise n'auraient pas eu accès à cette information capitale. Selon l'inspection générale, de telles informations auraient dû faire l'objet d'un échange systématique.
Le rapport relève, à ce titre, que la coordination et le partage d'informations entre l'ensemble des services et autorités sont fortement cloisonné et recommande qu'une circulaire commune aux directions des affaires criminelles et des grâces et de l'administration pénitentiaire définisse le cadre et les modalités d'échanges d'informations et de pièces relativement à la situation pénale des personnes en détention provisoire pour des infractions relevant de la criminalité organisée.
Il recommande, en outre, de diffuser une instruction nationale organisant l'échange des informations entre les différents services déconcentrés portant sur les incidents graves commis par les personnes détenues faisant l'objet d'un transfert entre établissements.
Par ailleurs, le rapport souligne que la démarche d'évaluation de la dangerosité des détenus est perfectible et recommande de faire évoluer le champ d'application de l'article 706-105-1 du code de procédure pénale afin d'élargir les prérogatives du procureur et des juges d'instruction de la juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée aux procureurs de la République et aux juges d'instruction des juridictions interrégionales spécialisées dans ce domaine.
Il souhaite connaître la position du Gouvernement concernant ce rapport et ses recommandations ainsi que les mesures qu'il compte prendre en la matière pour tenter d'éviter le renouvellement d'un tel drame.
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Transmise au Ministère de la justice
Réponse du Ministère de la justice publiée le 12/06/2025
L'ensemble des recommandations du rapport d'inspection sont prises en compte par les directions du ministère de la Justice. Parmi celles-ci, six ont déjà été entièrement réalisées. Les autres recommandations sont en cours de mise en oeuvre. S'agissant spécifiquement de la recommandation relative aux échanges d'informations entre les différents services déconcentrés, portant sur les incidents graves commis par les personnes détenues faisant l'objet d'un transfert inter-établissement, les dispositifs existants et les obligations applicables ont été rappelées par une note transmise aux services de l'administration pénitentiaire. S'agissant de l'évolution du champ d'application de l'article 706-105-1 du code de procédure pénale, l'article 6 de la proposition de loi visant à « sortir la France du piège du narco-trafic », adoptée le 29 avril 2025 par le Parlement, prévoit cette évolution pour favoriser le partage d'information dans un cadre juridique adapté et sécurisé. Enfin, le protocole d'accord signé le 13 juin 2024 entre le garde des Sceaux, ministre de la Justice et les organisations syndicales représentatives de l'administration pénitentiaire à la suite de l'attaque meurtrière d'Incarville, qui a pour principal objectif d'apporter des réponses fortes et rapides aux besoins de sécurité et de protection des agents pénitentiaires dans l'exercice de leurs missions, est actuellement mis en oeuvre avec un suivi très resserré. Il comporte 33 mesures emblématiques sur des thématiques variées. Après une première rencontre en juillet 2024, un deuxième comité de suivi national du protocole Incarville, réunissant l'ensemble du comité de direction de la direction de l'administration pénitentiaire (DAP) et les organisations syndicales signataires, s'est réuni le 9 janvier 2025 pour réaliser un point d'étape sur la bonne mise en oeuvre des mesures du protocole, dont de nombreuses mesures ont d'ores et déjà été finalisées. Plus généralement, la mise en oeuvre des 33 mesures du protocole permet d'abord une amélioration des conditions de travail des agents. Ainsi, d'ici la fin de l'année 2025, 90 sites seront équipés de dispositifs anti-drones (DNCD) et 38 sites munis de dispositifs de brouillage de téléphones portable (DNCI). D'ici la fin du premier trimestre 2025, une doctrine d'emploi permettra de cadrer l'usage des chiens en spécialité stupéfiants. Les directions interrégionales des services pénitentiaires pourront se fournir d'ici la fin de l'année en portiques à ondes millimétriques (POM), afin de lutter contre les stupéfiants et les portables en détention. En ce qui concerne la fourniture de nouveaux véhicules, depuis décembre 2024, 232 véhicules pour la mise à niveau du parc des équipes de sécurité pénitentiaires (ESP) ont été livrés au sein des directions interrégionales. D'ici 2027, l'ensemble de ces équipes seront dotées de nouveaux véhicules. Concernant les pôles de rattachement des extractions judiciaires (PREJ), les neuf directions interrégionales qui en sont dotées seront livrées au premier trimestre 2025, pour un total de 46 nouveaux véhicules. Plus de 1 000 véhicules seront banalisés à la fin du premier trimestre 2025 sur le parc total qui est doté de 1 386 véhicules.
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