Question de Mme DUMAS Catherine (Paris - Les Républicains) publiée le 03/10/2024

Mme Catherine Dumas interroge M. le ministre de l'intérieur sur le risque de prolifération d'armes fabriquées par le biais d'imprimantes 3D, dites « armes fantômes », sur le territoire national.

Elle souligne que les forces de l'ordre ont démantelé, en février 2024, un vaste réseau d'armes fabriquées avec des imprimantes 3D, à la suite d'affaires criminelles.

Elle constate que les imprimantes 3D peuvent aujourd'hui fabriquer très rapidement, et à moindre coût, des pièces détachées en plastique permettant de constituer une arme à feu, à l'aide de tutoriels accessibles très facilement sur des plateformes d'hébergement de vidéo en ligne ou sur le « dark web ».

Elle observe que les saisies d'armes fabriquées par des imprimantes 3D se multiplient partout sur le continent européen depuis quelques mois.

Elle précise que ces armes sont intraçables (sans numéro de série), puisque qu'elles sont fabriquées artisanalement, ce qui inquiète les forces de l'ordre et les enquêteurs.

À l'occasion de cette question, elle permet également de souligner que des pièces détachées (canon, détente) sont disponibles très facilement à l'achat sur internet, notamment sur des sites de revente en ligne et sur les réseaux sociaux.

Elle souhaite par conséquent lui demander si le Gouvernement entend prendre des mesures, en partenariat avec ses partenaires européens, afin de lutter contre ce phénomène sur le territoire national et sur le continent européen

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 05/06/2025

La fabrication additive d'armes, qui nécessitait initialement le recours à des éléments d'armes en métal, seuls à mêmes de supporter la pression d'un tir répété, s'est à la fois popularisée, par les réseaux sociaux, et fiabilisée, avec la possibilité d'impression métallique ou l'ajout de pièces disponibles en commerce de bricolage. Bien que l'impression métallique se développe, elle demeure néanmoins très onéreuse pour une utilisation individuelle et la fabrication additive concerne encore essentiellement des éléments d'armes à feu et non des armes complètes. Elle constitue toutefois une menace émergente, par sa capacité à constituer à terme une nouvelle filière d'approvisionnement des milieux criminels et terroristes, actuellement orientés à titre principal vers les armes manufacturées provenant de zones de conflit ou de cambriolages, dont l'acquisition reste à ce jour plus aisée pour les malfaiteurs. Les forces de sécurité intérieure, en lien avec les services spécialisés de la douane, sont présentes sur l'ensemble du spectre des trafics d'armes et déploient des savoirs faire reconnus, sur le terrain comme dans le cyberespace. Le démantèlement évoqué d'un réseau de fabrication d'armes avec des imprimantes 3D illustre l'action menée. Les services du ministère de l'intérieur sont en effet attentifs à l'évolution de ce phénomène et mènent, à ce titre, un travail de veille, de surveillance et d'échange d'informations aussi bien sur le plan national que dans le cadre des instances européennes. Des discussions sont ainsi engagées au niveau de l'Union européenne pour envisager une approche coordonnée permettant de réglementer la détention et l'usage de fichiers de fabrication d'arme en 3D pour les réserver aux seuls professionnels de l'armurerie. Cette approche rejoint celle de notre réglementation nationale qui n'autorise la fabrication d'arme qu'à la seule profession réglementée d'armurier, sous peine de poursuite pénale, que l'arme soit manufacturée ou imprimée. La gendarmerie nationale constate que les modes de distribution des armes conventionnelles et de celles fabriquées en 3D ont profondément évolué, avec l'utilisation privilégiée des vecteurs de communication préservant l'anonymat des membres (réseau social non coopératif avec les forces de l'ordre ; dark web). La loi 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) a introduit un nouvel article dans le code pénal (art. 323-3-2) qui réprime toute fourniture de service (mise à disposition de plateforme, intermédiaire) ne permettant pas l'identification des auteurs d'actes illicites ou facilitant leurs actes. C'est sur la base de ce nouvel article que plusieurs dossiers visant ces plateformes facilitant les ventes d'armes ont déjà été initiés (armes classiques ou 3D). Par exemple, en matière de trafics d'armes imprimées en 3D, un dossier traité par l'unité nationale cyber (UNC) en février 2024 a ainsi permis la saisie de 8 imprimantes 3D, de 7 armes complètes imprimées en 3D, et de plus de 500 pièces détachées d'armes imprimées en 3D, 11 armes de poing conventionnelles de différents calibres, 13 armes d'épaule et plus de 1 000 munitions également de différents calibres. 3 046 euros ont également été saisis en numéraire. Sur les 14 individus interpellés, 5 ont été placés sous contrôle judiciaire, 6 écroués, et un, localisé en Belgique, fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen. La France travaille étroitement avec ses partenaires de l'Union européenne afin d'harmoniser la réglementation et de renforcer les échanges d'informations sur les saisies d'armes 3D. L'agence Europol joue à ce titre un rôle clé dans la coordination des efforts transnationaux, comme cela a été le cas lors de l'opération de l'UNC pour laquelle les gendarmes ont pu compter sur le soutien de 3 représentants d'Europol et 18 policiers belges. Enfin, diverses formations spécifiques et complémentaires sont dispensées aux forces de sécurité intérieure pour leur permettre de mieux identifier et contrer ces nouvelles formes de criminalité.

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