Question de Mme BROSSEL Colombe (Paris - SER) publiée le 10/10/2024

Mme Colombe Brossel interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères la protection par la France des demandeurs d'asile soudanais. Depuis avril 2023, le Soudan est touché par une guerre qui oppose les forces armées soudanaises (SAF) et les forces de soutien rapide (RSF). Au milieu de ce conflit armé se trouve une population civile victime de violences ciblées, contraignant près de huit millions de personnes à fuir. Une enquête d'Amnesty international a mis en lumière des violations susceptibles d'être qualifiées de « crimes de guerre ». Au Darfour Ouest, des dizaines de milliers de civils sont ciblés en raison de leur appartenance ethnique selon Human rights watch. Dans ce contexte dramatique, la France a procédé en décembre 2023 à l'expulsion d'un Soudanais vers son pays d'origine. Entre octobre 2023 et janvier 2024, plusieurs demandeurs d'asile ont été enfermés, dont six ont été placés en centre de rétention administrative (CRA). Si trois de ces six personnes ont été libérées, elles restent menacées d'un renvoi vers un pays en guerre. Certains juges français prennent ces décisions alors qu'aujourd'hui, aucune zone au Soudan n'est épargnée par une extension du conflit. Compte tenu de la situation sur place, la cour nationale du droit d'asile (CNDA) considère depuis juillet 2023 que l'État de Khartoum et trois des cinq États de la région du Darfour sont en proie à une situation « de violence aveugle d'exceptionnelle intensité ». Elle en tire les conséquences et annule des rejets de demandes d'asile par l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Cette jurisprudence s'applique déjà pour d'autres régions soudanaises, en dehors de Khartoum. Dans une situation de dangerosité extrême, l'application d'une politique migratoire ne peut se faire en dépit du strict respect des droits fondamentaux. C'est pourquoi elle lui demande de préciser la position officielle de la France en matière de protection des demandeurs d'asile soudanais. Elle l'invite à privilégier la seule protection des demandeurs d'asile soudanais.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 12/06/2025

La crise qui a débuté au Soudan en avril 2023 et la dégradation sécuritaire dans ce pays ont conduit l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) à faire évoluer sa pratique décisionnelle. L'Ofpra estime ainsi, depuis le troisième trimestre 2023, qu'un conflit armé est caractérisé, qui génère une violence aveugle sur le territoire soudanais, le plus souvent d'intensité exceptionnelle. A réception d'une demande d'asile émanant d'un ressortissant soudanais, l'Ofpra vérifie tout d'abord la nationalité alléguée et la qualité de civil, puis identifie la région où l'intéressé a le centre de ses intérêts, pour enfin examiner les craintes de persécutions ou d'atteintes graves auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays. Dans tous les cas, l'Ofpra vérifie qu'il n'y a pas de raisons sérieuses de penser que l'intéressé s'est rendu coupable d'exactions antérieurement à sa venue en France, et qu'il ne représente pas une menace grave pour l'ordre public en France, conformément au cadre juridique en vigueur. Il est à noter que la Cour nationale du droit d'asile est encore amenée à examiner des recours portant sur des décisions de l'Ofpra prises avant le déclenchement de la guerre, ce qui peut expliquer en partie l'annulation de certaines décisions de l'Ofpra. Ci-dessous, les données chiffrées de la demande d'asile et du taux de protection de l'Ofpra illustrent l'évolution de la demande d'asile de personnes se déclarant soudanaises et de la pratique décisionnelle de l'Ofpra :


2022

2023

2024

Nombre global de demandes d'asile soudanaises introduites à l'Ofpra

1 947

3 443

5123

Taux de protection de l'Ofpra sur les demandes soudanaises

40,7 %

58,9 %

64 %

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