Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 10/10/2024

M. Guillaume Gontard attire l'attention de Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine sur l'encadrement législatif de l'affectation de logements neufs à des logements saisonniers ou permanents.

Les stations de haute montagne ont un besoin de main d'oeuvre important pour faire vivre leur territoire, tant l'hiver que l'été. Or, d'après l'association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM), 20 % des postes de saisonniers étaient encore vacants deux semaines avant l'ouverture de la saison hivernale 2023-2024 et le nombre de candidatures pour les emplois permanents baisse. Le manque de logements pour les accueillir est une des premières causes de ce manque de personnel.

Or, bien qu'ayant la volonté d'attirer des travailleurs et leur famille sur leur station par la construction de nouveaux logements destinés à l'habitat saisonnier ou permanent - permettant de plus, dans ce dernier cas, de faire vivre la commune à l'année (école, crèche, maison de santé, etc.) - les municipalités se heurtent à un vide législatif et réglementaire.

L'habitat saisonnier ou permanent est une affectation qui ne constitue pas une sous-destination de la destination « habitation » prévue à l'article R 151-27 du code de l'urbanisme. Dès lors, les communes ne peuvent contraindre les opérateurs construisant de nouveaux logements à les affecter à de l'habitat saisonnier ou permanent. Or, le marché des résidences secondaires est souvent bien plus attractif en haute montagne, où ce type de logement représente 90 % du parc. De même, sans appui législatif, la commune n'est pas en mesure de contrôler les changements d'usage des logements.

Pour tenter de pallier ce manque, la commune d'Huez (Isère) a conclu des conventions avec les opérateurs immobiliers pour que les logements construits soient affectés à de l'habitat saisonnier ou permanent. À cela s'ajoutent les directives de mixité sociale du plan local d'urbanisme. Ces conventions permettent à la commune de rendre une part des logements accessibles à des prix abordables pour les travailleurs aux revenus au-dessus des seuils permettant de prétendre à un logement social mais trop faibles pour leur permettre de se loger au prix du marché.

Cependant, aucun de ces dispositifs n'est contraignant. Les propriétaires peuvent donc s'en désengager quand ils le souhaitent et changer l'usage du logement ou le revendre au prix du marché.

Ainsi, il s'interroge sur la révision du code de l'urbanisme qu'il entend mettre en place afin de reconnaître la sous-destination hébergement/logement saisonnier/permanent et d'inscrire la possibilité de conclure des conventions pour garantir cette affectation.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 29/05/2025

Le code de l'urbanisme prévoit la possibilité pour le règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de définir, dans les zones qu'il a délimitées, « les règles concernant la destination et la nature des constructions » qui seront autorisées, « en fonction des situations locales » (cf. article L. 151-9). Parmi les destinations qui peuvent être réglementées par le PLU, figure la destination « habitat » qui est composée des sous-destinations « logement » et « hébergement ». L'arrêté ministériel 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être réglementées par les plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu, modifié par l'arrêté du 22 mars 2023, précise dans son article 2 que la sous-destination « logement » recouvre les « constructions destinées au logement principal, secondaire ou occasionnel des ménages (…). » La définition de cette sous-destination ne fait pas de distinction entre les statuts d'occupation : propriétaire, accédant, locataire, occupant à titre gratuit, et tous les logements quel que soit leur mode de financement. Elle ne fait pas non plus de distinction en termes de temporalité d'occupation du logement, entre une occupation temporaire ou permanente du propriétaire. En effet, l'utilisation d'un logement en résidence principale ou secondaire par son propriétaire peut évoluer au fil du temps, et ce sans pour autant nécessiter de travaux. De plus, qu'il soit situé sur le littoral, en zone de montagne ou dans le reste du territoire, un même immeuble peut comporter une part mixte d'occupation (à titre principal, à titre secondaire, etc), au surplus très fluctuante dans le temps. Or, le PLU qui a vocation à réglementer l'implantation des constructions au moment de la délivrance de l'autorisation d'urbanisme, n'est pas habilité à instaurer un contrôle aussi fin et régulier de l'affectation des logements dans le temps. Une telle distinction en termes de durée d'occupation relève donc davantage des modalités d'occupation que de la destination des constructions. En revanche, s'il ressort du dossier de demande d'autorisation d'urbanisme que l'utilisation du logement principal du propriétaire est destinée à être louée plus de 120 jours par an à une clientèle de passage, et propose des prestations hôtelières au sens du b) du 4° de l'article 261-D du code général des impôts, en tant que meublé de tourisme, la construction relèvera davantage de la sous-destination « autres hébergements touristiques » qui désigne les constructions « autres que les hôtels destinées à accueillir des touristes », et ne pourra être autorisée dans une zone qui n'accueille que la sous-destination « logement ». Par ailleurs, la procédure de changement d'usage prévue par le code de la construction et de l'habitation est un dispositif qui permet de lutter contre la pénurie de logements car sa mise en oeuvre a pour effet de soumettre à autorisation, sous certaines conditions, la transformation d'un logement en un local à autre usage, y compris lorsqu'il s'agit de meublés de tourisme (cf. article L. 631-7 à L. 631-9). A ce propos, de nouveaux dispositifs législatifs ont été récemment mis en place pour permettre aux collectivités de contrôler et réguler l'implantation des logements selon leurs modalités d'occupation, permanente ou saisonnière, qu'il s'agisse de résidences principales ou secondaires, et notamment en cas de changement d'usage d'un logement en meublé de tourisme au sens du I de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme. En effet, la loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024 visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale a notamment introduit dans le code de l'urbanisme la possibilité pour le règlement du PLU des communes où la taxe annuelle sur les logements vacants mentionnée à l'article 232 du code général des impôts est applicable, ou comprenant un taux de résidences secondaires de plus de 20 %, de délimiter, dans les zones urbaines ou à urbaniser, « des secteurs dans lesquels toutes les constructions nouvelles de logements sont à usage exclusif de résidence principale (…) » (cf. nouvel article L. 151-14-1). De nouvelles dispositions sont également prévues en matière de police de l'urbanisme. Ces dispositions législatives fournissent ainsi aux collectivités de nouveaux outils leur permettant de mieux réguler sur leur territoire l'implantation des logements selon leur durée d'occupation, permanente ou temporaire. S'il n'est pas prévu à ce jour de modifier le code de l'urbanisme pour y introduire des dispositions concernant des outils de nature contractuelle, telles que des conventions entre la commune et les opérateurs immobiliers, le Gouvernement reste ouvert à toute proposition permettant de favoriser durablement le logement des saisonniers et l'implication des élus dans la production de ces logements.

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