Question de Mme OLLIVIER Mathilde (Français établis hors de France - GEST) publiée le 31/10/2024
Mme Mathilde Ollivier attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur une difficulté rencontrée par les ressortissants étrangers qui souhaitent obtenir un titre de séjour en qualité de conjoint d'un français.
Aux termes de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), l'étranger marié avec un français peut se voir délivrer un titre de séjour pour motif familial s'il justifie d'une communauté de vie d'au moins six mois et de son entrée régulière sur le territoire.
S'agissant de cette entrée régulière, la sénatrice souhaite mettre en exergue la situation des étrangers munis d'un visa pour entrer en France et qui sont en provenance directe d'un État partie à l'accord Schengen qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.
L'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen impose, dans cette situation, aux personnes munies d'un visa pour entrer et séjourner sur le territoire français de se déclarer aux autorités françaises compétentes dans un délai de trois jours ouvrables à compter de l'entrée sur le territoire français. Le défaut de déclaration peut entrainer le refus de leur titre de séjour au titre de leur mariage assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Ces étrangers se trouvent ainsi en situation de séjour irrégulier alors même qu'ils sont titulaires d'un visa et que les autres conditions tenant au mariage en France, à la communauté de vie et à la nationalité de leur conjoint, sont remplies.
Ils se trouvent donc dans l'obligation de retourner dans leur pays d'origine, réaliser une nouvelle demande de visa, puis revenir sur le territoire français pour reprendre la procédure de déclaration d'entrée puis de demande de titre de séjour. Toutefois, elle remarque que l'article L. 312-1 A du CESEDA empêche la délivrance de visas à l'étranger qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français depuis moins de cinq ans et n'apporte pas la preuve qu'il a quitté le territoire français dans le délai qui lui a été accordé. Dans ces circonstances, les demandeurs, s'ils laissent passer le très court délai de trois jours pour se déclarer aux services compétents et qu'ils ne parviennent pas à rapporter la preuve qu'ils ont exécuté leur obligation de quitter le territoire dans le délai imparti, ne peuvent obtenir à nouveau un visa pour la France pendant cinq ans. Cette situation kafkaïenne bouscule les projets de vie familiaux et professionnels de nombreux couples binationaux. En cela, elle semble contraire au droit de chacun au respect de sa vie privée et familiale consacré par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.
Par conséquent, elle demande au ministre de l'intérieur si ses services sont saisis de cette problématique particulière. Pour la régler, elle interroge le ministre sur la pertinence de mettre en place un dispositif permettant aux étrangers de régulariser leur entrée sur le territoire pendant toute la durée de leur visa.
En outre, Madame la sénatrice Mathilde Ollivier a été alertée de cas dans lesquels les demandeurs de déclaration d'entrée se voyaient refuser cette souscription par les services de police qui n'avaient pas connaissance de leur compétence, notamment lorsque cette démarche est effectué dans les postes proches des frontières terrestres de la France avec d'autres pays de l'UE. De ce fait, Madame la sénatrice demande au ministre de l'Intérieur quelles mesures il compte prendre pour que les services compétents soient mieux informés de leur rôle en la matière.
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Transmise au Ministère de l'intérieur
Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 05/06/2025
La déclaration d'entrée sur le territoire (DET) mentionnée à l'article L. 621-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) précise que l'étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne et qui est en provenance directe d'un État partie à la convention d'application de l'accord de Schengen doit souscrire, lors de son entrée en France métropolitaine, la déclaration mentionnée à l'article 22 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, afin de pouvoir justifier de la régularité de son entrée en France. Il s'agit donc d'une obligation résultant du droit communautaire au titre de l'acquis Schengen. Tous les étrangers en provenance directe d'un État partie à l'accord Schengen ne sont pas soumis à l'obligation de souscrire à la DET. Sont dispensés de cette formalité, en vertu de l'article R 621-4 du CESEDA, les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois et ceux qui sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un État partie à la convention d'application de l'accord de Schengen. Les étrangers soumis à cette formalité peuvent prendre l'attache des services de police et de gendarmerie qui sont habilités à délivrer un récépissé et éventuellement à apposer une mention sur le document de voyage. Cette formalité, qui est exigible à compter du franchissement d'une frontière française, constitue un moyen permettant à l'étranger de justifier de son entrée régulière lorsque celui-ci n'est pas en mesure de la justifier par d'autres moyens. En effet, le défaut de présentation de la DET ne signifie pas que l'étranger est en situation irrégulière en France, si son visa Schengen est encore valable, et n'entraîne pas systématiquement un refus de séjour notamment pour le ressortissant d'un pays tiers (RPT) qui est conjoint de ressortissant français. Le préfet apprécie selon l'ancienneté du mariage ainsi que l'intensité de la vie commune entre le RPT et son conjoint français le caractère disproportionné d'un refus de séjour au regard du droit au respect de la vie privée et familiale visé à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, les ressortissants de pays tiers conjoints de Français ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) peuvent apporter la preuve de l'exécution de cette décision par plusieurs moyens. Il ressort des articles R. 711-1 2° et R. 711-2 du CESEDA que l'OQTF dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers, est réputée exécutée à la date à laquelle a été apposé sur ses documents de voyage le cachet de l'administration lors de sa sortie du territoire. Il peut également justifier de l'exécution de l'OQTF et de sa sortie du territoire en établissant par tout moyen sa présence effective dans le pays de destination, notamment en se présentant personnellement aux représentations consulaires françaises ou à la représentation de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Sauf preuve contraire, il est réputé avoir exécuté la décision portant OQTF à la date à laquelle il s'est ainsi présenté à l'une de ces autorités. En outre, les étrangers munis d'un visa délivré par les autorités consulaires françaises et entrés en France depuis un autre pays de l'espace Schengen ne sont pas assujettis à la présentation d'une DET pour solliciter un titre de séjour, notamment en qualité de conjoint de Français. Il est d'ailleurs précisé à l'article L. 312-3 du CESEDA que le ressortissant de pays tiers conjoint de ressortissant français se voit délivrer de plein droit un visa de long séjour et qu'il ne peut être refusé qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public.
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