Question de Mme BOYER Valérie (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 31/10/2024

Mme Valérie Boyer attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la multiplications des violences sexuelles contre nos aînées. Jeudi 24 octobre 2024, la presse nous apprend qu'un jeune homme est soupçonné d'avoir violé une retraitée de 84 ans, la veille, chez elle à Pont-de-Claix, près de Grenoble.
Au premier jour de l'année 2024, un individu est entré sans effraction par une fenêtre d'une maison d'Ozoir-la-Ferrière en Seine-et-Marne et a violé son habitante, une septuagénaire. Le mari de la victime, en situation de handicap, était présent mais incapable d'intervenir.
Le 3 mai 2023 une femme de 83 ans, handicapée physique et mentale, est victime de viol à son domicile de La Courneuve (93). Ses agresseurs seraient deux Algériens âgés de 29 et 38 ans, en situation irrégulière, dont l'un déjà sous obligation de quitter le territoire (OQTF).
Quimper, Clichy-la-Garenne, Toulouse, Alès, Lorient, au Creusot, Nanterre et tant d'autres communes... depuis plusieurs mois les violences sexuelles contre nos aînées semblent se multiplier dans notre pays.
Comme l'a expliqué dans les médias, notamment Atlantico, Pascal Neveu, directeur de l'Institut Français de la Psychanalyse Active (IFPA) : "depuis 10 ans, des études soulèvent plus de 100 agressions impliquant du personnel hospitalier mais aussi des jeunes qui n'hésitent pas à gravir les murs d'Ehpad et violer des personnes vulnérables. Une enquête fait état d'agressions survenues dans des maisons de retraite situées dans l'Ain, les Yvelines, les Bouches-du-Rhône, le Tarn, la Creuse, l'Hérault, les Deux-Sèvres, en Martinique, en Isère, en Loire-Atlantique. Des faits ont été jugés, d'autres vont l'être prochainement".
Comme l'a expliqué le criminologue Xavier Raufer dans ce même journal, même si ces actes ne sont pas nouveaux, leur multiplication est nouvelle : "nous en sommes à plusieurs de ces viols/agressions par mois ; la plupart commis par des individus bien sûr égarés par leur frustration sexuelle et aussi, issus de pays dans lesquels, selon des cultures tribales-ancestrales, ou religieuses, la femme doit se plier au désir des hommes".
Malheureusement de nombreux criminologues regrettent l'absence de données précises. En effet, selon les services de police, l'index du registre (Etat 4001) ne suffit pas à répondre aux besoins d'information statistique sur la délinquance. La nomen­clature des index, très ancienne (qui remonte à 1972), ne permet pas d'identifier certaines catégories de délinquance apparues récemment, ou que l'on souhaite davantage appréhender aujourd'hui : la cybercriminalité, les violences conjugales, les atteintes du type crimes de haine (racistes, xénophobes, antireligieux, homophobes, sexistes...). Ces crimes et délits se retrouvent répartis dans divers index (escroqueries, coups et blessures volontaires, menaces ou chantage...) mais ne peuvent être isolés pour être quantifiés séparément.
Pour toutes ces raisons, Valérie Boyer souhaiterait obtenir davantage d'informations et d'analyses sur ces violences sexuelles contre nos ainées et sur les agresseurs sous forme d'une cartographie détaillée et précise. Il semblerait qu'il faille également étoffer cette cartographie en y ajoutant le profil des agresseurs (âge, nationalité, motifs, antécédents judiciaires et psychologiques) et des victimes (âge, nationalité, relations avec l'agresseur) afin de pouvoir établir un plan d'actions pour garantir la sécurité des Français.
La représentation nationale doit connaître précisément quelle est la cartographie de cette violence sexuelle pour en tirer les enseignements. Enfin, elle aimerait pouvoir comparer ces crimes avec les années précédentes afin d'établir s'il y a bel et bien une multiplication de ces drames en France, et dans quelles proportions.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 05/06/2025

Protéger les aînés est l'affaire de toute la société, bien au-delà des seules infractions pénales dont ils peuvent être les victimes. La loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l'autonomie comporte un volet sur la prévention et la lutte contre les maltraitances dont peuvent être victimes les personnes qui sont en établissement. Doit également être rappelée la stratégie nationale de lutte contre les maltraitances 2024-2027 lancée en mars 2024 (ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles), notamment pour mieux protéger ceux que le grand âge rend plus vulnérables. Trop souvent, des personnes du troisième âge sont les victimes de faits particulièrement ignobles et révoltants. Tout est mis en oeuvre pour que les enquêtes diligentées permettent d'identifier leurs auteurs et de les présenter à la justice. Concernant les statistiques de la délinquance, le ministère de l'intérieur dispose depuis plusieurs années du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI). Son site internet « Interstats » comporte de très nombreuses études et statistiques, notamment sur les violences sexuelles, avec des données par âge. Ses bilans annuels sur la délinquance enregistrée par les forces de l'ordre comportent également de nombreuses données chiffrées, par âge et par sexe, sur les violences sexuelles. En février 2025 par exemple, a été publié un Info Rapide n° 47 portant sur « Les victimes de violences physiques ou sexuelles enregistrées par les services de sécurité en 2024 ». Cette publication fait apparaître que le nombre de victimes enregistrées pour violences sexuelles pour 1 000 habitants pour les 75 ans et plus est, en 2024, de 0 dans un cadre intrafamilial, et de 0,1 hors cadre familial (tous âges confondus, le nombre est de 0,5 dans un cadre intrafamilial et de 1,3 hors cadre familial). Pour les femmes âgées de 15 à 19 ans, le nombre est de 9,6 victimes hors cadre familial pour 1 000 habitants. Sur le plan méthodologique, le SSMSI dispose depuis 2016 d'outils qui lui permettent d'isoler toutes les infractions, et ses bases de données fournissent des éléments sur les liens entre la victime et l'auteur, sur la nationalité, l'âge, etc. Il existe donc des outils pour mesurer de nombreuses formes de délinquance, par exemple la cybercriminalité (cf. par ex. : Info Rapide n° 48 de mars 2025), les violences intrafamiliales (cf. par ex. : Interstats n° 73 de janvier 2025 sur « Les violences intrafamiliales non conjugales enregistrées par les services de sécurité en 2023 »), les violences conjugales (cf. par ex. : Info Rapide n° 44 de novembre 2024 sur « Les violences conjugales enregistrées par les services de sécurité en 2023 »), les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux (cf. par ex. : Interstats n° 49 de mars 2025), etc. Il doit aussi être noté que toute analyse approfondie de la délinquance implique de croiser les données dites administratives avec les enquêtes dites de victimation, notamment l'enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité. C'est particulièrement le cas en matière de violences sexuelles, pour lesquelles le taux de plainte est faible. À cet égard, la dernière enquête de victimation publiée en novembre 2024 (Vécu et ressenti en matière de sécurité 2023, victimation - délinquance et sentiment d'insécurité) fait apparaître, en matière de violences sexuelles (physiques et non physiques), que 12,1 % des personnes âgées de 18 à 24 ans déclarent en avoir été victimes, et 0,3 % des personnes âgées de 65 à 74 ans. S'agissant des procédures enregistrées par les services de police et les unités de gendarmerie en 2024 (Insécurité et délinquance en 2024, une première photographie, janvier 2025), elles font par exemple apparaître que 2 % des victimes de violences sexuelles ont plus de 60 ans. En 2024, sur un peu plus de 122 000 victimes de violences sexuelles (dont 46 300 de viol ou de tentative de viol), 2 242 ont plus de 60 ans (dont 626 ont été victimes de viol ou de tentative de viol). Parmi les femmes âgées de 75 ans ou plus, on recense 573 victimes de violences sexuelles en 2024, dont 154 de viol ou de tentative de viol. La loi du 8 avril 2024 susmentionnée prévoit la création de cellules de recueil et de traitement des signalements de maltraitance envers les personnes majeures en situation de vulnérabilité. Elles se mettent progressivement en place dans les agences régionales de santé. Le système d'information assurant la traçabilité des faits de maltraitance, et la plateforme téléphonique nationale, prévus également par la loi, seront mis en service en janvier 2026. Les forces de sécurité intérieure (FSI) portent une attention particulière à la lutte contre les agressions de personnes âgées, y compris par des actions de prévention et de sensibilisation. Ainsi, depuis 5 ans, la gendarmerie nationale a déployé progressivement les maisons de protection des familles (MPF) sur l'ensemble du territoire national, avec 101 MPF aujourd'hui actives dans tous les territoires, dans l'Hexagone et outre-mer. Elles ont pour mission d'appuyer dans leur quotidien les unités territoriales dans la prise en charge et l'accompagnement des victimes. Les MPF mènent par ailleurs des actions de prévention et de sensibilisation au profit des seniors. Leurs actions sont complétées par le dispositif des intervenants sociaux en commissariats et gendarmeries (488 ISCG), qui constitue un appui essentiel pour les FSI en matière de détection, d'accueil et de prise en charge des victimes de violences conjugales et sexuelles ainsi que des personnes vulnérables. Parmi les actions de prévention mises en place par les FSI, l'« opération tranquillité seniors » permet de renforcer la surveillance du domicile des personnes âgées qui se sentent isolées, menacées ou simplement inquiètes pour leur sécurité. Des actions de sensibilisation sont régulièrement menées dans les lieux habituellement fréquentés par les seniors afin de rappeler les bons réflexes à adopter, à l'image de la « semaine bleue » à laquelle de nombreux services territoriaux de police et de gendarmerie participent. Des campagnes d'information et de sensibilisation sont également menées avec la diffusion de guides concernant les risques de vols (ex. : vols pas usage de fausse qualité), d'actes malveillants, de cambriolages ou encore relatifs aux dangers d'internet. Ces actions ont notamment lieu lors de réunions publiques, à domicile ou directement au profit d'associations, de clubs ou encore dans les EHPAD. En 2024, 1 500 opérations tranquillité seniors ont été réalisées et plus de 60 000 personnes de plus de 65 ans ont été sensibilisées par des gendarmes. Enfin, la gendarmerie renforce ses partenariats, nationaux comme locaux, pour favoriser les signalements. Des conventions ont été signées avec des associations telles que France Victimes, France Alzheimer et Valentin Hauy (malvoyants). La prévention des agressions, et la préservation de la sureté de chacun, en particulier des plus vulnérables, est une préoccupation constante du ministère de l'intérieur.

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