Question de Mme LINKENHELD Audrey (Nord - SER) publiée le 23/01/2025

Mme Audrey Linkenheld attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur une problématique soulevée par les opérateurs français, notamment ceux situés dans le département du Nord, concernant la refonte de l'arrêté du 9 mai 2006 encadrant l'utilisation des vitamines et minéraux dans les compléments alimentaires.

Cette refonte, prévue pour être mise en oeuvre au courant de l'année 2025, intervient au moment où la Commission européenne procède à l'harmonisation des régulations européennes, avec une mise en application attendue à la fin de l'année 2025. Cela entraînerait pour les entreprises françaises de ce secteur une double reformulation de leurs produits : une première pour se conformer au nouvel arrêté français et une seconde pour répondre aux futures normes européennes, avec des coûts associés pour les entreprises françaises du secteur des compléments alimentaires, estimés entre 70 à 350 millions d'euros. Cette situation risque de nuire à la compétitivité de la filière, notamment dans le Nord, où le secteur des compléments alimentaires est particulièrement dynamique.

Elle souhaite donc savoir pourquoi le Gouvernement entend mettre en oeuvre une telle réforme au niveau national avant même l'harmonisation des régulations européennes, et s'il a mesuré l'impact d'une telle décision sur l'emploi et l'innovation dans ce secteur. Elle sollicite ainsi l'intervention de Madame la Ministre pour suspendre la mise en oeuvre de l'arrêté national jusqu'à la finalisation de l'harmonisation européenne.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 15/05/2025

Les compléments alimentaires sont des denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire habituel : il s'agit donc de produits qui peuvent être consommés par toute personne, sans obligatoirement de contrôle ou de conseil de professionnels de santé. Or certains nutriments, consommés au-delà de certaines teneurs, peuvent comporter des risques sanitaires (soit pour la population générale, soit pour des personnes vulnérables ou sous traitement médical). Les nutriments qui ne présentent pas de tels risques en propre, peuvent toutefois contribuer à fatiguer de façon prématurée le foie ou les reins. Les doses maximales en nutriments (vitamines et minéraux) fixées dans l'arrêté du 9 mai 2006 n'ont jamais été modifiées bien que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) -précédente administration chargée du secteur des compléments alimentaires avant la police sanitaire unique- ait permis une évolution des teneurs maximales admissibles pour certains nutriments, en publiant sur son site internet des lignes directrices jusqu'en janvier 2019. Avec la mise en oeuvre de la police sanitaire unique, la direction générale de l'alimentation (DGAL) a donc, dès 2023, annoncé aux organisations professionnelles du secteur des compléments alimentaires, engager des travaux visant à actualiser ce texte. La méthode suivie a été la suivante : les doses maximales précédemment admises par la DGCCRF ont été intégrées dans un projet d'arrêté (ayant vocation à remplacer l'arrêté de 2006) et l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a été saisie de ce projet de texte en septembre 2023. Sur la base de l'expertise rendue par l'Anses cet été, la DGAL a modifié certaines doses maximales journalières, en concertation avec la direction générale de la santé (DGS), co-signataire du texte, en suivant de façon systématique les recommandations de l'Anses : pour certains nutriments, les doses maximales sont plus faibles que les valeurs actuelles. Fin novembre 2023, soit après la saisine de l'Anses sur le projet de texte révisant l'arrêté « nutriments », les réflexions sur la fixation de doses maximales harmonisées pour les nutriments ont repris au niveau européen, dans le cadre d'un groupe de travail dédié, dont la dernière réunion s'est tenue à Bruxelles le 19 novembre 2024. À ce jour, il n'y a pas de projet de texte européen relativement consensuel, ni de calendrier prévisionnel de publication. Par conséquent, la Commission n'est pas en mesure d'initier la consultation des parties prenantes qu'elle souhaite mener. Ces réflexions ne sont donc pas assurées d'aboutir à moyen terme. D'autant plus que des travaux similaires avaient été conduits entre 2006 et 2009 avant qu'ils ne soient suspendus par la Commission européenne, a priori faute de consensus entre les États membres. Une réunion de concertation a été organisée par la DGAL le 7 novembre 2024 avec l'ensemble des associations représentatives du secteur des compléments alimentaires. À cette occasion, il a été convenu de continuer d'échanger pendant deux mois sur leurs principales sources d'inquiétudes : la diminution des teneurs maximales de certains nutriments pour lesquels l'Anses n'a pu se prononcer concernant leur sécurité (tant dans cet avis que dans les précédents avis rendus sur la base de la procédure « article 18 ») et les mesures transitoires. Ce n'est qu'une fois que les réunions de concertation avec la filière seront terminées que le projet de texte pourra être notifié au titre de la directive (UE) n° 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information (étape indispensable pour que les dispositions soient opposables aux opérateurs et qui suppose d'attendre au minimum trois mois afin d'envisager la publication du texte). Il est de l'intérêt de tous de poursuivre les réflexions pour la mise à jour de l'arrêté relatif aux nutriments dans les compléments alimentaires, tant pour une question de transparence (accessibilité de la règlementation pour tous les opérateurs), de sécurité sanitaire, que pour porter les teneurs françaises en nutriments auprès de la Commission européenne dans le cadre des négociations à venir (sous réserve que ces travaux ne soient pas de nouveau suspendus).

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