Question de M. KHALIFÉ Khalifé (Moselle - Les Républicains-A) publiée le 13/02/2025

M. Khalifé Khalifé attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur la nécessité de contrôle plus strict de la qualité de l'eau potable en France en raison de la présence d'acide trifluoroacétique (TFA), notamment à Paris.

D'après une étude commandée par les associations Générations Futures et l'UFC-Que Choisir, menée sur l'eau du robinet de 30 communes françaises par des laboratoires certifiés, la molécule TFA est présente dans 24 d'entre elles, avec une forte concentration dans des points de distribution du réseau d'eau à Moussac (département du Gard), à Paris et à Buxerolles (département de la Vienne). Dans le 10e arrondissement de Paris, la molécule TFA s'élève à 6 200 nanogrammes par litre, soit un niveau préoccupant si l'on se base sur le seuil de la qualité fixé pour des résidus de pesticides à risque (100 ng/l).

Contrairement à d'autres pays européens, la France n'a pas établi de seuil de référence pour la molécule TFA. L'absence de données précises sur sa dangerosité est préoccupante, d'autant plus qu'il s'agit d'un résidu de l'herbicide flufenacet, classé le 27 septembre 2024 comme perturbateur endocrinien par l'Agence européenne de contrôle des pesticides. Massivement utilisé sur les cultures céréalières en Europe, son usage en France est en forte hausse, passant de 100 tonnes en 2008 à 911 tonnes en 2022. Cette augmentation pourrait expliquer sa présence accrue dans les eaux souterraines et l'eau potable.

L'absence de normes françaises spécifiques compromet la consommation des français. Le TFA, pourtant classé parmi les polluants éternels, ne figure pas parmi les 20 PFAS (substances per- et polyfluoroalkylées) qui seront intégrés aux contrôles sanitaires réglementaires à partir du 1er janvier 2026. Pourtant, une fois épandu, le flufenacet se désagrège progressivement en TFA, une molécule composée d'atomes de carbone et du fluor lui conférant des propriétés antiadhésives, imperméabilisantes et résistantes aux hautes températures. Ces caractéristiques le rendent particulièrement difficile à éliminer, favorisant son accumulation dans l'organisme via l'alimentation et l'eau potable.

En conséquence, il l'interroge sur les actions concrètes envisagées par le Gouvernement concernant la contamination au TFA des eaux de Paris, au-delà des mesures de prévention déjà engagées par l'agence Eau de Paris, pour remédier à l'absence de régulation de la molécule TFA.

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Transmise au Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins


Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins publiée le 26/06/2025

L'attention du ministre chargé de la santé est appelée sur les composés perfluorés ou PFAS et notamment la contamination des eaux destinées à la consommation humaine (EDCH) par ces substances persistantes et toxiques en particulier par l'acide trifluoroacétique (TFA). Le TFA est classé comme PFAS selon la définition de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) et reconnu comme tel par l'Union européenne. Toutefois, le TFA ne fait pas partie de la somme des 20 PFAS prévus par la directive européenne n° 2020/2184 du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Aussi, les mesures mises en oeuvre par la Direction générale de la santé (DGS) à ce stade sont les suivantes. La DGS a mandaté le laboratoire d'hydrologie de Nancy de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) pour mener une campagne nationale exploratoire sur les PFAS sur la période 2023-2026. 34 PFAS sont recherchés sur plusieurs centaines d'échantillons. Parmi les 34 PFAS, sont intégrés les 20 PFAS issus de la directive européenne ainsi que d'autres PFAS dits « à chaîne courte » dont le TFA. Cette campagne prospective permettra de développer et tester les capacités analytiques des laboratoires et de prioriser les expertises sanitaires menées par l'ANSES pour la fixation de valeurs sanitaires. Les résultats sont attendus mi-2025. S'agissant des mesures de gestion d'ores et déjà applicables, à ce stade et compte tenu des connaissances disponibles, la DGS retient le seuil sanitaire de 60 µg/L de TFA dans l'eau en s'appuyant sur les modalités de gestion adoptées en Allemagne. Cette recommandation a été formalisée dans l'instruction N° DGS/EA4/2025/22 du 19 février 2025 relative à la gestion des risques sanitaires liés à la présence de PFAS dans les EDCH, à l'exclusion des eaux conditionnées. D'un point de vue sanitaire, ce n'est pas tant l'origine de la substance (dégradation de pesticides, dégradation de gaz fluorés utilisés en tant que fluides frigorigènes, rejets industriels, etc.) par ailleurs difficile à déterminer qui importe, que le seuil sanitaire appliqué pour la gérer au regard du danger intrinsèque de la substance (le seuil de 60 µg/L est à ce stade utilisé en France pour la gestion, que la présence de TFA soit liée à un rejet industriel ou à la dégradation d'un pesticide). La DGS rappelle par ailleurs, qu'elle a saisi l'ANSES afin de définir des valeurs sanitaires dans l'eau pour les 20 PFAS de la Directive européenne. S'agissant de la définition d'une valeur sanitaire pour le TFA, l'ANSES a renvoyé vers les travaux en cours de l'autorité européenne de sécurité des aliments qui devraient aboutir courant 2025. A noter par ailleurs que la Commission européenne a saisi de son côté l'Organisation mondiale de la santé pour mener une évaluation des risques liés aux PFAS dont le TFA dans l'eau. Ces travaux pourront faire évoluer la valeur sanitaire retenue au regard des dernières connaissances scientifiques disponibles.

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