Question de Mme APOURCEAU-POLY Cathy (Pas-de-Calais - CRCE-K) publiée le 27/02/2025

Mme Cathy Apourceau-Poly interroge M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice sur les responsabilités et les conséquences de ces responsabilités concernant la production et la distribution d'amiante, mais aussi et surtout sur le délai d'interdiction de cette fibre tueuse comme matériau de construction ou dans les équipements de protection.
En effet, si c'est en 1977 que l'amiante a été reconnue cancérigène par l'Organisation mondiale de la santé, il aura fallu attendre 20 ans, soit 1997 pour que la France l'interdise effectivement. Pourtant, l'amiante, ce sont plus de 120 000 victimes connues et des dizaines de milliers à venir, ce sont autant d'agonie pour les malades atteint du cancer et une anxiété pour ceux qui n'ont pas encore développé de séquelles à cette exposition.
La justice s'est prononcée pour un non-lieu dans l'affaire Eternit, considérant que les responsabilités individuelles ne pouvaient pas être établies. De même, alors que rapport sénatorial de 2005 « Le drame de l'amiante en France : comprendre, mieux réparer, en tirer des leçons pour l'avenir. » a conclu que le Comité permanent amiante (CPA) avait agi comme un « lobby pro-amiante » retardant l'interdiction de cette matière, il n'y a pas eu de condamnations pour les acteurs de ce CPA.
Elle interroge donc le garde des sceaux pour savoir s'il entend constituer un pôle d'instruction aux moyens étendus pour faire toute la lumière sur le drame de l'amiante afin de refermer enfin cette plaie béante dans l'histoire sanitaire et sociale de notre pays.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 21/08/2025

Prenant toute la mesure des souffrances des victimes de l'exposition à l'amiante, M. le ministre d'État, garde des Sceaux, ministre de la Justice, partage la légitime préoccupation de voir les procédures judiciaires engagées en ce domaine traitées avec toute l'attention et l'efficacité requises. Depuis 1996, d'importants moyens ont été mis en oeuvre, dans un souci de bonne administration de la justice, afin d'aboutir au traitement des plaintes déposées par les victimes de l'amiante. Les dossiers d'exposition à l'amiante sont en effet devenus l'une des priorités des pôles de santé publique et de l'environnement de Paris et Marseille, tant du côté du siège que du parquet, étant rappelé que ces pôles ont vu augmenter leurs moyens de manière constante depuis leur installation en 2003. A la fin du mois de septembre 2024, ces deux pôles avaient eu à connaître de 76 procédures relatives à l'exposition à l'amiante depuis leur création, dont 33 étaient toujours en cours. Parallèlement, les moyens d'enquête ont été durablement renforcés. L'Office central de lutte contre les atteintes environnementales et la santé publique (OCLAESP), principal service d'enquête saisi sur ce contentieux, dispose désormais de dix détachements sur l'ensemble du territoire, qui sont tous en mesure de traiter des procédures relatives à l'exposition à l'amiante. En complément, la gendarmerie nationale a spécialement formé de multiples enquêteurs à ce type d'infractions, qui sont titulaires de qualifications spécifiques en la matière : au sein de l'OCLAESP, mais également au sein d'autres unités ou services, lesquels peuvent être saisis par les magistrats afin d'apporter leur expertise aux enquêtes pénales. Enfin, depuis 2022, l'OCLAESP a développé une capacité d'engagement sur le terrain capable de mener des investigations et constatations en milieu dégradé en liens très étroits avec la Force nationale nucléaire radiologique biologique chimique (F2NRBC) et l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). La mobilisation de l'autorité judiciaire sur ce sujet reste donc entière. A toutes fins utiles, il est rappelé que les victimes des conséquences d'une exposition à l'amiante, qu'elle soit professionnelle ou environnementale, ainsi que leurs ayant droits en cas de décès, ont la faculté de saisir le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) d'une demande d'indemnisation de leurs préjudices.

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