Question de M. CANÉVET Michel (Finistère - UC) publiée le 13/03/2025
M. Michel Canévet attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire concernant le secteur concurrentiel de la production de tomates.
La France est une nation agricole qui, depuis longtemps, contribue à la satisfaction de sa population. Or, depuis 2012, avec la signature de l'accord commercial Union européenne - Maroc, qui n'a jamais été renégocié, le secteur des tomates est notamment touché par une concurrence « déloyale » pour les maraîchers français, inquiets de cette situation.
En effet, les tomates sont devenues la principale exportation agricole du Maroc vers la France : environ 395 000 tonnes de tomates sont importées chaque année, dont 285 000 tonnes bénéficient de droits de douane nuls. L'allègement des taxes profite surtout au segment des tomates cerises, comme les Azura vendues à 99 centimes dans les supermarchés français, c'est à dire environ 4 euros le kilo contre 5 euros pour des tomates cerise origine France.
Aujourd'hui, les productions françaises de tomates sont très impactées notamment dans les principales régions productrices : Bretagne, Sud-est et Sud-ouest. Concrètement, le Maroc bénéficie d'avantages concurrentiels importants : main-d'oeuvre à faible coût et droits de douanes favorables. De plus, 36 % des volumes annuels de tomates consommées en France sont importées. L'année dernière, la production française de tomates était d'environ 475 500 tonnes, comparable donc, avec l'import de tomates marocaines en France. Et, qui de plus est, soumise à des normes plus strictes.
Ces accords de libre-échange donnent un avantage bien distinct et inégal à la production de tomates marocaines vis-à-vis des maraîchers français. Il apparaît donc nécessaire de rééquilibrer ces accords, pour que les productions françaises sur le marché des tomates ne soient plus pénalisées par la concurrence marocaine.
Aussi, il lui demande quelles sont les mesures de protection que le Gouvernement envisage de mettre en place pour rééquilibrer les accords et réguler le problème de concurrence sur le marché des tomates entre le Maroc et la France.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 18/09/2025
La souveraineté alimentaire constitue une priorité de l'action du Gouvernement et l'axe transversal de la politique conduite au ministère chargé de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Cette priorité, ainsi que le constat que la moitié des fruits et légumes consommés en France sont issus de l'importation, ont conduit à l'élaboration d'un plan de souveraineté pour la filière fruits et légumes. Celui-ci a été annoncé lors de l'édition 2023 du salon international de l'agriculture (SIA). Il a pour objectif de gagner cinq points de souveraineté en fruits et légumes dès 2030, et d'enclencher une hausse tendancielle de dix points à horizon 2035. Ce plan a bénéficié des moyens du programme France 2030 qui ont permis de mobiliser, dès 2023, 200 millions d'euros en faveur de la filière fruits et légumes, notamment pour réaliser des investissements et mener des actions de recherche, de développement et d'innovation. Concernant les importations de tomates marocaines, une mission du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a été menée fin 2024 dans le but de mieux connaître et d'objectiver les flux physiques au sein de la filière, et en particulier d'évaluer la proportion de tomates importées puis réexportées depuis la France, notamment vers le Royaume-Uni et l'Union européenne (UE). Si la tomate est un produit très apprécié des français, avec une consommation annuelle de près de 700 000 tonnes (t) (sur la campagne 2022/2023), la production française (estimée à un peu moins de 480 700 t en 2024) ne suffit pas à approvisionner le marché national. Le marché français de la tomate est ainsi alimenté par des produits d'importation, notamment durant la période de novembre à avril, en provenance du Maroc et d'Espagne. Par ailleurs, la France a exporté près de 300 000 t de tomates en 2023, à 95 % vers d'autres pays de l'UE. Il s'agirait en grande majorité de réexportations de tomates marocaines, en raison de l'effet « Perpignan », du nom de la plateforme logistique routière internationale de Perpignan-Saint Charles, véritable « hub » de dédouanement, d'éclatement et de réexpédition des fruits et légumes dans l'UE. L'accord de 2012 entre l'UE et le Maroc relatif aux mesures de libéralisation réciproques exclut d'une libéralisation totale des échanges une série de produits sensibles, notamment en matière agricole, dont les tomates. En particulier, à ce titre, les importations de tomates fraîches en provenance du Maroc sont régies par un système de contingents tarifaires ainsi que par des prix d'entrée minimum et des droits de douane spécifiques correspondants. Il convient de noter que l'UE, ainsi que la France, tirent nombre d'avantages de cet accord. Compte tenu du risque de remise en cause de ces avantages, l'UE n'est à ce jour a priori pas favorable à la réouverture de cet accord. La voie d'une renégociation de cet accord d'association, sans être exclue, n'apparaît donc ni aisée, ni forcément souhaitable car pas nécessairement favorable aux intérêts nationaux. Dans ce cadre, la voie privilégiée par les professionnels français est de rechercher une solution avec leurs homologues marocains qui tienne compte des contraintes des deux parties, et réponde aux attentes respectives par des mesures concrètes. De son côté, le ministère chargé de l'agriculture veille à la bonne tenue de ces discussions et à ce que les échanges entrepris par les professionnels aboutissent à des résultats concrets dans les meilleurs délais.
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