Question de M. WEBER Michaël (Moselle - SER) publiée le 03/04/2025

M. Michaël Weber attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la coordination des régimes de sécurité sociale appliquant le principe de la lex loci laboris aux prestations de chômage des travailleurs frontaliers.

Dans la législation actuelle, il revient à l'État de résidence de verser les prestations chômage et d'accompagner le retour à l'emploi pour les travailleurs frontaliers au chômage. Les associations de travailleurs frontaliers estiment que cette disposition est satisfaisante et cohérente pour garantir au mieux les droits sociaux des travailleurs frontaliers, dont le centre d'intérêt principal est le pays de résidence.

Or, la présidence polonaise du Conseil de l'Union européenne (UE) a annoncé, jeudi 16 janvier 2025, relancer les travaux sur la révision du règlement 833/2004 de coordination des systèmes de sécurité sociale. Ce projet de révision porté initialement par la Commission européenne en décembre 2016, prévoit notamment que le dernier pays d'emploi devienne compétent pour le versement des allocations de chômage.
Cette décision, si elle était actée, nuirait gravement à l'intérêt des travailleurs frontaliers et rendrait plus complexe l'accès à leurs droits sociaux. Cette mesure aurait, en effet, pour conséquence de contraindre les frontaliers en recherche d'emploi à de longs déplacements depuis leur domicile pour s'inscrire dans l'agence de travail étrangère qui deviendrait, dès lors, seule compétente pour la gestion des allocations chômage. En outre, la barrière de la langue dans certains pays transfrontaliers comme l'Allemagne rendrait, de facto, plus difficile, voire impossible, les formations et reconversions professionnelles. Les travailleurs âgés, en fin de carrière, ont toutes les chances de se retrouver dans la misère après épuisement, par exemple, des allocations allemandes et luxembourgeoises, le maintien des droits n'étant plus assuré. En cas de litige avec l'agence de travail, les frontaliers seraient contraints de saisir des tribunaux étrangers, rendant la procédure plus complexe et entraînant des coûts importants. Un frontalier qui exercerait une double activité dans deux pays transfrontaliers différents se retrouverait, par ailleurs, dans une situation administrative compliquée, ne sachant plus vers quel État se retourner pour le versement de ses prestations. Enfin un travailleur licencié dans une pays transfrontalier et qui souhaite entreprendre un projet de reconversion professionnel sur le territoire français, n'aurait aucun intérêt à dépendre d'une agence pour l'emploi étrangère.
Michaël Weber rappelle que le règlement européen a vocation à garantir l'accès aux droits sociaux et préserver les intérêts des travailleurs et non l'intérêt financier des États.
Il estime que la problématique, réelle, de la compensation financière de l'État qui a perçu les contributions sociales vers celui de résidence qui verse les prestations de chômage, doit se régler par des conventions fiscales ou des accords bilatéraux entre les États membres et ne doit pas se faire au détriment de l'intérêt des travailleurs transfrontaliers.
Il lui demande de bien vouloir garantir que la révision du règlement européen portant sur la coordination des régimes de sécurité sociale ne portera pas atteinte aux droits des travailleurs frontaliers, et de clarifier la position de la France sur l'application de la législation de l'État de résidence en ce qui concerne les travailleurs frontaliers au chômage, que les associations de travailleurs frontaliers estiment nécessaire de préserver.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 19/06/2025

La présidence polonaise du Conseil de l'Union européenne a souhaité relancer les travaux relatifs à la révision du règlement relatif à la coordination des systèmes de sécurité sociale. Dans ce cadre, un accord a été trouvé au sein du Comité des représentants permanents (Coreper) le 11 avril dernier. Cet accord prévoit un transfert de compétence de l'indemnisation chômage de l'Etat de résidence vers l'Etat d'emploi après une période d'affiliation comprise entre 18 et 22 semaines (soit entre 5 et 6 mois) ainsi qu'une période d'exportation de 6 mois pour l'ensemble des travailleurs mobiles. Ainsi, si le transfert de compétence est en effet prévu, il interviendra à la suite d'une période d'affiliation préalablement fixée et ne concernera donc que les travailleurs mobiles de longue durée, assurant dès lors l'harmonisation du dispositif et une plus juste répartition des charges entre l'Etat d'activité et l'Etat de résidence. En outre le texte de compromis prévoit que tout demandeur d'emploi qui souhaite élargir sa recherche d'emploi dans un autre Etat membre que celui où il a des droits ouverts, pourra exporter ses droits pour une durée de six mois (et non plus trois mois comme prévu actuellement). Ce compromis, jugé équilibré, a été soutenu par les autorités françaises. En effet, la mise en place d'une déclaration préalable obligatoire ainsi que les mécanismes d'affiliation et d'export permettent de garantir un niveau de protection élevé aux travailleurs, y compris frontaliers. Il assure également une répartition juste et équitable de la charge financière entre les États membres, charge qui s'élève à ce jour à près d'un milliard d'euros par an pour la France. Les autorités françaises sont pleinement engagées en vue de l'obtention d'un accord et demeureront attentives à ce que cet équilibre soit conservé, en conformité avec les objectifs poursuivis par la révision qui vise à faciliter l'exercice des droits des citoyens et une répartition juste et équitable de la charge financière entre les États membres.

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