Question de Mme MULLER-BRONN Laurence (Bas-Rhin - Les Républicains-A) publiée le 10/04/2025
Mme Laurence Muller-Bronn attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur l'absence de publication du rapport d'activités de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), qui a été annoncé à plusieurs reprises par le chef de la mission - d'abord pour novembre 2024, puis pour la fin d'année 2024 et enfin pour le début de l'année 2025 - et qui n'est toujours pas publié à ce jour. Cette absence de publication est d'autant plus problématique que les dernières données disponibles datent de l'année 2021, publiées en 2022, et ne permettent donc pas de caractériser les dérives sectaires actuelles ni d'évaluer objectivement leur évolution dans le domaine de la santé. Pourtant, si l'on en croit le dernier rapport de la Miviludes de 2022, c'est dans le domaine de la santé que les risques de dérives sectaires auraient particulièrement augmenté, affirmation pourtant contredite par les données de ses précédents rapports, qui montrent une stabilité des saisines depuis 2017, sans majoration après la pandémie.
C'est également sur la foi de ce constat alarmant que le Gouvernement avait engagé la procédure accélérée sur le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires, malgré toutes les réserves du Conseil d'État, ainsi que celles du Sénat sur l'article 4 (devenu article 12 de la loi n° 2024-420 du 10 mai 2024 visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes), inutilement répressif et jetant un discrédit abusif sur les pratiques de soins non conventionnelles. Par conséquent, au regard des arguments de la Miviludes qui sous-tendent l'adoption de la loi précitée du 10 mai 2024, elle s'étonne du retard accumulé dans la publication de données de cette importance et elle lui demande donc de bien vouloir lui indiquer à quelle date la Miviludes envisage de publier son rapport d'activité.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 05/06/2025
La sortie du rapport d'activité de la Miviludes 2022-2024 a fait l'objet d'une conférence de presse par François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, le 8 avril 2025. Dans ce rapport, il est notamment indiqué que, depuis 2015, les signalements et demandes d'informations adressés à la Miviludes n'ont cessé d'augmenter, avec une accélération depuis la crise sanitaire : de 2160 en 2015, à 3008 en 2020, puis 4 571 en 2024 (soit plus qu'un doublement : + 110 % depuis 2015 ; + 50 % depuis 2020). Cependant cette augmentation très importante du nombre de signalements et de demandes d'informations est corroborée par les informations concordantes des services de l'État et par les indicateurs des associations spécialisées qui confirment être sollicitées de manière croissante par des familles, des proches d'adeptes et par des adeptes eux-mêmes. Les dérives sectaires, qui n'épargnent aucune région, ni de l'Hexagone ni de l'Outre-mer, peuvent concerner des zones urbaines tout autant que des zones rurales. Les dérives sectaires peuvent affecter tous les domaines de la vie sociale. Les signalements et demandes d'informations à la Miviludes se répartissent de la manière suivante : un tiers (et même plus qu'un tiers, 37 %) dans le domaine de la santé et du bien-être, un tiers dans le domaine des différentes spiritualités et des cultes (35 %), et le dernier tiers, pour les autres secteurs où sont constatées des dérives sectaires : coaching, éducation, formation professionnelle, développement personnel, et, à la marge, des mouvements à caractère sectaire, complotisme, séparatisme et autres formes d'engagement radical. Dans le domaine de la santé, 81 % des faits portés à la connaissance de la Miviludes visent des « pseudothérapeutes », c'est-à-dire des personnes qui ne disposent d'aucun diplôme reconnu par l'État, qui mettent en oeuvre des pratiques le plus souvent non éprouvées et qui ne sont soumis à aucune norme déontologique qui puisse être sanctionnée par un ordre professionnel. Dans 19 % des cas, les pratiques déviantes signalées sont le fait de professionnels de santé (médecins ou infirmiers en exercice, osthéopathes, etc.), psychothérapeutes ou psychologues. Ces constats justifient les partenariats passés entre la Miviludes et tous les ordres des professionnels de santé. Pour rappel, les dérives sectaires entraînent inévitablement des détournements des parcours de soins voire des ruptures de soins, qui concernent le plus souvent des pathologies graves, particulièrement le cancer, qui concentre une majorité de signalements et demandes d'informations à la Miviludes, dans le domaine de la santé, mais également des pratiques qui peuvent être dangereuses, comme le jeûne, ou les soins en matière de santé mentale.
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