Question de M. BUVAL Frédéric (Martinique - RDPI-A) publiée le 03/04/2025
M. Frédéric Buval souhaite interroger Mme la ministre de la culture concernant la non ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la France. La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, adoptée par le Conseil de l'Europe en 1992, vise à protéger et à promouvoir les langues régionales au sein des États membres. La France, bien qu'ayant signé la Charte en 1999, ne l'a toujours pas ratifiée, ce qui empêche la mise en oeuvre de ses dispositions sur le territoire national, puisque la charte encourage l'utilisation des langues régionales dans l'éducation, les médias, et les institutions publiques. De ce fait, la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires est un sujet qui suscite beaucoup d'attente, notamment pour la préservation et la valorisation du créole. Le créole est une langue régionale française parlée au quotidien par des millions de personnes des territoires d'outre-mer et fait partie de ces langues dont la survie et la transmission sont essentielles pour la diversité culturelle de notre pays. Il est utilisé pour transmettre des savoirs, des traditions et des pratiques culturelles, notamment dans la musique, la poésie et les arts.
En 2010, l'UNESCO a même inscrit le créole sur la liste des langues patrimoniales mondiales dans le cadre de son programme « Mémoire du monde ». La ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires pourrait donc offrir une opportunité pour renforcer la place du créole, en assurant sa préservation et sa transmission tout en respectant l'unité nationale de la langue française. Or, si certains soulèvent l'obstacle constitutionnel, et notamment le principe d'indivisibilité de la République prévu à l'article 2 de la Constitution, qui dispose que « la langue de la République est le français », il se trouve que l'article 75-1 de la même Constitution reconnaît les langues régionales comme faisant partie du patrimoine de la France.
Aussi, il s'agirait de trouver le juste équilibre pour protéger et promouvoir les langues régionales à travers un ensemble de mesures qui respectent à la fois les droits individuels et collectifs, sans entrer en contradiction avec la place du français au centre, et comme fondement de notre modèle républicain.
Ainsi, il souhaite savoir comment le Gouvernement compte concrètement traduire cette reconnaissance dans les politiques publiques, et savoir quelles solutions pourraient être envisagées pour surmonter les obstacles, liés à la ratification de la Charte, notamment en termes de modifications législatives ou constitutionnelles.
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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé du travail et de l'emploi publiée le 21/05/2025
Réponse apportée en séance publique le 20/05/2025
M. le président. La parole est à M. Frédéric Buval, auteur de la question n° 429, adressée à Mme la ministre de la culture.
M. Frédéric Buval. Ma question concerne la non-ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires par la France. Adoptée par le Conseil de l'Europe en 1992, cette charte vise à protéger et à promouvoir les langues régionales au sein des États membres.
Bien que la France l'ait signée en 1999, elle ne l'a toujours pas ratifiée, ce qui empêche malheureusement la mise en oeuvre de ses dispositions sur le territoire national, la Charte encourageant notamment l'utilisation des langues régionales dans l'éducation, les médias et les institutions publiques.
Cette ratification suscite beaucoup d'attentes, notamment pour la préservation et la valorisation du créole. Cette langue régionale française, parlée au quotidien par des millions de personnes dans les territoires d'outre-mer, fait partie de ces langues dont la survie et la transmission sont essentielles pour la diversité culturelle de notre pays.
Le créole est utilisé pour transmettre des savoirs, des traditions et des pratiques culturelles, notamment dans la musique, la poésie et les arts. En 2010, l'Unesco l'a même inscrit dans la liste des langues patrimoniales mondiales, dans le cadre de son programme Mémoire du monde.
La ratification de la Charte pourrait donc offrir une opportunité de renforcer la place du créole, d'assurer sa préservation et sa transmission, tout en respectant l'unité nationale de la langue française.
Si certains soulèvent l'obstacle constitutionnel et notamment le principe d'indivisibilité de la République garanti par l'article 2 de la Constitution, qui dispose que « la langue de la République est le français », l'article 75-1 de la même Constitution reconnaît que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Il s'agit donc de trouver un juste équilibre permettant de protéger et de promouvoir les langues régionales, via un ensemble de mesures respectant les droits individuels et collectifs, sans pour autant remettre en cause la place centrale du français, fondement de notre modèle républicain. Ma question est simple, madame la ministre : comment le Gouvernement compte-t-il traduire concrètement cette reconnaissance dans ses politiques publiques et quelles solutions pourrait-on envisager pour surmonter les obstacles à la ratification de la Charte, notamment en matière législative ou constitutionnelle ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Buval, vous avez raison, la France n'a pas ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, mais elle s'efforce d'appliquer pleinement les trente-neuf engagements qu'elle a pris au moment de la signature de cette convention, qui concernent l'enseignement, la culture, les médias, la vie sociale et économique ou les services publics. Nous parlons en effet de langues vivantes et répandues, en particulier dans votre département, monsieur le sénateur.
Le veto du Conseil constitutionnel à la ratification de cette charte portait précisément sur les principes d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi, d'unicité du peuple français et d'usage officiel de la langue française, non sur l'ensemble du texte. Dans ce cadre, le Gouvernement met tout en oeuvre pour que nos politiques publiques soient aussi au service de la diversité culturelle et linguistique.
Au cours des dernières années, faut-il le rappeler ? une dynamique nouvelle a vu le jour, d'abord grâce à l'adoption de la loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, dite loi Molac, puis avec la création en 2022 du Conseil national des langues et cultures régionales, mais également avec les dispositifs État-régions, notamment la signature d'un pacte linguistique entre le ministère de la culture et La Réunion en 2023.
En outre, les états généraux du multilinguisme outre-mer permettent régulièrement des avancées dans les champs sociaux, culturels, numériques et éducatifs. Le dialogue avec les collectivités et les élus pour la promotion des langues régionales est constant et a été soutenu budgétairement avec volontarisme, au moyen d'une enveloppe de 900 000 euros jusqu'en 2022, puis de 2 millions d'euros par an.
Nous continuons donc de faire vivre le plurilinguisme dans le respect de l'unicité de la nation française, monsieur le sénateur.
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