Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 01/05/2025
Question posée en séance publique le 30/04/2025
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, vendredi 25 avril, Aboubakar Cissé, fidèle musulman, était mortellement poignardé à quarante reprises dans une mosquée, alors qu'il croyait transmettre le rite de la prière à son infâme assassin.
Monsieur le président, je vous remercie d'avoir changé d'avis et d'avoir concédé un moment de recueillement : cela était important.
Car, de la profanation d'un sanctuaire maculé du sang d'un innocent jusqu'à la duperie haineuse de l'assassin, tout dans cet acte est profondément révoltant. À la famille et aux proches d'Aboubakar Cissé, nous adressons nos condoléances les plus émues.
Monsieur le Premier ministre, vous avez choisi des mots justes pour qualifier l'assassinat islamophobe d'Aboubakar Cissé ; vous avez également entendu la souffrance, la peur et le sentiment de relégation exprimés par nos compatriotes musulmans depuis vendredi ; ce sentiment, partagé sur nos travées, que les plus hautes autorités de l'État, à commencer par le ministre de l'intérieur et des cultes, n'ont pas exprimé une émotion à la hauteur du supplément de violence symbolique que représente l'assassinat d'un fidèle dans une mosquée (Huées et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. - M. Akli Mellouli applaudit.) ; que les plus hautes autorités de l'État n'ont pas pris toute la mesure de la gravité inouïe de cet attentat.
L'histoire de France, tout comme l'histoire du monde, enseigne pourtant qu'aucune guerre de religion n'a jamais produit autre chose que de la haine et de la désolation. La France en a tiré la conclusion la plus exemplaire qui soit en inventant la laïcité, définie par la loi de tolérance et de liberté de 1905.
Monsieur le Premier ministre, vous avez justement rappelé hier à l'Assemblée nationale un principe fondamental : « la loi protège la foi ».
Dès lors, qu'allez-vous faire afin que cesse, notamment au sein du Gouvernement et des hémicycles parlementaires, cette instrumentalisation incessante de la laïcité visant à stigmatiser l'islam et les musulmans ?
Qu'allez-vous faire pour lutter concrètement contre la montée de l'islamophobie, avant que d'autres drames ne surviennent ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Roger Karoutchi. Ils osent tout, c'est insupportable !
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Réponse du Premier ministre publiée le 01/05/2025
Réponse apportée en séance publique le 30/04/2025
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. François Bayrou, Premier ministre. Monsieur le président Gontard, je puis vous assurer que l'ensemble des responsables publics, au sein de l'exécutif comme, je le crois, au sein de nos assemblées, partage la même certitude, celle que vous venez d'exprimer et que j'ai moi-même défendue dans plusieurs ouvrages sur les guerres de religion : là se trouve un démon jamais endormi, un danger perpétuel qui ne cesse de se réveiller, en temps de crise, singulièrement. Son expression se résume très simplement et très clairement : « L'autre est un ennemi. »
Or nous partageons tous cette maxime que vous avez rappelée et que je cite souvent : « La loi protège la foi, mais la foi ne fait pas la loi. »
Nous partageons l'idée, non seulement de la tolérance - et j'ai écrit sur l'édit de Nantes, comme vous le savez -, mais, au-delà même, de la compréhension mutuelle ; nous avons la certitude que nous ne sommes pas des étrangers les uns aux autres, que nous avons à construire ensemble.
Tous nos compatriotes musulmans, tous nos compatriotes juifs, tous nos compatriotes chrétiens, tous nos compatriotes agnostiques, tous nos compatriotes athées, et ceux d'autres sensibilités encore, ont droit de cité. J'ai même ajouté hier que nous devrions approfondir l'idée d'un devoir de cité. Nous avons, collectivement, le devoir de bâtir une citoyenneté et un destin partagés.
Le drame survenu dans le Gard est épouvantable précisément parce qu'il est entaché, comme vous l'avez relevé, de tous les symptômes de ce que nous cherchons à combattre et que nous devons dénoncer.
Je suis heureux de sentir l'unanimité qui prévaut en réalité sur ces travées quant à notre détermination commune à mener ce combat et à édifier ensemble une cité différente. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et RDPI.)
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