Question de M. TISSOT Jean-Claude (Loire - SER) publiée le 29/05/2025

Question posée en séance publique le 28/05/2025

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - M. Yannick Jadot applaudit également.)

M. Jean-Claude Tissot. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'agriculture.

Ce qui s'est déroulé lundi à l'Assemblée nationale, madame la ministre, n'est pas digne de notre parlementarisme. (Oh ! sur des travées du groupe Les Républicains. - M. Olivier Paccaud lève les bras au ciel.)

N'ayant pas le courage d'assumer ses choix, le socle commun s'est joyeusement livré, dans une parfaite connivence avec le Rassemblement national, à un contournement des procédures législatives. Fuir le débat n'honore personne, et certainement pas les parlementaires ! (Marques d'assentiment sur les travées du groupe SER.)

Sans doute, madame la ministre, la pression était-elle trop forte : rappelons que le syndicat agricole majoritaire, non content d'avoir eu le privilège de rédiger lui-même la proposition de loi, s'est permis de venir, devant l'Assemblée nationale, mettre la pression sur les parlementaires !

Et permettez-moi de m'adresser aussi à vous, monsieur le Premier ministre. Contrairement à ce que vous avez affirmé hier, sur les ondes et dans les journaux, il n'y a pas besoin que vous nous expliquiez le texte : l'agriculture c'est mon métier, je sais de quoi je parle ; quant à ce texte, nous le comprenons parfaitement, et c'est bien pour cela que nous lui sommes farouchement opposés !

Mme Audrey Linkenheld. Très bien !

M. Jean-Claude Tissot. Nous disons non à l'assouplissement de l'usage des pesticides ! Non à la réintroduction des néonicotinoïdes ! Non à la normalisation des mégabassines et des fermes-usines !

L'allégement des contraintes n'est ici qu'un élément de langage servant à faire passer avant tout les intérêts court-termistes d'une agriculture chimique, intensive et passéiste. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K. - Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Vous nous répétez sans cesse, madame la ministre, que ce texte est attendu par le monde agricole. C'est faux et archifaux : c'est mon monde, et je n'attends pas un tel texte ! Il est uniquement attendu par les syndicats libéraux, droitiers, conservateurs, voire réactionnaires. (Mêmes mouvements. - Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Le débat ne doit pas être seulement entre agriculteurs : il doit être ouvert, et toute la société doit y prendre part.

Madame la ministre, cessez de regarder ailleurs quand la communauté scientifique est unanime, quand mille chercheurs et médecins nous alertent sur les dangers de cette proposition de loi.

Ayons collectivement de l'ambition, et cessons d'aligner les normes sanitaires et environnementales à la baisse ! Oui, il faut simplifier, c'est indispensable, mais simplification ne doit pas rimer avec régression.

Alors, madame la ministre, quand allez-vous entendre le monde paysan dans son ensemble, tous les paysans ? Quand allez-vous entendre la société dans son ensemble, tous les citoyens ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

À défaut de débattre devant la représentation nationale, ayez au moins ce courage, madame la ministre !

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Claude Tissot. Entendez les agriculteurs bio ! Entendez les apiculteurs ! Entendez les Français qui ne veulent plus de pesticides ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. - Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 29/05/2025

Réponse apportée en séance publique le 28/05/2025

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Jean-Claude Tissot, vous évoquez l'adoption par une majorité de députés, ce lundi, de la motion de rejet de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur. Vous avez un regard de sénateur.

M. Jean-Claude Tissot. Et de paysan !

Mme Annie Genevard, ministre. J'aimerais que vous regardiez ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale, où près de 3 500 amendements avaient été déposés sur ce texte, ce qui aurait empêché d'aller jusqu'au vote. Là est le scandale démocratique, monsieur le sénateur ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe RDPI. - Protestations sur les travées du groupe SER.)

M. Mickaël Vallet. Vous avez refusé le débat !

Mme Annie Genevard, ministre. Le débat, j'aurais aimé qu'il ait lieu, mais nous nous sommes heurtés à une pile d'amendements à notre arrivée en séance. Cela faisait des semaines que nous nous préparions au débat, et nous l'aurions conduit avec beaucoup de conviction. Alors, je vous en prie, pas de procès d'intention à l'égard du Gouvernement !

Je respecte la voix des parlementaires. (Rires sur les travées du groupe SER.) Ils en ont décidé ainsi, après soixante-dix heures de débats en commission ; le débat reprendra en commission mixte paritaire et lors de la lecture de ses conclusions par les assemblées.

J'en viens au fond du texte. (Ah ! sur les travées du groupe SER.) Monsieur le sénateur, vous avez assisté aux débats qui se sont déroulés dans cet hémicycle, débats auxquels vous avez d'ailleurs longuement contribué - je vous en remercie -, et vous avez pu constater d'où nous sommes partis et où nous sommes arrivés, ici même.

M. Yannick Jadot. Justement !

Mme Annie Genevard, ministre. Nous avons travaillé sur ce texte avec le ministère de la transition écologique,...

M. Guy Benarroche. Avec la FNSEA, plutôt !

Mme Annie Genevard, ministre. ... et nous sommes tombés d'accord sur à peu près - je dis bien : à peu près - tous les articles, à l'exception de l'article 2. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST.)

En tout état de cause, c'est la position du Gouvernement que je défends, et c'est en son nom que je me suis toujours exprimée. (M. Yannick Jadot s'exclame.)

Vous opposez les modes de production ; vous opposez les paysans entre eux. (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.) Ce ne sera jamais ma philosophie ! C'est peut-être la vôtre, elle vous appartient, mais je crois que c'est une impasse. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. - MM. Bernard Buis, Henri Cabanel et Bernard Fialaire applaudissent également. - Vives protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)

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