Question de M. BARROS Pierre (Val-d'Oise - CRCE-K) publiée le 29/05/2025

Question posée en séance publique le 28/05/2025

M. le président. La parole est à M. Pierre Barros, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Pierre Barros. Monsieur le Premier ministre, dans votre dernière intervention télévisée, au sujet de l'effort que vous demandez aux Français pour trouver vos 40 milliards d'euros d'économies, vous avez déclaré : « Je ne ciblerai pas une catégorie de Français à l'exclusion des autres. »

Sur le terrain, pourtant, nous constatons que vous ciblez, encore une fois, les collectivités locales et leurs habitants les moins riches.

Lors de la construction du budget pour 2025, par exemple, vous avez diminué les crédits alloués à la politique de la ville.

Il y a une semaine, à quelques jours de l'été, nous avons apprécié avec amertume la mise en oeuvre de vos choix politiques. Ils s'expriment notamment, dans nos quartiers prioritaires, par une réduction de 30 % des fonds consacrés aux opérations Quartiers d'été, à destination de notre jeunesse. À croire que le Gouvernement n'a rien retenu de ce qui a conduit aux émeutes de 2023 !

On comprend mieux pourquoi le comité interministériel des villes a sans cesse été reporté - peut-être se réunira-t-il au début de juin - et pourquoi la récente conférence financière des territoires a fraîchement accueilli vos propositions.

Il est en effet difficile de justifier une telle décision auprès des élus locaux sans que ces derniers se sentent, de nouveau, abandonnés.

Je n'ose citer ici les retours que j'ai reçus concernant les dossiers de subventions liés aux récentes catastrophes naturelles : nous notons que la participation de l'État n'atteint pas même 20 % des coûts nécessaires de la reconstruction. Qui va donc payer ?

De même, que dire de votre idée de TVA sociale pour refinancer la sécurité sociale ? À l'heure où les Français font déjà des efforts majeurs pour survivre dans un contexte économique des plus moroses, vous estimez qu'il leur faut contribuer encore davantage par le biais d'une TVA sociale, l'un des impôts les plus injustes, puisque les moins riches y contribuent plus que les autres.

Monsieur le Premier ministre, voici donc ma question : vous dites souhaiter une prise de conscience des Français, à l'heure où nos collectivités et leurs habitants les moins riches sont les cibles de vos coupes budgétaires, mais de quelle prise de conscience parlez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

- page 5992


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics publiée le 29/05/2025

Réponse apportée en séance publique le 28/05/2025

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, la prise de conscience, c'est d'abord reconnaître que, collectivement, nous paierons bientôt plus pour la charge des intérêts de la dette que pour des politiques profitant à nos enfants, à leur éducation.

M. Franck Montaugé. C'est votre faute !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. La prise de conscience, c'est admettre que notre souveraineté géopolitique, en tant qu'État, est indissociable de notre souveraineté financière.

La prise de conscience, c'est affirmer que tous les Français sont concernés par nos comptes publics, puisque tous les Français sont liés par les finances publiques. Ils en sont à la fois tous contribuables et tous bénéficiaires : tous bénéficiaires de notre sécurité sociale, pour nous soigner ; tous bénéficiaires de l'éducation nationale, pour éduquer nos enfants ;...

Mme Cathy Apourceau-Poly. Et heureusement !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. ... tous bénéficiaires de la protection de nos armées, pour la défense de notre territoire ; tous bénéficiaires, enfin, des investissements consentis pour la transition écologique.

Nous avons donc tous intérêt à ce que nos services publics fonctionnent mieux ; nous avons tous intérêt à ce que chaque euro d'argent public soit employé là où il est le plus utile et non là où l'on a l'habitude de trouver de l'argent public ; nous avons tous intérêt à ce que notre dépense n'augmente pas plus vite que notre croissance.

Bref, nous avons tous intérêt à ce que nos comptes publics soient des comptes solides, qui nous permettent d'envisager l'avenir avec des marges de manoeuvre, qui permettent à notre nation, à notre démocratie, de vivre et à vous, ses parlementaires, de faire des choix qui ne soient pas contraints.

Vous avez évoqué le sujet des collectivités locales. L'objectif que je partage avec le Premier ministre est simple. Les communes vivent sur des mandats de six ans ; l'État, lui, est contraint par l'annualité de son budget. Nous ne pouvons pas travailler ainsi, car cela est source de frustrations, d'incompréhensions et de beaucoup d'inefficacité. Nous devons aux élus locaux de la prévisibilité ; nous devons tous, et eux aussi, être en mesure de contribuer pleinement à cet effort national.

Nous n'opposons pas les Français entre eux, mais nous voulons retrouver de la confiance. Pour cela, il faut de la transparence, il faut dire où nous en sommes et où nous allons. Où nous allons, c'est fort simple : c'est arrêter de faire augmenter notre dette et les charges d'intérêts qui lui sont liées. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Cécile Cukierman. Mais vous ne réclamez pas la même chose à tous les Français !

M. le président. La parole est à M. Pierre Barros, pour la réplique.

M. Pierre Barros. Madame la ministre, pardonnez-moi, mais c'est à vous de prendre conscience de la réalité de ce que vivent les collectivités.

Certes, il faut trouver de nouvelles recettes, mais cela ne peut pas se faire sur le dos de celles et de ceux qui savent équilibrer leur budget et se serrent déjà la ceinture.

M. Michel Savin. Très bien !

M. Pierre Barros. La situation financière de la France, c'est votre bilan, vos choix politiques, votre responsabilité, et non pas celle des collectivités ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER. - Mme Agnès Canayer et M. Michel Savin applaudissent également.)

- page 5992

Page mise à jour le