Question de M. HINGRAY Jean (Vosges - UC) publiée le 08/05/2025
M. Jean Hingray attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la situation préoccupante du secteur français de l'ameublement, confronté à une concurrence jugée déloyale de la part de plateformes d'e-commerce asiatiques.
La filière française de l'ameublement, qui représente plus de 14 000 fabricants et un secteur économique de proximité, est aujourd'hui confrontée à une concurrence croissante et déséquilibrée, du fait de l'arrivée massive de meubles commercialisés par des plateformes asiatiques telles que Temu ou Shein. Ces plateformes, déjà connues pour leur rôle dans l'essor de la « fast fashion », développent désormais une « fast déco » : des produits extrêmement bon marché, renouvelés presque quotidiennement, souvent importés sans respect des normes européennes en matière de sécurité, de fiscalité ou d'environnement.
Outre l'absence fréquente de conformité des produits, de nombreuses irrégularités sont dénoncées : TVA non collectée, écoparticipation non versée, absence de mandataire légal en France. Les fabricants français font régulièrement l'objet de contrôles stricts et sont soumis à des normes environnementales et fiscales exigeantes. Ce traitement inégal nourrit un sentiment d'injustice et fragilise la filière nationale.
Cette situation est d'autant plus préoccupante que le marché du meuble connaît une forte contraction : avec un niveau historiquement bas de constructions neuves en 2024, les ventes de meubles ont chuté de 7 %, tandis que les importations de colis Shein et Temu augmentaient de 22 % en volume. Il est donc urgent d'agir pour garantir l'équité entre les acteurs économiques, protéger les consommateurs et éviter la désindustrialisation du secteur.
Dans ce contexte, les professionnels appellent à un renforcement des contrôles douaniers sur les produits importés via ces plateformes, à la désignation obligatoire d'un représentant légal en France pour toute entreprise extra-européenne vendant en ligne, à la pérennisation de l'écocontribution au-delà du 31 décembre 2025, ainsi qu'à une meilleure coordination entre les autorités compétentes afin de lutter plus efficacement contre les contournements réglementaires.
Il demande quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour répondre à ces demandes légitimes, garantir une concurrence loyale, et protéger durablement la filière française de l'ameublement.
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 26/06/2025
La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est mobilisée pour faire appliquer les réglementations relevant de son champ de compétence à l'ensemble des opérateurs, quel que soit leur pays d'origine, dès lors qu'ils mettent des produits sur le marché national. Chaque année, la DGCCRF procède à des contrôles dans le secteur de l'ameublement et de la literie pour vérifier la présentation commerciale des produits, le respect des réglementations liées à la sécurité des produits et lutter contre les pratiques déloyales ou agressives susceptibles d'être mises en oeuvre dans ce secteur. Les contrôles se déroulent essentiellement au stade de la distribution, aussi bien chez les opérateurs physiques que ceux qui réalisent des ventes sur internet. La très grande diversité des opérateurs contrôlés permet de contrôler aussi bien des produits fabriqués en France que des produits fabriqués à l'étranger (Union européenne ou pays tiers), qui sont donc autant ciblés que les premiers. Des contrôles sont par ailleurs régulièrement réalisés sur les sites de vente en ligne et les plateformes de e-commerce, qui ont pu conduire ces dernières années à vérifier leur niveau de réactivité pour traiter les cas de produits non-conformes et dangereux et au retrait d'annonces litigieuses, à titre d'exemple concernant des lits superposés non-conformes aux exigences de sécurité. En complément, au niveau des instances de l'Union européenne, les autorités françaises poursuivent depuis plusieurs années l'objectif d'un renforcement de la responsabilité des places de marché de commerce électronique, afin de garantir une concurrence saine et loyale tant sur le marché français qu'européen. Dans ce cadre, deux règlements récents, à savoir le « Digital Services Act » (DSA - règlement (UE) 2022/2065 du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques) et le règlement sur la sécurité générale des produits (RSGP - règlement (UE) 2023/988 du 10 mai 2023), sont entrés en application respectivement le 17 février 2024 et le 13 décembre 2024. Le premier améliore la régulation de l'ensemble des grandes plateformes numériques, tandis que le second renforce les responsabilités des places de marché en ligne en matière de lutte contre la vente de produits dangereux. Pour ce faire, le RSGP leur impose désormais des efforts supplémentaires en matière d'information des consommateurs, de collaboration avec les pouvoirs publics quant aux procédures d'identification et de rappel de produits dangereux. Afin de mettre sur un pied d'égalité l'ensemble des acteurs de la chaîne d'approvisionnement, qu'ils soient nationaux ou internationaux, ce dernier règlement impose en particulier aux exportateurs de pays tiers de désigner « une personne responsable dans l'Union européenne » qui a vocation à être le point de contact des autorités de surveillance du marché en cas de signalement de produits illicites ou dangereux. Les services de lÉtat et ceux de la Commission européenne sont très vigilants à la bonne application de ce nouveau cadre réglementaire. En France, en vertu de l'article L. 452-5-1 du code de la consommation, le non-respect de ces obligations par les places de marché est ainsi passible d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 600 000 euros, montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel de l'opérateur en cause. Appliqué au secteur de l'ameublement et de la literie, ce cadre réglementaire renforcé vise à apporter aux consommateurs la même protection en ligne et en magasin et à assurer les conditions d'une concurrence équitable entre opérateurs économiques
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