Question de M. LEROY Henri (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 15/05/2025

M. Henri Leroy interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les fraudes massives qui affectent le dispositif MaPrimeRénov', instauré en 2020 pour encourager la rénovation énergétique des logements.

Selon les dernières données disponibles, Tracfin - Service de renseignement financier a détecté en 2023 près de 398 millions d'euros de mouvements financiers suspects liés à ce dispositif. L'Agence nationale de l'habitat (Anah) indique avoir empêché 229 millions d'euros de fraudes grâce à un renforcement des contrôles, mais reconnaît que le phénomène prend de l'ampleur. Déjà, sur les seuls premiers mois de 2025, 74 millions d'euros de fraudes ont été identifiés. Ces chiffres traduisent l'existence d'un système de fraude à grande échelle, souvent orchestré par des réseaux criminels s'appuyant sur des sociétés éphémères et fictives, dont le seul objectif est de capter des subventions publiques avant de disparaître.

Ces dérives préoccupantes posent une double menace. D'une part, elles détournent massivement des fonds publics dans un contexte budgétaire déjà contraint, d'autre part, elles fragilisent la confiance des citoyens dans la politique de transition énergétique, en pénalisant les ménages modestes qui devraient être les premiers bénéficiaires de l'aide.

Il souhaite donc savoir quelles mesures immédiates le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour stopper ces détournements, renforcer les contrôles en amont des versements, améliorer la coordination entre l'Anah, Tracfin, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et les services d'enquête, et garantir à terme une attribution rigoureuse et équitable de MaPrimeRénov'. Il lui demande également si une suspension temporaire du dispositif, ou une refonte structurelle, est à l'étude pour restaurer son efficacité et sa légitimité.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 04/09/2025

Depuis la mise place de MaPrimeRenov'en 2020, cette aide a bénéficié à 2,5 millions de ménages, pour leur permettre d'améliorer leur confort de vie, de baisser leur facture énergétique et d'émettre moins de gaz à effet de serre. Les subventions versées entre 2020 et 2024 ont permis d'accompagner la mise en oeuvre de 37,9 Mdseuros de travaux confirmant l'effet levier important de l'aide sur l'économie et l'artisanat. En matière d'évaluation de cette fraude, il convient de ne pas confondre le montant réel du préjudice subi par l'État avec les déclarations de soupçon reçues par Tracfin de la part des banques. En 2024, 44 172 dossiers MaPrimeRénov'frauduleux ont été détectés avant leur mise en paiement. Pour atteindre ce niveau de vigilance, chaque dossier de demande d'aide est soumis à un contrôle systématique avant la validation puis au moment du paiement. Ces vérifications sont régulièrement complétées par des contrôles renforcés et des inspections sur place. Les dispositifs de lutte contre la fraude mis en place par l'Agence nationale de l'habitat ont ainsi permis de détecter et d'éviter 229 millions d'euros de fraude en 2024. En outre, pour l'année 2024, 8Meuros d'aides versées ont fait l'objet de fraude avérée au travers de dossiers qui font l'objet de contentieux et de procédures de recouvrement. Ceci est à mettre au regard du budget de 3,3Mdeuros pour 2024. Les estimations issues des déclarations de soupçon reçues par Tracfin (Ministère de l'Economie) conduisent à évaluer à environ 100 Meuros/an le potentiel de fraude sur les aides à la rénovation énergétique dans leur ensemble c'est-à-dire à la fois l'aide MaPrimeRénov'et les Certificats d'Economie d'Energie (CEE). Face à ces constats, une cellule de veille interministérielle anti-fraude aux aides publiques rattachée à la mission interministérielle de lutte anti-fraude (MICAF) a été mise en place le 5 décembre 2023. Elle réunit, en vue d'une meilleure détection et sanction, les services de gendarmerie, de police, la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), la DGFIP (direction générale des finances publiques), Tracfin (Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins), la DG Travail (direction générale du Travail), le parquet de la JUNALCO (Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée), le parquet européen et les services en charge de la conception et du déploiement de la politique de rénovation énergétique des logements (DGALN - direction générale de l'aménagement du logement et de la nature, DGEC - direction générale de l'énergie et du climat, ANAH - agence nationale de l'habitat). La MICAF organise la coordination des travaux techniques visant à identifier les organisations frauduleuses, à les retirer du marché et à engager des poursuites. Elle définit de plus des stratégies d'action et d'enquête concertées. En outre, une forte dynamique du dispositif d'aide est constatée en 2025. A fin mai 2025, 122 712 ménages ont bénéficié de cette aide, avec une nette accélération des rénovations d'ampleur (44 162 logements concernés), multipliées par plus de trois par rapport à la même période en 2024. Au regard de ces éléments, le Gouvernement a décidé de suspendre le guichet MaPrimeRénov'dédié à la rénovation globale individuelle avec une fermeture à partir du 23 juin et une réouverture d'ici fin septembre 2025. Durant cette période, tous les dossiers déposés avant la fermeture de la plateforme seront instruits et seront engagés s'ils sont réguliers. Les demandes de paiement sur les dossiers d'ores et déjà engagés seront instruites normalement et le versement des aides interviendra dès la validation des dossiers. Le Gouvernement va en outre approfondir le travail d'enquête sur les activités suspectes ou frauduleuses de certains acteurs afin de les retirer du marché. Il va également travailler à la définition des paramètres de réouverture du guichet d'aide afin de rendre le dispositif moins sensible aux risques de fraude. Enfin, afin de renforcer encore les leviers d'action des services de l'Etat, depuis la prévention jusqu'aux sanctions, le Gouvernement se félicite des avancées que permettra la loi contre toutes les fraudes aux aides publiques votée les 14 et 21 mai par le Parlement. Il s'est attaché à soutenir les mesures qui y sont proposées et les mettra en oeuvre le plus rapidement possible dès sa promulgation. Le Gouvernement reste pleinement engagé à ce que ce dispositif d'aide reste le ciment d'un engagement collectif de l'État, des collectivités territoriales, des professionnels de l'accompagnement et des professionnels du bâtiment labellisés reconnus Garant de l'Environnement (RGE) au bénéfice des ménages, en particulier les plus modestes.

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