Question de Mme FLORENNES Isabelle (Hauts-de-Seine - UC) publiée le 05/06/2025
Question posée en séance publique le 04/06/2025
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Isabelle Florennes. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux.
Après les violences insupportables perpétrées à l'issue de la victoire du PSG, je tiens à rendre hommage à toutes les victimes et à leurs familles, et particulièrement aux deux personnes décédées ainsi qu'aux policiers et gendarmes blessés. Je tiens aussi à saluer l'engagement de toutes nos forces de l'ordre, qui sont intervenues pour protéger nos concitoyens.
Ce déchaînement de violence a de quoi nous interpeller quand on le compare à la liesse populaire dont la Coupe du monde de 1998 avait été l'occasion. C'était il y a vingt-sept ans ; c'était un autre monde. Nous ne pouvons plus accepter de tels actes.
Les premières condamnations intervenues depuis ces événements dramatiques semblent marquées d'une extrême mansuétude : deux à huit mois de prison avec sursis, un stage de citoyenneté ou une simple amende de quelques centaines d'euros.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. La justice est indépendante !
Mme Isabelle Florennes. Cette impression d'indulgence laxiste est choquante.
Face à cela, vous avez réagi en déclarant que les condamnations « ne sont plus à la hauteur de la violence que connaît notre pays ». Et pourtant, ces décisions sont à mettre en parallèle avec votre circulaire de politique pénale générale du 27 janvier dernier, dans laquelle vous appeliez déjà à plus de fermeté contre toutes les atteintes dont les représentants de nos institutions sont victimes.
Monsieur le garde des sceaux, comment concrètement comptez-vous rendre cette fermeté effective ? Vous l'avez dit, voilà qui ne peut passer que par la loi. Avez-vous aujourd'hui les moyens de faire évoluer radicalement ladite loi ? En outre, comment s'assurer que cette fermeté aura enfin un effet profondément dissuasif ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 05/06/2025
Réponse apportée en séance publique le 04/06/2025
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice, à ne considérer que le ressort de la préfecture de police - il y a eu d'autres violences ailleurs sur le territoire national : je pense évidemment aux blessés graves de Grenoble, au policier blessé dans la Manche et placé dans le coma, au mort de Dax -, les services de M. le ministre de l'intérieur ont procédé à 600 interpellations. Sur ces 600 interpellations, on compte seulement 256 gardes à vue. Il y a donc déjà un écart très important entre le nombre d'interpellations et le nombre de gardes à vue par les policiers ou gendarmes.
Je rappelle que les questions de maintien de l'ordre sont sous l'autorité du préfet de police et du ministre de l'intérieur, et non sous l'autorité des procureurs de la République, laquelle ne s'exerce qu'à partir de la garde à vue. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie s'exclame.)
Sur les 256 gardes à vue, il y a eu 82 classements sans suite, soit pour irrégularité de procédure soit pour absence d'infraction. Se pose en effet la question de l'infraction collective, que le Parlement doit concéder, me semble-t-il, au ministère de la justice et au ministère de l'intérieur, sachant que le droit pénal - vous le savez - est individuel. Une proposition de loi visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations avait été portée par MM. Retailleau et Castaner ; sa disposition phare avait été censurée par le Conseil constitutionnel.
Je souhaite que soit créée une infraction visant les attroupements collectifs et permettant aux services de police de qualifier les faits pour éviter les classements sans suite.
Pour ce qui concerne les violences sur lesquelles vous m'interrogez, madame la sénatrice, j'ajoute que 52 mineurs sont concernés. À ce propos, vous venez d'adopter une proposition de loi instaurant une procédure de comparution immédiate spécifique aux mineurs, mais elle n'a pas encore été validée par le Conseil constitutionnel.
Mes propositions sont assez simples.
Comme il y a des peines maximales dans le code pénal, je souhaite la création de peines minimales. La tâche est plus difficile encore que pour les peines planchers, qui ne concernaient que les cas de récidive : les peines minimales que j'ai en vue seraient applicables dès le premier acte.
Autre proposition simple : trois mois de prison ferme, à exécution immédiate, dès lors que l'on s'en prend à un représentant des forces de l'ordre. (M. Laurent Somon acquiesce.)
Je souhaite également mettre fin - je l'ai dit dès mon arrivée à la Chancellerie - à l'obligation d'aménager les peines de moins d'un an d'emprisonnement, c'est-à-dire de revenir sur une orientation qui fut partagée par l'ensemble des gouvernements précédents et par les gardes des sceaux successifs - M. Perben, Mme Dati, Mme Taubira, Mme Belloubet, M. Dupond-Moretti.
Je compte proposer au Parlement, sous l'autorité du Premier ministre, l'abrogation du principe de l'aménagement obligatoire dès lors qu'une peine de prison a été prononcée, quelle qu'en soit la durée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. - M. Pierre Jean Rochette applaudit également.)
M. Laurent Somon. Bravo !
M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Je souhaite enfin la suppression du sursis.
À la demande du Premier ministre, je travaille donc sur un texte que j'espère pouvoir présenter au mois de septembre. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et Les Républicains. - MM. Franck Menonville et Olivier Cigolotti applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour la réplique.
Mme Isabelle Florennes. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces propositions.
Je vous renvoie à l'excellent rapport sénatorial fait par François-Noël Buffet, désormais ministre, en sa qualité de rapporteur de la commission d'enquête sur les émeutes survenues à compter du 27 juin 2023. La commission des lois y avait formulé un certain nombre de propositions relatives aux sanctions applicables aux primodélinquants et aux mineurs délinquants. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. - M. Louis Vogel applaudit également.)
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