Question de M. TISSOT Jean-Claude (Loire - SER) publiée le 03/07/2025
Question posée en séance publique le 02/07/2025
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Claude Tissot. Ma question s'adresse à monsieur le ministre chargé de la santé.
Monsieur le ministre, la communauté scientifique et médicale exprime depuis plusieurs semaines de très vives inquiétudes quant à la proposition de loi visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur. (M. Laurent Duplomb s'exclame.)
Médecins, professionnels de santé, associations de patients, sociétés savantes, chercheurs, conseil scientifique du CNRS : tous nous ont massivement alertés sur les dangers majeurs que les dispositions du texte font peser sur la santé publique.
Alors même que la proposition de loi acte l'assouplissement des règles encadrant l'utilisation des pesticides et la réintroduction de certains néonicotinoïdes, ces différentes tribunes alertent sur l'ampleur des pathologies associées à l'exposition aux pesticides.
Une réalité s'impose : les pesticides tuent. Puisqu'il faut le marteler, nous le martèlerons : les pesticides tuent !
Cancers pédiatriques, leucémies, myélomes, lymphomes, cancers de la prostate : la corrélation entre l'exposition aux pesticides et la survenance de nombreux cancers est claire et avérée. Il en va de même pour les maladies neurodégénératives, les affections pulmonaires, ou encore les troubles du développement neurologique de l'enfant.
Des études ont mis en évidence que l'acétamipride - puisque c'est de lui qu'il est question - traverse le placenta et peut se retrouver dans le liquide céphalo-rachidien des nouveau-nés.
La société dans son ensemble - y compris les agriculteurs - ne veut plus de toutes ces substances qui sont disséminées dans l'environnement, dans nos aliments et dans l'eau.
Aussi, je m'étonne, monsieur le ministre, de ne pas vous avoir entendu vous exprimer publiquement sur ces enjeux sanitaires. Face à un texte qui va accroître l'exposition de la population à des substances dangereuses, le principe de précaution, qui est de nature constitutionnelle, aurait dû imposer une réaction forte, claire et assumée de votre part.
Votre silence est assourdissant et vous rend responsable des scandales sanitaires à venir. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) L'amiante ne vous a donc pas suffi ? Le chlordécone ne vous a donc pas suffi ?
Comment comprendre que le ministre de la santé ne prenne pas publiquement position contre un texte qui risque de produire des dommages durables sur la santé publique ? Est-ce à dire que vous soutenez ces dispositions ? Est-ce à dire, pour l'exprimer clairement, que vous désavouez la communauté scientifique et médicale ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins publiée le 03/07/2025
Réponse apportée en séance publique le 02/07/2025
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l'accès aux soins.
M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le sénateur Tissot, je n'expliquerai pas la proposition de loi Duplomb dans cet hémicycle ; vous la connaissez.
Je rappellerai simplement quelques éléments, pour éviter que l'on ne dise tout et son contraire. Cette proposition de loi a pour objet d'améliorer l'exercice du métier d'agriculteur en apportant des simplifications, notamment sur les retenues d'eau.
L'usage de l'acétamipride est un sujet important, mais vous savez très bien qu'il serait inconstitutionnel de lever totalement l'interdiction de ce produit. Il est simplement question d'appliquer les règles qui sont en vigueur dans les autres pays européens. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
Naturellement, nous devons être extrêmement attentifs, et je vous rassure, monsieur le sénateur Tissot : le ministre de la santé que je suis est extrêmement attentif aux évolutions de cette question. (Marques d'ironie sur les travées des groupes SER et GEST. - M. Yannick Jadot mime les mouvements d'un rameur.)
Toutefois, je prends des mesures qui se fondent sur des preuves : cela s'appelle l'evidence-based medicine, ou la médecine fondée sur des preuves ! (Protestations sur les travées du groupe GEST.)
J'examinerai avec beaucoup d'attention les études qui seront rendues par la communauté scientifique, notamment les recommandations que formulera l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses),...
Mme Raymonde Poncet Monge. Comme sur l'amiante ?
M. Yannick Neuder, ministre. ... dont la commission mixte paritaire a réaffirmé le caractère indépendant, si tant est que celui-ci ait jamais été menacé. (Marques d'ironie sur les travées des groupes GEST et SER. - M. Yannick Jadot rit ostensiblement.)
Vous pouvez rire, monsieur Jadot, mais c'est cela que font les autres pays ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
M. Mickaël Vallet. On rit parce que vous êtes risibles !
M. Yannick Neuder, ministre. Nous parlons de ce sujet à chaque réunion des ministres européens de la santé, et le ministre de la santé français prendra les mêmes précautions que ses vingt-six homologues.
Les mesures seront prises en temps et en heure, avec la plus grande fermeté, pour protéger la santé des Français. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
Laissons le temps à l'Anses et à la communauté scientifique de réaliser les études nécessaires et mettons la France au même niveau de précaution que les autres pays européens ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme Laurence Rossignol. Rendez-vous à l'Assemblée nationale !
M. Mickaël Vallet. Et à la Commission européenne !
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