Question de Mme NADILLE Solanges (Guadeloupe - RDPI) publiée le 10/07/2025
Question posée en séance publique le 09/07/2025
M. le président. La parole est à Mme Solanges Nadille, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Solanges Nadille. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, depuis le début de l'année 2025, l'archipel Guadeloupe fait face à une flambée dramatique de la violence. On dénombre désormais vingt-neuf homicides, dont près de dix-huit par arme à feu. Mercredi dernier encore, un homme est décédé au centre hospitalier universitaire de la Guadeloupe, après avoir été grièvement blessé par balles au petit matin.
Ces chiffres, aussi tragiques que répétés, traduisent une insécurité croissante sur ce territoire, où le narcotrafic et la circulation d'armes ne cessent de gangrener le tissu social. Et ce sont souvent les plus jeunes qui en paient le prix fort : en Guadeloupe, les victimes ont parfois 17, 16, voire 13 ans.
Face à cela, les réponses répressives, indispensables, ne sauraient suffire, monsieur le ministre.
Augmenter les effectifs de police ne constitue qu'un pan de la réponse. Il faut aussi agir sur les causes profondes de cette violence. La déscolarisation, la perte de repères, la désocialisation sont autant de facteurs qui nourrissent la marginalisation.
L'éducation nationale elle-même nous alerte : depuis les années 2000, les populations scolaires des départements et régions d'outre-mer sont en constant recul, tous degrés confondus. Les niveaux sont en baisse. Le décrochage scolaire, aggravé par la pénurie de formations, est une réalité.
Dans ce contexte, ma question est simple, et j'espère une réponse claire de votre part : le Gouvernement envisage-t-il, en lien avec les collectivités locales et les acteurs de terrain, la mise en place d'un contrat territorial de prévention et de sécurité spécifique à la Guadeloupe ? Quelles mesures concrètes compte-t-il prendre pour agir sur les causes structurelles de la violence, en particulier chez les jeunes ?
À la veille du comité interministériel des outre-mer, le Gouvernement se doit d'entendre les doléances des élus et des citoyens, et de proposer enfin des réponses concrètes, durables et efficaces face à une spirale de violence qui, chaque jour, endeuille des familles. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 10/07/2025
Réponse apportée en séance publique le 09/07/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, vous me permettrez, avant d'apporter une réponse à Mme la sénatrice, de me joindre à l'hommage que vous et M. le Premier ministre avez rendu à Olivier Marleix, brutalement disparu. Je commencerai par citer les mots de la célèbre philosophe Simone Weil : « Chaque être crie en silence. »
Dans chaque vie humaine, dans chaque existence humaine, il y a une part de douleur secrète, de souffrance sacrée et cachée. Et souvent, ces souffrances, ces douleurs nous sont inaccessibles, incompréhensibles. Parfois, on se demande : qu'est-ce que nous avons pu manquer ? Quel signal faible n'avons-nous pas vu ?
Pour nous, Olivier Marleix était un repère, une fidélité française, une figure de l'Assemblée nationale. Tout à l'heure, nous examinerons justement un texte d'initiative sénatoriale qu'il a défendu à mes côtés, en tant que rapporteur, la semaine dernière, devant ses collègues députés.
C'était un législateur hors pair. C'était aussi une figure de l'Eure-et-Loir, plus précisément de sa deuxième circonscription, et c'était aussi une figure de notre famille politique, permettez-moi de le dire.
Olivier Marleix avait une exigence intellectuelle, une grande droiture morale et, enfin, une fidélité. Une fidélité à des convictions qui étaient, pour ce qui le concerne et me concerne, des convictions gaullistes qui dessinaient chez lui, chez nous, comme un idéal français. Voilà les quelques mots que je voulais dire, en remerciant les uns et les autres qui ont pu, tout à l'heure, sur ces travées, lui rendre hommage. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Madame la sénatrice Solanges Nadille, je suis comptable, bien sûr, de la réponse sécuritaire. Vous avez raison, pour tous les drames que nous vivons, dans l'Hexagone, mais aussi en outre-mer, la seule réponse sécuritaire et judiciaire ne suffit pas. Néanmoins, je suis le ministre chargé de la sécurité. Vous avez égrainé des chiffres épouvantables. Ces chiffres ont une cause racine : la criminalité organisée. Le texte sur le narcotrafic est désormais promulgué. L'état-major qui va présider au renseignement et aux enquêtes est désormais à pied d'oeuvre. Ce sera vraiment une aide précieuse.
Au moment où je vous parle, dans l'archipel, il y a 4 170 policiers et gendarmes. L'an dernier a été créée une nouvelle brigade de gendarmerie à Goyave. Nous allons renforcer le dispositif avec un nouvel escadron de gendarmes mobiles, un peloton d'intervention de la garde républicaine et la projection sur ces territoires d'enquêteurs depuis l'Hexagone pour pouvoir dénouer des enquêtes qui tardent trop.
Cela ne suffit pas. Aussi, nous avons mis en oeuvre depuis un mois une nouvelle stratégie de sécurité. Vous le savez parfaitement, l'archipel est au coeur de la route de la drogue, coincé entre les pays producteurs et les pays consommateurs, Amérique du Sud d'un côté et Europe de l'autre. La drogue arrive et repart par la mer ou les airs. C'est pourquoi nous nous efforçons de sécuriser les plages, le port et l'aéroport.
Madame la sénatrice, je m'engage ici à me rendre en août aux Antilles - Martinique et Guadeloupe -, pour m'assurer sur place que toutes les dispositions soient bien prises et pour toucher du doigt le problème. Je ne veux pas me contenter d'en parler ici : je veux recueillir aussi les avis des élus. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et des travées du groupe INDEP.)
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