Question de M. VAYSSOUZE-FAURE Jean-Marc (Lot - SER) publiée le 24/07/2025

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conséquences engendrées par la suspension partielle du dispositif MaPrimeRénov'.
Décidée le 23 juin 2025 par le Gouvernement devant l'afflux des dossiers de demande, l'insuffisance du budget alloué et la recrudescence des fraudes, cette suspension du dispositif porte un véritable coup d'arrêt à la dynamique de rénovation énergétique engagée ces dernières années en France.
Pourtant, le secteur du bâtiment, responsable de 25 % des émissions de gaz à effet de serre en France, fait face à un immense défi de rénovation énergétique, avec un objectif de 900 000 rénovations d'ampleur par an d'ici 2030 pour éradiquer les passoires thermiques. Mais le rythme actuel des réalisations, les difficultés de financement et la prévalence des logements énergivores classés F ou G montrent que la France est encore loin d'atteindre ses ambitions.
Dans le département du Lot, où 973 dossiers ont été déposés en 2024, représentant treize millions d'euros de travaux, la fermeture de la plateforme de dépôt des demandes d'aide entraîne de lourdes conséquences sur les ménages, souvent modestes, pour qui ce soutien est essentiel pour réduire leur facture énergétique. Cette décision met également en difficulté les entreprises locales du bâtiment qui perdent des chantiers essentiels à leur activité et à l'emploi local.
Si le maintien temporaire des aides pour les travaux monogestes apporte un soulagement ponctuel pour les entreprises, il n'offre pas la même efficacité qu'une démarche de rénovation globale pour atteindre les objectifs climatiques et sociaux attendus. Plus coûteuse pour les particuliers, cette alternative menace également les démarches de rénovation globale du bâti ancien soutenues par les collectivités locales. Ce sont cependant ces chantiers qui permettent de donner un nouveau visage aux quartiers historiques des zones urbaines ou aux centres-bourgs des communes rurales, et favorisent ainsi l'attractivité de ces centralités.
La situation actuelle symbolise parfaitement la fragilité de tels financements instaurés sans concertation avec les acteurs du territoire
Aujourd'hui, dans le Lot, les collectivités, les structures d'accompagnements des particuliers et les organisations représentatives des artisans unissent leurs voix et dressent un constat alarmant des dérives générées par le dispositif : complexification des dossiers de demandes, travaux souvent mal réalisés par des opérateurs éloignés du territoire et gaspillage des deniers publics. Elles sont également force de proposition en faveur d'une rénovation énergétique du bâti de qualité, durable et menée par les artisans locaux afin de mener à son terme une politique ambitieuse et pérenne pour améliorer concrètement la vie des Français, notamment les plus vulnérables.
Attentif à les soutenir, il demande quelles mesures immédiates le Gouvernement compte prendre pour assurer la continuité, la lisibilité et l'intégrité du dispositif MaPrimeRénov', tout en protégeant les ménages modestes, en préservant l'emploi local et en impliquant les acteurs de terrain dans la gouvernance.
Il souhaite également savoir si les critères d'éligibilité et de financement seront stabilisés et si le budget 2026 sera suffisant pour atteindre les objectifs fixés dans la stratégie nationale bas carbone.

- page 4228

Transmise au Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 11/09/2025

Pour 2025, l'enveloppe budgétaire allouée par l'ANAH à MaPrimeRénov'de 3,6 Mdseuros a permis de fixer des objectifs ambitieux de 350 000 rénovations, réparties entre 250 000 rénovations par geste et 100 000 rénovations d'ampleur (soit +10 % par rapport à 2024). A fin juin 2025, 156 762 ménages ont bénéficié de cette aide, avec une nette accélération des rénovations d'ampleur (52 283 logements concernés), multipliées par plus de trois par rapport à la même période en 2024. Ce dynamisme témoigne de l'appropriation croissante du parcours accompagné, qui facilite les projets complexes grâce à un appui renforcé sur le plan technique et financier. Le stock de dossiers déposés permet de garantir l'atteinte des objectifs 2025 de l'Anah de 100 000 rénovations d'ampleurs engagées dans l'année : pour la rénovation d'ampleur, 95 036 dossiers ont été déposés depuis le début de l'année, soit + 61 814 dossiers par rapport à la fin du 1er trimestre. Pour la rénovation par geste, 102 715 dossiers ont été déposés depuis le début de l'année, soit + 53 126 dossiers par rapport à la fin du 1er trimestre. Ce bond quantitatif par rapport à 2024 témoigne de la montée en puissance du parcours accompagné, qui séduit de plus en plus de propriétaires désireux d'engager une rénovation globale, ambitieuse et performante de leur logement. Ce succès masque cependant un certain nombre de fragilités. Tout d'abord, depuis 2020 et la réforme de MaPrimeRénov', l'Anah fait face à de nombreuses tentatives frauduleuses pour capter de l'argent public. Le Gouvernement dispose de chiffres précis à ce sujet : la fraude effective (fraude avérée + fraude potentielle) correspond à 3,5 % des montants d'aides décaissées. Si l'on regarde l'ensemble des tentatives de fraudes (en incluant les fraudes évitées), ce taux monte à 9 % du budget engagé. En 2025, de nouveaux schémas de fraude apparaissent dans le paysage via les accompagnateurs rénov'(MAR). Une centaine d'entre eux au niveau national a déposé en 2025 environ 16 000 dossiers présentant des signaux forts d'une diversité de fraude : usurpation d'identité du ménage ou de l'entreprise, audits manipulés, absence de neutralité. Cette fraude s'organise tout aussi diversement avec ou sans la complicité des ménages, avec ou sans travaux réellement effectués, avec ou sans la complicité des entreprises intervenantes. C'est l'activité de cette frange marginale d'acteurs qui nécessite la mise en place d'une instruction renforcée. Ensuite, le succès du dispositif a généré un afflux de dossiers dès janvier, provoquant un allongement des délais d'instruction de 70 à 105 jours, en partie aggravé par l'adoption tardive du budget 2025, mais surtout une consommation rapide de l'enveloppe financière disponible. La dynamique de dépôt des dossiers constatée en 2025 aurait mécaniquement conduit à un épuisement du budget en 9 mois au lieu de 12. Sans prendre aucune mesure, les dossiers déposés après épuisement du budget ne pourraient pas être instruits en 2025, allongeant le délai d'instruction de 3 à 5 mois supplémentaires ce qui n'est pas acceptable. Par ailleurs on constate en 2025 une forte augmentation du coût des travaux (+7 %) sur la rénovation d'ampleur qui est sans commune mesure avec l'inflation (autour de 2 %). Cette augmentation a également un impact budgétaire et risque de conduire à financer moins de dossiers de rénovation si rien n'est fait En responsabilité, le Gouvernement a décidé de suspendre le guichet MaPrimeRénov'pendant la période estivale et jusqu'au 30 septembre 2025 selon les modalités suivantes : A compter de la date de fermeture et pendant la pause estivale habituellement plus calme en termes d'activité, il ne sera plus possible de déposer un nouveau dossier MaPrimeRénov rénovation d'ampleur. Cette fermeture ne concernera pas MaPrimeRénov'copropriétés et MaPrimeRénov'monogestes suite à des discussions avec l'ensemble des acteurs concernés. Le budget 2025 de MaPrimeRénov est néanmoins sanctuarisé : 3,6 Mdseuros comme voté en loi de finances 2025 ce qui permettra d'atteindre les objectifs. Le guichet MaPrimeRénov'pour la rénovation d'ampleur réouvrira le 30 septembre 2025 dans des conditions ajustées. Rien ne change cependant pour les monogestes ou la rénovation des copropriétés. Lors de la réouverture, le volume de nouveaux dossiers acceptés sera limité à 13 000. Les objectifs seront déclinés par territoire et chaque territoire aura la responsabilité de refuser les dossiers qui dépassent l'objectif : il n'est pas souhaitable d'accepter des dossiers qui ne pourraient pas être financés par la suite. La réouverture sera ciblée sur les propriétaires très modestes, suivis des ménages modestes en fonction de la dynamique de dépôt. Les plafonds des travaux subventionnable seront de 30 000 et 40 000euros selon la performance énergétique permise par les travaux : sauts de 2 et 3 classes ou plus respectivement. Les aides seront recentrées sur les logements classés E, F et G. Les taux d'aide ne changent pas mais le bonus de sortie de passoire de 10 % est supprimé. Ces paramètres qui seront en vigueur à compter du 30 septembre prochain ont vocation à être prolongés en 2026. L'organisation retenue préfigure celle de 2026 qui doit être l'année du renforcement majeur du rôle des territoires qui auront donc la responsabilité de piloter leurs objectifs et le guichet des dépôts de dossiers. Je souhaite que les collectivités continuent de s'engager dans des opérations programmées type OPAH ou PIG, qui leur permettront de sélectionner leurs accompagnateurs, et de leur fixer des objectifs sans possibilité de dépassement. Sous ces conditions nous pouvons espérer que MaPrimeRénov'deviendra plus lisible, plus simple et davantage pilotable et permettra d'éviter les écueils que nous avons connus.

- page 5050

Page mise à jour le