Question de Mme SCHILLINGER Patricia (Haut-Rhin - RDPI) publiée le 07/08/2025

Mme Patricia Schillinger attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur la situation financière particulièrement préoccupante de l'Agence France-Presse (AFP).
Le 13 juin 2025, le président-directeur général de l'AFP, a annoncé à l'ensemble du personnel une dégradation brutale de la situation économique de l'agence. Celle-ci serait contrainte de réaliser deux millions d'euros d'économies dès cette année et entre dix à douze millions supplémentaires en 2026, malgré l'obligation statutaire qui lui impose de présenter chaque année un budget à l'équilibre.

Selon la direction, cette situation découle de plusieurs facteurs exogènes : d'une part, la dénonciation de contrats par des agences américaines consécutive au changement d'administration aux États-Unis ; d'autre part, l'arrêt des activités de vérification de l'information (« fact-checking ») par Meta sur le marché américain, avec un risque d'extension mondiale. En parallèle, les grandes plateformes numériques, notamment Google et Meta, réduisent leur soutien à la presse, alors même qu'une part significative de l'audience s'oriente désormais vers les usages d'intelligence artificielle générative, au détriment des sites d'information classiques.

L'AFP, agence de presse globale reconnue pour son impartialité et son exigence journalistique, se trouve donc en première ligne de bouleversements politiques, économiques et technologiques profonds, dans un contexte de désinformation croissante et de multiplication des conflits internationaux.

Pourtant, l'AFP, forte de plus de 3 500 clients dans le monde, joue un rôle stratégique dans la diffusion d'une information fiable et vérifiée, participant au rayonnement de la France et de ses valeurs démocratiques. À ce titre, sa mission d'intérêt général ne saurait être fragilisée sans conséquences majeures pour l'ensemble de l'écosystème médiatique, tant national qu'international.

Elle demande en conséquence au Gouvernement quelles mesures il entend prendre pour garantir la pérennité du modèle économique de l'AFP, et notamment s'il envisage de rehausser les dotations publiques allouées à l'agence pour les exercices 2025 et 2026, afin d'éviter des coupes budgétaires dommageables à son fonctionnement, à l'emploi et à l'indépendance de l'information.

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Transmise au Ministère de la culture


Réponse du Ministère de la culture publiée le 13/11/2025

Représenté au sein du conseil d'administration de l'Agence France Presse (AFP), le ministère de la culture est informé de la situation financière de l'AFP et des incertitudes qui pèsent sur ses prévisions de recettes commerciales en 2025 et 2026. L'agence est confrontée à une diminution des revenus tirés de ses produits traditionnels (fil texte, photo, infographie), conséquence des difficultés financières de ses clients médias dans un contexte économique mondial dégradé. Le développement de nouveaux produits commerciaux (l'investigation numérique et les droits voisins notamment) qui ont soutenu la progression du chiffre d'affaires de l'agence au cours des dernières années est rendu plus incertain du fait du recours croissant aux intelligences artificielles conversationnelles au détriment des moteurs de recherches, de l'abandon de l'investigation numérique par META en Amérique du Nord et de l'arrêt du contrat avec la radio publique Voice of America. La situation que traverse l'Agence est inédite, dans la mesure où elle découle directement des décisions prises depuis le début de l'année par le gouvernement américain et de ses répercussions sur les clients de l'Agence. Dans un tel contexte, le ministère de la culture suit attentivement l'évolution de la situation financière de l'Agence et sa capacité à poursuivre son activité de service public. Le soutien du ministère de la culture est encadré par le contrat d'objectifs et de moyens (COM) conclu entre l'État et l'AFP pour la période 2024-2028 et par la décision de la commission européenne en date du 19 décembre 2023 d'autoriser la compensation financière accordée par l'État à l'AFP au titre de ses missions d'intérêt général. Ces missions lui sont confiées par la loi du 10 janvier 1957 qui fixe le statut de l'AFP. Définies de manière précise et concrète dans le COM, ces missions se déclinent autour des cinq principaux objectifs suivants : assurer l'existence d'un réseau d'établissements dense permettant à l'AFP d'avoir une « portée globale » ; garantir le caractère permanent de la collecte et du traitement de l'information ; assurer la production d'une information complète pour les usagers français et étrangers, en langue française et dans les principales langues utilisées dans le monde ; garantir une information exacte, impartiale et digne de confiance (exigences d'objectivité et d'indépendance) ; assurer une diffusion régulière et sans interruption de l'information. L'AFP est pour rappel un organisme autonome de droit privé sui generis. Le financement public de l'agence correspond à environ 43 % de l'ensemble de ses produits. Établi dans le COM 2024-2028, le montant de la compensation des coûts nets des missions d'intérêt général confiées à l'AFP s'établit en 2025 à 120 millions d'euros, en augmentation de 6 % par rapport à 2023, dernière année du précédent COM. L'annuité prévue par le COM pour 2026 s'établit à 124 millions d'euros.

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