Question de M. BITZ Olivier (Orne - UC) publiée le 21/08/2025

M. Olivier Bitz attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les déclarations de la Commission européenne concernant le projet d'évolution de la politique agricole commune (PAC).
Socle fondateur de la construction européenne depuis plus de soixante ans, la PAC continue de représenter un instrument majeur pour le développement économique de l'Union européenne (UE), et en particulier au sein des territoires ruraux.
Dans un contexte durement marqué par l'accumulation des incertitudes commerciales et géopolitiques, et face aux nombreux défis que relèvent les agriculteurs, la filière agricole constitue une priorité en ces temps incertains. Dans leur diversité, ces acteurs ont besoin de lisibilité et de soutien.
Le 16 juillet 2025, la présidente de la Commission européenne, Mme Ursula von der Leyen a présenté les premières orientations du futur cadre financier pluriannuel de l'UE pour la période 2028-2034. L'architecture budgétaire s'en trouverait modifiée avec des conséquences importantes pour la PAC. Actuellement, celle ci bénéficie de 386 milliards d'euros. Or, la Commission européenne prévoit désormais une enveloppe de 300 milliards d'euros pour soutenir les agriculteurs sur la période 2028-2034, ce qui correspondrait à une diminution de 20 %. Par ailleurs, la PAC se trouverait intégrée dans un grand fonds plus global comprenant d'autres programmes. En outre, les financements ne seraient plus versés directement sous la forme de dotations annuelles mais débloqués sur la base de plans nationaux ou régionaux. Seule une fraction plus ténue des paiements directs agricoles conserverait une ligne budgétaire fixe.
Selon une projection réalisée par le groupe de réflexion « Farm Europe » , au moins 50 % des agriculteurs français percevant 5 000 euros par an, seraient frappés par la réduction des aides telle qu'elle est actuellement avancée par la Commission européenne. Ces impacts significatifs seraient causés par la révision des taux de dégressivité du soutien dès 20 000 euros et du plafonnement de l'aide au revenu de base à 100 000 euros.
Les agriculteurs redoutent « un choc de désinvestissement » . Ces premières orientations font en effet peser des risques lourds sur la production et la souveraineté de l'agriculture européenne dont la France constitue l'une des principales locomotives. Depuis ces annonces, les syndicats agricoles se mobilisent pour exprimer leurs plus vives préoccupations.
Alors que les négociations s'apprêtent à s'ouvrir en vue de l'élaboration du prochain cadre financier pluriannuel européen, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour préserver les moyens budgétaires alloués à l'approfondissement de la politique agricole commune.

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Transmise au Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire


Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire publiée le 05/11/2025

Réponse apportée en séance publique le 04/11/2025

M. le président. La parole est à M. Olivier Bitz, auteur de la question n° 698, adressée à Mme la ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire.

M. Olivier Bitz. Madame la ministre, politique fondatrice de la construction européenne, la politique agricole commune (PAC) représente encore aujourd'hui un axe majeur de l'action de l'Union européenne (UE).

Or, le 16 juillet dernier, la présidente de la Commission européenne a présenté les premières orientations du futur cadre financier pluriannuel de l'Union européenne pour la période 2028-2034. L'architecture budgétaire s'en trouverait profondément modifiée, avec des conséquences importantes pour la PAC.

Actuellement, celle-ci bénéficie de 386 milliards d'euros. La Commission européenne prévoit désormais une enveloppe de 300 milliards d'euros sur la période 2028-2034, ce qui correspondrait à une baisse de 20 % des crédits. En outre, la PAC se trouverait très largement intégrée dans un grand fonds, plus global, comprenant d'autres programmes. Selon les projections réalisées, plus de la moitié des agriculteurs français seraient affectés par une réduction des aides.

Ces premières orientations constituent un risque important pour la production et la souveraineté de l'agriculture européenne, dont la France est l'une des principales locomotives. Depuis ces annonces, les syndicats agricoles se mobilisent pour exprimer leurs plus vives préoccupations, tout particulièrement les filières bovine et laitière.

Madame la ministre, les négociations européennes ont démarré. Le 27 octobre dernier, lors du Conseil agriculture et pêche (Agripêche), vous avez déclaré qu'en l'état le budget dévolu à la PAC était « insuffisant » et qu'il « compromet[tait] le succès d'une politique faisant la fierté de l'Union européenne ». Nous ne pouvons que vous suivre !

Le lendemain, le Premier ministre s'est entretenu avec M. Christophe Hansen, commissaire européen à l'agriculture et à l'alimentation. À l'issue de cet échange, le chef du Gouvernement a affirmé que « les enveloppes de la PAC devaient être intégralement maintenues ». Nous en sommes également d'accord.

Madame la ministre, pouvez-vous nous assurer que le Gouvernement est pleinement mobilisé pour que la PAC demeure une politique commune d'avenir, reposant sur des garanties financières durables, en vue de soutenir le développement de l'agriculture française ? Bref, comment entendez-vous rassurer nos agriculteurs ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Olivier Bitz, je tiens à dire en préambule qu'il est indispensable que l'Union européenne continue de se doter d'une PAC robuste permettant de garantir notre souveraineté alimentaire, les revenus des agriculteurs, et de faciliter le renouvellement des générations. À cet égard, la vive inquiétude exprimée par les milieux agricoles, que je partage, doit être entendue.

Ainsi, le montant alloué de manière certaine au périmètre garanti de la PAC dans le budget européen, et la proposition d'enveloppe nationale octroyée à la France qui en découle, suscitent une profonde incompréhension.

La France fera preuve d'une vigilance absolue pour obtenir toutes les garanties nécessaires à la préservation des aides liées à la PAC.

Nous n'avons jamais eu autant de besoins pour relever les immenses défis agricoles du XXIe siècle. Il nous faut donc obtenir une clarification rapide de la part de la Commission sur les évolutions budgétaires proposées pour la PAC, à l'échelle de l'Union comme des États membres.

En outre, la demande initiale de la France et de nombreux États membres était que la PAC demeure une politique commune à part entière, et qu'elle continue à bénéficier de dispositions et d'un budget dédiés, séparés d'un éventuel fonds unique - je l'ai encore dit, la semaine dernière, très clairement à Luxembourg lors du Conseil Agripêche.

La Commission a proposé une nouvelle architecture qui nuit à la lisibilité des dispositions et de l'action publique pour les agriculteurs. Il est donc d'autant plus indispensable que la Commission apporte toutes les garanties nécessaires pour faire en sorte que la PAC soutienne le revenu des agriculteurs et permette de répondre aux nombreux défis auxquels ils font face, alors même que nous avons plus que jamais besoin d'eux pour assurer notre souveraineté alimentaire.

Dans ce contexte, je note toutefois certains motifs de satisfaction, tels que le maintien des soutiens au revenu, des aides couplées et de l'indemnité compensatoire des handicaps naturels (ICHN).

Enfin, le besoin de simplification de la PAC ne saurait constituer un prétexte pour gommer son caractère commun.

Soyez persuadé, monsieur le sénateur, que le Gouvernement, le Premier ministre et moi-même serons particulièrement attentifs à cette question et déterminés à nous faire entendre.

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