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Avis n° 93 (2000-2001) de M. Louis de BROISSIA , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 23 novembre 2000

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N° 93

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2000

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XI

PRESSE ÉCRITE

Par M. Louis de BROISSIA,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar, vice-présidents ; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. François Abadie, Jean Arthuis, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Roger Karoutchi, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François Picheral, Guy Poirieux,  Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570 .

Sénat : 91 et 92 (annexe n° 10 ) (2000-2001).

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Des aides budgétaires directes en diminution de près de 2 %, l'AFP munie d'un nouveau président pour tout viatique sur le chemin de l'adaptation aux exigences de la communication moderne, les NMPP toujours en attente d'une contribution au financement du service universel de la vente au numéro de la presse d'information politique et générale, un gouvernement sans réaction aux multiples propositions qui lui sont faites depuis plusieurs années alors que se profile une augmentation importante du coût du papier journal et que se confirme le vieillissement du lectorat : les raisons de désapprouver les crédits d'aide à la presse de 2001 ne manquent pas.

Dans le présent rapport, votre commission développe certaines d'entre elles, et présente des suggestions qu'elle espère voir prises en considération à l'avenir.

*

* *

I. UN ENVIRONNEMENT ÉCONOMIQUE FRAGILE

Lors de son audition devant la commission du 17 octobre 2000 sur l'évolution en 2001 des aides à la presse écrite, Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication, a annoncé que le " bulletin de santé globale " de la presse était bon, tout en admettant que les équilibres demeuraient fragiles, en particulier pour la presse d'information politique et générale.

Votre commission estime que la fragilité l'emporte largement sur le rétablissement de la santé économique de la presse, pour ne pas sortir du registre médical utilisé à juste titre par la ministre. Il convient d'y insister avant de présenter et d'évaluer les propositions budgétaires du gouvernement.

A. UN CHIFFRE D'AFFAIRES TIRÉ PAR LA PUBLICITÉ

1. Évolution globale

Les derniers chiffres publiés, ceux de 1999, montrent que si la presse a globalement enregistré la progression de chiffre d'affaires la plus forte depuis le début des années 1990 (+ 5,3 %), ceci s'explique par une progression de 2,2 % des recettes de vente et de 9,5 % de celles de publicité. En 1990, celles-ci avaient contribué à 47,5 % du chiffre d'affaires. Cette part a ensuite régressé jusqu'en 1993 (39,5 %). Depuis, la publicité contribue de plus en plus au financement de la presse sans toutefois égaler les proportions atteintes au début de la décennie : en 1999, pour 100 francs de revenus de la presse, près de 44 francs proviennent de la publicité.

Après deux années successives de recul, les recettes issues des ventes au numéro se redressent quelque peu (+0,8 %). Elles demeurent le principal moyen de financement de la presse, suivi de près par la publicité commerciale.

Les revenus de la publicité commerciale augmentent de 8,9 % en 1999 par rapport à 1998. La presse bénéficie en effet des grandes campagnes de communication (notamment financière) de l'année 1999.

Les annonces, constituées des petites annonces et des annonces judiciaires et légales, représentent une moindre part des recettes de la publicité (20,7 %). Leur rythme de progression reste soutenu mais se réduit en 1999 (11,9 % contre 16,3 en 1998). Leur principale composante, les petites annonces, profite de la reprise du marché immobilier ainsi que de l'embellie de l'emploi observées depuis 1998, mais à un degré moindre qu'en 1998.

Le tableau suivant montre que les progrès des recettes publicitaires de la presse s'inscrivent dans une tendance globale au rétablissement léger de la part de la presse dans le partage de la publicité.

RECETTES PUBLICITAIRES DES GRANDS MÉDIAS
(NET FACTURÉ À L'ANNONCEUR)

montant en millions de francs, structure en %

1998

%

1999

%

Audiovisuel

16 509

29,2

17 940

29,0

dont télévision

16 154

28,6

17 478

28,3

Radio

3 678

6,5

4 119

6,7

Publicité extérieure

7 312

13,0

7 765

12,6

Presse (y compris petites annonces)

28 929

51,3

31 891

51,7

Total

56 428

100

61 715

100

Source : compte provisoire de la publicité et de la communication externe d'entreprise

L'expérience des années passées montre la fragilité de ce soubassement économique. La tendance à long terme semble être la diminution de la part de la presse parmi les grands médias, et l'embellie économique qui a permis la relance du marché publicitaire global peut être fragile. On ne saurait donc se fonder sur la seule constatation de la progression du chiffre d'affaires global de la presse en 1999 pour publier des bulletins de santé optimistes et justifier ce qui pourrait ressembler à terme à l'annonce d'un désengagement de l'Etat à l'égard de la problématique économique de la presse, d'autant moins que la situation de la presse d'information politique et générale, rien moins que florissante, appelle un soutien attentif des pouvoirs publics.

2. Évolution par type de presse

Le chiffre d'affaires de la presse nationale d'information générale et politique a progressé en 1999 de 4,1 %. Les recettes de vente ont diminué de 0,9 % (- 2,9 % pour la vente au numéro, ce qui donne la mesure des nécessaires progrès de la distribution, et + 2,9 % pour la vente par abonnement, ce qui semble couronner les efforts entrepris avec l'aide de l'Etat dans ce domaine). Les recettes de publicité ont augmenté de 10,2 %, dont + 8,3 % pour la publicité commerciale et + 16 % pour les petites annonces.

Les tableaux suivants permettent de comparer ces résultats avec ceux d'autres catégories de presse.

Presse nationale d'information générale et politique

Presse spécialisée grand public

Presse spécialisée technique et professionnelle

1999

%

1999

%

1999

%

Chiffre d'affaires total (1)

11,00

4,1

25,74

6,3

7,32

3,2

Ventes au numéro

3,66

- 2,9

12,68

1,8

0,35

- 0,1

Ventes par abonnement

2,11

2,9

5,15

7,2

2,99

1,6

Total ventes

5,77

- 0,9

17,83

3,3

3,34

1,4

Publicité commerciale

3,89

8,3

7,28

13,9

3,14

3,0

Petites annonces

1,35

16,0

0,63

11,5

0,84

12,2

Total publicité

5,23

10,2

7,91

13,7

3,98

4,8

(1) en milliards de francs

B. UN LECTORAT VIEILLISSANT

L'un des soucis majeurs que suscite l'environnement économique de la presse reste le vieillissement du lectorat. Il appartient naturellement au premier chef aux éditeurs de presse d'organiser la reconquête du lectorat par des politiques éditoriales adaptées, ce qui est devenu leur souci majeur depuis que la crise publicitaire des années 1990 a rappelé à d'aucuns cette vérité d'évidence que la presse n'existe que par ses lecteurs. Les pouvoirs publics doivent cependant assumer un rôle d'appui absolument fondamental pour faciliter l'accès de tous, et en particulier des jeunes, à la presse écrite. Quelques pistes seront tracées ci-dessous à cet égard.

1. La structure du lectorat

Par type de presse

Seuls les chiffres de 1998 sont ici disponibles. Si l'on retient la diffusion totale annuelle comme indice de l'évolution du lectorat, on constate en 1998 une diminution de 0,9 % (hors gratuits d'annonces) pour l'ensemble de la presse. Pour la presse nationale d'information générale et politique, la diminution a été de 0,4 %, et de 0,9 % pour la presse spécialisée technique et professionnelle. En revanche, la presse locale d'information générale et la presse spécialisée grand public ont enregistré une augmentation, respectivement de 0,3 % et de 3,3 % de leur diffusion.

Par tranches d'âge

Le lectorat de la presse est réparti à 45,4 % dans la tranche d'âge des plus de 55 ans ; à 26,1 % dans celle des 35 à 54 ans ; à 15 % dans celle des 25 à 34 ans et à 13,5 % dans celle des 15 à 24 ans.

Le vieillissement progressif de la population française, que les statistiques confirment d'année en année, ne peut tenir lieu de consolation à l'égard de cette structure du lectorat.

2. La nécessité d'une stratégie de reconquête

On ne mentionnera ici, sommairement, que les actions dont il appartient à l'Etat d'appuyer la mise en oeuvre.

La presse à l'école

Former la jeunesse à la lecture de la presse, d'abord en mettant celle-ci à sa portée, et ceci concerne avant tout la presse d'information politique et générale, est indispensable.

Votre rapporteur s'attache depuis plusieurs années à promouvoir l'idée de créer un fonds de concours destiné à permettre à l'ensemble des classes des établissements d'enseignement de disposer à des conditions favorables d'abonnements aux journaux de toutes tendances.

Interrogée lors de son audition du 17 octobre, Mme Catherine Tasca a présenté une réponse peu encourageante. Selon elle, le dossier de la presse à l'école est difficile à traiter : " toute réflexion serait bienvenue concernant la possibilité de mettre à la disposition de chaque classe des journaux représentant la diversité des opinions ; cela peut poser problème, toutefois, dans la mesure où les titres existants n'épuisent pas la notion de pluralisme " .

Mme Tasca a aussi rappelé que le CLEMI organisait périodiquement des opérations importantes. Votre rapporteur observe à cet égard que si ces opérations utiles mais ponctuelles peuvent être menées, c'est sans doute parce que le respect du pluralisme n'y fait pas obstacle. L'objection de Mme Tasca manque donc de consistance et la suggestion de votre rapporteur devrait faire enfin l'objet d'un examen sérieux de la part de l'Etat et des organismes représentatifs de la presse.

La distribution

La distribution est un instrument essentiel de la reconquête du lectorat. Sa modernisation pose des problèmes très divers et très techniques qui ont fait l'objet d'un rapport pour information de votre commission en 1994 et ne seront évoqués, dans la troisième partie de ce rapport, que par le biais, particulièrement actuel et urgent, de la réforme des NMPP.

La publicité de la presse à la télévision

L'accès de la presse à la publicité télévisée, interdit par un décret n° 92-280 du 27 mars 1992, est depuis longtemps l'objet d'un débat auquel il est difficile de trouver une réponse univoque. Il a récemment resurgi sous la forme d'une polémique autour d'une décision du CSA d'autoriser la diffusion télévisuelle de messages publicitaires pour les sites internet de la presse.

Le CSA avait décidé le 22 février 2000 de permettre l'accès à la publicité télévisée des sites internet, y compris ceux des secteurs interdits tels que la presse, la distribution, le cinéma et l'édition. Il avait considéré que les activités des sites internet constituaient un secteur économique nouveau et spécifique auquel les restrictions d'accès à la publicité télévisée prévues par l'article 8 du décret du 27 mars 1992 ne devaient pas être appliquées.

Le Conseil d'Etat, saisi par un certain nombre d'organisations professionnelles, a annulé le 3 juillet 2000 la décision formulée par le communiqué n° 414 du CSA, au motif que celui-ci n'était pas compétent pour fixer une règle juridique nouvelle.

L'arrêt du Conseil d'Etat manifeste surtout l'opposition persistante de cette juridiction à l'émergence d'une fonction régulatrice analysée par elle comme un corps étranger à notre système juridique 1 ( * ) (et pourtant elle tourne, la régulation, constaterait Galilée s'il était encore de ce monde et suffisamment juriste pour en juger !). La question de fond n'est pas résolue par cette décision de justice.

Dès le 6 juillet, la ministre de la culture et de la communication a annoncé sa décision " d'engager une large consultation sur l'accès à la publicité télévisée des secteurs interdits, en vue d'une éventuelle modification de l'article 8 du décret du 27 mars 1992 ". (...) " Les technologies numériques modifient profondément le paysage audiovisuel " , a estimé Mme Tasca, pour qui " le déploiement de la télévision numérique de terre, le développement de l'internet et des hauts débits et le rôle accru de la publicité dans l'économie renforcent la nécessité de conduire une évaluation des dispositions de régulation actuellement applicables en vue de les adapter si nécessaire, en fonction des spécificités de chacun des secteurs, aux évolutions constatées ou prévisibles " .

Mme Tasca a aussi estimé que " les restrictions en vigueur ont été établies dans le cadre d'une politique en faveur du pluralisme et que ces objectifs demeurent une priorité ". (...) " Ils ne peuvent être assujettis aux seules conditions économiques " .

Ces dernières remarques, qui semblent très largement préjuger des résultats de la concertation engagée entre les différents intéressés sous les auspices de la direction du développement des médias du ministère, rencontrent l'argumentation développée par les organisations syndicales de la presse hostiles à l'ouverture.

Dans une tribune libre publiée par le Nouvel Observateur en date du 14 septembre 2000, M. François d'Orcival, président du syndicat professionnel de la presse magazine et d'opinion, a justifié ainsi le maintien de l'interdiction et son extension aux sites internet de la presse : " Certes, les sites internet n'existaient ni en 1986 ni en 1992, mais ceux-ci ne sont que la déclinaison par un autre moyen technique des mêmes activités. La question posée, et à laquelle le législateur de droite de 1986, puis le gouvernement de gauche de 1992, avaient l'un et l'autre déjà répondu " non ", est donc celle-ci : la presse, l'édition ou le cinéma doivent-ils avoir accès à la publicité télévisée ? La nouvelle économie, la mondialisation ont-elles changé quoi que ce soit au débat ? Nullement. Elles l'ont rendu seulement plus sensible et plus vif.

La réponse à la question n'est pas " parce que ", comment veut le faire croire la campagne en question. La réponse, c'est tout simplement : pour que la presse puisse rester libre. La liberté n'a jamais été celle du renard libre dans le poulailler libre. La liberté est trop précieuse pour ne pas être protégée. Elle ne peut l'être que par la loi.

Cette liberté, pour ce qui nous concerne, ne peut être que la pluralité des titres, des journaux, des opinions. En quoi l'ouverture à la publicité télévisée peut-elle porter atteinte à ce pluralisme ? Parce que ? Eh bien, oui, parce qu'elle éliminera de l'accès au public les plus faibles en ressources financières, parce qu'elle favorisera ainsi un peu plus les mégagroupes au détriment des plus petits, parce qu'elle étouffera la diversité au profit des concentrations. Bref, parce que l'on est en train de chercher à tout prix à changer les règles du jeu. "

Le syndicat de la presse magazine et d'information (SPMI), favorable depuis plusieurs années à l'ouverture de la publicité télévisée à la presse, a de son côté regretté la décision du Conseil d'Etat, notant qu'alors que l'ensemble des sites internet proposent de l'information, " la presse, dont c'est le métier, se trouve nettement défavorisée dans cet univers de concurrence déloyale " . Pour lui, " les éditeurs restent parqués dans leur " réserve d'indiens ". Seuls les archaïsmes que la société français se complaît parfois à cultiver permettent d'expliquer cette contradiction ". Citant les résultats d'une étude, le SPMI note aussi que l'accès à la publicité télévisée des sites de presse aurait sans doute permis de pallier les difficultés " d'accessibilité mentale " des médias.

Ce dernier point de vue est essentiel pour la stratégie de reconquête du lectorat dont le présent rapport souhaite le lancement. Aussi apparaît-il à votre commission nécessaire de compléter les objectifs un peu sommairement assignés par Mme Tasca à la concertation en cours par une étude approfondie du concours que la publicité télévisée pourrait assurer au développement de ce produit de presse nouveau que sont les sites internet de la presse.

Il y a sans doute moyen de définir de façon pragmatique un partage équitable entre les préoccupations tenant au maintien de la diversité des titres et celles inspirées par le souci de favoriser l'accès de la presse à ses lecteurs potentiels.

C'est ce que le CSA cherchait à faire, en lançant après la publication du communiqué n ° 414 une série d'auditions dont la livraison de mars 2000 de la lettre du CSA définissait ainsi les objectifs :

" Les auditions actuellement en cours visent à préserver les équilibres économiques existants en permettant de définir, dans la plus large concertation, des conditions d'application aptes à éviter toute vente directe de produits et de services, proscrite par l'article 2 du décret n° 92-280, ainsi que toute publicité indirecte ou déguisée pour les secteurs qui demeurent interdits d'accès à la publicité télévisée.

Une fois ces conditions d'application arrêtées et entrées en vigueur, c'est au vu de l'évolution du nouveau marché de l'internet, de sa dimension internationale et des textes applicables que le Conseil étudiera à nouveau, au terme d'une période expérimentale de dix-huit mois, les conditions d'accès à la publicité télévisée des sites internet ".

La voie réglementaire, désormais seule ouverte, permettra-t-elle une telle précision dans les éventuels ajustements, et le suivi réactif de l'évolution du dossier ?

C. L'AUGMENTATION DU PRIX DU PAPIER JOURNAL

On se contentera de rappeler ici, sans entrer dans l'analyse d'un marché très internationalisé, de plus en plus concentré, dominé par les producteurs nord-américains et scandinaves, de rappeler qu'une augmentation de 15 % à 20 % du prix du papier journal, deuxième poste de dépense de la presse après les salaires, est attendue en 2001.

La légère et bien inégale embellie, signalée plus haut, de l'économie de la presse pourrait ne pas résister à cet événement qui ne semble pas susciter l'intérêt du gouvernement.

En effet, interrogée par votre rapporteur lors de son audition du 17 octobre, Mme Catherine Tasca a répondu que la tendance à l'augmentation du prix du papier était une préoccupation dont les pouvoirs publics s'entretiennent avec les professionnels afin de trouver des solutions, et que les pouvoirs publics n'ont pas d'influence sur les cours du papier.

Alors que le montant des aides budgétaires directes à la presse diminuera en 2001 de 2 %, peut-être aurait-il été prudent d'étudier la mise en place d'une aide au papier journal inspirée de celle qui figurait il y a plusieurs années à l'article 40 du chapitre 43-03 du budget des services généraux du Premier ministre.

II. LES CRÉDITS DE 2001

Lors de son audition du 17 octobre 2000 par votre commission, Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication, annonçait une progression de 1,8 % des aides directes à la presse en 2001. Il faut nuancer cette présentation.

A. LES AIDES DIRECTES

On distinguera les aides budgétaires et le fonds de modernisation de la presse, qui n'a pas un caractère budgétaire.

1. Les aides budgétaires

Nature des aides

LFI 1999

Exécuté

LFI 2000

PLF 2001

Variation en % 2001-2000

Chapitre 41-10 - Aides à la presse

Article 11-Remboursement à la SNCF des réductions tarifs accordés à la presse

102 000 000

104 971 428

101 000 000

99 500 000

- 1,49

Article 21- Aide à la transmission par fac similé

6 660 000

3 688 571,24

6 500 000

5 000 000

- 23,08

Article 31- Fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger

22 000 000

21 747 811

23 000 000

24 000 000

4,35

Art 32- Fonds à l'aide aux quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires

20 000 000

19 929 663

26 600 000

30 000 000

12,78

Article 33- Fonds d'aide aux quotidiens régionaux à faibles ressources de petites annonces

8 200 000

8 200 000

8 500 000

9 000 000

5,88

Article 34- Fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale

8 400 000

8 384 289

8 700 000

9 200 000

5,75

Article 35- Fonds d'aide au développement du portage

49 500 000

49 479 767

50 500 000

52 500 000

3,96

Article 36- Fonds d'aide aux multimédia

15 000 000

10 000 000

15 000 000

15 000 000

0

Article 41- Aide complémentaire au plan social de la presse parisienne

13 500 000

9 169 539

13 500 000

4 000 000

- 70,37

Article 42- Remboursement des cotisations sociales de portage

7 500 000

4 581 627

7 500 000

7 500 000

0

Total des aides à la presse (hors abonnements AFP)

252 760 000

240 152 695,5

260 800 000

255 700 000

- 1,96

a) Evolution globale

Le tableau ci-dessus montre que les aides directes diminueront de 1,96 % en 2001. La ministre n'a pu faire état d'une augmentation de 1,8 % qu'en faisant abstraction de la diminution de 70,37 % de l'aide complémentaire au plan social de la presse parisienne, en voie d'achèvement comme on le rappellera ci-dessous. La non-reconduction de 9,5 millions de francs de crédits en 2001 qui résulte de cet achèvement revêt une grande signification au moment où le problème du coût de la vente au numéro de la presse parisienne provoque aux NMPP l'adoption d'un plan stratégique de réorganisation draconien, pour le financement duquel l'aide de l'Etat n'a pas encore été accordée, comme on le verra dans la troisième partie de ce rapport.

C'est donc bien le chiffre de - 1,96 % qu'il convient de retenir de ce qui concerne les aides directes.

On complète généralement le tableau des aides directes en évoquant les abonnements de l'Etat à l'AFP, qui constituent une aide budgétaire indirecte à la presse. Le montant correspondant sera en 2001 de 613 millions de francs, en augmentation de 0,92 % par rapport à 2000.

Au moment où le gouvernement refuse à l'AFP les réformes statutaires qui lui permettraient de financer elle-même son développement par l'emprunt et en nouant des partenariats - on évoquera aussi ce problème dans la troisième partie du rapport - ce chiffre de + 0,92 % n'est pas dépourvu d'ironie.

b) Les différentes aides
(1) L'aide aux quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires

Elle augmentera de 12,7 % en 2001, pour s'établir à 30 millions de francs.

Cette aide est répartie en deux sections dont la première ne peut-être inférieure à 85 % de la dotation globale.

Les conditions d'éligibilité au titre de la première section sont les suivantes : être un quotidien de langue française d'information politique et générale à diffusion nationale, paraissant cinq jours au moins par semaine, imprimé sur papier journal et dont le tirage et la diffusion payante sont respectivement inférieurs, en moyenne, à 250 000 et 150 000 exemplaires. Leur prix de vente doit être compris dans une fourchette de - 10 % à + 30 % du prix de vente moyen pondéré des quotidiens nationaux d'information politique et générale. Enfin, les recettes publicitaires ne peuvent excéder 25 % des recettes totales. Ces conditions sont vérifiées sur les données de l'année précédant celle de l'attribution de l'aide.

Le bénéfice de la seconde section est accordé aux journaux répondant aux mêmes conditions, mais dont le prix de vente ne dépasse pas 130 % du prix de vente moyen pondéré par la diffusion annuelle en France des quotidiens nationaux d'information politique et générale, sans qu'aucun plancher soit fixé.

La première section a été dotée de 19,8 millions de francs en 1999 ; la seconde de 200 000 francs.

La répartition des aides s'effectuera en 2001 selon des modalités nouvelles, en fonction des dispositions d'un décret du 26 octobre 2000.

Il s'agit d'augmenter très sensiblement les sommes allouées à l'Humanité, seule bénéficiaire de ce fonds avec La Croix. Le gouvernement a estimé que la situation critique de l'Humanité justifiait cette adaptation qui ne devrait pas léser La Croix.

La répartition de 2000 est donc en cours. En 1999, cinq titres ont bénéficié de cette aide : au titre de la première tranche, La Croix et l'Humanité ; et pour la seconde tranche, Mon Quotidien, le Petit Quotidien, l'Actu.

Les tableaux suivants indiquent la répartition des montants et le taux des aides de la première section du fonds de 1994 à 1998.

Exercices budgétaires

1995

1996 (après mise en réserve de crédits)

1997

1998

1999

1

La Croix

6 964 588

8 860 374

9 483 505

10 908 592

11 384 871

2

L'Humanité

4 948 588

6 076 313

6 213 169

7 991 408

8 344 792

3

Play Bac Presse

------

------

-----

100 000

20 000

4

Présent

603 187

748 168

------

------

------

sans emploi

70 336

Dotation du chapitre 43-03 (art.20)

12 516 362

15 684 855

15 696 674

19 000 000

20 000 000

Année

Montant

Evolution en  %

Taux

Evolution en  %

1994

12.970.323

- 33,74

0,2527

- 28,41

1995

12.516.362

- 3,50

0,2497

- 1,20

1996

19.335.123

+ 54,48

0,3870

+ 55,40

1996

15.684.855

+25,31

0,3180

+ 27,71

1997

15.696.674

+ 0,075

0,3430

+ 7,86

1998

19.000.000

+ 21

0,4597

+ 34,02

1999

20.000.000

+ 5,2

0,5152

+ 12,7

(2) L'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces

La dotation de ce fonds augmentera en 2001 de 5,88 %, passant de 8,5 millions de francs à 9 millions de francs.

Les modalités d'attribution des aides ont été modifiées par le décret n° 97-1068 du 20 novembre 1997 qui distingue deux sections du fonds afin d'apporter une aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources en petites annonces subissant de fortes augmentations de leurs abonnements postaux.

Pour chaque section, la répartition du montant global de l'aide est définie proportionnellement au nombre d'exemplaires vendus, dans la limite d'un plafond par exemplaire égal à 6 % du prix de vente moyen des quotidiens éligibles à cette aide.

Les tableaux suivants indiquent, depuis 1995, l'évolution des crédits du fonds et du taux unitaire de subvention, ainsi que leur répartition entre les quotidiens éligibles.

Année

Montant

Evolution en  %

Taux

Evolution en  %

1996

8 015 701

+ 48,97 %

0,12729

+ 43,5 %

1997

7 813 346

- 2,52 %

-

-

1 ère section

7 032 012

-

0,1288

+ 1,2 %

2è section

781 334

-

0,0821

-

1998

7 800 000

- 0,2 %

-

-

1 ère section

7 020 000

- 0,2 %

0,124

- 3,7 %

2è section

780 000

- 0,2 %

0,1068

+ 30 %

1999

8 200 000

+ 5,12%

-

-

1 ère section

7 380 000

+ 5,12%

0,125

+ 0,8%

2è section

820 000

+ 5,12%

0,114

+ 7,5%

(3) L'aide au portage des quotidiens

En augmentation de 3,96 %, cette aide atteindra un montant de 52,5 millions de francs en 2001.

Le développement important de la dotation de ce fonds, passée depuis 1997 de 15 millions à 52,5 millions de francs, traduit la priorité que le gouvernement accorde à juste titre à cette forme particulièrement prometteuse de distribution que constitue le portage. Cette inflexion remonte à l'adoption du plan de réforme des aides à la presse d'avril 1995, et répond à la conviction, partagée par les éditeurs, que la diffusion par portage constitue un des axes principaux des stratégies de développement de la presse. Le portage est perçu comme complémentaire de la vente au numéro, et est pris en charge, dans certains cas, par le réseau de vente au numéro, le diffuseur de presse se chargeant de porter les exemplaires aux lecteurs intéressés.

En 1999, 59 titres ont bénéficié de cette aide, soit 7 quotidiens nationaux (pour 20,5 % du montant total du crédit), 31 régionaux (pour 67,6 % du montant total du crédit) et 21 départementaux (pour 11,7 % du montant total du crédit).

Aux termes du décret du 6 novembre 1998, la dotation est répartie pour un quart en fonction du nombre d'exemplaires portés, et pour les trois autres quarts, en fonction de la progression de ce nombre au cours des deux dernières années.

Cette clé de répartition permet d'aider prioritairement les journaux qui réalisent des efforts de prospection destinés à leur permettre de gagner de nouveaux lecteurs.

(4) Le fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale et locale

La dotation de ce fonds progresse de 5,75 % et s'établit ainsi à 9,2 millions de francs.

L'aide a été instituée par le décret n° 96-410 du 10 mai 1996, dont le dispositif a été modifié par le décret n° 97-1067 du 20 novembre 1997 visant à tenir compte de la situation des hebdomadaires les plus touchés par l'augmentation des tarifs postaux due à la mise en place des accords Galmot.

L'aide est réservée aux publications d'information politique et générale à diffusion régionale, départementale ou locale, de langue française, inscrites sur les registres de la Commission Paritaire des Publications et Agences de Presse (CPPAP), dépassant d'une façon manifeste les préoccupations d'une catégorie de lecteurs, paraissant au moins cinquante fois par an, imprimées sur papier journal, et dont le prix de vente est compris entre 50 % et 180 % du prix de vente moyen des quotidiens régionaux, départementaux ou locaux d'information politique et générale. Le développement des réseaux de vente, situés très majoritairement en zones rurales et semi-rurales, appelle en effet, la prise en charge de coûts importants :

- livraison par l'éditeur d'un grand nombre de points de vente dans des petites communes, ce qui nécessite la mise en place d'une structure de distribution coûteuse ;

- ramassage des invendus ;

- opérations de facturation pour des volumes de vente très faibles par points de vente.

Quelque 200 publications reçoivent une aide au titre de ce dispositif.

(5) L'aide à la transmission par fac-similé

Cette aide va diminuer de 23,08 % en 2001, s'établissant à 5 millions de francs. Elle avait remplacé en 1999 l'allégement des charges téléphoniques des correspondants de presse, avec une dotation de 51,7 % inférieure.

Votre rapporteur avait regretté, dans son avis sur le budget de 2000, le remplacement d'une aide profitant essentiellement à la presse quotidienne régionale par un instrument destiné à favoriser l'impression en province des quotidiens parisiens. Il considère que l'aide à la transmission des données numérisées pourrait utilement se substituer progressivement à celle relative au fac similé.

Les bénéficiaires de cette aide ont été, en 1999, 9 quotidiens nationaux, 1 quotidien régional et Le Canard enchaîné.

(6) Les crédits de remboursement à la SNCF des réductions de tarifs accordées à la presse

Ils se monteront à 99,5 millions de francs en 2001, enregistrant une diminution de 1,49 %.

Rappelons que le tarif de transport ferroviaire de la presse est calculé à partir des prix de revient des différents moyens mis en oeuvre : moyens de transport (fourgons et espaces fourgons des trains de voyageurs, trains rapides de marchandises spécialisés, véhicules routiers), moyens de manutention dans les gares, et de distribution aux dépositaires. L'estimation des prix de revient est actualisée périodiquement en fonction de l'évolution des coûts et des progrès techniques.

A partir du 1 er janvier 1996, l'Etat a reversé à la SNCF 70 % du tarif accordé aux quotidiens, contre 35 % pour les périodiques, les éditeurs acquittant le complément. En 2000, le taux de la compensation a été fixé à 60 % pour les quotidiens et a été abaissé à 19 % pour les publications (contre 22 % en 1999).

Cette modulation avait pour objectif d'une part d'inciter les partenaires du transport ferroviaire de la presse à une certaine maîtrise des coûts, et d'autre part, de réagir à l'évolution qui fait des magazines les principaux bénéficiaires d'un mécanisme destiné initialement aux quotidiens. En effet, cette aide, progressivement étendue à l'ensemble des 18 000 publications inscrites à la commission paritaire des publications et agences de presse, est le premier poste d'aide directe.

Il est envisagé en 2001 d'affecter 90 millions de francs à l'indemnité compensatrice, et de consacrer le solde au remboursement de la dette contractée par l'Etat envers la SNCF au milieu des années 1990.

(7) Le fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger

Les crédits de ce fonds augmenteront en 2001 de 4,35 % pour s'établir à 24 millions de francs.

Trois grandes catégories de bénéficiaires se répartissent ces crédits : d'une part, les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) et l'Union pour la diffusion de la presse française dans le monde (Unipresse), qui sont des organismes collectifs d'exportation ; d'autre part, les éditeurs individuels.

Tous les types de publications françaises inscrites à la commission paritaire des publications et agences de presse et justifiant d'une part d'un marché à l'étranger, d'autre part d'un plan de promotion sérieux, peuvent prétendre à une aide du fonds. Ces publications doivent, de surcroît, être rédigées " en tout ou partie " en français et " contribuer au rayonnement de la langue, de la pensée et de la culture françaises à l'étranger ".

En 2000, 46 titres ont reçu une aide directe pour 5,95 millions de francs environ au total ; la collectivité des éditeurs a bénéficié d'un concours de 17,2 millions de francs par l'intermédiaire de ses organismes collectifs (NMPP et Unipresse).

(8) Le soutien au plan social de la presse parisienne

Ce crédit, en diminution de 70,37 % par rapport à 2000 comme on l'a vu plus haut, sera porté à 4 millions de francs, somme suffisante pour couvrir le coût du dispositif en 2001.

Il convient de rappeler les objectifs et les modalités d'application de ce dispositif en voie de disparition.

Dans un contexte économique difficile et face à une crise du lectorat, les entreprises de presse quotidienne parisienne ont dû opérer de sérieux gains de productivité qui se sont notamment traduits par la mise en place d'un plan de modernisation des imprimeries intégrées des quotidiens nationaux.

Dans ce cadre, le Syndicat de la presse parisienne (SPP) et le Comité intersyndical du Livre Parisien (CILP) ont signé, en juin 1992, un accord-cadre visant à créer les conditions de la mutation de la presse parisienne et à résorber les sureffectifs.

Cet accord s'accompagne d'un volet social auquel l'Etat a accepté d'apporter son soutien, en octobre 1992, puis en décembre 1993, en consentant des mesures dérogatoires au droit commun :

- entrée en préretraite à 55 ans ;

- départs en congé de conversion dès 50 ans, pris en charge par l'Etat à hauteur de 50 %.

Le coût de ce soutien par l'Etat a été fixé à 666 millions de francs sur toute la durée du plan, c'est-à-dire jusqu'au 31 août 2001.

Le ministère de la communication prend à sa charge le financement des congés de conversion au-delà du 10 ème mois.

Le plan social est mis en oeuvre par tranches d'application dont les modalités de gestion sont déterminées chaque année par les parties concernées et font l'objet d'un avenant au protocole d'accord d'octobre 1992. Le dernier en date, instituant une septième et ultime tranche d'application courant jusqu'au terme du plan, a été signé le 7 septembre 2000.

(9) Le remboursement des cotisations sociales de portage de la presse nationale

Ce crédit sera maintenu à 7,5 millions de francs.

(10) Le fonds d'aide aux investissements multimédia

Le fonds d'aide aux investissements multimédia, géré conjointement par l'IFCIC et le SJTIC sera, comme les deux années précédentes, doté de 15 millions de francs.

Le fonds octroie aux entreprises de presse écrite inscrites à la CPPAP des avances partiellement remboursables, afin de leur permettre " de développer des projets offrant au public des accès aux contenus des journaux, magazines et revues sur les nouveaux supports numériques : services en lignes, supports d'archivages (cédérom, DVD, DAT...) lorsque ces derniers apparaissent comme le complément du contenu éditorial de la publication et qu'ils sont prévus pour faire l'objet d'une actualisation régulière par un service en ligne, ou pour intervenir fonctionnellement dans un site en ligne ".

Seules les dépenses directement et nécessairement liées au projet multimédia sont prises en compte. Le bénéfice du fonds est limité à un projet par année et par entreprise de presse et aucun nouveau projet ne pourra être examiné avant la bonne fin d'un projet précédent.

L'avance représente 50 % au maximum de la dépense éligible, avec un plafond de 2 millions de francs et est accordée pour une durée de 9 à 48 mois. Un allégement de la dette, d'un montant maximal de 40 % de l'avance accordée, peut être accordé après constatation par le comité de sélection de la bonne fin du projet et du respect de ses engagements par le bénéficiaire.

En 1999, 16 dossiers ont été aidés pour une somme totale de 11,8 millions de francs. Lors du premier semestre 2000, 10 dossiers ont reçu 3,2 millions de francs d'avances. Sur les trois dernières années, les aides ont concerné 24 quotidiens, en majorité des quotidiens régionaux, 11 hebdomadaires et 19 mensuels.

2. Le fonds de modernisation de la presse

Le fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée et des agences de presse a été créé par la loi de finances pour 1998. Il a été mis en place en 1999 avec un crédit de 150 millions de francs. Les recettes sont estimées en l'an 2001 à 160 millions de francs. La collecte de 1999 est évaluée à 157 millions de francs.

Ces montants restent éloignés des estimations de recettes avancées lorsque la taxe sur la publicité hors médias a été créée pour financer le fonds de modernisation. Le chiffre de 300 MF avait alors été évoqué.

Cet écart est d'autant plus fâcheux que, le taux de taxe étant de 1 %, le chiffre d'affaires estimé de la publicité hors médias est supérieur à 50 milliards de francs.

Interrogé l'année dernière sur les raisons de cette situation par votre rapporteur, le service juridique et technique de l'information avait répondu que la base taxable pouvait se situer autour de 35 à 40 milliards de francs, pour autant qu'on puisse l'évaluer avec quelque précision à partir du poste 63 du plan comptable général, qu'il conviendrait d'opérer d'autres déductions, dont le montant est difficile à identifier, pour évaluer la base effectivement taxable, et qu'au demeurant le ministre avait demandé au ministre chargé du budget d'analyser les conditions de la perception en 1999 et d'envisager les améliorations envisageables. Insatisfait de cette réponse imprécise, votre rapporteur a renouvelé cette année ses demandes d'explication à la ministre de la culture et de la communication. Lors de son audition du 17 octobre Mme Catherine Tasca n'a pas été plus en mesure que sa devancière d'expliquer les causes du très faible rendement de cette taxe.

A défaut de ces renseignements dont il continue à espérer la communication, tout en soupçonnant que le désintérêt des services fiscaux pour cet instrument de financement de la presse joue un rôle essentiel dans le faible rendement de la taxe, votre rapporteur indiquera ci-dessous les modalités de gestion de ce système.

Le décret n° 99-79 du 5 février 1999, modifié, définit les types d'actions de modernisation qui peuvent être prises en compte, les critères d'éligibilité ainsi que la composition et le fonctionnement du Comité d'orientation.

L'arrêté du 5 février 1999 fixe aussi le taux maxima et les plafonds retenus pour l'octroi des subventions et des avances au titre du fonds.

Le Comité d'orientation chargé d'émettre des avis sur les demandes d'aide est composé de cinq représentants de l'administration (trois représentants du ministre chargé de la communication, un représentant du ministre chargé du budget et un représentant du ministre chargé de l'industrie), et de cinq représentants des milieux de la presse (un pour la presse quotidienne nationale, un pour la presse quotidienne régionale, un pour la presse quotidienne départementale, un pour la presse hebdomadaire régionale et un pour les agences de presse). Il est présidé par un membre du Conseil d'Etat.

Il convient de préciser que la politique d'aide à la presse qui a été mise en place dans le cadre de cet outil se situe dans une logique de projet. En effet, il est exclu pour les pouvoirs publics que les aides de ce fonds se transforment en contribution à la gestion des entreprises de presse. Il s'agit au contraire de prise en compte de véritables projets de développement dont les publications assument au moins 70 % du coût.

Le Comité d'orientation, s'est réuni :

- le 18 juin 1999 pour examiner 48 dossiers et pour donner un avis sur des dépenses fixées à 73 millions de francs ;

- le 2 décembre 1999 pour examiner 72 dossiers et donner un avis pour une dépense fixée à 99 millions de francs ;

- le 28 janvier 2000 pour examiner 52 dossiers et donner un avis pour une dépense fixée à 52 millions de francs ;

- le 21 avril 2000 pour examiner 30 dossiers et donner un avis pour une dépense fixée à 63 millions de francs,

- et enfin, le 22 juin 2000, pour examiner 44 dossiers et donner un avis pour une dépense fixée à 39,5 millions de francs.

Le montant total des aides accordées depuis la création du Comité est de 326,5 millions de francs et concerne 200 dossiers recevables.

La somme de 326,5 millions de francs se répartit en 316 millions de francs au titre de subvention et 10,5 millions de francs au titre d'avance.

La Direction du Développement des Médias assure le secrétariat du comité et l'instruction des dossiers.

Les critères d'attribution des aides accordées au titre du fonds sont :

- la situation de l'entreprise,

- l'ensemble des aides publiques dont elle est susceptible de bénéficier,

- la nature et la qualité du projet,

- la contribution du projet à la modernisation de l'entreprise,

- son coût net pour celle-ci,

- enfin, l'effet du projet sur l'emploi.

Il est tenu compte, pour l'attribution des aides, de la nature et des caractéristiques de la catégorie de publication (agence, presse hebdomadaire régionale, presse quotidienne départementale, presse quotidienne nationale, presse quotidienne régionale).

Pour la détermination de l'assiette de l'aide, sont prises en considération les dépenses liées au projet de modernisation et strictement nécessaires à la réalisation de celui-ci.

A l'appui de leur demande les entreprises et agences de presse fournissent un dossier établi suivant un modèle approuvé par le Comité d'orientation.

Le secrétariat du fonds contrôle les indications fournies.

Le montant total de l'aide accordée à un projet, sous forme de subvention et d'avance, ne peut dépasser 40 % du montant des dépenses éligibles. Le plafond peut cependant être porté à 50 % des dépenses éligibles pour les projets collectifs.

L'octroi d'une subvention ou d'une avance est subordonné à la conclusion, entre l'Etat et le bénéficiaire, d'une convention fixant notamment les conditions d'attribution de l'aide et prévoyant, s'il y a lieu, l'échéancier de remboursement de l'avance et les pénalités applicables.

Une commission de contrôle sera chargée de vérifier la conformité de l'exécution des projets aux engagements pris par les bénéficiaires des aides versées par le fonds.

En ce qui concerne les montants de la subvention susceptible d'être accordée à un projet de modernisation, il convient de distinguer :

- la presse quotidienne d'information politique et générale, plafonnée à 12 millions de francs et à 30 % des dépenses comprises dans l'assiette de l'aide,

- la presse hebdomadaire régionale d'information politique et générale et les agences, plafonnées à 2 millions de francs et à 30 % des dépenses comprises dans l'assiette de l'aide.

Au titre des avances susceptibles d'être accordées à un projet de modernisation, le plafonnement est fixé :

- pour la presse quotidienne à 18 millions de francs et à 30 % des dépenses,

- pour la presse hebdomadaire régionale et les agences, à 3 millions de France et à 30 % des dépenses.

B. LES AIDES INDIRECTES

L'aide au transport postal de la presse

Le transport et la distribution de la presse, indispensables à la libre circulation de l'information et permettant à chacun d'accéder à la publication de son choix, constituent en application de l'article 2 de la loi du 2 juillet 1990 un service obligatoire que La Poste exerce dans le respect des dispositions des articles 2, 3 et 6 de son cahier des charges.

Depuis 1991 et conformément à l'article 38 du cahier des charges de la Poste, l'Etat participe à la prise en charge du coût du service obligatoire du transport et de l'acheminement de la presse. Le cahier des charges précise notamment que " les sujétions particulières, supporté par la Poste à raison du régime d'acheminement et de distribution de la presse mentionné à l'article 6 du présent cahier des charges font l'objet d'une juste compensation financière ".

Cette participation est déterminée pour la durée du contrat d'objectif et de progrès, c'est-à-dire jusqu'en 2001. Le texte précise que l'Etat améliore sa participation à la couverture du coût de cette activité pour la Poste. La contribution annuelle de l'Etat, fixée à 1 850 millions de francs pour 1998 et 1999, est portée à 1 900 millions de francs en 2000 et 2001. La somme correspondant à la participation de l'Etat au transport et à la distribution de la presse est versée à la Poste en douze douzièmes le dernier jour ouvrable de chaque mois.

Le régime de l'article 39 bis du code général des impôts

La moins-value fiscale pour le budget de l'Etat résultant de l'application de l'article 39 bis du code général des impôts est estimée à 150 millions de francs pour 2000, soit un montant comparable à celui constaté en 1999, après la forte baisse constatée entre 1997 et 1998 (-28,5 %). Les prévisions pour 2001 ne sont pas disponibles.

Le régime préférentiel en matière de TVA

Depuis 1988, toutes les publications de presse inscrites à la commission paritaire sont soumises à une TVA de 2,10 % en France métropolitaine quelle que soit leur périodicité.

Pour 2000, la dépense fiscale qui en résulte est évaluée à 1,3 milliard de francs par rapport à un taux à 5,5 % et à 7 milliards de francs par rapport au taux normal de 19,6 % (auquel sont soumises les publications non inscrites à la commission paritaire).

Les exonérations de taxe professionnelle (article 1438 du CGI)

Les éditeurs de feuilles périodiques et, sous certaines conditions, les agences de presse ainsi que, depuis le 1 er janvier 1995, les correspondants locaux de presse régionale ou départementale sont exonérés de taxe professionnelle.

Le coût de ces exonérations est supporté par les collectivités locales qui participent ainsi, aux côtés de l'Etat, à l'effort public en faveur de la presse. Son montant est évalué à 1 200 millions de francs pour 1999.

Le statut fiscal et social des correspondants de presse

Votre commission tient à noter que les correspondants de presse, véritables artisans de la presse dans la vie des quartiers urbains ou des cantons ruraux, ne bénéficient d'aucune mesure nouvelle (par comparaison, les bas revenus sont exonérés de la CSG et du RDS).

III. QUELQUES DOSSIERS

A. L'AFP EN PANNE D'AMBITION

Nommé en mars 1999 à la tête de l'Agence France Presse pour un mandat de trois ans, M. Eric Giuily démissionnait de ses fonctions le 28 septembre 2000 à la suite du refus que l'Etat opposait à sa proposition d'élaborer un budget déficitaire pour 2001. Cette circonstance est significative. C'est pour avoir mis en évidence les causes structurelles du sous-financement de l'Agence, que M. Eric Giuily avait assorti de propositions statutaires le plan stratégique de développement à cinq ans élaboré conformément à son mandat. Si la tutelle n'a jamais formellement désavoué ce projet, elle a progressivement retiré son soutien au président, jusqu'à ce que, ultime dérobade, son refus d'accorder à l'AFP la possibilité de financer par l'emprunt la mise en oeuvre en 2001 de la stratégie de développement adoptée provoque l'aboutissement que l'on sait.

1. Le plan Giuily

La mission confiée à M. Eric Giuily par l'Etat et par les représentants de la presse au conseil d'administration de l'Agence a été résumée dans ces termes en mai 1999 par Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication : " rechercher les raisons pour lesquelles l'AFP ne parvient pas à être structurellement bénéficiaire, ce qui lui permettrait d'assurer par elle-même le financement des investissements nécessaires à son adaptation indispensable ", et proposer les remèdes.

Le plan stratégique de M. Eric Giuily en fonction de ces objectifs constatait le caractère structurellement déséquilibré de l'exploitation de l'AFP et pariait sur les perspectives offertes à l'entreprise par les nouvelles technologies, à la condition que soit effectué un investissement massif et rapide.

a) Un constat sans complaisance

Il est intéressant de rappeler très sommairement quelques éléments saillants de l'analyse présentée par M. Eric Giuily en prélude à ses propositions.

S'agissant de la structure des coûts, il était rappelé qu'un plan à 4 ans lancé au début des années 1990 avait fait descendre les frais de personnel à 60 % du chiffre d'affaires contre 70 % auparavant. Mais dès 1996, la tendance a repris son cours naturel, les frais de personnel remontant à 65 % du chiffre d'affaires en 1998, alors que la marge annuelle d'exploitation passait de 140 millions de francs en 1995 à 87 millions de francs en 1998.

M. Eric Giuily constatait aussi que la capacité d'investissement, de l'ordre de 100 millions de francs par an, et sur laquelle 60 à 80 millions de francs sont préemptés par l'entretien de l'outil existant, ne pouvait que diminuer.

En effet, la croissance du chiffre d'affaires de l'AFP est limitée par la réduction des marchés traditionnels, représentés par la presse écrite, et le chiffre d'affaires conquis ces dernières années auprès de nouveaux clients (250 millions de francs) a servi en grande partie à compenser la diminution du chiffre d'affaires auprès de la clientèle traditionnelle.

Dans ces conditions, l'AFP se trouve incapable de faire face à la révolution en cours du marché de l'information.

Or, et c'est l'idée clé du projet présenté par M. Eric Giuily, un échec dans le multimédia signerait le début du déclin irréversible de l'Agence. Avec l'évolution du marché de l'information consécutif à la révolution numérique, une clientèle nouvelle souhaite en effet disposer de services plus personnalisés et avoir accès non seulement à des flux d'informations, mais aussi à des archives rassemblées dans des banques de données. Ces services sont le plus souvent des " services groupés " c'est-à-dire comportant du texte, de la photo, et à terme des images animées, du son, des graphiques. Alors que le marché des médias traditionnels, particulièrement celui de la presse écrite, stagne, le marché du hors média semble appelé à un important développement, sur internet en particulier. Ceci permettrait de compenser les conséquences de deux importants ratages : la diversification dans l'information et les transactions financières réussies par Reuters dans les années 70 ; de la même façon, dans la première moitié des années 1990, l'Agence n'a pas su prendre le virage de l'information audiovisuelle, contrairement à ses principales concurrentes, Associated Press et l'agence Reuters.

b) Une démarche cohérente

L'objectif premier du plan était de proposer l'élaboration d'un outil susceptible de répondre aux besoins d'une clientèle internationale, les principales marges de croissance se situant dans cette direction. De nouveaux types de clientèle apparaissent aussi. C'est ainsi que la clientèle d'internet représente aujourd'hui 30 millions de chiffre d'affaires et que des entreprises demandent des contenus destinés à leur service intranet et à leur site web.

Le second axe prioritaire était le renforcement des métiers de base et la création, en aval, de services spécialisés. C'est en effet à partir du métier traditionnel de l'agence que devaient être élaborés, selon le plan, des services plus spécialisés, notamment dans quelques secteurs : l'économie et la finance en France et à l'étranger, les sports -une banque de données sportives est en cours d'élaboration-, les phénomènes de société et tout ce qui concerne la vie pratique, la consommation, le divertissement, la santé, les hautes technologies.

Le troisième axe stratégique était la fixation d'un objectif de croissance du chiffre d'affaires. Celui-ci devrait passer de 1,4 milliard à 2 milliards en cinq ans, essentiellement grâce aux activités internationales.

Le dernier axe stratégique était l'obtention des moyens financiers nécessaires, estimés à 800 millions de francs sur la durée du plan, la majeure partie étant investie dans les deux ou trois premières années.

Un volet institutionnel accompagnait ces propositions.

Il s'agissait de permettre l'établissement de partenariats industriels afin d'obtenir les moyens financiers nécessaires mais aussi de croiser les savoir-faire technologiques, et d'avoir accès aux images animées et au son.

Ceci a conduit à envisager l'adaptation du statut élaboré en 1957.

Celui-ci comporte des dispositions, comme la règle de l'équilibre budgétaire, qui gênent considérablement le financement de l'investissement.

En outre, l'Agence, n'ayant pas d'actionnaires, ne peut pas opérer d'augmentation de capital, émettre des obligations convertibles et des prêts participatifs, et n'a donc pas la possibilité de se financer sur le marché. Elle est condamnée à l'emprunt bancaire, au taux le plus élevé, dans la mesure où elle n'est pas adossée à un groupe bénéficiant d'une notation de qualité.

L'avant-projet de plan stratégique proposait d'effacer ces obstacles en prévoyant en particulier la constitution d'un capital social. La propriété de ce capital devait appartenir initialement à une entité commune aux partenaires historiques, prenant la forme d'une fondation. Une augmentation du capital social aurait ensuite été l'occasion d'associer à cette entité les nouveaux partenaires et le personnel. Ces projets exigeaient l'adaptation de la loi de 1957.

Le projet se proposait aussi de garantir juridiquement la pérennité des principes constitutifs d'indépendance et d'objectivité. Tout d'abord, il était considéré comme exclu d'adosser l'AFP à une seule entreprise. L'avant-projet de plan stratégique présentait une liste de cinq catégories de partenaires potentiels, la sélection de quatre ou cinq partenaires effectifs au minimum. L'objectif était de substituer à l'équilibre voulu par le statut de 1957 un équilibre élargi entre l'Etat, la presse, des opérateurs privés ou publics et le personnel. Il s'agissait d'élargir la base de l'AFP en réaffirmant sa vocation d'entreprise d'intérêt national et d'entreprise mondiale.

Une " charte du partenariat " devait traduire ces principes et orienter la recherche des partenaires.

2. Le choix de l'immobilisme

a) L'abandon du volet institutionnel

La présentation des premières esquisses du projet de stratégie de développement a suscité dans l'entreprise un débat marqué par l'opposition résolue d'une partie du personnel aux propositions statutaires du président.

Ce débat a été ponctué par l'annonce, le 29 novembre 1999, de la décision de M. Eric Giuily de retirer définitivement le projet de transformer de l'AFP en société anonyme et d'ouvrir son capital en vue d'établir un partenariat stratégique global.

La ministre de la culture et de la communication s'est alors félicitée de cette position en estimant que la stratégie de l'AFP devait " être élaborée avec les personnels de l'agence et ses administrateurs, c'est-à-dire les représentants de la presse et de l'Etat ".

La suite des événements allait montrer qu'il s'agissait en fait de la première étape de l'abandon de la tentative de M. Eric Giuily.

b) Le lancement ébauché de la stratégie de développement

Pour autant, l'année 2000 a vu l'ébauche d'un lancement des autres volets de la stratégie de développement, sous la forme de trois séries d'actions.

L'adaptation des services existants (textes, photo, infographie) aux besoins de l'internet.

Cette action, engagée depuis 1997, a été fortement accélérée en 1999 et 2000. Elle se traduit notamment par :

- l'implantation d'unités de production multimédia, dans chaque région, et dans les principaux bureaux et services de l'Agence,

- le développement d'une nouvelle console rédactionnelle dite multimédia,

- l'augmentation des capacités en réseaux et en serveurs, et le recrutement de techniciens capables de faire face à l'extrême diversité des demandes des clients,

- la création d'une direction du marketing et d'un véritable réseau commercial international,

- la création de la direction du développement multimédia.

L'enrichissement des contenus

Si la demande sur le web n'est pas encore stabilisée, il semble qu'elle se portera principalement sur trois domaines : le sport, l'économie-finances et les phénomènes de société (haute technologie, santé, environnement, culture-loisirs), exigeant une précision accrue des informations, des contenus plus détaillés, plus locaux, diffusés dans un plus grand nombre de langues.

L'Agence répond à ces exigences :

- en renforçant ses services de production (recrutement de 89 journalistes de production en 3 ans par réaffectation interne de postes en 1998 et 1999 et par augmentation des effectifs en 2000) ;

- en créant de nouveaux services de production dans le cadre de filiales qui lui permettent de s'associer à des partenaires et de partager l'effort d'investissement initial. C'est ce qui a été fait il y a 10 ans avec AFX pour l'information financière en langue anglaise, c'est ce qui vient d'être fait avec Sport Asia. Com pour l'information sportive en Asie, en anglais, en chinois et à l'avenir en japonais et en coréen.

D'autres projets sont en cours d'étude tels que la création d'un service économique et financier pour le Moyen-Orient, d'un service en français sur les activités maritimes, d'un service international d'information en 3 langues sur la culture et le divertissement.

- Pour le sport, un partenariat type Sport Asia.Com centré sur le football est étudié en priorité, en Amérique du Sud, le marché d'Amérique du Nord semblant déjà saturé. En Europe, le développement peut s'appuyer sur un renforcement du réseau interne et sur SID, la filiale allemande de l'AFP.

- Pour l'économie-finances, il est envisagé de se concentrer sur AFX sauf pour les produits en langue française. Le business plan d'AFX prévoit une implantation prioritaire aux USA, l'Amérique du Sud et le Japon venant en second rang. Pour les produits en langue française, plusieurs projets de partenariat sont en cours d'examen.

En mars 2000, l'AFP a repris pour 2 millions de livres les 50 % que le groupe Financial Times détenait dans AFX, en raison des conflits d'intérêt existant avec la filiale Internet FT. Com du Financial Times, avec l'objectif de rechercher de nouveaux partenaires pour financer un plan de développement ambitieux par augmentation de capital. Celle-ci est en cours de négociation.

Pour les phénomènes de société, l'Agence n'a pas à ce jour de projet significatif sauf dans le domaine culture-divertissement. La première étape est donc le renforcement de la couverture interne en matière de santé, haute technologie, environnement tout en poursuivant la recherche de projets de partenariats.

La diversification des services

Pour être un acteur crédible sur le web à moyen terme, l'AFP cherche à compléter ses services traditionnels (texte, photo et infographie) par deux nouvelles séries d'activités.

Il s'agit, en premier lieu, de lier les flux d'information à des archives regroupées dans des banques de données.

Cela a été fait en interne pour la photo avec Image-Forum et pour le sport avec la Banque de données Sports (BDS) qui ont représenté des investissements importants, totalement autofinancés.

Le même processus, à l'étude dans les autres domaines prioritaires (économie et finances, phénomènes de sociétés), ne peut être engagé, eu égard au montant des investissements nécessaires, que dans le cadre de partenariats.

Parallèlement, l'AFP cherche à proposer à ses clients des images animées et du son pour le web. Elle est, on l'a vu plus haut, pratiquement absente de ce domaine d'activité investi par ses concurrents traditionnels, AP et Reuters, véritables agences d'informations télévisées.

La diversité des modalités de mise en oeuvre et des domaines à couvrir est considérable et, en fonction des choix éditoriaux et techniques qui seront faits, l'ampleur des investissements à réaliser variera significativement. La nécessité d'aller vite et l'absence de savoir faire de l'Agence en matière de production d'images la conduisent en outre, ici encore, à rechercher des partenaires.

En ce qui concerne la diversification, l'Agence en est ainsi davantage au stade des projets qu'à celui des réalisations : d'ici la fin de 2000 des études de marché devaient être menées, un cahier des charges éditorial défini, des expériences techniques de production et de transmission réalisées, avant que soient présenté un projet structuré et chiffré.

On ne sait pas encore si l'avortement brutal de la stratégie de M. Eric Giuily sera compatible avec la poursuite de ces projets.

c) L'avortement du plan Giuily

Après le retrait du volet institutionnel de son plan stratégique en novembre 1999, M. Eric Giuily a engagé une consultation avec l'ensemble des partenaires de l'AFP, à l'issue de laquelle il a exprimé le souhait que soient effectuées sans retard excessif les adaptations statutaires indispensables à la recherche des financements nécessaires au développement de l'entreprise.

Constatant l'immobilisme d'un gouvernement apparemment tétanisé par l'opposition désormais virulente d'une partie du personnel à toute initiative de la présidence, et convaincue de la nécessité vitale d'avancer, votre commission a adopté, sur la proposition de votre rapporteur, une proposition de loi adaptant de façon limitée la loi de 1957 aux exigences minimales d'une relance de l'AFP.

Il importe d'en rappeler le contenu afin de ramener toute polémique à sa vraie dimension :

- l'article premier de cette proposition modifie l'article premier de la loi du 10 janvier 1957 afin de permettre à l'AFP de prendre des participations dans toutes sociétés françaises ou étrangères constituées ou à constituer. Il s'agit d'inscrire dans la loi une possibilité que prévoit d'ores et déjà le sixième alinéa du décret du 9 mars 1957 pris pour l'application de la loi de 1957, en précisant le cadre et les finalités de cette possibilité ;

- l'article 2 modifie l'article 10 de la loi du 10 janvier 1957 afin de porter à cinq ans la durée du mandat du président. Il s'agit d'étendre à l'AFP le bénéfice de la réforme appliquée à l'audiovisuel public ;

- l'article 3 modifie l'article 12 de la loi du 10 janvier 1957 afin de permettre au conseil d'administration d'adopter un budget en déséquilibre, à titre exceptionnel et après avis motivé de la commission financière, à condition que le déséquilibre soit justifié par la mise en oeuvre des projets de développement et que les conditions du retour à l'équilibre dans les trois ans soient explicitement prévues ;

- l'article 4 complète l'article 13 de la loi du 10 janvier 1957 sur deux points : il consacre d'une part le droit de l'AFP de recourir à l'emprunt (cette possibilité n'est actuellement mentionnée que par le septième alinéa de l'article 14 du décret du 9 mars 1957), il permet d'autre part à l'Agence d'émettre des titres participatifs et des obligations.

Ces propositions réalistes et modestes -elles ne font qu'entériner et préciser des possibilités d'ores et déjà rendues possibles, mais dans des conditions imprécises et précaires, par le décret d'application du 9 mars 1957- semblent avoir suscité l'embarras de la ministre de la culture et de la communication qui leur a opposé en juin une fin de non recevoir abrupte en déclarant que la réforme de l'AFP n'était pas à l'ordre du jour et que pour l'instant l'AFP devait se développer dans le cadre de son statut actuel.

Le refus, en septembre, d'admettre l'adoption d'un budget dont l'exécution aurait été financée par l'emprunt a marqué un raidissement qui a inévitablement provoqué la démission du président Giuily.

Cet épisode méritait une mise en perspective. M. Henri Pigeat, ancien président de l'AFP, a présenté à cet égard d'utiles rappels et d'intéressantes analyses dans un article publié dans Le Monde du 13 octobre.

Ce texte confirme en substance que le statut de 1957, quels qu'aient été ses mérites passés, maintient aujourd'hui l'Agence dans un immobilisme désastreux : " les faiblesses économiques du statut sont devenues des handicaps rédhibitoires lorsque les techniques et les marchés ont commencé à bouleverser les charges et les obligations des agences de presse " . Il pointe les responsabilités de l'Etat, qui " oscille depuis quinze ans entre l'attentisme et un interventionnisme brouillon, plus soucieux d'intérêts électoraux à court terme que de vision d'avenir " . Il rappelle qu'une tentative de reconversion lancée en 1975 avec des moyens exceptionnels et donc difficilement répétitifs a été stoppée en 1986 " lorsque l'Etat s'est rangé aux côtés des organisations syndicales qui interdisaient la remise en cause d'un certain nombre d'intérêts acquis qu'il fallait pourtant rendre compatibles avec les contraintes de la concurrence internationale " . Il lance un message que votre rapporteur veut croire excessivement pessimiste : " l'AFP, agence mondiale, est aujourd'hui au bout du rouleau [...] Elle a gaspillé une partie de ses chances dans la photographie, dans l'information économique et dans les services de télécommunications. Elle n'a pas su entrer dans l'information télévisée. Elle a marqué trop longtemps le pas devant l'internet " .

L'article de M. Henri Pigeat appelle enfin l'Etat à prendre ses responsabilités en faisant de l'AFP " une entreprise véritable et responsable, dans le cadre de missions d'intérêt général garanties par la puissance publique " .

Cette conclusion semble démentir le verdict qui figure en tête de l'article : " quelle que soit la respectabilité du nouvel élu, il risque fort d'être impuissant. Tout démontre, en effet, que l'AFP est actuellement incapable d'élaborer et de mettre en oeuvre un projet qui lui garantisse le rang de grande agence de presse mondiale " .

Et pourtant, l'irrésistible rétraction de la ministre de la culture et de la communication devant les propositions adoptées par votre commission des affaires culturelles - combien modestes au regard des nécessités mises en lumière par tous les présidents de l'AFP ! - semble montrer que rien ne viendra de ce côté rompre le cycle régressif d'une entreprise en panne d'ambition, ou des moyens de son ambition.

C'est donc à M. Bertrand Eveno, nouveau président de l'AFP, qu'est dévolue la tâche ardue de rompre l'enchantement. On peut certes fonder des espérances sur ses qualités reconnues de gestionnaire et d'homme d'entreprise. Une réforme statutaire, qui suppose l'initiative des pouvoirs publics, n'en paraît pas moins incontournable.

Si l'octroi de ressources exceptionnelles par l'Etat a longtemps différé la mise en lumière des extravagantes contraintes juridiques qui pèsent sur le financement de l'AFP - et l'abandon du prêt participatif de 90 millions de francs consenti en 1990 sera sans doute une des toutes dernières manifestations de cette stratégie de l'esquive - l'Union européenne est de plus en plus attentive aux accrocs portés au droit de la concurrence. Force est alors d'en revenir au point de départ : afin de desserrer le goulot d'étranglement financier qui entrave tout développement, il est nécessaire d'apporter quelques adaptations au statut.

L'Etat se dérobe, a-t-on vu plus haut ? Il s'agit plutôt du gouvernement. Et quand le gouvernement se dérobe, le Parlement demeure, pour assumer ce qu'il y a dans l'Etat de conscience des enjeux et des nécessités. Voilà pourquoi le Sénat a souhaité mettre à son ordre du jour la proposition de loi dont le contenu est rappelé ci-dessus. Si l'AFP est réduite dans dix ans au statut de sous-traitante pour la France des grandes agences de presse anglo-saxonne, il y aura eu une institution, dans l'Etat, pour proposer une autre voie en temps encore utile.

Votre rapporteur, attendant sereinement que le courage revienne en cette affaire, met en garde le gouvernement devant le projet d'adoption -annoncé dans la presse et non dénoncé à ce jour- d'un budget de l'Agence en déséquilibre sur 2001 : cet exercice est illégal... en l'état actuel de la loi.

B. LA DISTRIBUTION COOPÉRATIVE EN QUÊTE DE RATIONALISATION

Dans un rapport d'information publié en décembre 1994, votre commission des affaires culturelles estimait que, fondé sur le triptyque liberté, égalité, solidarité et après avoir donné de remarquables preuves de sa valeur et de sa vitalité, le système français de distribution de la presse, et singulièrement le système coopératif, devait faire face à une nécessité nouvelle de rationalité sans renier ses principes fondateurs.

Quelques années et un plan de modernisation plus tard, cette appréciation reste intégralement valable en ce qui concerne la distribution coopérative, marquée par les graves difficultés que connaît son acteur principal et incontournable, les NMPP.

1. Le plan de modernisation 1994-1997

Il est utile de rappeler les grandes lignes du plan de modernisation mis en oeuvre par les NMPP entre 1994 et 1997 avec un succès certain mais insuffisant pour contrecarrer les germes de remise en cause qui se dessinaient déjà clairement en 1994.

a) La diminution du coût d'intervention des NMPP

La diminution du coût des prestations des NMPP a été le principal objectif du plan de modernisation. Il s'agissait de faire passer ce coût de 14 % de la valeur faciale des titres distribués à 10 % à la fin de 1997, ce qui impliquait une économie de 737 millions de francs avec les frais de fonctionnement de l'entreprise.

Cet objectif a été dépassé, puisque les NMPP ont réduit en trois étapes à 9 % leur coût d'intervention.

Le 1 er octobre 1994, celui-ci était porté à 13 % de la valeur faciale des titres. Le 1 er juillet 1995, il était porté à 11 %. Depuis le 1 er janvier 1996, il est de 9 %.

L'économie récurrente annuelle correspondante, de 817 millions de francs, a été partagée entre les éditeurs de presse à hauteur de 80 % et les diffuseurs à hauteur de 20 %.

Elle a été rendue possible en particulier par un plan social qui a entraîné le départ de 1025 salariés avec l'aide des pouvoirs publics.

b) Les mesures structurelles d'accompagnement

Un vaste effort de réorganisation et de modernisation a accompagné la mise en oeuvre du plan :

- la restructuration du réseau de dépositaires a permis de passer de 1251 dépôts en 1994 à 372 dépôts au 31 décembre 1997. Moins nombreux, les dépôts sont devenus mieux capables d'investir -dans l'informatique notamment-, de développer une politique d'animation commerciale de leur points de vente et d'adopter des procédures de travail standardisées et optimisées ;

- la réforme du traitement des invendus, rendue possible par la réduction du nombre des dépositaires et leur professionnalisation, a consisté à délocaliser chez les dépositaires, la destruction des invendus, opération qui, auparavant, n'était effectuée qu'à Paris dans le centre d'invendus de Bobigny. Au 31 décembre 1997, les dépôts " agréés en destruction locale " étaient au nombre de 269. Corollaire indispensable de cette réforme : la mise en place de procédures strictes de sécurisation du traitement comptable, informatique et physique des exemplaires invendus ;

- la réorganisation et la modernisation du traitement des quotidiens a été réalisée avec l'ouverture, en mai 1994, du centre de Stains en remplacement du centre de la Villette. Doté de technologies industrielles automatisées ce centre traite 1,1 million d'exemplaires/jour avec une productivité accrue ;

- la modernisation de la distribution des publications est passée par l'optimisation des chaînes de traitement et de l'organisation du travail dans les centres de traitement des publications de Rungis et de Saint-Denis ;

- l'amélioration des services rendus aux éditeurs a été rendue possible par la mise en oeuvre de nouvelles bases de données communes à tous les acteurs de la chaîne de distribution, sur les titres, le réseau et les ventes. Une architecture informatique rénovée a permis aux éditeurs d'optimiser et d'affiner leurs actions de réglage sur les titres. Il est désormais plus facile de gérer les titres point de vente par point de vente.

Le développement et la modernisation du réseau des diffuseurs de presse a constitué le dernier volet du plan de modernisation. Les NMPP ont mené à la fois une politique d'implantation et de modernisation des points de vente, afin de favoriser l'émergence de nouveaux types de magasins.

2. La crise de 1999

La mise en oeuvre du plan 1994-1997 n'a pas permis d'atténuer des tensions qui se sont cristallisées à la fin de 1999 autour du problème de la refonte des barèmes tarifaires.

a) Les symptômes

On a mentionné plus haut le rôle crucial des NMPP dans la distribution coopérative de la presse.

Il convient de rappeler ici que trois sociétés de messageries assurent le groupage et la distribution dans le réseau de la vente au numéro.

Les NMPP sont une SARL née d'un rapprochement des éditeurs parisiens avec la librairie Hachette, " en vue d'établir un accord qui, par l'association des journaux à diffuser et des techniciens susceptibles d'utiliser au mieux les actifs appartenant à la librairie Hachette permettrait d'harmoniser au mieux les intérêts de tous et de chacun, et d'assurer la distribution des quotidiens et périodiques " comme l'énonce la déclaration d'intention qui devait, le 16 avril 1947, donner naissance aux NMPP sur le fondement juridique offert par l'article 4 de la loi du 2 avril 1947.

Cinq coopératives regroupant quelque 700 sociétés éditrices sont associées pour assurer la distribution de quelque 2 500 titres avec le concours de la société Matra-Hachette, dans le cadre de contrats de groupage et de distribution passés entre elles et les NMPP, société commerciale de distribution au sens de l'article 4 de la loi de 1947.

Les cinq coopératives détiennent 51 % du capital social des NMPP et désignent 5 des 8 gérants qui administrent la société. Le directeur général est désigné par Hachette, qui détient 49 % du capital social et est considéré comme " opérateur " de la société. Au sein des assemblées générales des coopératives, chaque titre détient une voix.

Les ventes des NMPP représentaient en 1998 35 % du marché total de la vente de la presse, 51 % du marché de la vente au numéro, et 88 % du marché de la vente au numéro de la presse nationale. On notera aussi que quelque 50 % de la distribution globale de la presse passent par des grossistes liés en quelque façon aux NMPP ou à Hachette, leur opérateur et actionnaire à 49 %.

Pour une grande partie de la presse, la presse parisienne et les magazines en particulier, les NMPP constituent donc indubitablement un interlocuteur d'un poids tout particulier.

La SAEM Transports presse est liée aux NMPP et à Hachette : la SOPREDIS, filiale à 87,2 % d'Hachette, possède 49 % du capital social de la SAEM Transports presse dont les opérations de distribution sont assurées par les NMPP.

Les messageries lyonnaises de presse (MLP) sont enfin une coopérative groupant quelque 200 adhérents et assurant elle-même, sans l'intermédiaire d'une société commerciale, l'intégralité des opérations de distribution de quelque 650 titres sur l'ensemble du territoire.

Les parts de marché des MLP ont tendance à augmenter, représentant en 1998 12,3 % du marché de la distribution coopérative et 14,9 % du marché des publications, segment sur lequel une forte concurrence s'est instaurée avec les NMPP. Traduction comptable de cette évolution, le chiffre d'affaires des MLP est passé de 0,3 milliard de francs à 2,7 milliards de francs de 1993 à 1998.

Un certain nombre d'hebdomadaires et d'autres publications ont en effet confié leurs distributions aux MLP afin de réaliser des économies parfois substantielles sur leurs coûts de distribution. C'est ainsi que le passage aux MLP, en mai 1999, de l'hebdomadaire Point de vue aurait généré pour lui une économie de 6 millions de francs.

Cet exemple est emblématique de la critique latente portée depuis plusieurs années par la presse magazine contre les barèmes tarifaires des NMPP. Ceux-ci seraient excessivement favorables aux quotidiens nationaux eu égard aux charges particulières de logistique que suscite les conditions d'urgence dans lesquelles il est par nature indispensable de les distribuer sur l'ensemble du territoire. Les MLP, qui ne distribuent pas de quotidiens, sont soumis à des contraintes plus souples qui leur permettent de consentir aux magazines des conditions plus favorables que les NMPP.

Quoi qu'il en soit de cette esquisse d'analyse, sur laquelle on reviendra après, il faut constater l'existence d'une tendance de plus en plus affirmée des titres de la presse magazine à envisager de confier leur distribution aux MLP, ce qui n'est pas sans conséquence sur le chiffre d'affaires des NMPP et par voie de conséquence sur la pérennité d'une solidarité entre les diverses catégories de presse, qui apparaît consubstantielle au système français de distribution sans être explicitement instituée par la loi Bichet du 2 avril 1947.

Les départs de titres magazines des NMPP représenteraient ainsi en valeur plus de 680 millions de francs depuis 1996 en prix public des titres.

Or il se trouve que la situation financière de l'entreprise n'est pas florissante : des projections économiques annoncent un déficit d'exploitation de 277 millions de francs en 2003.

C'est à l'occasion d'une réforme des barèmes proposée en septembre 1999 pour endiguer la contestation de la presse magazine, que s'est déclenchée la crise à la suite de laquelle une remise à plat de l'ensemble du système est apparue inéluctable.

b) Le déclenchement de la crise

La direction des NMPP a soumis en septembre 1999 aux coopératives d'éditeurs de nouveaux barèmes tarifaires plus favorables aux magazines, en précisant que leur adoption devait se traduire par un déficit prolongé. Ces propositions se sont heurtées à l'opposition des quotidiens. Par suite, la décision a été reportée au 1 er janvier 2000, dans l'attente des conclusions d'une mission sur la distribution de la presse nommée par le gouvernement.

Un communiqué publié en août 1999 par M. Alain Ayache, président de la coopérative des publications parisiennes, avait pu donner la mesure des revendications, plus radicales qu'un simple aménagement des barèmes, exprimées par les publications elles-mêmes : " il est naturel, dans un contexte d'ouverture à la concurrence, que face aux NMPP, leader incontestable sur le marché, un challenger, les MLP, tente de se frayer une place en proposant des barèmes plus attractifs grâce, il est vrai aussi à des structures plus souples et plus légères.

Face à ce défi qui leur est lancé, les NMPP vont adapter leurs barèmes pour retenir les éditeurs qui seraient tentés de changer de boutique.

Mais, en réalité, le fond du problème pour les NMPP passe par un drastique allégement de leurs structures, à tous les niveaux, par un état d'esprit conquérant, par une attitude moins distante à l'égard des éditeurs, et en n'oubliant jamais que ceux-ci réunis dans les 5 coopératives sont les actionnaires majoritaires de l'entreprise ! Mais aussi par une prise de conscience du conseil de gérance qui ne doit jamais perdre de vue son rôle principal : la défense des intérêts de tous les éditeurs et notamment des plus petits, quotidiens, hebdomadaires ou périodiques dont le nombre est indispensable à l'équilibre financier des NMPP. Mais plus encore au pluralisme de la presse auquel les Français sont indéfectiblement attachés ".

C'est dans une telle perspective de remise à plat que M. Jean-Claude Hassan s'est acquitté de la mission confiée par la ministre de la culture et de la communication.

c) Le rapport Hassan

Avant de rappeler le contenu de ses propositions, on notera les réticences du rapport de M. Jean-Claude Hassan sur la question de la péréquation, et l'absence dans ce texte de toute prise de position claire sur ce point.

Tout en notant dans la troisième partie de son rapport que la péréquation à proprement parler répartit à l'intérieur de chaque coopérative et par le biais du barème tarifaire les coûts de distribution entre les titres selon leur prix de vente, les titres chers contribuant plus que les autres ; tout en rappelant à juste titre que ce mode de péréquation est une composante légitime de la solidarité instituée par le groupage entre les éditeurs et que ceux-ci n'y sont pas fondamentalement hostiles, M. Jean-Claude Hassan aborde de façon moins claire la question de la répartition des coûts entre la presse quotidienne et les publications, en particulier la presse magazine : " entre les quotidiens et les publications traitées par les NMPP qui appartiennent à des coopératives différentes, seule la communauté de destin dans la même société commerciale crée des solidarités qui ne sont pas inscrites dans chacun des deux barèmes pris séparément " .

La cinquième partie du rapport, intitulée significativement " la vraie-fausse question du déficit des quotidiens " , tout en estimant que " cette question a été agitée de manière inutilement polémique " note que le déficit allégué de la distribution des quotidiens, plusieurs dizaines de centimes par exemplaires vendus, reflète, à le supposer établi et consensuel, " l'état actuel des conditions d'exploitation des NMPP ; il ne fait pas cas de certaines réformes envisagées mais non réalisées non plus que d'une modernisation à venir qui pourrait le modifier fortement ".

Le rapport concède un peu plus loin qu'il " existe sans doute un déficit d'exploitation des quotidiens " , tout en avançant dans une note de bas de page attachée au même paragraphe que " rien ne confirme, et notamment pas les observations étrangères, que la distribution des quotidiens est structurellement déficitaire " .

La référence aux observations étrangères apparaît peu appropriée, dans la mesure où le système français est entièrement différent des systèmes de distribution des pays voisins, et où sa spécificité explique seule l'existence du problème de péréquation que nous évoquons.

Mais ces circonlocutions ont sans doute une explication. Elles tendent à minimiser le problème de la péréquation des charges entre les quotidiens et les magazines afin de mieux écarter la mise en évidence de la situation particulière de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale, spécialement visée par le débat sur la péréquation. Il s'agit de rejeter par avance la conclusion nécessaire d'un examen objectif du dossier : l'Etat, et non l'ensemble de la presse distribuée par les NMPP, doit prendre en charge les coûts supplémentaires afférents à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale, conformément à sa mission de conforter l'expression et la diversité des courants d'opinion.

Il est sans doute plus facile pour l'Etat d'abonder chaque année les médiocres crédits consacrés à la presse d'information politique et générale, et de s'en targuer devant le Parlement, que de s'attaquer aux problèmes cruciaux.

Ce qui conforte cette analyse du rapport Hassan est la conclusion même de celui-ci sur ce point : " On pourrait estimer qu'en matière de distribution de la presse comme en matière de télécommunications, il y a lieu d'instaurer un service universel qui comprend la distribution sur tout ce territoire, dans de bonnes conditions de rapidité et de simultanéité, de la presse quotidienne d'information politique et générale. (...) Ce ne sera pas l'orientation retenue plus loin. (...) A ce stade, il faut donc que la question tarifaire soit consécutive et non préalable à une réforme des NMPP ".

• La mise à l'écart de l'Etat ainsi réalisée, la sixième partie du rapport Hassan présente les principales conclusions de son auteur.

Il présente à cet égard quelques conditions :

- Que des conditions tarifaires trop éloignées des prix auxquels conduirait la prise en compte des seuls facteurs logistiques de formation des coûts ne finissent pas par inciter au départ certains éditeurs ou certains titres.

- Que d'éventuelles discriminations positives en faveur de tel ou tel type de presse, pour répondre à des préoccupations d'intérêt général, ne soient pas d'un coût excessivement supérieur au montant des aides publiques consenties au système.

- Que l'insuffisante transparence du fonctionnement de l'entreprise solidaire ne crée pas une suspicion générale, certes compatible avec l'immobilisme, mais certainement pas avec la réforme.

- Que la position dominante ne soit pas l'occasion d'en abuser.

On notera que les deux premiers points paraissent accorder à la question des tarifs le caractère de préalable qui lui est dénié dans un autre passage du rapport.

Le rapport rappelle ensuite que " les prévisions financières des NMPP, aujourd'hui déjà mauvaises, sont appelées à s'aggraver aussi bien en cas d'immobilisme -car alors les pertes de chiffres d'affaires ont un effet cumulatif- qu'en cas de baisse défensive des barèmes pour faire face à la concurrence ".

Il propose en conséquence :

- d'engager au plus tôt une profonde réforme industrielle afin que les éditeurs se dotent d'un outil efficient à vocation durable ;

- de permettre ainsi la réforme commerciale sans laquelle la blessure de la concurrence serait à terme mortelle ;

- d'accompagner ce mouvement d'une réforme institutionnelle qui favorise l'engagement et la responsabilité des éditeurs-coopérateurs (ou du moins de ceux qui le souhaitent).

Il admet enfin que des baisses défensives de barèmes sont nécessaires, tout en notant :

" Elles ne sont à l'évidence pas finançables par une augmentation de la contribution des titres, moins nombreux, qui continueraient à confier leur distribution aux NMPP. Une seule voie existe : celle de l'amélioration de l'efficacité économique de l'entreprise, afin que le service que les éditeurs coopérateurs souhaitent soit produit suffisamment moins cher qu'aujourd'hui pour que la tentation de la sécession ne se fasse pas trop forte pour certains grands groupes de presse.

Il s'agit ensuite, et c'est au moins aussi important, de savoir répartir par la construction de nouveaux barèmes l'effet de cette amélioration globale de l'efficacité économique entre les différents titres, entre les différentes coopératives, entre les différentes familles de presse ".

Des responsabilités de la puissance publique à l'égard d'une presse indispensable au bon fonctionnement de la démocratie, on constate qu'il n'est guère question.

3. Le plan stratégique 2000-2003

Un consensus a pu être établi en février 2000 entre les éditeurs de la presse quotidienne et magazine ainsi qu'entre les éditeurs et l'opérateur-actionnaire Hachette sur ces grands axes d'un plan stratégique de réorganisation des NMPP.

• Le contenu du plan

Les axes stratégiques retenues sont les suivants :

- améliorer l'efficacité de la distribution des quotidiens dans les domaines industriel et commercial ;

- tirer le meilleur parti de la nouvelle logistique des magazines ;

- achever la réforme des invendus ;

- refonder la structure de distribution de Paris Diffusion Presse (Paris et petite couronne) sur une logique de dépôts ;

- redéfinir la relation avec les dépositaires de presse dans une optique concurrentielle : passer de 350 dépôts aujourd'hui à 200 dépôts et 30 plates-formes quotidiens et mettre en place une rémunération modulée ;

- optimiser les actions commerciales vers les éditeurs : mieux relayer leurs opérations de terrain, mieux valoriser la richesse des bases de données NMPP ;

- adapter la tarification à l'environnement concurrentiel ;

- optimiser l'adéquation du niveau 3 (réseau des points de vente) aux attentes des lecteurs pour vendre plus et mieux la presse ;

- accroître la performance des équipes fonctionnelles ;

- réformer l'informatique pour mieux accompagner les activités de l'entreprise et produire de la valeur ajoutée ;

- moderniser les structures institutionnelles.

Un volet social accompagne ces orientations. Il prévoit 797 suppressions de postes d'ici à la fin de 2003 : 429 postes d'ouvriers, 129 postes d'employés et 239 postes de cadres. L'organisation cible à la fin de 2003 est ainsi de 1540 salariés : 640 ouvriers, 210 employés et 690 cadres. Ce volet social concerne tous les établissements de l'entreprise. Les NMPP rappellent à cet égard que l'ajustement des effectifs est une nécessité ancienne et permanente. Elle sera la conséquence des aménagements industriels et des réorganisations du plan stratégique qui visent à réduire les coûts pour tenir compte de la presse concurrentielle.

La priorité sera donnée à la concertation, avec comme objectifs de rechercher un accord d'entreprise, optimiser les mutations internes, voire externes, favoriser l'aide à la formation et à l'installation, mettre au point un dispositif de départ pour les salariés plus âgés.

En ce qui concerne le financement du plan, trois axes sont prévus :

- l'entreprise engage l'ensemble de ses fonds propres ainsi que les provisions constituées à cet effet ;

- l'opérateur a renoncé à percevoir sa redevance à partir de 1999 et pour la durée du plan. Un effort similaire est attendu de la part des éditeurs en ce qui concerne le " trop perçu " ;

- la mission de service universel qui incombe aux NMPP amène à solliciter de l'Etat une aide publique indispensable pour résoudre l'équation économique du plan stratégique. Il s'agit d'obtenir de l'Etat la compensation du surcroît pour l'entreprise de la distribution des quotidiens, évaluée à 250 millions de francs.

• La première phase de la mise en oeuvre

Les cinq coopératives des NMPP ont adopté en juin dernier de nouveaux barèmes qui, pour les magazines, visent trois objectifs majeurs :

- reconquérir des parts de marché sur le segment des petits et moyens titres, en instaurant notamment des bonifications spécifiques pour les titres dont la fourniture ne dépasse pas 200 000 exemplaires et dont le prix de vente est de 15 francs ou plus (85 % des titres magazines distribués par les NMPP entrent dans cette catégorie) ;

- fidéliser les éditeurs qui choisiront de confier durablement la distribution de leurs titres aux NMPP, en créant une " prime de fidélité " annuelle. Son montant, calculé en pourcentage des ventes, est croissant d'année en année : 0,20 % la première année (2000), 0,30 % l'année suivante (2001), et enfin 1,10 % en 2002 ;

- adopter un système de facturation des invendus plus équitable en réformant en profondeur pour tous les titres le mécanisme des frais sur invendus du barème.

• Le rôle de l'Etat

On aura constaté sans surprise que les analyses du rapport Hassan sur le service universel n'ont pas suscité l'adhésion des auteurs du plan stratégique des NMPP.

Le discours de l'Etat est plus ambigu. Le caractère d'intérêt public de la distribution coopérative est constamment relevé. Recevant le 25 février 2000 le syndicat Filpac-CGT, Mme Catherine Trautmann manifestait ainsi sa volonté de " veiller à ce que le plan de restructuration garantisse les enjeux du pluralisme et de la liberté d'expression " 2 ( * ) . Elle n'aurait pas rejeté, devant les dirigeants des NMPP et les représentants de la presse, le principe d'une contribution de l'Etat à la mise en oeuvre du plan, fixant des conditions : l'adoption définitive du plan, l'examen du compte d'exploitation sur trois ans, l'abandon de la redevance d'Hachette et du trop-perçu reversé aux éditeurs sur la base des économies réalisées 3 ( * ) . Ces conditions ont été largement acceptées. Ainsi le discours de l'Etat semble-t-il désormais moins précis.

Interrogée par votre rapporteur lors de son audition du 17 octobre par votre commission, Mme Catherine Tasca notait : " en ce qui concerne le problème spécifique des NMPP, une demande d'aide de 200 à 250 millions de francs par an pendant quatre ans a été présentée à l'Etat afin de permettre la mise en place d'un nouveau plan de modernisation. Il est difficile de répondre à une demande d'une telle ampleur, d'autant que la commission européenne pourrait trouver à redire à l'octroi d'une aide directe et massive à une entreprise privée, et que la certitude que le plan de modernisation offre une solution durable n'est pas encore acquise. Il convient donc de poursuivre l'examen de ce dossier en étudiant les données économiques du fonctionnement des NMPP et en définissant les conditions de la poursuite de ses misions. En tout état de cause, il est important de maintenir le système de gestion collective de la distribution, dont la disparition serait un recul " .

Face à cette prise de position au mieux ambiguë et au pis annonciatrice d'une stratégie de défaussement identique à celle adoptée à l'égard de l'AFP comme on l'a vu ci-dessus, votre commission ne peut que rappeler le caractère d'intérêt public de la distribution coopérative de la presse, et tout particulièrement le caractère d'intérêt public qui s'attache à la distribution de la presse d'information politique et générale.

Il serait absolument légitime que l'Etat prenne en charge les coûts spécifiques afférents à la distribution de ce type de presse dans le cadre juridique de la notion de service universel que la commission européenne ne saurait critiquer à l'heure où l'Union adopte une charte des droits fondamentaux qui consacre solennellement les principes de la démocratie et dresse un inventaire de leurs conséquences.

L'appel à l'Europe devrait ainsi manifestement jouer en faveur de la prise de responsabilité de l'Etat et non pas contre !

S'il est vrai par ailleurs que l'aide globale demandée par les NMPP est équivalente au montant annuel des aides directes à la presse, on peut estimer que la pérennité d'une distribution coopérative répondant à l'intention justement manifestée par le législateur lors de l'adoption de la loi du 2 avril 1947, est à ce prix. C'est en tout état de cause l'analyse de votre commission, qui rappelle que la presse d'information générale et politique ne pourra conforter son lectorat, reconquérir des positions et poursuivre sa contribution à la vie démocratique de notre pays que si elle conserve la possibilité d'atteindre son public potentiel dans de bonnes dispositions et à un coût raisonnable.

*

* *

Pas davantage que l'Assemblée nationale, le Sénat n'a le privilège de déclarer blanc ou noir le tableau des crédits inscrits au titre du projet de loi de finances pour 2001, pour ce qui concerne particulièrement le volume et l'affectation des crédits consacrés au développement de la presse écrite.

Mais pour 2001, votre rapporteur a estimé, en conscience, que l'environnement de ce secteur, vital en économie et incontournable en démocratie, était de plus en plus gris ; qu'il ne fallait pas se contenter de la " surface des choses ", de l'évolution du chiffre d'affaires ou de la stabilisation du lectorat.

Dans un monde qui bouge, où les médias électroniques et télévisuels réagissent à l'échelle de l'Europe et du monde, le Gouvernement de la France, aiguillonné par le Parlement, doit montrer la voie : le déclin de la presse écrite n'est pas inexorable, il y faut des lignes budgétaires, il y faut une volonté nationale.

Les propositions budgétaires pour 2001 esquivent les problèmes de l'AFP, de la distribution de la presse, du statut des correspondants de presse, de la forte relance d'un fonds de modernisation, voulu cependant par le législateur, etc...

Le refus, proposé par votre rapporteur, des crédits d'aide au développement de la presse sanctionne donc un budget de pure reconduction, sans élan nouveau, là où était possible un budget d'aide à la reconquête.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée du 15 novembre 2000, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Louis de Broissia sur les crédits de la presse pour 2001.

Un débat s'est ensuite engagé.

Mme Danièle Pourtaud a manifesté son désaccord avec les conclusions du rapporteur pour avis, notant en particulier que si le fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée n'atteignait pas le montant escompté initialement, la consommation des crédits avait été jusqu'à présent assez faible. On peut espérer par ailleurs que les montants collectés au titre de la taxe sur le hors média augmenteront au cours des prochaines années. Il n'y a donc pas lieu de s'inquiéter sur ce point ; au demeurant, l'exercice 2000 bénéficiera, en plus de la collecte de 160 millions attendus, d'un report de 157 millions de francs non consommés en 1999.

M. André Maman a demandé quelles étaient les pistes non suivies par le rapport sur la réforme des NMPP transmis au ministère de la culture et de la communication en janvier 2000. Il a aussi demandé des précisions sur la destination de l'aide à l'exportation de la presse française à l'étranger.

M. Jean-Paul Hugot a noté qu'en dépit d'une légère augmentation des crédits affectés aux aides traditionnelles, le Gouvernement n'avait pas pris en compte, dans le projet de budget, la problématique du développement de la presse. Il a annoncé qu'il adhérait, en conséquence, aux conclusions du rapporteur.

En réponse aux intervenants, M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- la consommation des crédits du fonds de modernisation de la presse est satisfaisante, puisque les sommes allouées depuis sa création atteignent aujourd'hui 327 millions de francs. La collecte annuelle de la taxe sur le hors média, moins de 160 millions de francs, est très inférieure aux estimations avancées lors de la création de cette taxe. L'administration fiscale s'est probablement peu mobilisée pour assurer sa perception. Il serait regrettable que la collecte reste fixée autour de 160 millions de francs de ce fait, alors que la consommation des crédits s'améliore et que de nouveaux projets sont élaborés ;

- le rapport de janvier 2000 sur la réorganisation des NMPP a contourné un point essentiel pour la recherche d'une solution durable : la reconnaissance de la charge d'intérêt public que la distribution, non rentable, de la presse quotidienne d'information politique générale fait peser sur les NMPP et donc sur la collectivité des éditeurs ;

- trois grandes catégories de bénéficiaires se répartissent les crédits d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger : d'une part les NMPP et l'Union pour la diffusion de la presse française dans le monde, en tant qu'organismes collectifs d'exportation, et d'autre part les éditeurs individuels. Toutes les publications françaises inscrites à la commission paritaire des publications et agences de presse, justifiant d'un marché à l'étranger et d'un plan de promotion sérieux sont éligibles, à condition d'être rédigées en tout ou en partie en français et de contribuer au rayonnement de la culture française à l'étranger. En 2000, 46 titres se sont partagés un montant de 6 millions de francs environ, alors que les organismes collectifs d'exportation ont bénéficié d'un concours de 17,2 millions de francs ;

- l'examen du budget des aides à la presse, qu'il faudrait rebaptiser " budget du développement des médias ", doit être l'occasion d'envisager l'ensemble des problèmes de développement de la presse et spécialement le défi de la reconquête du lectorat. C'est dans cette optique qu'il est justifié de demander à nouveau la création d'un fonds de concours pour financer la lecture de la presse dans les établissements scolaires. Ce fonds pourrait être géré par les associations qui se chargent actuellement de cette mission et pourrait être alimenté par des reports de crédits non utilisés en provenance d'autres fonds d'aide à la presse.

Mme Hélène Luc a ensuite indiqué que tout en partageant certaines préoccupations exprimées par le rapporteur pour avis, mais constatant néanmoins l'augmentation des crédits d'aide à la presse, le groupe communiste républicain et citoyen voterait ce budget.

Au terme de ce débat, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de la presse pour 2001.

* 1 Cf. Commission du rapport du Conseil d'Etat, Etudes et documents du Conseil d'Etat, 1983-1984, n° 35.

* 2 Le Monde du 26 février 2000.

* 3 Le Monde du 26 février 2000.

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