Accéder au dossier législatif

Avis n° 94 (2000-2001) de M. Alain GÉRARD , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 23 novembre 2000

Disponible au format Acrobat (179 Koctets)

N° 94

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2000.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME II

PÊCHE

Par M. Alain GÉRARD,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Léon Fatous, Louis Moinard, Jean-Pierre Raffarin, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Christian Demuynck, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Philippe Labeyrie, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570 .

Sénat : 91 et 92 (annexe n° 3 ) (2000-2001).

Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Modestes par leur montant, les crédits consacrés dans le projet de loi de finances 2001 à la pêche maritime et aux cultures marines, n'en ont pas moins une incidence importante sur ce secteur et son environnement.

La pêche maritime a connu cette année des difficultés considérables. Avec la marée noire de l'Erika et la hausse du prix du gazole, le revenu des entreprises de pêche a, en effet, très fortement diminué du fait d'un fléchissement de la consommation, mais surtout d'une augmentation des charges liées au gazole.

Le plan gouvernemental pour venir en aide aux pêcheurs, dont votre rapporteur pour avis analysera les mesures en détail a été bien accueilli par les professionnels. Votre rapporteur pour avis souhaite que ces mesures puissent être acceptées par les autorités européennes et que le Gouvernement ait pris toutes les assurances pour qu'elles soient compatibles avec le droit communautaire. Il serait, en effet, inadmissible que les entreprises de pêche aient à rembourser les aides que l'Etat leur a consenties pour faire face à cette situation de crise.

Au delà de ces difficultés qu'il faut espérer conjoncturelles, la préoccupation de votre commission des affaires économiques concerne le long terme. La flotte de pêche française ne cesse de décliner. Elle a diminué de plus de moitié depuis 1982. Le nombre d'emplois décroît de façon continue depuis 10 ans. Si cette tendance se poursuit, il est à craindre que la pêche française ne disparaisse. Il semble que les pouvoirs publics en France et en Europe s'accommoderaient de cette situation que, pour sa part, votre commission refuse d'envisager.

L'avenir dépendra très largement de la capacité des autorités nationales françaises à accompagner la pêche française dans une révolution qualitative qui lui permette de mettre fin à une course à la production d'une ressource que l'on sait rare, et de s'engager plus encore dans une quête de la qualité. Il dépendra également des conditions réglementaires et fiscales dans lesquelles les marins français pourront affronter la compétition internationale.

L'avenir dépendra également des autorités communautaires. Nous avons assisté l'année dernière à une réforme des actions structurelles de la communauté dans le secteur de la pêche et à une réforme de l'organisation commune des marchés. La commission des affaires économiques avait exprimé ses plus vives préoccupations face aux mesures relatives au renouvellement et à la modernisation de la flotte. De même, l'ouverture excessive aux importations prévue par le texte OCM n'a pas manqué d'inquiéter. La prochaine étape est la réforme de la politique commune de la pêche d'ici 2002. Sur ce point, les professionnels français se sont déjà exprimés. Ils souhaiteraient notamment que les programmes d'orientation pluriannuels soient très largement réformés. Il conviendra de les écouter.

Le budget de la pêche, dont votre rapporteur pour avis examinera ici les principales évolutions, s'inscrit donc dans un contexte difficile dont le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure. C'est pourquoi, votre rapporteur pour avis a proposé à votre commission des affaires économiques, qui l'a suivi, de donner un avis défavorable à son adoption.

CHAPITRE IER -

UN SECTEUR EN DIFFICULTÉ

I. UN MARCHÉ FRANÇAIS DES PRODUITS DE LA MER ET DE L'AQUACULTURE EN FAIBLE PROGRESSION

A. LES DEBARQUEMENTS DE LA PÊCHE FRAÎCHE DANS LES CRIÉES FRANÇAISES EN 1999

Le tonnage de pêche fraîche débarquée en criées a baissé en 1999, après deux années consécutives de hausse, pour redescendre en dessous de 300.000 tonnes, tandis que le prix moyen à la première vente a continué sa progression (+3 %).

L'augmentation des prix a été particulièrement forte fin 1999. Cependant, pour la première fois depuis 1995, la valeur des ventes en criées a baissé par rapport à l'année précédente (-2 %). Cette baisse est due à la réduction des quantités débarquées et à l'augmentation des retraits, qui n'ont pas été compensées par la hausse du prix moyen à la vente.

RÉPARTITION DES VENTES EN CRIÉES EN 1999

Quantité (tonnes)

Valeur (MF)

Prix moyen (F/kg)

Poissons

226 313

3 240

14,32

Crustacés

9 590

391

40,77

Coquillages

25 614

290

11,32

Céphalopodes

20 759

321

15,46

Source : RIC

Cette baisse des apports et cette augmentation des retraits affectent principalement les poissons. Au contraire, aussi bien en volume qu'en valeur, les débarquements de crustacés et ceux de coquillages sont en hausse. Quant aux céphalopodes, les volumes débarqués sont en hausse mais leur valeur est en baisse à cause d'un net recul du prix moyen à la vente.

Très peu d'espèces de poissons ont vu leur volume vendu en criées augmenter en 1999. C'est surtout le cas du germon (+63 %), mais aussi dans une moindre mesure de la sardine (+24 %), du bar (+10 %), du merlan (+11 %), du grenadier (+13 %) et de l'empereur (+8 %).

Au contraire, la baisse des apports a été très sensible pour plusieurs espèces contribuant fortement au chiffre d'affaires de la pêche française comme la baudroie (-19 %), le cabillaud (-32 %), l'anchois (-27 %), le rouget-barbet (-27 %), l'églefin (-27 %), le maquereau (-23 %), la julienne (-18 %) ou le lieu noir (-6 %).

EVOLUTION DES VENTES EN CRIÉES ENTRE 1995 ET 1999

1995

1996

1997

1998

1999

Quantités débarquées (tonnes)

289 088

284 909

294 597

303 826

292 524

Retraits (tonnes)

12 695

10 042

10 697

7 562

10 248

Quantités vendues (tonnes)

276 393

274 867

283 900

296 264

282 276

Valeur des ventes (MF)

3 681

3 837

4 108

4 340

4 243

Prix moyen (F/kg)

13,32

13,96

14,47

14,65

15,03

Source : RIC

D'une manière générale, les espèces pour lesquelles les débarquements ont été plus importants ont vu leur prix moyen baisser. Cependant, on constate un renchérissement du bar et de l'empereur alors que leur offre a été accrue en 1999 par apport à 1998. A l'inverse, le prix de la sole a baissé de 6 % alors que les apports étaient plus faibles que l'an passé, mais avec une plus forte proportion de petites tailles.

Bien que les débarquements soient en hausse pour l'ensemble des crustacés, les ventes de langoustine ont baissé de 10 % en volume. Mais l'augmentation de son prix de vente a permis d'obtenir un chiffre d'affaires identique à celui de l'an passé.

Les quatre criées les plus importantes en valeur restent Boulogne (515 millions de francs, -8 % par rapport à 1998), Concarneau (372 millions de francs, -7 %), Le Guilvinec (340 millions de francs, +4 %) et Lorient (337 millions de francs, +2 %).

Sur l'ensemble des principales criées françaises, on constate que les quantités débarquées au cours des huit premiers mois de l'année 2000 sont stables par rapport à la même période en 1999.

Cette stabilité d'ensemble recouvre de fortes disparités entre espèces. En effet, les débarquements d'anchois (+ 30%), de grenadier (+ 23%), de bar (+21%), de merlu (+ 20%), de maquereau (+ 20%), de seiche (+ 16%) et dans une moindre mesure ceux de sole (+ 12%), de rouget-barbet (+ 12%), de lieu noir (+ 6%) et de langoustine (+ 5%) sont en augmentation, tandis que ceux de cabillaud (- 41%), de baudroie (- 14%), de germon (- 14%) et de merlan (-11%) sont en baisse. L'offre en poissons blancs (cabillaud, merlu, merlan, grenadier et lieu noir) est en baisse de 5%, surtout à cause de la raréfaction du cabillaud.

L'analyse des résultats par criées fait apparaître une hausse des débarquements à Boulogne où l'offre en seiche, en calmar, en hareng et en merlu a été particulièrement abondante. On observe également des apports en hausse sur la côte atlantique sud et en méditerranée. En revanche, les débarquements sont à la baisse pour la plupart des ports bretons, en particulier à Concarneau et à Douarnenez.

B. LA PRODUCTION TOTALE DES PÊCHES ET DE L'AQUACULTURE

La production totale de la pêche et de l'aquaculture françaises peut être estimée à partir des données de ventes de la pêche fraîche en criée fournies par le RIC (Réseau Inter Criées géré par l'OFIMER), en y ajoutant les données de pêche fraîche hors criées, de la pêche congelée, de la conchyliculture, de la pisciculture continentale et de la pisciculture marine.

Ces données proviennent de la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture du ministère de l'Agriculture et de la Pêche, ainsi que de différentes organisations professionnelles. L'analyse et le traitement de données de ces différentes sources exigent plus de temps. C'est pourquoi seule l'estimation pour 1998 est disponible.

La compilation de tous ces éléments a permis d'évaluer pour 1998 la production française à un peu plus de 800.000 tonnes de produits aquatiques pour un chiffre d'affaires de 9,5 milliards de francs, soit un recul de 5 % en quantité, mais une stabilité en valeur grâce à l'augmentation du prix moyen des produits. La pêche fraîche, dont près de 80 % de la valeur des ventes est réalisée en criée, a représenté 46 % en volume et 54 % en valeur de ce total, soit 380.000 tonnes pour 5 milliards de francs. L'aquaculture (conchyliculture, pisciculture marine et pisciculture continentale) a contribué à ce total pour 33 % en volume et 35 % en valeur, soit 270.000 tonnes et 3,3 milliards de francs. La pêche congelée est minoritaire avec 21 % du volume total (170.000 tonnes) et seulement 11 % de la valeur (1 milliard de francs).

Production

Part de marché

Evolution par rapport à 1997

Pêche fraîche en criée

Quantités (tonnes)

303 826

37 %

3 %

Valeur (MF)

4 340

46 %

6 %

Prix moyen (F/kg)

14,28

Pêche fraîche hors criée

Quantité (tonnes)

74 481

9 %

-25 %

Valeur (MF)

724

8 %

-36 %

Prix moyen (F/kg)

9,71

-14 %

Conchyliculture et pisciculture

Quantité (tonnes)

265 566

33 %

-1 %

Valeur (MF)

3 358

35 %

3 %

Prix moyen (F/kg)

12,64

4 %

Pêche congelée

Quantité (tonnes)

171 891

21 %

-11 %

Valeur (MF)

1 092

11 %

9 %

Prix moyen (F/kg)

6,35

22 %

TOTAL

Quantité (tonnes)

815 764

-5 %

Valeur (MF)

9 514

0 %

Prix moyen (F/kg)

11,66

5 %

Source : Compilation OFIMER

C. LE COMMERCE EXTERIEUR DE LA PÊCHE

Au cours de l'année 1999, le déficit du commerce extérieur français en produits aquatiques destinés directement à la consommation humaine a atteint 500.000 tonnes pour 13 milliards de francs, selon les données de l'administration des douanes. Ce déficit est en baisse de 2 % en volume et de 3 % en valeur par rapport à 1998.

Cette légère contraction du déficit, qui fait suite à une forte aggravation en 1998, est due à une augmentation des exportations en volume tandis que les importations sont restées stables.

Aussi bien à l'importation qu'à l'exportation, le prix moyen est en légère baisse.

Quantité (tonnes)

Valeur (MF)

Prix moyen (F/kg)

Quantité (tonnes)

Valeur (MF)

Prix moyen (F/kg)

Quantité (tonnes)

Valeur (MF)

Prix moyen (F/kg)

Import*

860 976

19 577

22,74

849 945

19 666

23,14

1 %

0 %

-2 %

Export*

366 072

6 453

17,63

344 432

6 101

17,71

6 %

6 %

0 %

Déficit

494 904

13 124

505 513

13 565

-2 %

-3 %

*hors farines, huiles, graisses et algues

Source : Douanes françaises

Analyse par famille de produits

Cette évolution apparaît très contrastée selon les familles de produits. Le poste dont l'évolution est la plus négative est celui des poissons frais, avec des importations en hausse de 9 % en volume et 11 % en valeur et des exportations en baisse de 10 % en volume et de 2 % en valeur. Cette évolution correspond bien à la situation de raréfaction de l'offre française de poissons de pêche.

Le déficit lié aux échanges de poissons congelés est également en hausse, car les importations croissent en volume (+10 %) et en valeur (+6 %), tandis que les exportations sont stables en volume et à la baisse en valeur (-11 %). La demande est particulièrement forte pour les filets congelés.

Les postes relatifs aux crustacés et coquillages sont stables.

En revanche, les importations de conserves de poisson sont en baisse de 11 % en volume et 15 % en valeur, tandis que les exportations sont en hausse de 19 % en volume et 29 % en valeur. Toutefois, cette évolution est à relativiser, car l'alternance de phases d'abondance et de pénurie de la ressource en thon influence la politique de stockage des producteurs de conserves, ce qui peut faire apparaître des variations inter-annuelles fortes dans les données du commerce extérieur.

C'est pourquoi la réduction du déficit français en produits aquatiques constatée au vu des données 1999 n'est qu'apparente. Au contraire, sans tenir compte de l'artefact dû aux conserves de thon, la tendance est bien à l'aggravation du déficit du fait d'une demande toujours aussi forte en poissons frais et congelés.

II. UN SECTEUR OÙ LE MAINTIEN DE L'EMPLOI N'EST PAS ASSURE

1. La flottille de pêche française se caractérise par un lent et régulier déclin en volume

En 1999, la flotte métropolitaine comptait 5.906 navires armés représentant une puissance de 924.792 Kw et une capacité de 167.048 tonneaux de jauge brute.

Situation au 31 décembre 1998 - Source CAAM

On constate une diminution continue de la flotte française. Cette situation, qui préoccupe votre rapporteur, résulte de la mise en oeuvre des réductions opérées dans le cadre des programmes d'orientation pluriannuels successifs.

De ce point de vue, on ne peut que regretter la lenteur avec laquelle les pouvoirs publics autorisent le renouvellement de la flotte, et ce malgré l'autorisation de Bruxelles.

Comme à l'accoutumée, l'examen de la structure de la flotte française fait apparaître une prédominance des petites unités de moins de 12 mètres :

Au 31 décembre 1998

Navires

Marins

Moins de 12 m

4 559

6 364

12 à moins de 16 m

560

1 840

16 à moins de 25 m

840

4 684

25 m et plus

160

2 070

Mixte

-

1 598

Source : CAAM - DPMCM - Février 1999

2. La situation des marins pêcheurs et des conchyliculteurs

Le déclin progressif de la flotte de pêche française entraîne naturellement une diminution des emplois.

a) Des emplois en diminution

Le nombre d'emplois à la pêche est, en effet, en constante diminution depuis bientôt dix ans, comme l'illustre le graphique ci-après.

NOMBRE D'EMPLOIS

Source : Direction des pêches maritimes et des cultures marines

En 1998, ces emplois à la pêche se décomposent de la façon suivante :

NOMBRE D'EMPLOIS À LA PÊCHE EN 1998

Genre de navigation/Durée

<3 mois

3-6 mois

6-9 mois

>9 mois

Total

Grande pêche

252

188

148

616

1204

Pêche au large

1 094

542

616

2 234

4 486

Pêche côtière

814

433

653

2072

3972

Petite pêche

2 302

1 594

1 928

5 532

11 356

Conchyliculture

469

425

445

3 606

4 945

TOTAL

4 931

3 182

3 790

14 060

25 963

Comme on peut le constater, le secteur de la petite pêche artisanale est le secteur le plus riche en emplois, mais également le plus exposé aux difficultés liées à la conjoncture.

b) Un système de formation en voie de réforme

La formation est indissociable de l'exercice de la profession de marin pêcheur, qui est notamment subordonnée à l'obtention de brevets de navigation. Votre rapporteur pour avis rappelle que les professionnels appellent de leurs voeux une meilleure prise en compte de la spécificité de ce métier, qui devrait se traduire par une plus grande place faite à l'embarquement dans la formation initiale ainsi qu'à la dimension économique et gestionnaire du rôle de chef d'entreprise à la pêche artisanale.

Les réformes engagées dans l'adaptation des cursus de formation ainsi que celles prévues par la loi d'orientation sur la pêche maritime visent à répondre à ces préoccupations. Ainsi, la loi d'orientation a prévu l'élargissement du champ d'action du fonds d'assurance formation de la pêche et des cultures marines et le développement de l'apprentissage. Elle prévoit également un encouragement à la formation économique des chefs d'entreprise de pêche artisanale par le biais d'une incitation fiscale à l'installation pour les jeunes patrons qui auront suivi une telle formation.

Votre rapporteur pour avis est, en revanche, plus circonspect sur la mise en oeuvre de la réforme du statut des personnels de l'enseignement maritime.

L'organisation des systèmes de l'enseignement maritime et aquacole secondaire s'avérant compliquée, et trop refermée sur elle-même, il était proposé, dès 1996, d'intégrer les personnels de l'AGEMA dans les corps existants de la fonction publique.

Le rapport présenté à cette époque allait plus loin en dessinant les évolutions induites par ce passage sous statut public :

- une relation plus étroite entre les LEMA et les ENMM, ouvrant ainsi la voie à la création d'un véritable service public de l'enseignement maritime ;

- une réflexion prospective sur les moyens humains et le fonctionnement qui, à terme, doit se traduire par une véritable politique de la pédagogie du système ;

- une reconnaissance de l'originalité de l'éducation maritime dont la polyvalence des enseignants est une richesse ainsi que son système de formation continue qui facilite la promotion sociale des gens de mer, tout en étant résolument tourné vers l'international.

La loi de finances 2000 a prévu de faire passer sous statut de droit public le personnel des LEMA remplissant les conditions prévues dans cette loi. Les chantiers budgétaires et statutaires conduits en liaison avec les ministères concernés et les organisations représentatives du personnel ont beaucoup progressé. A la demande du ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement, le nombre de postes budgétaires devrait passer de 287 prévus à 315. L'intégration se fera en tenant compte de l'emploi actuel dans les corps de l'équipement et de l'agriculture. La diminution du nombre d'heures de cours effectuées par des enseignants de ces lycées professionnels devait ainsi conduire à un recrutement d'enseignants supplémentaires.

Depuis le 20 décembre 1999, un travail conjoint a été mené avec les ministères de l'Agriculture, de la Fonction Publique et du Budget pour élaborer le décret d'intégration des personnels de l'AGEMA.

Le décret fixant les conditions d'intégration des personnels de l'AGEMA a été présenté au comité technique paritaire de l'agriculture le 23 mai 2000, à celui de l'équipement le 28 juillet et à la commission des statuts du conseil supérieur de la fonction publique le 12 juillet. Il a ensuite été transmis au Conseil d'Etat le 25 juillet 2000. Ce décret sera complété par un certain nombre d'arrêtés d'application.

Pour le personnel non intégré (contractuel) un règlement intérieur est en cours d'élaboration. Par ailleurs, les conséquences sociales du changement de statut des salariés de l'AGEMA sont gérées dans le cadre d'un accord collectif d'entreprise en cours d'élaboration.

Alors que le passage à la fonction publique des lycées maritimes devait être effectif à la rentrée 2000, votre rapporteur pour avis constate aujourd'hui des dysfonctionnements de deux ordres.

Les enseignants " chargés d'enseignement ", qui assuraient des fonctions d'enseignement et de surveillance, n'assurent plus aujourd'hui leur fonction de surveillance. Des postes de surveillants restent donc vacants, mais non pourvus, entraînant de nombreux problèmes de sécurité pour les élèves.

Les personnels qui assuraient exclusivement des fonctions d'enseignement ont vu leur temps d'enseignement diminuer, sans que des créations de poste en nombre suffisant soient intervenues.

Pour ce qui concerne les lycées maritimes de Bretagne, ces changements ont pour conséquence un déficit de postes qui peut être établi comme suit :

- 5 postes d'enseignant option Pont

- 4 postes d'enseignant option Machine

- 4 postes de surveillant.

Les lycées maritimes ne sont plus en mesure d'assurer leur mission de service public et de sécurité des élèves. La préparation des élèves à leur futur métier et aux examens qu'ils devront présenter n'est plus correctement assurée. Enfin, l'image négative de l'enseignement maritime secondaire ne cesse de croître et accentue encore le désintérêt des jeunes pour une profession qui reste pourtant essentielle à ces départements.

III. DES MARINS PÊCHEURS ET DES CONCHYLICULTEURS TOUCHÉS PAR LA MARÉE NOIRE DE L'ERIKA ET LA HAUSSE DU PRIX DU CARBURANT

Les difficultés structurelles du secteur ont été cette année aggravées par l'effet de la marée noire de l'Erika et la hausse du prix du carburant.

A. LES CONSÉQUENCES DE LA MARÉE NOIRE DE L'ERIKA

Après le naufrage du pétrolier Erika, survenu le 12 décembre 1999, et lorsqu'il est apparu que les nappes atteindraient la côte en raison des conditions météorologiques, les pouvoirs publics ont pris les mesures nécessaires au contrôle de la qualité sanitaire des produits de la mer. Dès le 20 décembre, les différents ministères et services compétents en matière de contrôle sanitaire des produits de la mer (ministère de l'agriculture et de la pêche : IFREMER ; ministère de l'économie, des finances et de l'industrie : directions de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) ont été mobilisés afin de renforcer le dispositif de surveillance et d'inspection des produits de la mer, mettre à disposition des moyens afin d'assurer les transferts des stocks de coquillages avant l'arrivée des nappes, prélever des échantillons afin de disposer d'une référence avant marée noire, interdire la récolte et la commercialisation des coquillages provenant de zones qui seraient manifestement touchées.

Des dispositions ont été prises par les pouvoirs publics, sur la base des recommandations de l'Agence Française de sécurité sanitaire des aliments pour suivre la contamination des zones conchylicoles, le cas échéant interdire le pompage de l'eau de mer et la commercialisation des coquillages. C'est le cas :

- dans tous les départements exposés où la pêche à pied professionnelle a été interdite et où seuls quelques gisements classés ont pu être réouverts à partir de la mi-juin ;

- en Loire-Atlantique où la totalité des zones d'élevage ont été fermées dès la première quinzaine du mois de janvier jusqu'au mois de juin. Ces fermetures ont été maintenues, car la plupart des analyses faisaient apparaître un accroissement des contaminations ;

- en Vendée, où un certain nombre de zones ont été fermées dans la deuxième quinzaine du mois de janvier sur critère visuel puis à nouveau durant la première quinzaine de février lors de l'arrivée des premiers résultats d'analyse. La plupart de ces zones ont pu être réouvertes à la mi-mars, d'autres ont pu également être réouvertes en avril et mai. Les dernières interdictions ont été levées au mois de juillet ;

Les stocks d'huîtres qui restent dans les zones d'élevage du fait de ces interdictions de commercialisation se sont dépréciés rapidement. Leur grossissement s'est poursuivi, leur taille ne correspond plus aux catégories commerciales et la période de reproduction dans laquelle nous sommes entrés leur a retiré toute valeur.

Les hydrocarbures plus ou moins dispersés dans le milieu marin sont à l'origine de dégâts matériels pour la pêche comme pour la conchyliculture :

- sur les engins de pêche traînants ou dormants qui sont remontés souillés et dont les captures peuvent être contaminées à cette occasion ;

- sur les ressources, de crustacés notamment, qui sont contaminées dans leur milieu d'origine. Une fois pêchées, ces ressources font l'objet de tris successifs en mer et au débarquement, les captures contaminées étant rejetées. Les autorités vétérinaires peuvent également opérer des retraits et des destructions lors de débarquement ;

- en conchyliculture, outre les parcs et matériels, des stocks de coquillages ont directement été souillés et ont dû être détruits au début de la marée noire.

Cette situation a eu des effets très négatifs sur la filière, notamment en termes d'image, qui se sont traduits par une dégradation du marché des coquillages au plan national. La baisse du chiffre d'affaires de la conchyliculture pour les deux premiers mois de l'année 2000 a pu être estimée par l'OFIMER à 30 % par rapport à la même période des années antérieures.

Dans l'ensemble, il apparaît que la mévente a été générale sur les marchés des coquillages durant le premier semestre 2000. Ce phénomène touche tant les départements directement touchés par la pollution de l'ERIKA, du Finistère à la Vendée, que les autres régions conchylicoles. Celles-ci ont pâti de la dégradation de l'image des coquillages et des inquiétudes des consommateurs malgré les dispositions prises par les pouvoirs publics pour éviter de les exposer aux contaminations des coquillages.

Du fait de cette mévente, les stocks d'invendus se sont dépréciés également.

Le naufrage du " Ievoli Sun ", dont il est encore difficile d'établir un bilan, souligne encore une fois la nécessité de renforcer la réglementation en matière de circulation des navires dangereux. Votre rapporteur pour avis souhaite que des mesures d'urgence soit prises au niveau communautaire pour que de pareilles catastrophes écologiques ne puissent se reproduire. Les pollutions entraînées par ces naufrages détériorent notre environnement, détruisent les ressources halieutiques et nuisent considérablement à l'image des produits marins. C'est pourquoi une agence de sécurité à l'échelle maritime européenne doit être créée au plus vite.

B. UNE AUGMENTATION DU PRIX DES CARBURANTS QUI MET EN PÉRIL LA RENTABILITÉ DES ENTREPRISES DE PÊCHE

Si depuis fin 1996 le redressement des cours a permis de stabiliser le résultat des entreprises, cette amélioration ne doit néanmoins pas dissimuler la fragilité persistante des flottilles, dont l'équilibre économique est particulièrement sensible à la hausse de certaines charges comme le carburant.

Il existe de bons taux de rentabilité pour certaines entreprises de pêche, pouvant atteindre 15 à 20 % des capitaux investis sur certaines pêcheries spécialisées. D'autres métiers notamment en pêche fraîche connaissent en revanche des difficultés croissantes depuis l'embellie observée pendant l'année 1998. Certains types de pêche, en particulier chalutière, sont en effet très sensibles à la hausse des coûts d'exploitation induits par la montée du prix du gazole.

Le relatif vieillissement de la flotte dû notamment aux contraintes communautaires imposées par les programmes d'orientation pluriannuels a des conséquences en matière économique (navires moins rentables) et de sécurité (navires vétustes).

Le gazole constitue en effet un poste important pour l'équilibre des comptes d'exploitation des navires de pêche. Le prix de vente du gazole suit l'évolution du marché pétrolier. Après une certaine stabilisation ces dernières années et une baisse significative en 1998, le prix de vente a subi une hausse brutale et continue depuis le début de l'année 1999 (le prix moyen est de 0,74 francs au 1 er janvier 1999 contre 1,60 francs - 1,80 francs courant juillet 2000). La poursuite de la hausse des prix du pétrole fragilise de nombreux armements. Cette charge qui se place en deuxième ou troisième position, après ceux des personnels et d'entretien/réparation, représente plus de 20 % du chiffre d'affaires (contre 10 % début 1999) d'un navire . Elle est particulièrement lourde pour les chalutiers, qui développent les puissances les plus importantes. L'augmentation du prix du gazole touche d'autant plus la France qu'une grande partie de la pêche française s'effectue hors des eaux territoriales françaises.

De plus, les surcoûts qui en résultent sont au moins partiellement répercutées sur les clients, ce qui génère des tensions inflationnistes.

Les effets de cet alourdissement de charges sont d'autant plus sévères que la structure du marché des produits de la mer rend sa répercussion très difficile sur le prix des produits vendus.

Cette évolution a eu des répercussions immédiates sur le revenu des pêcheurs.

En effet, les rémunérations de l'armateur et du marin-pêcheur dépendent de l'évolution tant des captures que des coûts d'exploitation. Ces charges, qui sont difficilement compressibles, tendent à s'accroître significativement depuis le début de l'année 1999, en raison en particulier de la hausse importante et continue du prix du gazole.

Ce poste de dépense pèse d'un poids considérable dans le revenu des armements et des marins-pêcheurs, pour lesquels tout accroissement des frais communs, s'il n'y a pas amélioration du chiffre d'affaires, entraîne une diminution parallèle et mécanique de la part qui revient aux équipages.

L'impact de ce phénomène sera très significatif sur les résultats du secteur de la pêche en 2000.

C'est la raison pour laquelle différentes mesures d'allégement de charges ont été décidées au deuxième semestre 2000 afin de répondre à cette situation sensible, tant pour les entreprises de pêche que pour les marins.

*

* *

Votre rapporteur pour avis veut espérer que ces difficultés ne soient que conjoncturelles. La tendance de fond à la diminution de la flotte française et des emplois ne cesse cependant de l'inquiéter. Si les évolutions observées ces dix dernières années se poursuivent, il est, en effet, à craindre que la pêche française ne soit progressivement cantonnée à des fonctions touristiques. On peut se demander si les pouvoirs publics français, mais surtout communautaires, ne s'en accommoderaient pas. Votre commission des Affaires économiques et son rapporteur pour avis refusent de l'envisager.

CHAPITRE II -

DES POLITIQUES PUBLIQUES QUI NE RÉPONDENT QUE PARTIELLEMENT AUX ATTENTES DES PROFESSIONNELS

I. UNE POLITIQUE NATIONALE SANS AMBITION

A. LES MESURES GOUVERNEMENTALES POUR VENIR EN AIDE AUX SECTEURS DE LA PECHE ET DES CULTURES MARINES

1. Le plan gouvernemental en faveur de conchyliculteurs et des pêcheurs victimes des tempêtes et du naufrage de " l'Erika "

Dans le cadre du plan gouvernemental arrêté le 12 janvier 2000 pour venir en aide aux victimes des tempêtes et du naufrage de l'Erika, des mesures spécifiques ont été prises en faveur des conchyliculteurs et des pêcheurs. Le Gouvernement a décidé de traiter de la même manière les victimes des deux sinistres.

Les dommages non assurables subis par les conchyliculteurs lors des tempêtes , tels que les pertes de fonds et pertes des récoltes, sont indemnisés au titre des calamités agricoles dans le cadre d'une procédure accélérée, de façon à ce que les premiers versements soient effectués dans les deux mois suivant la déclaration. Il est précisé que les coquillages en cours d'élevage seront considérés comme pertes de fonds et indemnisés en tant que tels. Au titre de cette procédure, les conchyliculteurs ont accès aux prêts bonifiés au taux de 1,5 %.

Au-delà de ces dispositions, des mesures exceptionnelles ont été arrêtées : une aide à la reconstitution des matériels et des stocks conchylicoles pourra être versée pour faciliter le redémarrage des exploitations, au vu d'une déclaration des préjudices subis et après vérification par les services déconcentrés, dans la limite de 200.000 francs par exploitation.

Pour les navires de pêche endommagés par la tempête , et en complément des interventions des assurances, une aide de même nature et de même montant pourra être versée.

Les entreprises dont l'activité est spécifiquement affectée par la marée noire auront accès à des avances de trésorerie à taux nul et garanties par l'Etat dans l'attente de l'indemnisation du fonds d'indemnisation de la pollution (FIPOL). Cette disposition concerne toute particulièrement les établissements conchylicoles situés dans une zone fermée à la suite de la pollution.

Un dispositif d'allégement des charges sociales a été mis en place pour les conchyliculteurs affectés par la tempête ou la marée noire après un examen au cours par cas.

Une aide forfaitaire pour perte de revenu pourra être consentie au bénéfice des marins dont le navire est rendu navigable du fait des dommages causés par la tempête.

Les conchyliculteurs sinistrés pourront bénéficier de reports d'annuités, ainsi que de l'exemption du versement de la redevance domaniale sur le domaine public maritime concédé.

Des campagnes de communication devraient être réalisées en vue de conforter l'image des produits de la mer.

Enfin, les instruments communautaires devraient être sollicités pour la restauration des outils de travail endommagés.

Ces mesures traduisent l'importance de la solidarité nationale pour ce secteur durement éprouvé puisqu'elles représentent un effort budgétaire global de 300 millions de francs.

2. Les résultats du Conseil interministériel d'aménagement et de développement du territoire et du conseil interministériel de la mer

A l'issue du Conseil interministériel d'Aménagement et de Développement du Territoire et du Conseil interministériel de la Mer qui se sont tenus lundi 28 février, à Nantes, le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement avait décidé de débloquer cinq milliards de francs supplémentaires (dont quatre milliards de l'Etat) jusqu'en 2003 pour faire face aux conséquences de la marée noire et des tempêtes, dont 939,5 millions de francs en 2000. Cette enveloppe a été inscrite au collectif budgétaire du printemps :

- les crédits du plan Polmar ont été portés à 560 millions de francs, pour financer notamment l'emploi de 900 contrats à durée déterminée pour le soin des oiseaux et le nettoyage des côtes ;

- 100 millions de francs sont destinés à la restauration écologique ;

- 350 millions de francs devraient être consacrés au tourisme ;

- 90 millions de francs ont été alloués à l'indemnisation exceptionnelle des préjudices non assurables des professionnels. De plus, l'Etat s'est engagé à accorder 60 millions de francs de prêts sans intérêts ;

- 10 millions de francs devraient être alloués chaque année au Centre de documentation, de recherche et d'expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux ;

- 40 millions de francs sur deux ans sont destinés à intensifier la recherche ;

- 20 millions de francs de nouveaux crédits ont été dégagés pour faire face à l'abandon des navires et prendre en charge les marins en cas de danger avéré.

En outre, des mesures sont destinées à renforcer les défenses du littoral : 25 millions de francs pour les digues de l'estuaire de la Gironde, 20 millions de francs pour l'estuaire de la Loire et 7 millions de francs pour les petits ports de Charente-Maritime.

Sur trois ans, 30 millions de francs devraient être consacrés à la réhabilitation de la diversité biologique et au suivi des milieux et espèces.

Sur cinq ans, 60 millions de francs devraient permettre de réaliser des travaux de restauration des écosystèmes marins et côtiers.

3. Les mesures spécifiques annoncées au conseil supérieur d'orientation des politiques halieutiques, aquacoles et halioalimentaires (CSO)

Au CSO du 7 mars dernier, le ministre de l'agriculture a précisé les mesures supplémentaires annoncées par le Premier ministre le 3 mars au Salon international de l'agriculture, en faveur du secteur de la pêche et de la conchyliculture. Ces mesures complètent le dispositif gouvernemental arrêté le 12 janvier 2000 et tiennent compte des difficultés de ce secteur, confronté aux conséquences cumulées de la tempête et de la marée noire.

Pour les conchyliculteurs, il a été décidé d'étendre la procédure d'avance sur l'indemnisation du Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL) à l'ensemble des exploitations des quatre départements sinistrés (Vendée, Loire-Atlantique, Morbihan, Finistère). En outre, la prise en charge des cotisations sociales a été élargie aux entreprises situées dans des régions non touchées par la marée noire, mais qui subissent un préjudice réel du fait de la dégradation générale du marché des coquillages. L'enveloppe affectée à cette mesure représente un mois de cotisations sociales, mais sa répartition pourra être modulée en concertation avec la profession.

Le dispositif d'avance sur indemnisation FIPOL a également été étendu aux pêcheurs pour les retraits et destructions de capture de crustacés pollués.

Par ailleurs, l'assiette pour l'indemnisation des navires et engins de pêche dégradés par la tempête a été relevée de 60 à 75 %, comme cela a été fait pour les conchyliculteurs.

Pour prendre en compte les conséquences de la marée noire sur les conditions d'exploitation des navires de pêche et de commercialisation des produits, le Gouvernement a décidé d'affecter une enveloppe de 75 millions de francs à un dispositif d'allégement de charges. Les modalités adaptées aux différentes situations ont été définies en concertation avec les professionnels, sous l'égide du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPM).

4. Des mesures renforcées pour limiter les conséquences de l'augmentation du prix du gazole

Les mesures adoptées au cours du premier trimestre ont été amplifiées pour limiter les conséquences de l'augmentation du prix du gazole. C'est ainsi que les mesures d'allégement temporaire des charges sociales ont été prolongées jusqu'à la fin de l'année.

A la mi-août 2000, le bilan des aides mises en place s'établit ainsi :

Dans le secteur des cultures marines, afin que les conchyliculteurs, mais aussi les pêcheurs à pied, bénéficient rapidement d'un concours financier, l'Etat a consenti une avance de la moitié de l'indemnisation à recevoir au titre du FIPOL du fait des dommages aux biens mais également du préjudice économique causé par la marée noire. Cette avance est plafonnée à 200.000 francs. Au 15 août 2000, sur les 778 dossiers déposés, 710 avaient été examinés par les cellules départementales pour un montant de 13,6 millions de francs. Du fait de l'adoption d'un taux provisoire d'indemnisation à 50 % par le FIPOL lors de la réunion du 5 juillet 2000 de son comité exécutif, le Gouvernement a décidé que de transformer cette avance en complément d'indemnisation.

En matière d'allégement de charges financières, l'Etat peut prendre en charge une partie des intérêts des prêts professionnels échus ou à échoir en 2000, 2001 et 2002. Le montant ne peut pas excéder 48.000 francs, sauf situation particulièrement critique, auquel cas il peut être porté à 62.000 francs. Il est modulé en fonction de la situation globale de l'entreprise.

En matière d'allégement de charges sociales, les mesures ciblées sont destinées aux aquaculteurs et pêcheurs à pied des six départements directement touchés par la tempête ou la marée noire. Elles sont décidées au cas par cas, en fonction de la situation du redevable, par le préfet sur proposition de la cellule départementale d'indemnisation. Elles sont calculées sur la base du salaire forfaitaire de la 4 ème catégorie. Elles portent sur un ou deux mois, pour les cotisations dues au régime social des agriculteurs (MSA : Mutualité sociale agricole) ou à celui des marins (ENIM : Etablissement national des Invalides de la Marine) ainsi qu'à la CNAFPM (Caisse nationale d'allocations familiales des pêches maritimes). Cette caisse prélève les cotisations d'allocations familiales pour les assujettis à l'ENIM. La mesure générale d'allégement des charges sociales a également été décidée pour l'ensemble des aquaculteurs de France pour les cotisations dues à la MSA.

Pour la même raison de dégradation du marché des produits de la mer, les concessions de cultures marines sur le domaine public maritime ainsi que les autorisations de prise d'eau pour l'alimentation de parcelles privées situées dans les départements concernés sont exonérées du paiement de la redevance domaniale en 2000. Le coût de cette mesure est d'environ 15 millions de francs.

Dans le secteur de la pêche, afin que les pêcheurs bénéficient rapidement d'un concours financier, l'Etat consent une avance de la moitié de l'indemnisation à recevoir au titre du FIPOL du fait des dommages aux biens (engins de pêche) ainsi que des pertes de chiffre d'affaires pour les captures, essentiellement de crustacés, retirées du marché pour raison sanitaire. Cette avance est plafonnée à 200.000 francs. 75 dossiers ont été déposés et, au 18 août 2000, 60 ont été examinés par les cellules départementales. De même que pour les aquaculteurs, les avances vont être transformées en complément d'indemnisation.

Une mesure générale d'allégement des charges sociales dues à l'ENIM a été décidée pour l'ensemble des pêcheurs de France. Elle porte sur la moitié de trois appels trimestriels successifs de cotisation, son coût est de 180 millions de francs.

Votre rapporteur pour avis se félicite de ces mesures qui, à défaut de s'attaquer aux problèmes structurels du secteur, devraient néanmoins permettre de réduire les difficultés financières des entreprises de pêche. Il souhaite que ces mesures puissent être acceptées par les autorités communautaires. Il veut croire que le Gouvernement a pris toutes les assurances pour qu'elles soient compatibles avec le droit communautaire. Il serait, en effet, inadmissible que les entreprises de pêche aient à rembourser les aides que l'Etat leur a consenties pour faire face à cette situation de crise.

B. DES PROPOSITIONS POUR UN MEILLEUR EXERCICE DE LA PÊCHE DANS LA BANDE CÔTIÈRE

La loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines promulguée le 18 novembre 1997 prévoyait que le Gouvernement établirait, dans un délai de deux ans, un rapport sur l'exercice de l'activité dans les zones des 12 miles et en particulier dans les eaux territoriales. Ce rapport devait également dresser un bilan des mesures à prendre, notamment dans la perpective de la renégociation de la politique commune des pêches (PCP) en 2002.

Cette mission a été confiée à Jacques Bolopion, directeur régional des affaires maritimes de la région Paca, André Forest, chercheur au département ressources halieutiques de l'Ifremer, et Louis-Julien Sourd, ingénieur général au ministère de l'agriculture et de la pêche. Leur rapport a été remis au ministre de l'agriculture et de la pêche au début de cette année.

Ce rapport dresse le bilan des activités de petites pêche côtière . Les unités de pêche côtière (inférieures à 12 mètres) représentent 80% de la flotte française, soit 4.512 bateaux (75 % en métropole et 96 % dans les départements d'outre mer) et 43 % de sa puissance moyenne.

Le poids de la pêche côtière est aussi considérable en terme d'emplois. A elle seule, la petite pêche regroupait déjà 14.099 actifs en 1998, soit environ 48 % des actifs, chacun de ces marins générant de 1 à 2 emplois à terre. Quant à la production de la bande côtière, même si elle est très difficile à cerner avec précision étant donné la fragilité des données disponibles, elle est aussi importante. Quelque 60 % de la production de la Manche (hors algues) viendrait de la bande côtière, contre 37 % en Atlantique. En Méditerranée, 50 % des débarquements de poissons de fond, 60% des sardines et 30 % des anchois seraient aussi pêchés dans les 12 miles.

Les propositions de ce rapport s'inscrivent dans la continuité d'actions déjà entreprises, ou proposent d'étendre au niveau national des expériences positives réalisées dans certaines régions. Plusieurs de ces propositions ont retenu l'attention de votre rapporteur pour avis :

Prévoir des évolutions réglementaires tendant à une exploitation durable des ressources. Certaines propositions dans ce sens méritent d'être relevées :

Limiter la taille et la puissance des navires accédant aux 12 miles . Comme c'est le cas dans divers pays de l'Union européenne, il conviendrait de poursuivre la réflexion sur l'interdiction de la bande des 12 miles à des navires au-delà d'une certaine taille et/ou d'une certaine puissance.

Votre rapporteur pour avis constate que la limitation de la taille et de la puissance des navires est déjà appliquée dans un certain nombre de licences. Il observe que certains professionnels estiment que de telles mesures interviennent trop tardivement, ou craignent une faillite de leur navire si jamais il était contraint de pratiquer son activité au-delà des 12 milles, alors que d'autres prônent des mesures plus générales et plus radicales afin de limiter la puissance et la taille des navires dans la bande côtière.

Proscrire certains engins de pêche . Certains d'entre eux (dragues à dents, casiers à parloir...) posent problème à cause de leur impact sur le milieu et les ressources. Il conviendrait, en concertation avec les organisations professionnelles, de faire un inventaire de ces engins et de définir les conditions de leur disparition (licences non cessibles...).

Votre rapporteur pour avis partage l'objectif des licences qui est d'encadrer plus strictement un type de pêche sans l'interdire totalement (limitation du nombre et de la puissance des navires, limitation des navires tout en conservant un seuil de rentabilité et disparition progressive des excès). Il estime que la diversité des engins de pêche, permet une plus grande diversité des captures, à condition que ces engins soient bien utilisés.

Organiser la pêche à pied des coquillages . Prévoir dans un délai rapide, au moins pour la partie coquillages, la publication du décret pêche à pied prévu par la loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines du 18 novembre 1997. Votre rapporteur pour avis estime que sur ce point les structures professionnelles devraient pouvoir intervenir dans le futur dispositif.

Réglementer la pêche aux filets . Les rapporteurs ont ressenti une demande de réglementation de la pêche aux filets, et notamment quant aux longueurs autorisées par navire, y compris de la part des intéressés. Pour satisfaire cette aspiration, il faudra faire appel à des solutions techniques originales, notamment pour la mesure des filets mis à l'eau. Votre rapporteur estime qu'il y a là un véritable problème qui dépasse d'ailleurs le cadre français et qui mériterait d'être examiné à la fois aux niveaux national et communautaire, puisque le nouveau texte sur les mesures techniques qui a pris effet le 1 er janvier 2000 réglemente essentiellement les maillages.

Mieux réglementer la pêche de plaisance . Les textes existants sont globalement admis, mais comporteraient des failles ou des lacunes à redresser, à partir d'une concertation préalable au niveau national. Les conditions d'application seraient en revanche à renvoyer au niveau des préfets de région. Par ailleurs, il existe un réel besoin d'harmonisation entre les différentes régions. Quelques pistes mériteraient d'être explorées :

- instaurer un permis de pêche annuel pour la pêche de plaisance ;

- limiter les apports par pêcheur plaisancier, par navire et par jour ;

- conserver les engins de pêche autorisés aux plaisanciers, mais prévoir de manière précise et rigoureuse le marquage des casiers et des filets ;

- fournir un cadre sur la manière dont doivent être organisés les concours de pêche ;

- couper les queues des poissons pêchés par les plaisanciers pour contrecarrer une vente éventuelle ;

- vendre les poissons pêchés pendant les concours de pêche sportive, au profit des oeuvres sociales des marins ou remise à l'eau de certaines prises (pêche sportive), notamment quand celles-ci sont effectuées sur des stocks soumis à quotas.

Rénover le système de recueil des statistiques de pêche

Les apports des navires de petite pêche sont quasi inconnus, aussi bien en ce qui concerne les quantités que les espèces et les valeurs, sauf dans quelques régions où un système de collecte de l'information a été mis en place. Ce vide statistique empêche de conduire des actions pertinentes sur l'évaluation des ressources et des flottilles, de mesurer son poids économique réel et ne permet donc pas d'émettre des orientations sur la petite pêche. Il est donc impératif de prendre en compte la petite pêche dans le cadre de la réforme du système nationale des statistiques de pêche.

Cette action est considérée par votre rapporteur pour avis comme prioritaire. Elle nécessite un effort budgétaire, une approche adaptée à la spécificité de la petite pêche, mais ne présente pas de difficultés particulières sur les plans méthodologique et technique. Sa réussite suppose une réelle implication des professionnels, avec une intensification du dialogue entre les différents acteurs du système.

Protéger de manière renforcée les espaces de grand intérêt halieutique

La protection des espaces concernés, les estuaires, des récifs coralliens et certaines zones par petits fonds à proximité des côtes, identifiés comme des frayères ou des nourriceries pour certaines espèces, apparaît importante, d'autant plus que la reconquête d'un secteur détruit ou abîmé se révèle très coûteuse.

Les actions préconisées sont de plusieurs ordres : confirmer l'interdiction du chalutage dans la bande des 3 miles. Son interdiction doit être maintenue sur l'ensemble du littoral et les nombreuses dérogations dont il bénéficie doivent être revues de manière systématique. Bon nombre de ces activités de chalutage en zone côtière ne sont rentabilisées qu'au travers de pratiques non conformes aux réglementations nationales et européennes. Elles se font au détriment de l'intérêt général des professionnels eux-mêmes. La solution passe ici par un examen détaillé des justifications des dérogations, de l'extinction de celles qui posent problème, de la mise en oeuvre dans certains cas particuliers et limités d'engins ou de techniques de pêche réellement sélectifs et ciblant certaines espèces particulières.

Il est également proposé d'instaurer des parcs, réserves et cantonnements. Cela implique la prise en compte de questions d'ordres social et/ou économique sur le milieu naturel et son usage, et doit relever d'une approche consensuelle permettant de définir entre partenaires reconnus les objectifs, les ambitions et les usages possibles des zones protégées. Dans un certain nombre de régions (Méditerranée, Antilles), les parcs, réserves, cantonnements sont considérés par les professionnels comme des outils de gestion au même titre que d'autres mesures. L'utilisation d'outils juridiques existants paraît possible (Natura 2000, parcs marins...) mais la création d'un système ad hoc pourrait être envisagée. L'objectif de ces dispositifs étant de préserver autant que faire se peut des zones définies dans lesquelles toute extraction, rejet de dragage ou implantation industrielle polluante seraient interdits et la pêche professionnelle ou plaisancière réglementée de manière particulière et restrictive.

Votre rapporteur pour avis est favorable à ce type de dispositif, sous réserve que les professionnels conservent un rôle actif dans le système de décision lors de la mise en place de zones protégées.

Définir un schéma national des extractions en mer et des immersions des vases de dragage

La croissance des demandes nouvelles de permis miniers apparaît préoccupante, à la fois par les quantités et par le caractère épars des zones proposées. Les auteurs du rapport suggèrent que soit élaboré, en concertation avec tous les usagers, un document destiné à guider les services de l'Etat lors de l'instruction des dossiers et comportant un certain nombre de recommandations sur les méthodes et les politiques d'extraction qui perturbent le moins le milieu, sur les procédures de contrôle de l'activité et sur les secteurs qui sont à exclure totalement en raison de leur richesse halieutique. Un tel schéma pourrait être régional ou national.

Il est également proposé de fixer des conditions précises de rejet en mer des sédiments de dragage, il convient de fixer aux collectivités responsables des ports des règles de rejet en mer lorsqu'à proximité se trouve une zone conchylicole ou aquacole, d'intérêt halieutique ou touristique. Les rapporteurs proposent que, dans un premier temps, dans le cadre de directives générales interministérielles et après avis scientifique, les préfets fixent des périmètres autour des zones concédées où tout rejet de vases de dragages est interdit. Au-delà de ce périmètre, pourraient être également fixés les règles auxquelles doivent obéir les dépôts de dragage et les conditions dans lesquelles au préalable les sédiments à draguer sont analysés. Dans une deuxième étape, les directives pourraient également fixer des secteurs où tout rejet serait interdit. Il est cependant clair que la solution à terme se situe en amont (prévention des rejets de polluants).

L'ensemble de ces propositions apparaissent satisfaisantes. Votre rapporteur insiste cependant sur le fait que tout rejet en mer devrait faire l'objet d'un avis délibératif des professionnels. De même en matière d'extractions, il convient de dénoncer l'absence de consultation des professionnels dans les instances attributives de quotas et d'instaurer un suivi contradictoire de ces activités impliquant extracteurs et professionnels de la pêche.

Renforcer et conforter le rôle des organisations professionnelles

Face à l'accroissement du rôle des comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins (CRPM), comme interlocuteurs des collectivités territoriales et de l'Etat et comme lieu privilégié de défense des intérêts de la profession, trois propositions sont formulées :

Il est tout d'abord proposé de renforcer les moyens de fonctionnement des CRPM. Une des difficultés que rencontre aujourd'hui le secteur tient au fait que les structures professionnelles ne disposent pas des moyens indispensables pour remplir les rôles qui leur sont assignés par les textes réglementaires. Le budget minimum nécessaire au fonctionnement correct d'un " petit " comité régional peut être évalué entre 600.000 francs et 800.000 francs, cette somme couvrant les salaires d'un directeur et d'une secrétaire, les frais de fonctionnement, la location de bureaux et les déplacements nécessaires des dirigeants professionnels. Or, l'addition des taxes parafiscales et des cotisations supplémentaires volontaires donne actuellement pour la quasi-totalité des comités régionaux un produit global d'environ 250.000 à 400.000 francs. Le rapport insiste donc sur la nécessité d'assurer au minimum à chaque comité régional des ressources sûres tournant autour de 600.000/800.000 francs. Cette fourchette minimale pourrait atteindre 1,6 à 2 millions de francs pour le plus grand comité régional (la Bretagne). Est soulignée, à l'inverse, la nécessité de conserver pour les comités régionaux restants des structures légères, efficaces et donc d'éviter toute bureaucratisation avec des permanents en nombre important.

Il est ensuite suggéré de mieux coordonner l'action entre les structures professionnelles des secteurs de la pêche, de l'aquaculture et de la conchyliculture. Il est proposé qu'à l'initiative du CNPM soient organisées des réunions de coordination entre les comités régionaux par façade, soit lorsque des sujets le nécessitent, sinon au moins une fois par an. Dans le même sens, il convient de prévoir des réunions périodiques entre les sections régionales conchylicoles et les comités locaux pour résoudre des conflits, certes souvent mineurs mais relativement nombreux, entre les deux professions, notamment sur les conditions d'exercice de la pêche dans le cadre de l'armement conchyliculture-petite pêche.

Il est, enfin, proposé d'apporter, au sein des structures professionnelles, une attention accrue aux questions de gestion des ressources et d'environnement. Les auteurs du rapport ont regretté qu'un certain nombre de comités régionaux aient peu soulevé les questions environnementales, aussi bien sur un plan général (qualité des eaux) qu'au plan de la ressource. Il a semblé que cette situation amenait à un manque de propositions constructives pour la gestion des pêches en zone côtière, notamment pour juguler la surexploitation des ressources et la surcapacité de capture et résoudre les conflits qui en découlent.

Procéder à un toilettage des textes réglementaires régionaux et mener des actions fortes et ciblées contre les fraudeurs

L'un des problèmes auquel sont confrontés les professionnels du secteur est le volume et la complexité des textes réglementant la pêche en zone côtière. Cette complexité engendre des difficultés de compréhension, d'application et de contrôle, voire des divergences d'interprétation entre les services de l'Etat. Cette situation est encore compliquée par le jeu des dérogations de toutes sortes, notamment dans la bande des 3 miles. Une mise à plat de cette réglementation permettant de faire un état des lieux devrait être faite, afin d'envisager une refonte des textes, permettant qu'ils soient compris et acceptés de tous.

Consolider les concertations plaisance/pêche professionnelle et mener des actions énergiques contre la " fausse " plaisance

Il est proposé, partout où cela n'a pas lieu, des concertations périodiques et institutionnelles avec trois objectifs principaux : inventorier les points de conflit, faire évoluer les réglementations et déterminer les zones sensibles, lutter contre les pratiques frauduleuses. En ce qui concerne la " fausse " plaisance, le rapport estime que cette pêche frauduleuse, qui s'effectue pour l'essentiel à partir de navires ou en action de plongée, constitue en fait un travail illégal non déclaré. En métropole, le caractère saisonnier des " braconniers ", le fait qu'ils travaillent sur des secteurs bien connus et relativement peu étendus, doit conduire à des actions énergiques et ciblées. Il est suggéré d'organiser des opérations interministérielles de contrôle associant les affaires maritimes, la gendarmerie, la douane, la direction du travail et de l'emploi.

Maintenir sur le littoral un réseau de ports et de lieux d'amarrage pour la petite pêche

Le rapport " Bolopion " réaffirme l'intérêt du maintien d'un vrai réseau des ports de petite pêche implantés sur tout le littoral. Il précise que cette politique doit s'accompagner de deux éléments :

- revoir les listes de points de débarquement autorisés. Il est nécessaire de maîtriser les points de débarquements effectués hors des criées. L'existence d'un certain nombre d'entre eux, proches des criées, totalement inadaptés ou non utilisés, ne se justifie pas. La loi d'orientation du 18 novembre 1997 précise les conditions d'agrément de ces points dans le triple objectif de garantie de la qualité sanitaire des produits débarqués, d'amélioration de la connaissance statistique, et de rationalisation des conditions de débarquement.

- vérifier l'état sanitaire des produits vendus et mettre en place des instruments de vente adaptés. L'acceptation de la vente et de la commercialisation en dehors des halles à marée doit s'accompagner d'une réflexion portant sur les conditions de mise en marché des produits débarqués. Surtout, les conditions du contrôle sanitaire par les services vétérinaires sont à préciser. Il convient, bien sûr, de maintenir des règles sanitaires fermes pour les produits ainsi débarqués, mais aussi d'accepter des adaptations.

Votre rapporteur pour avis estime que ce rapport a l'avantage de mettre en évidence l'ensemble des grands problèmes de la pêche côtière et de proposer des solutions. Il constate que la plupart étaient réclamées par les professionnels eux-mêmes depuis bien longtemps. Il souhaite que les mesures proposées, qui recueillent l'approbation des pêcheurs puissent servir de base à l'élaboration d'une véritable politique française de la pêche maritime.

C. VERS UNE RÉFORME DE L'ORGANISATION DES ACTIVITÉS PORTUAIRES

Le Ministre de l'agriculture et de la pêche et le ministère de l'équipement devraient annoncer les suites qu'ils entendent donner au rapport sur les ports de pêches. Ce rapport, remis le 23 juin dernier, a procédé à une étude de la situation et des activités des ports de pêche après l'audition de nombreux acteurs. Il aboutit à la conclusion que la gestion, pour être efficace, devrait relever des acteurs locaux.

Selon les auteurs, il devrait en résulter une meilleure adaptation à la diversité de nos secteurs littoraux et une gestion réactive, en adéquation avec les besoins des utilisateurs et au moindre coût. Ils soulignent que si, actuellement, à quelques exceptions près, les comptes des ports de pêche sont équilibrés, il n'en demeure pas moins qu'ils restent fragiles et que la situation peut s'inverser. Le rapport considère que sauf cas particulier, un gestionnaire unique pour l'abri portuaire est le mieux à même de réaliser des économies d'échelle, d'optimiser l'utilisation de l'ensemble portuaire entre toutes les activités, et de diversifier l'activité pour maintenir la pleine utilisation du patrimoine.

Les concédants ont, directement ou indirectement, investi dans le passé et investiront encore sans visibilité, sans engagement d'apport durable des navires, donc en prenant un risque important qui ne peut être assumé par les usagers : Relever les tarifs face à une activité en déclin pour " équilibrer " le budget est, en effet, la pire des politiques, le navire étant par essence mobile. Le concédant assumant de fait les conséquences des évolutions économiques, le rapport estime qu'il importe de lui donner la pleine responsabilité de la décision, à un niveau en rapport avec l'impact global du système portuaire, c'est-à-dire selon les cas, communal, départemental, régional, ou éventuellement national.

Les auteurs constatent, par ailleurs, que seuls payent ad valorem les produits passant en criée, pour toutes les taxes, redevances, cotisations. Les produits ne passant pas en criée ne payent que très partiellement, sur une base déclarative. Les contrôles de toute nature sont, en outre, principalement ciblés sur les produits passant en criée. Les auteurs soulignent qu'un système assis sur la valeur du poisson en criée pousse à l'évasion et est sans rapport avec le service rendu.

Ils considèrent également que les fonctions liées à la première mise en marché des produits n'ont pas de lien obligatoire avec celles qui sont exercées par un port et suggèrent de dissocier les entités juridiques. Le système actuel de concessions des criées, à une Chambre de commerce et d'industrie (CCI) le plus souvent, est considéré comme, lourd, coûteux, opaque, peu réactif, inadapté à une gestion commerciale dynamique.

Le rapport observe qu'en Europe du Nord, la concentration des lieux de débarquement et des points de première mise en marché s'est organisée très tôt, alors que la France se distingue par l'existence de 43 criées indépendantes. Il relève que si elles se justifient en partie par des habitudes de consommation de poisson frais d'espèces recherchées, ce phénomène de bases avancées, la raréfaction de la ressource, la consommation croissante de poisson d'origine lointaine, le développement des moyens de communication, l'expansion de la grande distribution, font que les pratiques des pêcheurs évoluent, et notamment que les navires sont moins attachés à leur port d'origine qu'autrefois.

Les auteurs constatent, en outre, que l'avenir des ports et des halles à marée dépend de l'attractivité qu'ils exercent sur les patrons pêcheurs et les mareyeurs. Cette attractivité est fonction des attaches familiales, des services rendus, du montant des redevances et taxes, des lieux de pêche, et surtout de la valorisation locale du poisson. Les criées se sont orientées vers des domaines spécifiques : certaines, locales, valorisent bien des espèces nobles grâce à un débouché de produits très frais de haut de gamme dans des agglomérations proches ; certaines sont spécialisées en poisson de faible valeur mais profitent bien d'une demande forte et rémunératrice tirée par l'Europe de Sud ; d'autres, régionales, forment les prix mais à un niveau assez bas car soumise à la pression des importations ; d'autres enfin voient leur valorisation régresser du fait d'une inadéquation de l'offre et de la demande en nature d'espèces, quantité, qualité, taille, services, ouverture du marché. Les auteurs relèvent, à partir de ce constat, que le nombre de navires diminuant, certaines de ces dernières criées ont atteint un niveau qui les rend très fragiles.

A partir de ce constat, les auteurs de ce rapport formulent les propositions suivantes :

Les compétences de l'Etat en ce qui concerne tous les ports d'intérêt national pourraient être transférées aux régions et l'actuel cadre juridique d'affectation des ports entre départements et communes, pourrait être assoupli. Il s'agit en fait de libérer la possibilité de choix du meilleur niveau d'exercice de la responsabilité du concédant et de la gestion.

Le concédant, collectivité territoriale, conserverait la responsabilité des investissements lourds des infrastructures portuaires et des grandes décisions stratégiques, la gestion courante des ports s'effectuant sous le régime d'un affermage dont les durées ne dépasseraient pas 10 à 12 ans.

La redevance d'équipement portuaire (REPP), redevance ad valorem, sans lien avec le service rendu, serait remplacée par une redevance calculée en fonction de la taille du navire et en fonction de la durée qu'il passe à quai. Elle serait à la charge des pêcheurs et des armateurs, dont les navires sont les bénéficiaires des services en cause.

La concession des moyens de première mise en marché et la concession portuaire seraient dissociées chaque fois que possible. Cette séparation rendrait les fonctions -services aux navires et services aux produits-, distinctes et plus transparentes. Ce dédoublement permettrait aussi de redéfinir la géographie des ports et des halles à marée, les uns et les autres pouvant participer à des regroupements fonctionnels, organiques et géographiques qui leur soient propres. Par contre la séparation, sur un même site, des concessions ports de pêche, ports de commerce et ports de plaisance ne semble pas réaliste compte tenu de l'importance des ouvrages communs.

La quasi-totalité des prestations des halles à marée pourrait être assimilée à des prestations à caractère privé qui seraient supportées en grande partie par les acheteurs. En conséquence la taxe de criée serait, dans la pratique, remplacée par des tarifs de prestations.

Il revient aux pouvoirs publics d'apporter une garantie d'accès au marché pour les pêcheurs, et l'assurance, pour les consommateurs, que les réglementations statistiques et sanitaires sont effectivement appliquées. Des centres d'enregistrement et d'identification -à créer- joueraient ce rôle, dévolu à certains ports dont les fonctions s'exerceraient sur une portion de littoral de taille variable selon l'importance de la pêche locale. Grâce aux moyens informatiques modernes, ces centres enregistreraient les notes de vente, des éléments des livres de bord et identifieraient les produits.

Pour une meilleure qualité, l'identification et la traçabilité des produits doivent être recherchées lors de la première mise en marché. Dans cette perspective, il est proposé que :

- la formation des trieurs s'organise sous l'égide des responsables des criées et de l'Office Interprofessionnels des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER) ;

- le contrôle de premier niveau pour le classement qualité relève de la responsabilité contractuelle, des criées, des centres d'identification et d'enregistrement, et de l'OFIMER ;

- le contrôle de second niveau soit effectué, sous la responsabilité des services de l'Etat, par des sondages mieux répartis et non réservés aux criées agréées ;

- la saisie des éléments d'identification et le contrôle de premier niveau soient opérés sur le lieu de débarquement du poisson ;

- l'identification et la traçabilité du produit soient du ressort de centres d'enregistrement et d'identification habilités à délivrer les documents ad hoc ;

- le financement de ces opérations d'identification et de contrôle de premier niveau soit assuré par un prélèvement sur l'aval de la filière.

Les auteurs du rapport jugent souhaitable que l'action de l'OFIMER porte en priorité sur les activités d'encadrement des opérations de première mise en marché et de contrôle de premier niveau, car la promotion des produits relève plus d'une interprofession en période de raréfaction de la ressource et de demande supérieure à l'offre.

Une réglementation bien conçue et mieux appliquée devrait permettre une meilleure commercialisation du produit et sa valorisation, en apportant toutes les garanties de qualité. Les auteurs du rapport jugent que l'Etat doit jouer pleinement son rôle en cadrant les moyens limités dont il dispose sur la base d'une stratégie clairement définie. Il pourrait coordonner les interventions locales sous la responsabilité des préfets en employant des méthodes qui ont été appliquées avec succès dans d'autres domaines : pôle de compétence, mission inter-service et guichet unique.

Votre rapporteur pour avis partage les grandes orientations de rapport. Il estime que la séparation des activités portuaires et des activités liées aux criées est, en effet, de nature à clarifier les missions de chacun. Le remplacement de la REPP par une redevance calculée en fonction de la taille du navire et de la durée qu'il passe à quai permettrait, par ailleurs, de rapprocher le prix payé du coût du service rendu. On peut se demander si, à terme, le coût de ces prestations ne sera pas pris en charge par les collectivités territoriales auxquelles on confiera la responsabilité des ports.

Il s'interroge en revanche sur la pertinence des propositions assimilant la quasi totalité des prestations des halles à marée à des prestations à caractère privé devant faire l'objet d'une facturation individualisée en fonction de chaque prestation servie. Ce dispositif pourrait, en effet, présenter plusieurs inconvénients : favoriser l'éclatement des prestations alors même que l'on cherche depuis des années à favoriser des économies d'échelle, réduire le caractère redistributif des tarifications qui, jusqu'à présent, permettait de réduire les frais exigés des petits pêcheurs.

II. UNE POLITIQUE COMMUNAUTAIRE EN VOIE DE MUTATION

La filière de la pêche et de l'aquaculture concerne dans l'Union européenne entre 600.000 et 750.000 personnes, dont quelque 260.000 pêcheurs. L'économie de régions entières repose sur ce secteur dont les enjeux sont, par nature, plus européens que nationaux.

L'Union européenne fait aujourd'hui le constat que l'activité de pêche est menacée par un trop grand nombre de navires et la diminution constante des ressources. L'Europe se trouve donc face à un dilemme : équilibrer la capacité de pêche avec les ressources disponibles, tout en tenant compte des intérêts socio-économiques des hommes qui vivent de la mer et de ses produits.

A. UN NOUVEAU CADRE POUR LES ACTIONS STRUCTURELLES EN FAVEUR DE LA PÊCHE ET DE L'AQUACULTURE

En cinquante ans, parallèlement à une augmentation des capacités de pêche, les captures mondiales sont passées de 2,3 millions à près de 100 millions de tonnes. Au point que certaines espèces voient leur existence clairement menacée.

La nécessité s'est donc imposée d'une limitation de l'effort de pêche et des captures. Pour atteindre cet objectif, l'Union européenne a mis en place différents mécanismes visant à réduire le nombre de bateaux, limiter les captures, favoriser une pêche plus sélective et une gestion adaptée aux différentes zones de pêche, encourager la diversification des activités dans les régions dépendantes de la pêche.

La politique commune de la pêche doit par ailleurs faire face aux nouvelles exigences du marché quant à la qualité des produits, à l'hygiène et à la sécurité au travail, et au respect de l'environnement. C'est dans ce contexte que le soutien financier de la communauté prend toute son importance. On comprend dès lors que l'adoption par le Conseil des Ministres de la pêche, en décembre 1999, du nouveau règlement qui définit concrètement la politique structurelle en matière de pêche et d'aquaculture pour la période 2000-2006 1 ( * ) , ait été un événement important pour toutes les entreprises du secteur.

NOMBRE DE PÊCHEURS EN EUROPE ET LEUR ÉVOLUTION

La finalité des actions structurelles entreprises au niveau européen depuis plusieurs années peut se résumer en quatre grands axes :

- atteindre un équilibre durable entre les ressources et l'exploitation qui en est faite ;

- renforcer la compétitivité des entreprises de pêche ;

- améliorer l'approvisionnement du marché et la valorisation des produits de la pêche et de l'aquaculture ;

- contribuer à la revitalisation des zones dépendantes de la pêche.

Ces actions s'inscrivent dans le cadre des fonds structurels européens, et plus précisément de l'IFOP, l'Instrument financier d'orientation pour la pêche. Le nouveau règlement, d'application depuis le 1 er janvier 2000, apporte des améliorations à certaines dispositions qui, à l'usage, s'étaient révélées peu claires ou difficiles à appliquer. Il introduit par ailleurs certaines nouveautés, par exemple, au bénéfice du secteur de la petite pêche ou des jeunes pêcheurs envisageant l'achat d'un premier navire.

Poursuivant l'objectif de réduction de la capacité de pêche en vue de l'adapter aux ressources disponibles, ce nouveau règlement modifie les conditions pour obtenir des aides et institue un nouveau mécanisme de gestion, permettant un meilleur suivi de l'évolution de la flotte communautaire.

Le cadre de référence pour la gestion de l'évolution de la flotte reste le système des POP (programmes d'orientation pluriannuel), qui fixe des objectifs de réduction pour les différents types de bateaux et de pêche : le quatrième POP jusqu'en 2001, et un nouveau programme reste à définir pour les années ultérieures.

Pour pouvoir bénéficier des aides, les Etats membres doivent désormais établir un régime permanent d'entrées et de sorties de flottes et sont tenus d'informer annuellement la commission sur les progrès accomplis dans la mise en oeuvre des POP. Le nouveau système d'aide à la construction est un point crucial du règlement, qui a fait l'objet d'âpres négociations. Il s'applique aux chalutiers de toutes les longueurs et autres types de navire d'une longueur supérieure à 12 mètres. De manière générale, si les objectifs de réduction ont été respectés, les aides publiques à la construction de nouveaux bateaux peuvent être accordées si, parallèlement, il y a un retrait de capacité au moins équivalent -et cela sans aide.

Pour les segments de flotte qui n'ont pas respecté les objectifs des POP pour la période 2000-2001, les aides ne seront octroyées pour l'introduction de nouvelles capacités que si elles sont associées à des retraits sans aide supérieurs d'au moins 30 % (c'est-à-dire que pour obtenir une aide à la construction pour une capacité égale à 100, il faudra en retirer 130).

Dans certaines régions, la petite pêche côtière est très importante pour l'emploi et l'activité économique, tout en n'étant pas aussi importante en volume global de poisson que les grandes unités de pêche. A l'échelle de l'Union européenne, elle représente quelque 60 % de l'ensemble de la flotte communautaire.

Pour ces raisons, elle bénéficie dans le nouveau règlement de mesures particulières : à l'exception des chalutiers, les unités de moins de douze mètres, considérées comme appartenant à la catégorie " petite pêche côtière ", ne sont en effet pas concernées par les mesures générales mises en place pour le régime d'entrées et sorties.

Des mesures d'incitation des Etats membres sont prises par ailleurs pour améliorer les conditions d'exercice de cette petite pêche.

C'est ainsi, par exemple, qu'une intervention de l'IFOP est prévue sous la forme d'une prime forfaitaire maximale de 150.000 euros, destinée à un groupe de pêcheurs ou aux familles de pêcheurs présentant un projet collectif. Ces projets concerneront par exemple l'amélioration des équipements sanitaires et de sécurité, la mise en oeuvre d'innovations technologiques en faveur d'une pêche plus sélective, ou encore la formation professionnelle.

Toujours dans le but de réduire la surcapacité en bateaux de pêche, des primes encouragent l'arrêt définitif de leurs activités. Cet arrêt peut se présenter de trois manières : la démolition, le transfert vers un pays tiers ou la reconversion dans une autre activité.

LA FLOTTE PAR NOMBRE DE NAVIRES ET SON ÉVOLUTION

Est particulièrement encouragée, la reconversion dans des activités liées à la conservation du patrimoine historique, à la formation, à la recherche halieutique au sein de l'Union européenne, ou encore au contrôle des pêches dans un pays tiers. Ces reconversions permettent de bénéficier en totalité des barèmes prévus pour le déchirage.

Des mesures pour améliorer la qualité et la sécurité du travail des pêcheurs sont également prévues dans le cadre des actions structurelles.

Un nouveau dispositif pour aider les jeunes à s'installer dans le métier mérite d'être relevé. Il offre aux pêcheurs de moins de 35 ans qui envisagent l'acquisition d'une première embarcation une prime équivalant à 10 % de la valeur d'achat (sans dépasser un montant de 50.000 euros). Le pêcheur doit exercer son activité depuis au moins cinq années ; quant au navire, il doit être âgé de 10 à 20 ans et être opérationnel.

La Commission des Affaires économiques, qui s'est déjà prononcée 2 ( * ) sur le projet de directive regrette, tout d'abord, que cette proposition de la Commission européenne ait toutes les apparences d'un règlement-cadre sur les actions structurelles, alors que ce devrait être un texte technique d'application.

En effet, ce texte met en place un régime de gestion et d'encadrement de la flotte en durcissant les règles relatives à la gestion des POP.

Ainsi, avant même que ne soient engagées les négociations sur le POP IV, de nouvelles mesures relatives à l'élaboration et au suivi des POP et à l'ajustement des efforts de pêche figurent dans ce règlement.

De plus, le régime de contrôle permanent des entrées et sorties paraît excessivement rigide. Le durcissement du contrôle des entrées et sorties prévu par la Commission européenne conduit à mettre en place une gestion individuelle des navires.

Votre rapporteur pour avis exprime ses plus vives préoccupations face aux mesures relatives aux aides au renouvellement et à la modernisation de la flotte. Le règlement prévoit, en effet, que l'octroi d'aides à la construction de navires, plus généralement à la création de nouvelles capacités, soit subordonné à la destruction d'une capacité égale à 130 % de la capacité créée, en jauge et en puissance. Les conséquences d'une telle disposition sont des plus dangereuses pour l'avenir de la modernisation de notre flotte.

Il estime que le renouvellement de la flotte pourrait se trouver fortement entravé par la directive prévoyant une réduction du barème des interventions communautaires dans les zones éligibles à l'objectif 2 et une diminution de la participation communautaire à la construction de navires de 30 % à 15 %.

B. LA RÉFORME DE L'ORGANISATION COMMUNE DES MARCHÉS DANS LE SECTEUR DES PRODUITS DE LA PÊCHE ET DE L'AQUACULTURE

Le conseil des ministres de l'Union européenne chargés de la pêche a arrêté, le 17 décembre dernier, un nouveau règlement de base sur l'organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture (OCM). La nouvelle réglementation répond aux changements profonds qui sont intervenus au cours de ces dernières années sur le marché européen des produits de la pêche et de l'aquaculture. Ces changements résultent de divers facteurs, notamment l'épuisement des stocks de poissons, l'évolution des habitudes de consommation, la mondialisation des marchés et la forte dépendance de l'Union européenne à l'égard des importations de produits frais et de matières premières destinées à l'industrie de la transformation. Il était donc devenu impératif de modifier le règlement existant pour l'adapter aux conditions de marché actuelles.

Cette réforme de la Commission s'appuie sur un document de synthèse de 1997 intitulé " L'avenir du marché des produits de la pêche dans l'Union européenne : responsabilité, partenariat, compétitivité " et prend en considération les discussions qui se sont déroulées avec la filière dans les Etats membres durant la première moitié de 1998, après la publication de ce document.

L'objectif du nouveau règlement est d'assurer un meilleur équilibre entre l'offre et la demande, de renforcer la compétitivité de l'industrie de la transformation et d'améliorer les informations fournies aux consommateurs sur les produits de la pêche et de l'aquaculture disponibles sur le marché.

L'organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture fait partie intégrante de la politique commune de la pêche depuis 1970 et poursuit les objectifs suivants :

- application de normes de commercialisation communes ;

- établissement d'organisations de producteurs (OP) ;

- mise en place d'un système de soutien des prix reposant sur des mécanismes d'intervention (prix de retrait, aide au report et aide au stockage privé) ou des mécanismes de compensation (thon destiné à l'industrie de la conserve) ;

- établissement d'un régime d'échange avec les pays tiers.

En raison de la nature même de l'activité de pêche et du caractère souvent aléatoire et fluctuant de la production, des décalages entre l'offre et la demande sont inévitables, notamment pour les espèces saisonnières. La Communauté a mis en place des mécanismes afin de corriger les effets les plus indésirables de ces fluctuations.

Ces mécanismes d'intervention font appel à des aides communautaires au retrait des produits invendus et à des mesures de report (stockage et transformation des produits de la pêche en vue d'une réintroduction sur le marché lors d'une reprise de la demande). Ils sont appliqués à des produits spécifiques, considérés comme représentatifs de la production communautaire.

Les mécanismes d'intervention sur le marché entrent en action lorsque le prix des produits commercialisés est inférieur au prix de retrait. Les prix de retrait sont établis en fonction de prix d'orientation fixés annuellement par le Conseil pour chaque produit, sur la base des prix moyens relevés au cours des trois dernières années dans des ports représentatifs.

Les mécanismes de marché sont mis en oeuvre par des organisations de producteurs reconnues, qui bénéficient d'une aide pour l'exécution de leurs tâches. Ces organisations pourront également prétendre à un soutien financier pour la mise au point de méthodes et instruments destinés à améliorer la qualité de leurs produits.

L'OCM a également pour but de favoriser la compétitivité de l'industrie de la pêche. Il importe de donner la priorité aux produits originaires de la Communauté. Le tarif douanier commun est l'instrument sur lequel repose l'application du principe de préférence communautaire. Toutefois, la demande intérieure est supérieure à l'offre communautaire de produits de la pêche. Pour satisfaire la demande, l'Union européenne doit importer près de 60 % des produits de la pêche et de l'aquaculture. Ce déficit est particulièrement important en ce qui concerne les produits utilisés comme matière première par l'industrie de la transformation. Celle-ci doit donc pouvoir importer du poisson à un taux de droit réduit afin d'être compétitive.

Le tarif douanier commun comporte de nombreuses exceptions. C'est ainsi que près des deux tiers des importations communautaires sont couverts par des réglementations spéciales. Celles-ci sont le fruit de dispositions ou d'accords bilatéraux établis dans le cadre de la convention de Lomé IV et de l'Espace économique européen (EEE). Il existe également des réductions unilatérales, telles que le système généralisé de préférences (SGP).

Parallèlement à ces exceptions, un régime de contingents tarifaires autonomes et de suspension des droits de douane est également appliqué. Dans le premier cas, des quantités limitées de produits peuvent être importées dans la Communauté à taux de droit réduit. Le taux de droit plein est rétabli lorsque le contingent est épuisé. La suspension des droits de douane permet l'importation dans la Communauté de quantités illimitées d'un produit à taux de droit réduit.

Dans ce contexte, le nouveau règlement vise à :

- encourager les pêcheurs à ne pêcher que ce qui peut être vendu afin d'éviter tout gaspillage ;

- consolider les organisations de la filière, notamment les organisations de producteurs et les rendre plus compétitives ;

- permettre aux consommateurs de savoir ce qu'ils achètent ;

- garantir une meilleure adéquation de l'offre et de la demande ;

- protéger les emplois dans le secteur de la capture, ainsi que dans l'industrie de la transformation.

Pour atteindre ces objectifs, un certain nombre de changements devaient être opérés. Les principales innovations concernent :

- l'obligation pour les organisations de producteurs d'établir des programmes de pêche pour adapter l'offre à la demande ;

- le soutien à la constitution d'organisations interprofessionnelles ;

- l'actualisation des mécanismes d'intervention ;

- l'obligation pour les détaillants de mieux informer les consommateurs ;

- l'amélioration des conditions d'approvisionnement de l'industrie de la transformation.

Un rôle nouveau pour les organisations de producteurs (OP)

Les organisations de producteurs sont créées par des pêcheurs ou des pisciculteurs qui s'associent librement pour mettre en oeuvre des mesures garantissant les meilleures conditions de mise sur le marché pour leurs produits. Elles occupent une place stratégique entre la production et le marché. Grâce à leur position-clé, elles peuvent appliquer des mesures de gestion rationnelle des ressources, ajouter de la valeur aux produits de la pêche et contribuer à la stabilisation du marché. En faisant en sorte que les organisations de producteurs prennent davantage de responsabilités dans la régulation de leurs membres en matière de gestion des ressources disponibles, il sera possible de mieux répondre aux besoins du marché et d'atténuer la pression de pêche exercée sur les stocks.

L'objectif est d'éviter la capture de poissons pour lesquels la demande est inexistante ou quasi inexistante, en encourageant la planification des activités de pêche. Afin de préserver les stocks de poissons et de rester compétitifs, les producteurs doivent anticiper les besoins du marché, en termes non seulement de quantité, mais également de qualité et de régularité de l'offre. En vertu du nouveau règlement, les organisations de producteurs seront tenues de préparer et de mettre en oeuvre annuellement des programmes opérationnels de pêche indiquant les mesures prévues pour adapter les captures aux besoins du marché. Ces dispositions s'appliquent non seulement aux poissons capturés en mer, mais aussi aux produits de l'aquaculture.

Les organisations de producteurs peuvent, en accord avec leurs membres, étaler dans le temps les activités de pêche de leurs bateaux. Cette possibilité permet d'éviter la " course aux quotas " et d'étaler les débarquements sur l'année, ce qui empêche toute forte chute des prix et garantit un approvisionnement plus régulier du marché.

Des débarquements de qualité d'une plus grande régularité devraient profiter aux producteurs en termes de prix, aux négociants en termes d'offre et aux consommateurs en termes de rapport qualité/prix.

Chaque Etat membre doit veiller à ce que les organisations de producteurs opérant sur un territoire se conforment aux règles applicables. Les organisations de producteurs qui ne s'acquittent pas de leurs tâches courent le risque de perdre le bénéfice du soutien financier.

Un soutien financier sera octroyé pendant une période de cinq ans pour permettre aux organisations de producteurs de remplir leurs nouvelles obligations. Les organisations de producteurs dont les membres pêchent des espèces sauvages pourront recevoir une aide liée au nombre de bateaux adhérents, calculée selon une formule dégressive, dans la limite de 500 bateaux. De plus, elles pourront bénéficier d'un montant forfaitaire de 500 euros par espèce gérée par elles, à concurrence de dix espèces au total. Les espèces éligibles sont celles qui représentent une part significative des débarquements des membres de l'organisation de producteurs et pour lesquelles un plan de capture a été établi.

Par exemple, une organisation de producteurs comptant 30 bateaux adhérents pourrait recevoir annuellement 600 euros par bateau adhérent (18.000 euros) pendant les trois premières années, puis 300 euros par bateau adhérent (9.000 euros) pour chacune des deux années restantes, en sus du montant forfaitaire par espèce.

En ce qui concerne les organisations de producteurs dont les membres sont des aquaculteurs, l'aide sera calculée en fonction du niveau de représentativité de l'organisation de producteurs.

Par ailleurs, le nouveau règlement comporte des dispositions permettant aux Etats membres d'octroyer une aide supplémentaire aux organisations de producteurs pour la mise en place de mesures destinées à améliorer l'organisation et le déroulement de la mise sur le marché des poissons, ainsi que de mesures visant à mieux faire correspondre l'offre à la demande. L'aide doit être allouée conformément au règlement concernant les actions structurelles dans le secteur de la pêche.

Création d'organisations interprofessionnelles

Depuis toujours, des désaccords entre les différentes branches du secteur de la pêche ont affaibli la filière, bien qu'ils s'atténuent. La Communauté estime que, comme d'autres secteurs, la pêche doit être en mesure de constituer des organisations interprofessionnelles reconnues.

L'objectif est de favoriser l'établissement de partenariat dans des projets d'intérêt commun.

C'est pourquoi le nouveau règlement prévoit une exception aux règles de concurrence énoncées dans le traité CE, de sorte que les accords, décisions et pratiques concertées soient autorisés par les organisations interprofessionnelles reconnues dans le secteur de la pêche (dans une certaine limite et pour autant qu'ils aient été examinés préalablement par la Commission).

Des représentants de la production, du commerce de détail et de la transformation provenant de différentes régions pourraient se rassembler pour mettre en oeuvre des mesures dont l'ensemble de la filière pourrait tirer profit. Ces mesures pourraient viser notamment à :

- améliorer la connaissance et la transparence de la production et du marché ;

- contribuer à une meilleure coordination de la mise sur le marché des produits de la pêche, principalement par des recherches et des études de marché ;

- élaborer des contrats types compatibles avec la réglementation communautaire ;

- développer la mise en valeur des produits de la pêche ;

- fournir les informations et assurer les recherches nécessaires à l'orientation de la production vers des produits plus adaptés aux besoins du marché et aux goûts et aspirations des consommateurs, notamment en matière de qualité des produits et de protection de l'environnement ;

- mettre au point des méthodes et instruments pour améliorer la qualité des produits ;

- mettre en valeur et protéger les labels de qualité et indications géographiques ;

- promouvoir des méthodes de production respectueuses de l'environnement ;

- définir, en ce qui concerne la production et la commercialisation, des règles plus strictes que les dispositions des réglementations communautaires et nationales.

Aménagements du régime d'intervention

Pour garantir aux pêcheurs un revenu minimum, les organisations de producteurs peuvent retirer du marché les produits de la pêche lorsque les prix chutent au-dessous des prix de retrait. Selon les produits, les membres reçoivent une compensation de leur organisation de producteurs, qui demande en contrepartie une aide de la Communauté.

Pour donner droit à une compensation financière, les produits retirés doivent répondre aux critères de qualité officiels. De plus, le mécanisme des retraits ne doit entrer en action que pour faire face à des excédents de production occasionnels. Le montant de la compensation est directement lié aux quantités de poisson retirées : plus le volume retiré du marché est important, plus la compensation versée est réduite. Les produits retirés de la vente sont généralement mais pas automatiquement détruits. Les organisations de producteurs peuvent prendre d'autres mesures pour s'assurer que le poisson ne soit pas gâché. Celui-ci peut être vendu pour être utilisé dans la production d'aliments pour animaux.

L'objectif de la réforme est de diminuer les quantités de produits de la pêche retirées du marché et ainsi d'éviter le gaspillage des ressources.

Le retrait définitif, qui consiste à retirer du marché des produits de la pêche pour d'autres usages que la consommation humaine, doit désormais être considéré comme un filet de sécurité occasionnel. Les quantités donnant droit à compensation financière ont donc été réduites de 14 à 8% de la production ou des débarquements de l'organisation de producteurs.

Les espèces pélagiques seront soumises à des conditions particulières. En général, les débarquements de pélagiques représentent de grandes quantités, mais n'ont qu'une valeur relativement faible, ce qui peut susciter des difficultés sur le marché. Ils sont donc davantage susceptibles de nécessiter une intervention.

Les quantités éligibles ont également été réduites pour les espèces pélagiques, mais dans une moindre mesure que pour les autre espèces, et ont été fixées à 10 % des quantités mises en vente annuellement par l'organisation de producteurs.

Le taux de compensation financière accordée par la Communauté aux organisations de producteurs est également réduit pour toutes les espèces concernées. Jusqu'à présent, la compensation financière octroyée pour les quantités retirées était de 87,5 % du prix de retrait et pouvait s'appliquer jusqu'à 7 % des quantités mises en vente chaque année.

Pour les quantités excédant 4 %, l'aide diminue progressivement : pour la campagne de pêche 2001, la compensation financière s'élèvera à 75 % du prix de retrait pour les quantités comprises entre 4 et 10 % en ce qui concerne les espèces pélagiques et entre 4 et 8 % pour les autres espèces. Quant aux campagnes de pêche 2002 et 2003, la compensation tombe respectivement à 65 et 55 %.

Parallèlement à la baisse de l'aide au retrait définitif, il convient d'encourager l'application de mesures ajoutant de la valeur aux produits afin qu'ils puissent être mis sur le marché ultérieurement. Parmi ces mesures, on peut citer le mécanisme de report, c'est à dire le stockage et la transformation du poisson avant sa mise sur le marché lorsque la demande augmente. Les quantités ouvrant droit à l'aide en cas de report ont été sensiblement relevées, passant de 6 à 18 % (pour les organisations de producteurs qui ne pratiquent pas le retrait définitif). En outre le marinage a été ajouté à la liste des méthodes de transformation autorisées. D'autres mesures d'exécution nouvelles seront également appliquées pour faciliter l'utilisation du mécanisme de report, telles que la mise à disposition plus aisée de l'aide au stockage.

Des modalités d'intervention d'urgence ont également été prévues dans le nouveau règlement pour affronter de telles situations. Il sera ainsi possible d'accroître les quantités éligibles du retrait définitif, pendant une période pouvant aller jusqu'à six mois.

L'indemnité compensatoire pour le thon -un mécanisme introduit à l'origine pour compenser les pertes subies par les producteurs de thon en raison de la baisse du droit de douane sur ce produit- a été réduite. Le taux auquel ce mécanisme entre en action a été abaissé de 91 à 87 % du prix à la production communautaire.

Une meilleure information du consommateur

Le nouveau règlement met en place une réglementation devant garantir un meilleur étiquetage et une meilleure information des consommateurs concernant les produits vivants, frais ou réfrigérés. Le nom de l'espèce, la méthode de production (pêche en eau douce, en mer ou aquaculture) et la zone de production du poisson devront être indiqués. Ces dispositions pourraient stimuler la demande, dans la mesure où les gens sont incités à consommer un produit sur lequel ils disposent d'informations complètes. Les consommateurs risquent moins d'être trompés sur l'origine et la valeur des produits de la pêche et de l'aquaculture mis en vente, ce qui peut parfois être le cas, notamment avec les produits non emballés. Ces mesures éviteront aussi aux consommateurs d'acheter du poisson produit ou commercialisé dans des conditions défavorables à la préservation. En outre, les différentes précisions concernant l'origine permettront aux inspecteurs chargés du contrôle de procéder à des vérifications par recoupement avec les données recueillies à bord des bateaux ou lors des débarquements.

Amélioration des conditions d'approvisionnement de l'industrie de la transformation

L'industrie de la transformation européenne est tributaire de la régularité des débarquements pour conserver sa compétitivité et garantir les emplois à terre. Toutefois, les débarquements communautaires ne suffisent pas à satisfaire la demande. L'industrie de la transformation est donc dans l'obligation d'importer en provenance des pays tiers à des prix compétitifs.

Le nouveau règlement instaure un régime tarifaire davantage en phase avec les besoins du marché, sans toutefois pénaliser les producteurs communautaires. Il prévoit une suspension des droits du tarif douanier commun pour certains produits destinés à l'industrie de la transformation pour des quantités illimitées. La suspension peut être partielle (baisse du droit de la douane) ou totale (droit réduit à 0 %). Jusqu'à présent, le système n'a permis que l'importation, à taux réduit, de certaines quantités (contingents), mais celles-ci se sont très souvent révélées insuffisantes. C'est le cas, par exemple, pour certaines présentations de cabillaud.

Grâce à la réforme entreprise, des quantités illimitées de ces produits pourraient être importées à taux de droit réduit ou à taux zéro pendant une période indéterminée. En 1999, par exemple, la Communauté a pu importer pour une période indéterminée 75.000 tonnes de cabillaud frais, réfrigéré ou congelé au taux réduit de 3 %.

Les dispositions du nouveau règlement entreront en application à partir du 1 er janvier 2001, à l'exception de celles qui concernent l'information au consommateur, qui seront applicables à compter du 1 er janvier 2002 afin de permettre à la filière de s'adapter.

A terme, la nouvelle réglementation permettra à la Communauté d'engranger des économies. L'aide transitoire aux organisations de producteurs concernant les programmes de pêche entraînera une augmentation des dépenses budgétaires pendant quelques années, qui devraient néanmoins diminuer pour atteindre un niveau inférieur au niveau actuel.

Il est prévu que les dépenses consacrées à l'OCM s'élèvent à 20 millions d'euros en 2000 (avant l'entrée en application de la nouvelle réglementation). En 2001, lorsque le nouveau règlement sera entré en vigueur, elles devraient augmenter légèrement pour se situer à 22 millions d'euros.

En 2002 et 2003, elles devraient dans les deux cas se maintenir à ce niveau. On prévoit néanmoins une baisse à 16 millions d'euros d'ici à 2006.

Votre rapporteur pour avis observe que plusieurs dispositions répondent aux préoccupations françaises, notamment l'étiquetage minimal obligatoire des produits jusqu'à la vente au détail, la reconnaissance des organisations interprofessionnelles, le renforcement et la responsabilisation des organisations de producteurs par un soutien à des programmes opérationnels de campagne de pêche, ainsi que la rénovation du régime des interventions par un encouragement à l'utilisation du régime du report aux dépens du retrait.

Il estime néanmoins ce texte déséquilibré dans la mesure où il prévoit des moyens insuffisants pour renforcer la compétitivité de la production communautaire et prévoit une ouverture excessive aux importations .

Sur la valorisation du marché du frais :

- Si la directive prévoit un renforcement de l'identification du produit par l'adoption de règles communautaires d'identification du produit et par la reconnaissance de démarches volontaires de qualité, votre rapporteur considère la mise en place d'une catégorie " fraîcheur " comme difficilement applicable et contrôlable à tous les stades de la vente. En effet, quel poissonnier, détaillant ou grande surface, irait classer un produit en catégorie " non frais " ?

Il est important que les consommateurs soient garantis contre les mentions trompeuses ou de nature à les induire en erreur. A cet égard, s'il est nécessaire de différencier les produits de la pêche communautaire et les produits de la pêche de pays tiers sur la base du pavillon des navires, l'usage du terme " origine " dans ce cas là n'est pas adapté car il revêt un sens différent dans d'autres réglementations.

- La directive prévoit, par ailleurs, d'améliorer l'organisation de la filière notamment par un renforcement du rôle des organisations de producteurs et par le développement d'organisations interprofessionnelles. Plusieurs de ces dispositions recueillent l'approbation de votre rapporteur pou avis, mais elles apparaissent trop déséquilibrées par rapport aux moyens offerts aux organisations de producteurs pour assurer leurs responsabilités. En outre, le contenu des programmes opérationnels de campagne de pêche apparaît trop contraignant.

- La Commission prévoit, enfin, une adaptation des outils d'intervention du marché et leur intégration dans une logique de filière. Sur ce point, votre rapporteur pour avis regrette la réduction de l'indemnisation versée aux organisations de producteurs dans le cadre des opérations de retrait-destruction .

- De plus, il s'inquiète du nouveau régime de suspensions tarifaires, qui porte pour des durées indéterminées sur plusieurs espèces , dont certaines produites en quantité importante dans l'Union européenne ou dans des pays avec lesquels l'Union Européenne a conclu des accords de coopération et de développement. Le secteur des produits de la pêche est déjà très ouvert aux importations (multiples accords tarifaires préférentiels avec des pays tiers) et les prochaines négociations à l'OMC vont entraîner de nouveaux démantèlements tarifaires. Votre rapporteur pour avis ne peut donc accepter le principe des suspensions tarifaires prévu par la directive .

Il estime que   la politique communautaire de la pêche fait sur ce point preuve d'incohérence . A quoi bon soutenir la filière pêche et encourager une " gestion responsable " de la ressource, si l'on adopte par ailleurs une politique commerciale compromettant la survie de cette filière en lui faisant subir de plein fouet la concurrence de pays tiers souvent affranchis, pour leur part, de la plupart des contraintes pesant sur les producteurs européens ?

C. LA RÉFORME DE LA POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE APRÈS 2002, ENJEU MAJEUR POUR LES PÊCHEURS FRANÇAIS

En janvier dernier, la Commission européenne a rendu son rapport intermédiaire synthétisant les trente consultations par la DG XIV a menées dans chaque Etat membre entre septembre 1998 et juin 1999 sur la politique commune de la pêche (PCP) après 2002. La Commission devra, en effet, présenter au Parlement européen et au Conseil un rapport final sur la situation de la pêche dans l'Union européenne, afin que celui-ci décide -au plus tard le 31 décembre 2002- d'apporter ou non des modifications à la PCP. Ce rapport devrait être présenté au début 2001.

1. Le rapport intermédiaire de la Commission

A partir de mars 1998, la Commission a adressé un questionnaire à 350 organisations professionnelles ; 175 d'entre elles ont répondu, dont pour la France, la Coopération maritime et l'Union des armateurs à la pêche de France. La commission a ensuite consulté les représentants professionnels de chaque Etat membre, ce qui a abouti au rapport intermédiaire dont votre rapporteur pour avis a souhaité relever les principales conclusions.

Accès à la bande des 6-12 milles

Il n'y a aucune demande en ce qui concerne l'établissement d'un régime de libre accès " jusqu'à la plage ". En revanche, des demandes ont été exprimées, en ce qui concerne le renforcement du régime actuel en faveur de la pêche côtière, au Royaume-Uni, en Irlande et au Portugal (exemples : extension de la limite actuelle jusqu'à 24 milles ou plus, abolition des droits de voisinage actuels, etc.).

Accès à la mer du Nord

Des pêcheurs espagnols, portugais, finlandais et suédois soutiennent l'abolition de toutes limitations d'accès discriminatoires. Des organisations d'Etats riverains de la mer du Nord ont exprimé leur inquiétude à propos de l'intensification de la pêche en mer du Nord qui pourrait résulter du libre accès à la zone, bien que l'accès à la majorité des ressources y soit déjà réglementé.

Shetland Box

Le maintien du cantonnement dans la zone du Shetland Box n'est pas unanimement soutenu. Si certaines organisations souhaitent le maintien du régime actuel (et soutiennent les cantonnements en général en tant qu'outil de conservation efficace), un grand nombre d'autres organisations, notamment en Espagne et aux Pays-Bas -ainsi qu'une grande fédération de pêcheurs du Royaume-Uni- sont opposées au Shetland Box. Selon elles, l'établissement de ce cantonnement n'a aucun fondement scientifique et relève de décisions purement politiques.

Taux admissibles de capture (TAC) et quotas

S'il est souvent estimé, le régime des TAC et quotas n'a pas réussi à limiter les taux d'exploitation des stocks, faute de mise en application efficace et d'avis scientifiques pertinents. Il n'y a cependant pas de consensus pour abandonner complètement le régime et le remplacer par un autre. Parmi les moyens permettant d'améliorer le régime actuel déjà cités, le renforcement de la surveillance, l'introduction des rejets en mer et l'adoption de nouveaux plans de contrôle de l'effort de pêche, méritent d'être retenus.

Quotas individuels transférables

La majorité des participants est opposée aux quotas individuels transférables (QAIT), car ils craignent la création d'oligopoles et des pertes d'emplois. Le soutien en faveur des QAIT est plus net aux Pays-Bas, en Espagne et au Danemark. Le libre-échange des quotas au sein de l'Union européenne (sous le contrôle des autorités nationales/publiques pour certains) est également approuvé en Espagne et aux Pays-Bas. Du Royaume-Uni, émane un soutien vigoureux en faveur du système existant d'attribution nationale de quotas.

Stabilité relative et clés de répartition des quotas

Le principe de la stabilité relative est très largement approuvé. Dans nombre de cas, il est considéré comme un " pis-aller ", et sa modification ou abolition aggraverait la situation. La modification des clés de stabilité relative est réclamée avec force dans la république d'Irlande et en Irlande du Nord. Des ajustements des clés de répartition pour des espèces et des zones précises sont proposés dans nombre d'Etats membres. Selon l'argument le plus fréquemment utilisé, les clés en vigueur ne refléteraient pas les modes de pêche actuels.

Rejets

Les règles relatives aux rejets sont très critiquées. Les pêcheurs de certains Etats membres approuvent très largement le débarquement de toutes les captures. Certains se déclarent toutefois en faveur de la politique de rejets actuelle. Il s'agit, d'une part, des pêcheurs qui craignent le coût d'une interdiction des rejets et, d'autre part, de scientifiques qui pensent qu'il vaut mieux s'attaquer au problème des rejets par l'emploi d'engins plus sélectifs.

Système de contrôle de l'effort de pêche et POP

La définition actuelle de l'effort de pêche sous l'angle de la puissance motrice est très critiquée dans beaucoup d'Etats membres (Italie, Grèce, Pays-Bas, Portugal). En ce qui concerne les programmes d'orientation pluriannuels (POP), certains demandent un renforcement des sanctions imposées aux Etats qui ne respectent pas les objectifs de leur POP (par exemple) en Belgique, Allemagne, Portugal. Dans d'autres Etats membres, en revanche, les POP sont sévèrement critiqués et un assouplissement des règles actuelles est réclamé en particulier au Royaume-Uni et en Finlande.

Questions d'environnement

Les pêcheurs ont demandé une plus grande protection de l'environnement marin contre la pollution d'origine terrestre et d'autres activités industrielles. Dans certains cas, des mesures d'indemnisation des pêcheurs sont demandées pour les pertes de captures et d'engins causées par les phoques et autres mammifères marins (Ecosse, Grèce, Finlande).

Marchés et commerce des produits de la pêche

Si les transformateurs demandent plus de liberté et de facilité d'accès aux matières premières, les pêcheurs demandent une protection accrue contre les importations à bas prix en provenance des pays tiers.

Des mesures structurelles et des aides en faveur du renouvellement de la flotte, de la formation et du soutien des jeunes pêcheurs ainsi que de la flottille côtière sont préconisées dans de nombreux Etats membres.

Mise en application, contrôle et surveillance

Une demande générale est formulée en ce qui concerne le renforcement de la mise en application du contrôle et un appel à l'égalité des chances entre pêcheurs de l'Union. Les pêcheurs d'un Etat membre se plaignent fréquemment d'être davantage surveillés que leurs homologues d'autres Etats membres ou de pays tiers. Certains appellent même au renforcement des pouvoirs de la Commission dans ce domaine.

Recherche sur la pêche

Nombreux sont les pêcheurs qui prétendent que les données scientifiques sont " imparfaites " et qu'il y en réalité " plus de poisson " à pêcher, en dépit de preuves scientifiques contraires. Ils demandent une plus grande transparence, la diffusion des études scientifiques et une plus grande coopération avec les scientifiques. Les participants émettent fréquemment le voeu que soit encouragée la recherche multidisciplinaire sur tous les aspects de la pêche, sans se limiter aux aspects biologiques.

Aquaculture

La secteur de l'aquaculture se plaint souvent de ne pas être considéré comme faisant partie intégrante de la politique commune de la pêche et de ne pas bénéficier d'un soutien suffisant de la Communauté.

Méditerranée

Les organisations et associations méditerranéennes expriment sur l'application de la PCP dans cette région des points de vue spécifiques qui méritent une présentation à part. Nombre de participants ont ainsi souligné la " spécificité " de la pêche en Méditerranée, la nécessité de règles homogènes applicables à tout pêcheur dans la région, y compris ceux des pays tiers. Ils demandent le renforcement de la politique internationale de la Communauté dans la région, à l'égard des pays tiers et au sein des organisations multilatérales, de manière à garantir aux pêcheurs de la Communauté un traitement équitable. Les pêcheurs italiens ont fortement critiqué les mesures techniques en vigueur, tandis que les organisations espagnoles plaident pour une " approche régionale " de la Méditerranée par des POP régionaux par exemple.

Processus décisionnel - Dispositions institutionnelles

La demande d'une plus grande transparence de la part de la Commission ainsi que d'une participation et d'une contribution plus grandes du secteur à l'élaboration des décisions communautaires fait l'unanimité. La " régionalisation " du processus de gestion de la pêche est vigoureusement soutenue au Royaume-Uni, en Irlande, en Finlande et en Suède, mais elle suscite une certaine suspicion dans d'autres Etats, dont la France et l'Espagne à l'exception, pour cette dernière, de certaines associations méditerranéennes. Le débat a montré qu'une certaine confusion entoure le terme de " régional ". Pour certains, il signifie transfert des pouvoirs/compétences des institutions de la Communauté à l'échelon national/régional, tandis que pour d'autres il signifie simplement la prise en compte de particularités régionales dans les décisions de la Communauté, sans implications institutionnelles. De nombreux participants préconisent une politique de gestion flexible, en mesure de réagir rapidement aux problèmes locaux et aux situations de crise. Etant donné la lourdeur et la lenteur du processus décisionnel de la Communauté, ils proposent un transfert de pouvoirs aux autorités locales/régionales.

2. Les propositions des professionnels français

Le Comité national des pêches maritimes (CNPM) a fait ses propres propositions. Elles serviront de base au ministre de l'Agriculture et la pêche pour préparer un mémorandum qu'il remettra à Bruxelles au plus tard à l'automne prochain.

Les TAC et quotas

Les professionnels français jugent que le régime communautaire des TAC et quotas doit rester l'outil de base de la Politique commune de la pêche (PCP). Il est considéré comme un bon moyen de conservation et de gestion des ressources, à condition toutefois d'être réellement respecté par tous. Il nécessite cependant certains ajustements.

Les professionnels souhaiteraient obtenir de l'Union européenne un bilan global et par stock de l'application du système des TAC et quotas, dans l'objectif de définir des groupes d'espèces pour lesquelles différents modèles de stratégies de gestion pourraient être étudiés. Les conséquences socio-économiques de la politique des pêches sur les régions dépendantes de la pêche et des industries connexes doivent également être prises en compte. Est également demandé un meilleur suivi statistique de toutes les pêches -y compris la plaisance- ainsi que la connaissance de la consommation des quotas par chacun des Etats membres ;

Les professionnels souhaitent également bénéficier d'une meilleure transparence sur la façon dont les TAC et les quotas sont fixés. En particulier, il est important de distinguer les TAC " analytiques " de ceux dit " de précaution ", sur lesquels la profession voudrait être particulièrement consultée. Les professionnels sont réservés sur l'adoption de TAC et quotas pluriannuels et plurispécifiques. En revanche, les variations annuelles du volume des TAC doivent être limitées, dans une fourchette de plus au moins 15% par exemple. Il est en effet essentiel d'offrir aux producteurs les moyens de mieux anticiper les possibilités de pêche à venir, afin notamment d'adapter au mieux la production aux évolutions des marchés.

Les organisations professionnels françaises préconisent l'élaboration d'une typologie des rejets, car tous n'ont pas la même importance. Ainsi, des solutions adaptées pourraient être étudiées pour chaque catégorie de prises accessoires : mesures de prévention (évitement des engins, zones ou périodes à risque), d'échappement (par des efforts de sélectivité des engins) ou de valorisation commerciale selon les cas.

Leur apparaît, par ailleurs, clairement le besoin de déterminer les ayants droit légitimes sur les espèces actuellement non soumises à quotas, afin d'éviter de dangereux reports d'efforts de pêche par de nouvelles flottilles, qui seraient très risqués sur le plan de la gestion de la ressource. Dans certaines zones, il est souhaité l'encadrement de l'accès par un régime de TAC analytique qui respecterait les antériorités de pêche (poissons de grands fonds, certaines espèces de la Manche).

Le détournement du régime des quotas par la captation de quotas est également jugé préjudiciable à l'ensemble de la profession. Les TAC et quotas doivent assurer les retombées économiques les plus fortes aux Etats titulaires des droits de pêche. Cela doit passer par un renforcement des obligations des acteurs économiques, tant en matière d'exploitation des navires que d'établissement, afin d'apporter un juste retour à l'Etat du pavillon des fruits de l'activité générée par la pêche de ses quotas.

Les mesures techniques

Les professionnels français souhaitent des règles plus simples ainsi qu'une information claire et partagée par tous, y compris par les contrôleurs avec qui ils sont en relation en mer.

Les professionnels français considèrent que l'amélioration de la sélectivité des engins doit faire l'objet d'une meilleure recherche au niveau européen, avec la collaboration des professionnels eux-mêmes. De nombreuses études montrent que les modifications techniques, si elles réduisent les captures accessoires ou accidentelles et les captures sous taille, entraînent souvent une amélioration du rendement ou des conditions de travail (moins de tri, plus de sécurité).

Souvent dubitatifs sur le bien-fondé et l'efficacité d'une réglementation, les professionnels français demandent à ce que les effets directs et indirects, biologiques et socio-économiques de la mise en place de mesures techniques soient systématiquement étudiés, cela dans chaque cas de figure (pêcherie/espèce/engin).

Ils souhaitent également participer à la prise de décision concernant les mesures techniques. Ils se méfient des décisions dont la teneur répond à des objectifs politiques ou à des revendications environnementalistes.

D'autre part, ils ne veulent pas être les seuls à s'imposer des contraintes supplémentaires, et rappellent leur attachement à une gestion concertée et transparente des mesures techniques, dans un souci de partage de l'effort, entre pavillons comme entre métiers, et d'équité dans le respect des règlements.

Le contrôle

Sans contrôle, les instruments de gestion de la PCP sont inefficaces. Les professionnels français sont donc demandeurs :

- d'un contrôle communautaire. Dans le contexte actuel où chaque Etat européen considère que l'autre contourne les contrôles, les professionnels français sont nombreux à opter pour un transfert de l'organisation du contrôle à l'Union européenne : le contrôle est alors réalisé par des agents dépendants de la Commission européenne ;

- d'une intégration des nouveaux outils de contrôle. Attentifs au développement du contrôle du positionnement par satellite ainsi qu'à l'amélioration des livres de bord dans le but d'obtenir des statistiques de pêche plus précises, les professionnels français insistent avant tout sur la confidentialité de telles procédures et souhaitent qu'elles réduisent les contraintes liées au contrôle. Ils souhaitent aussi un meilleur suivi statistique des débarquements.

Les programmes d'orientation pluriannuels (POP)

Les réductions importantes de capacité n'ont pas fait la preuve de leur efficacité dans le rétablissement des stocks. Il est jugé que c'est une mesure trop globale qui ne tient pas compte des différences constatées dans l'état des différents stocks sur une même zone ou, même, selon les zones. Les critères (puissance et tonnage) ne sont pas satisfaisants : ils peuvent même s'avérer parfaitement inadaptés (pour les engins dormants).

En outre, les professionnels français font valoir que les POP ne sont pas un instrument adapté aux pêches réalisées hors Union européenne ou aux pêcheries nouvelles en raison :

- des effets pervers liés à l'élévation du coût des navires neufs et, surtout, d'occasion. Cette situation est un handicap pour la rentabilité des entreprises et peut conduire à une pression de pêche plus forte si l'armateur a des difficultés à respecter ses échéances. Les POP contribuent en outre au vieillissement de la flotte. L'obsolescence des navires et les coûts d'entretien élevés sont des handicaps majeurs dans le cadre d'une concurrence internationale. Elle présente également des risques importants pour la sécurité ;

- d'une application variable. Les professionnels français estiment que l'application des POP est d'une rigueur variable selon les Etats, voire peu fiable, quand certains Etats n'hésitent pas à refuser purement et simplement de faire respecter les objectifs de la PCP. Ils soulignent qu'il n'est pas concevable de poursuivre une telle politique si le respect des objectifs n'est pas imposé à tous les Etats. Aussi, proposent-ils que les POP interviennent en appoint de la régulation des captures par le système des TAC et quotas.

Ils font en outre observer que les limitations devraient concerner seulement les flottes pêchant sur les espèces dont les quotas sont surconsommés. Le développement de la gestion par l'effort de pêche et des permis de pêche spéciaux (PPS) pourrait remplacer avec plus de finesse les objectifs de réduction de flotte. Les mécanismes actuels du système devraient être modifiés : en excluant les navires pêchant hors les eaux de l'Union ; en tenant compte, dans la détermination des objectifs, des nouvelles pêcheries ; par révision des critères (puissance et tonnage), au moins pour certains métiers.

Pêche responsable et environnement

Les professionnels français font leur la notion de " pêche responsable ", comme l'illustre leur comportement au travers de leur coopération avec l'Ifremer, de leur souhait de gérer les quotas par les OP, de la mise en place des licences spéciales et des PPS, des déclarations statistiques volontaires ou encore de la mise en place de plans de pêche.

Mais il est nécessaire de s'appuyer sur des diagnostics fins, rapides et fiables de l'état des stocks. Trois champs de développement peuvent être distingués : l'amélioration du suivi statistique, voire un meilleur contrôle, le développement d'une recherche halieutique appropriée et d'une gestion adaptée; l'intégration des paramètres socio-économiques dans l'évaluation et la gestion des ressources exploitées.

Ils estiment que l'approche de précaution est trop souvent confondue avec le principe de précaution, tristement célèbre par son application dans le cas du filet maillant dérivant et utilisé par les uns et les autres, et trop souvent par les environnementalistes à des fins protectionnistes et conservatrices. Les professionnels français souhaitent donc une information claire, de préférence sur le terrain, de l'approche de précaution. Ils veulent aussi participer plus activement à l'élaboration des points de référence sur lesquels se basent les avis de gestion.

La pêche responsable implique également la prise en compte des rejets. A ce sujet, les professionnels français reprennent volontiers la proposition évoquée dans le cadre des mesures techniques, qui consiste à développer la recherche technologique pour réduire les rejets en améliorant la sélectivité des engins, c'est-à-dire premièrement en réduisant la capture accidentelle d'espèces protégées ou menacées et, deuxièmement, en valorisant à bord ou au débarquement les espèces non commerciales associées aux espèces cibles.

Ils soulignent que la pêche n'est pas la seule cause de mortalité non naturelle des espèces marines. Il faut aussi dénoncer d'autres sources de mortalité causées par d'autres utilisateurs comme la pollution et la dégradation de certains écosystèmes ayant une grande influence sur le cycle de ces espèces (frayères détruites par l'extraction de graviers, nourriceries polluées par des rejets en mer de produits toxiques, fonds à coquillages altérés par le transfert de vases provenant de zones touristiques ou colonisées par des espèces sauvagement introduites comme la crépidule).

Ils considèrent en conséquence que la place de l'environnement dans la PCP repose souvent sur l'idée que la pêche est seule responsable de l'état des stocks. Or, sans une préservation de l'environnement marin où vivent les ressources exploitées, il est impossible de maintenir l'état de ces stocks à des niveaux permettant une exploitation durable. Pour les professionnels français, il est donc grand temps de prendre en compte l'ensemble des interactions entre l'homme et la mer communautaire pour réaliser une véritable conservation de gestion des ressources marines.

Votre rapporteur pour avis estime que ces positions doivent être fermement défendues par le Gouvernement lors des prochaines négociations européennes.

CHAPITRE III -

LE PROJET DE BUDGET DES PÊCHES MARITIMES
ET DES CULTURES MARINES

I. UN PREMIER BILAN POUR 1999

L'examen des concours publics aux pêches maritimes et aux cultures marines recensées par les pouvoirs publics permet d'avoir une idée précise de l'ensemble des crédits qui proviennent du budget national ou de fonds européens. Le dernier bilan disponible porte sur l'année 1999, celui sur l'année 2000 étant en cours d'élaboration.

En 1999, la totalité des concours publics aux pêches maritimes et aux cultures marines s'élève à 4.597 millions de francs , et enregistre une légère baisse en francs courants de 1,3 % par rapport à 1998.

Les 4 milliards de francs sont dépassés depuis 1993, sous l'effet de la croissance des dépenses de protection sociale et des mesures instaurées à la suite de la crise de la pêche.

Cette masse est ventilée en 5 " domaines " permettant de distinguer les financements bénéficiant aux secteurs productifs de ceux dont l'incidence est plus indirecte sur l'économie de la filière. Chaque domaine est, en outre, subdivisé en " ensembles ", constitués de dépenses concourant à une même finalité.

Les montants des dépenses ventilées en cinq domaines

Les financements bénéficiant directement aux branches d'activités économiques des produits de la mer relèvent de deux domaines :

- le domaine 1 , consacré à l'appui aux activités d'exploitation de la ressource par la pêche et l'aquaculture marine, atteint 389 millions de francs en 1999, soit 8,5 % de la totalité des concours publics. Au sein de ce domaine, les actions spécifiques aux cultures marines s'élèvent à 29,6 millions de francs ;

- le domaine 2 , constitué par les dépenses en faveur de la commercialisation, de la transformation et de la promotion des produits de la mer s'élève à 143 millions de francs en 1999.

Ainsi défini, l'appui direct à la filière halio-alimentaire (domaines 1 et 2) représente 532 millions de francs en 1999, soit 11,5 % de la totalité des concours publics aux pêches et cultures marines.

Deux domaines sont ensuite distingués, au sein des dépenses en moyens de fonctionnement et en personnel des services d'enseignement, de recherche et d'encadrement administratif :

- le domaine 6 recense les dépenses en faveur du progrès scientifique et technique et de la formation professionnelle initiale et continue des pêcheurs et des aquaculteurs marins. Elles s'élèvent à 350 millions de francs en 1999 ;

- le domaine 7 est constitué par le financement des services généraux dévolus aux pêches et aux cultures marines, avec 83 millions de francs en 1999.

Enfin, les dépenses à caractère social constituent le domaine 8 . Avec 3,6 milliards de francs en 1999, soit 79 % de la totalité des concours publics aux pêches et cultures maritimes, il reste au premier rang des concours publics.

Les concours publics à l'exploitation de la ressource

Sur les 389 millions de francs consacrés au domaine 1 en 1999, 173 millions proviennent de crédits nationaux et 216 millions, de financements européens. A l'instar de l'agriculture, on note ici la part importante qu'occupent les programmes européens, au moyen des fonds de l'IFOP 3 ( * ) pour l'adaptation des structures des activités maritimes ou des lignes du FEOGA-Garantie réservées aux interventions sur le marché des produits de la mer.

On constate que l'appui à l'investissement est prépondérant jusqu'à la crise de la pêche.

Les financements de modernisation et d'investissement représentent en moyenne, de 1994 à 1999, 45 % des aides à l'exploitation de la ressource après en avoir représenté plus de 60 % entre 1991 et 1993. Cette évolution résulte :

- du respect des objectifs communautaires de réduction des capacités de capture, ces financements accordés à la construction et à la modernisation des bateaux de pêche diminuant fortement en 1994 et 1995 ;

- d'une nouvelle reventilation des dépenses en faveur des aides aux sorties de flotte.

Ces aides à l'investissement et à la modernisation sont financées par des fonds nationaux à hauteur de 83 millions de francs en 1999, sur les 202 millions de francs, principalement au travers de la bonification des intérêts d'emprunts, et par des fonds communautaires (l'IFOP) pour 119 millions de francs qui interviennent surtout dans l'appui, sous forme de subventions directes d'équipement, aux constructions et à la modernisation de navires.

Notons qu'au sein de l'ensemble des financements à l'investissement, 26 millions de francs sont spécifiquement dévolus, en 1999, aux investissements dans le secteur des cultures marines.

On observe également une reprise des dépenses liées à la limitation de la production.

Les dépenses consacrées à l'adoption des capacités d'exploitation aux objectifs de préservation de la ressource, sont très variables d'une année sur l'autre.

Leur évolution est rythmée par les programmes communautaires de réduction de l'effort de pêche.

Le POP IV (quatrième programme d'orientation pluriannuel) correspondant à la période du 1 er janvier 1997 au 31 décembre 2001 prévoyait une réduction globale de 40.000 kW ainsi que des objectifs intermédiaires de 10.000 kW par an.

En 1999, les dépenses de cet ensemble (36 millions de francs) ont été consacrées à l'objectif intermédiaire du POP IV prévu pour le 31 décembre 1999.

Ces dépenses sont financées par l'Union européenne et le budget national, dans des proportions qui sont prédéterminées pour la durée des programmes pluriannuels, mais qui s'avèrent variables en montants exécutés d'une année sur l'autre. A ces crédits s'ajoutent les participations des collectivités territoriales, non retenues ici comme " concours publics ".

Les concours publics à la valorisation des produits de la mer

L'intervention publique sur les prix à la production des produits de la mer est relativement peu " directrice ", régulant le marché sans s'y substituer. Dans ce contexte d'encadrement souple du jeu de l'offre et de la demande, la recherche d'une meilleure valorisation des produits en aval constitue une voie privilégiée de soutien des activités maritimes et d'amélioration de leurs résultats économiques.

Les actions relatives à l'amélioration des conditions de la première mise en marché concourent à la mise aux normes sanitaires européennes, à la modernisation des équipements et du fonctionnement des sites de première commercialisation (halles à la marée) et des ateliers de mareyage. Elles contribuent à un fonctionnement plus satisfaisant du marché (transparence) et à l'amélioration de la qualité des produits.

Les interventions nationales, financées par les crédits du MAP, sont définies pour une part dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, et pour le reste (plus de la moitié) par l'OFIMER 4 ( * ) . S'y ajoutent des contributions de l'Union européenne au titre de l'IFOP.

Les financements afférents s'élèvent à 86 millions de francs en 1999 (45 millions de francs en dépenses nationales, et 41 millions de francs provenant des fonds européens), contre 141 millions de francs en 1998. Le niveau de dépenses de 1999 reflète davantage le niveau moyen de ces financements que celui de 1998.

Les investissements des industries de transformation des produits de la mer sont subventionnés par les pouvoirs publics dans le cadre des procédures en vigueur pour l'ensemble de l'agro-alimentaire (financement national par la prime d'orientation agricole, couplé aux programmes opérationnels des fonds structurels européens).

Les dépenses bénéficiant au secteur des produits marins se sont élevées à 30 millions de francs en 1999, dont 8 millions de francs pour l'Etat et 22 millions de francs pour l'Union européenne (IFOP). Par rapport à 1998, on note une baisse des dépenses qui correspond à une diminution de la contribution communautaire en faveur des entreprises de transformation (22 millions de francs en 1999 contre 35 en 1998).

Enfin, en matière de développement de la consommation des produits de la mer, l'OFIMER consacre un budget significatif à l'information des consommateurs, à l'appui à la stratégie commerciale des détaillants (campagnes dans les médias, publicité sur les lieux de vente, ...), ainsi qu'à la prospection de nouveaux débouchés à l'exportation (foires internationales, conseils aux exportateurs).

Bénéficiant à l'ensemble de la filière, ces interventions contribuent à améliorer la rémunération tirée du marché par les activités d'amont de pêche et de cultures marines.

Les concours nets (d'origine essentiellement nationale) en faveur de la promotion des produits, regroupés au sein de l'ensemble 2.3, s'élèvent à 27 millions de francs en 1999 comme en 1998.

II. LE PROJET DE BUDGET POUR 2001

(en millions de francs)

AGRÉGAT 25 : PÊCHES MARITIMES ET AQUACULTURE

2000

(LFI)

2001

(PLF)

Variation PLF 2001/

LFI 99 (en %)

Dépenses ordinaires (Chapitre 44-36)

- Article 20

Intervention en faveur des entreprises de pêche et de

cultures marines

- Article 30

Organisation des marchés : industrie et commercialisation

54,88

95,59

66,7

95,77

+21,5 %

+0,19 %

Dépenses en capital (chapitre 64-36)

Article 20

Modernisation et développement des entreprises de pêche et de cultures marines

25,15 CP

35,4 AP

13,5 CP

24,7 AP

-46,3 %

-30 %

Article 30

Organisation des marchés : industrie et commercialisation

14,95 CP

9 AP

6,6 CP

9,7 AP

-55,85 %

+7,8 %

TOTAL DO + CP hors autorisations de programme (1)

190,58

182,58

-4,20 %

Subvention IFREMER

3,29

3,450

+ 4,8 %

Les dotations affectées aux secteurs de la pêche maritime et des cultures marines telles que retracées par l'agrégat 25 du budget de l'agriculture et de la pêche s'élèvent pour 2001 à 182,58 milliards de francs, en diminution de 4,2 % par rapport au budget pour 2000.

La dotation du chapitre 44-36 qui permet, d'une part, de poursuivre l'adaptation de la filière pêche et de financer, d'autre part, des actions ciblées facilitant la mise en oeuvre du programme communautaire d'orientation pluriannuel de la flotte de pêche augmente de 8 %.

S'agissant du chapitre 64-36, qui diminue de 50 %, il contribuera, comme depuis de nombreuses années, à la modernisation de la flottille, notamment en matière de valorisation qualitative des produits (modernisation en froid des navires, ainsi qu'à l'équipement matériel léger comme l'informatisation des criées).

*

* *

Votre rapporteur pour avis estime que ce budget de la pêche s'inscrit dans un contexte difficile dont le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure. Sur le long terme, les marins n'ont pas obtenu les réponses qu'ils sont en droit d'attendre sur l'avenir de leur profession. Sur le court terme, la diminution des crédits au moment où ce secteur connaît une grave crise conjoncturelle ne peut recevoir l'approbation de votre commission.

Suivant la proposition de son rapporteur, la Commission des Affaires économiques a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de l'agriculture et de la pêche consacrés à la pêche maritime et aux cultures marines, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.

* 1 Règlement n° 2792/1999 du Conseil du 17 décembre 1999 définissant les modalités et conditions des actions structurelles de la Communauté dans le secteur de la pêche, JO L. N37 du 30 décembre 1999.

* 2 Rapport n° 351 (1999) de M. Alain Gérard au nom de la Commission des Affaires économiques.

* 3 Créé en 1993, l'Instrument financier d'orientation des pêches (IFOP) a remplacé le FEOGA-Orientation en matière d'intervention socioculturelle dans les secteurs des pêches et de l'aquaculture.

* 4 Par décret 98-1261 du 29 décembre 1998, a été créé l'OFIMER (Office interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture) en remplacement du FIOM (Fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la pêche maritime et des cultures marines). Par commodité, le même terme d'OFIMER sera systématiquement employé dans ce document pour désigner la nouvelle structure et l'ancienne.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page