TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Réunie le mardi 24 octobre 2000 , sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission a entendu M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, sur les crédits consacrés à son ministère.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a tout d'abord rappelé que le projet de budget des anciens combattants pour 2001 diminuait moins que les budgets des années précédentes mais également dans une moindre proportion que la diminution du nombre d'anciens combattants. Il en a conclu que le montant des crédits budgétaires rapporté au nombre d'anciens combattants avait tendance à augmenter.

Il a également indiqué que le projet de budget apportait des réponses concrètes à plusieurs revendications du monde combattant. A cet égard, il a souligné que, depuis son entrée en fonctions, il s'était principalement efforcé de résoudre le contentieux existant avec les anciens combattants d'Afrique du nord et que des progrès très sensibles avaient été réalisés. Il a observé que le projet de budget pour 2001 apportait deux nouvelles réponses : l'assouplissement des conditions d'attribution de la carte du combattant pour les rappelés et l'extension des dates permettant d'obtenir le titre de reconnaissance de la Nation.

Il a également rappelé que ce projet de budget apportait de nouvelles avancées plus générales : augmentation du plafond majorable de la retraite mutualiste, poursuite du retour à la parité du montant des pensions des plus grands invalides, augmentation des crédits consacrés à la mémoire et soutien accru à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), notamment pour la mise aux normes des maisons de retraite et pour son action sociale.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, après avoir reconnu l'action menée par le secrétaire d'Etat dans certains domaines, a pour sa part regretté le faible nombre de mesures nouvelles présentées dans le budget et a déclaré ne pas admettre la diminution des crédits, considérant que si le nombre d'anciens combattants pouvait effectivement diminuer, ils étaient confrontés à une précarité croissante.

Il a alors interrogé le secrétaire d'Etat sur la question de la décristallisation et rappelé le récent avis du Conseil d'Etat laissant espérer la levée de la forclusion pour l'attribution des retraites du combattant.

M. Jean-Pierre Masseret a indiqué que cet avis ne signifiait pas la levée de la forclusion pesant sur la retraite du combattant, même à un taux cristallisé. Il a toutefois considéré que cet avis était important car il pourrait permettre d'avancer dans ce dossier éventuellement au cours de la discussion budgétaire. Il a également précisé qu'il importait de faire d'autres propositions sur la question de la décristallisation, notamment en matière de possibilité de réversion, de reconnaissance des aggravations des invalidités et de revalorisation du montant des pensions et retraites, en particulier pour les pays du Maghreb qui sont les seuls à avoir accumulé un retard en termes de pouvoir d'achat.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, s'est ensuite interrogé sur la situation des veuves d'anciens combattants et sur les perspectives de réforme des dispositifs en leur faveur.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a indiqué qu'il venait d'engager une discussion avec le monde combattant sur ce sujet. Il a fait part de son souci d'améliorer la situation des veuves, en particulier dans trois situations.

S'agissant des veuves des plus grands invalides dont la pension est proche de 4.000 francs par mois et qui n'ont souvent jamais travaillé, il a estimé qu'il fallait réfléchir à un système de cotisation obligatoire dont le financement reste à définir et qui pourrait permettre à la veuve de bénéficier du minimum vieillesse et d'une réversion de la pension de son mari.

S'agissant des veuves de guerre, il a jugé qu'il était possible de moduler le nombre de points de pension pour permettre la revalorisation de leur pension.

S'agissant des autres veuves ressortissantes de l'ONAC, il a considéré que leur situation relevait sans doute plus de la politique de solidarité générale que d'une action spécifique de son département ministériel. Toutefois, il s'est montré favorable à la mise en place d'une aide spécifique sous condition de ressources. Il a ainsi estimé qu'il était possible de réfléchir à un redéploiement des crédits du fonds de solidarité en faveur des veuves mais aussi des anciens combattants en situation de difficulté quotidienne.

Il a jugé qu'en l'état actuel des choses un élargissement du droit à réparation était difficilement envisageable mais qu'il accordait une attention toute particulière à garantir l'absence de toute remise en cause de celui-ci.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, s'est également interrogé sur l'opportunité d'un abaissement éventuellement progressif de l'âge d'obtention de la retraite du combattant.

M. Jean-Pierre Masseret a indiqué qu'il s'agissait d'une revendication relativement nouvelle du monde combattant souvent présentée comme une compensation à l'absence de retraite anticipée. Il a fait part de sa réserve sur cette mesure à la fois pour des raisons de principe, considérant que l'âge d'obtention de la retraite du combattant avait toujours été de 65 ans et que l'augmentation de l'espérance de vie en faisait un système de plus en plus favorable, et pour des raisons budgétaires, le coût d'une telle mesure étant estimé à 3,4 milliards de francs sur trois ans, dont 1,5 milliard de francs la première année.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, s'est inquiété alors de la date d'un retour définitif à la parité des pensions des plus grands invalides.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, s'est engagé à ce que celui-ci soit définitif pour 2002.

Puis, M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, s'est interrogé sur les conditions d'indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes.

M. Jean-Pierre Masseret a rappelé que la fondation Entente franco-allemande avait été dotée d'un fonds de 264 millions de Deutsch Mark pour indemniser les incorporés de force, mais que le règlement de la fondation avait exclu les incorporés de force dans les formations paramilitaires. Il a indiqué que seuls pouvaient bénéficier de l'indemnisation ceux qui pouvaient justifier avoir participé à des combats. Il a souligné que le conseil d'administration de l'Entente franco-allemande s'était effectivement engagé à participer à l'indemnisation de ces incorporés de force mais à la condition que des crédits budgétaires y concourent également. Il a alors fait part de sa crainte d'une incompatibilité entre le versement de telles indemnités et le règlement intérieur de la fondation, qui pourrait alors se traduire par un contentieux massif devant les tribunaux entraînant une très forte insécurité juridique pour les bénéficiaires. Il a toutefois précisé qu'actuellement, sur 11.425 dossiers reçus d'incorporés de force dans les formations paramilitaires, 1.582 avaient été rejetés, 7.901 avaient été traités et 1.242 restaient en instance.

Enfin, M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, s'est interrogé sur la position du Gouvernement concernant l'institution d'une date commémorative pour les morts de la guerre d'Algérie.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a indiqué qu'il constatait sur ce point une forte division du monde combattant et qu'en tant que responsable ministériel il ne proposait pas au Gouvernement de retenir une date parmi plusieurs dates proposées. Il a en effet précisé que les dates du 11 novembre et du 8 mai avaient fait l'objet d'un vote unanime des parlementaires et que l'unanimité ne serait sans doute jamais réalisée pour une date commémorative de la guerre d'Algérie. Il a en revanche rappelé qu'il avait donné ordre aux représentants de l'Etat dans les départements de participer aux différentes cérémonies commémoratives organisées et qu'il cherchait à avancer rapidement sur le dossier du Mémorial national des morts d'Afrique du nord.

M. Roland Huguet s'est interrogé sur les conséquences d'une possible ouverture de la gestion de la retraite mutualiste du combattant au secteur marchand en application de la prochaine ordonnance portant refonte du code de la mutualité ; il a souhaité obtenir des assurances sur l'avenir du site national de Lorette.

M. Louis Boyer s'est interrogé sur l'amélioration des circuits de paiement des pensions et des retraites versées aux anciens combattants d'outre-mer ainsi que sur le nombre d'anciens déportés politiques encore en vie recensés par les services du secrétaire d'Etat.

M. Guy Fischer a regretté que le retour à la parité des pensions des plus grands invalides ne soit pas effectif en 2001.

M. Alain Hethener a demandé au secrétaire d'Etat quelle était la répartition de l'effort financier prévue entre l'Etat et la fondation Entente franco-allemande pour l'indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes. Il s'est également interrogé sur l'éventualité, un moment évoquée par le secrétaire d'Etat, de l'introduction dans le projet de budget d'une mesure ramenant l'âge d'attribution de la retraite du combattant à 60 ans si son bénéficiaire a des ressources inférieures à 5.500 francs par mois.

Mme Gisèle Printz est à son tour revenue sur la situation des anciens incorporés de force des formations paramilitaires allemandes, insistant notamment sur la situation des femmes.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a tenu à souligner l'action des parlementaires qui lui avait permis d'obtenir des arbitrages budgétaires favorables pour le projet de loi de finances pour 2001. Il a indiqué que le projet de budget pouvait être encore amélioré lors de son examen à l'Assemblée nationale, notamment sur une décristallisation de la retraite du combattant et sur l'amélioration des dispositifs de solidarité.

S'agissant de la retraite mutualiste, il a reconnu que les organismes mutualistes s'étaient inquiétés de la mise en oeuvre de la réforme par voie d'ordonnances. Il a toutefois fait part de sa vigilance extrême sur ce sujet, précisant que, pour la gestion de la retraite mutualiste du combattant, le Gouvernement devra donner un agrément à chaque organisme gestionnaire et que l'objectif n'était à l'évidence pas d'en confier la gestion au secteur privé.

S'agissant du site de Lorette, il a rappelé qu'il s'agissait de la plus grande nécropole nationale et qu'elle méritait un important effort d'entretien. Il a précisé qu'un partenariat pluriannuel avec les collectivités locales était en cours de négociation pour assurer une amélioration de l'entretien du site.

S'agissant des circuits de versement des pensions outre-mer, il a reconnu que les pensions n'arrivaient effectivement pas toujours à leur destinataire. Il a toutefois déclaré qu'il avait chargé les attachés militaires des Ambassades françaises de veiller à l'effectivité du versement des pensions. Il a également déclaré qu'il n'était pas en mesure de préciser immédiatement le nombre de déportés politiques encore en vie.

S'agissant du retour à parité des pensions des plus grands invalides, il a confirmé qu'elle serait définitive en 2002.

S'agissant des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, il a précisé que la demande initiale de la fondation Entente franco-allemande était celle d'un partage des coûts à parité entre l'Etat et la fondation. Il a également indiqué que des avancées pouvaient être obtenues à condition d'une réelle sécurisation juridique du dispositif d'indemnisation.

S'agissant de la retraite du combattant, il a reconnu avoir envisagé à un moment de permettre un abaissement de l'âge d'obtention à 60 ans si les bénéficiaires ont des revenus inférieurs à 5.500 francs par mois et avoir obtenu un arbitrage favorable en ce sens. Il a souligné que le coût d'une telle mesure était très raisonnable, l'évaluant à 84 millions de francs. Toutefois, il a observé que cette mesure n'avait pas été relayée par le monde combattant et qu'il avait, en conséquence, renoncé à l'inclure dans le projet de budget.

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