projet de loi de finances pour 2002 - Tome V : Enseignement supérieur

DUPONT (Jean-Léonce)

AVIS 88 - TOME V (2001-2002) - commission des affaires culturelles

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Table des matières




N° 88

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME V

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Par M. Jean-Léonce DUPONT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Xavier Darcos, Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; MM. Jean Arthuis, François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernard Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean François-Poncet, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 16 ) (2001-2002)


Lois de finances .

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

S'élevant à 57,31 milliards de francs (8,736 milliards d'euros), le projet de budget de l'enseignement supérieur pour 2002 ne progresse que de 2,22  % par rapport à 2001.

Dans le même temps, le projet de budget de l'éducation nationale, entendue dans sa globalité, regroupant le scolaire et le supérieur, enregistre une hausse de 3,84  %, près de deux fois supérieure à celle du budget de l'Etat et dépasse pour la première fois le cap des 400 milliards de francs.

Le seul projet de budget de l'enseignement scolaire, qui atteindra 345,7 milliards de francs en 2002, progresse pour sa part de 4,11  %, soit une augmentation près de deux fois supérieure à celle de l'enseignement supérieur.

Depuis plusieurs années, votre commission observe l'évolution divergente entre ces deux budgets et demande un transfert de crédits du scolaire vers le supérieur, en raison notamment de l'évolution à la baisse ou à la stabilisation des effectifs dans le premier et le second degrés, alors que l'université, qui a répondu avec succès sur le plan quantitatif au défi de l'explosion démographique connaît des besoins importants d'encadrement pédagogique, notamment dans les premiers cycles.

Les comparaisons internationales témoignent du sort fait à notre système universitaire, puisque le rapport 2001 de l'OCDE montre que notre pays ne consacre que 1,13  % de son PIB à l'enseignement supérieur 1( * ) contre 1,33  % en moyenne pour les pays développés membres de l'Organisation.

Sans noircir le tableau très hétérogène de notre système universitaire où le meilleur côtoie le pire, où des initiatives originales coexistent avec trop de filières laissées en déshérence, du fait notamment d'un doublement des effectifs étudiants au cours des quinze dernières années, force est de reconnaître que les moyens humains, matériels et pédagogiques n'ont pas suivi pour accompagner ce mouvement, en particulier pour l'accueil des nouveaux étudiants. A cet égard, le projet de budget de l'enseignement supérieur pour 2002 manque incontestablement d'ambition.

Le tassement actuel de la démographie étudiante devrait, au contraire, être l'occasion de libérer des énergies, notamment par une plus grande autonomie de nos universités, et faire en sorte que notre système universitaire, bien en amont de la licence, assume ses missions, notamment au regard de l'adaptation à l'emploi et à la formation du citoyen. Si l'université souffre d'un certain manque de moyens, elle pâtit aussi d'une organisation trop centralisée et d'une vision trop conservatrice.

*

* *

Après avoir retracé l'évolution des grandes masses de crédits, il conviendra d'examiner quelques aspects de la démocratisation de l'enseignement supérieur, de rappeler la nécessité d'une programmation des moyens qui sont affectés à notre système universitaire et d'exposer la nécessité de l'ouverture des universités au monde d'aujourd'hui, tant au plan international qu'au regard de leur modernisation.

I. UNE ÉVOLUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS DÉCEVANTE

Alors que le budget de l'enseignement supérieur a quasiment été multiplié par deux entre 1990 et 2002 (+ 96  % à prix courants), la progression du projet de budget pour 2002 n'est que de 2,22  %, soit l'une des plus faibles enregistrée depuis plus de quinze ans.

Si les dépenses ordinaires sont en augmentation de 3,95  %, pour les crédits d'investissement, les autorisations de programme progresseront de 18,63  % tandis que les crédits de paiement se réduiront de 13,65  %, cet ajustement technique résultant d'une prise en compte du rythme effectif des paiements des travaux de construction.

EVOLUTION DU BUDGET DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

(en milliards d'euros)

LFI

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Montant total

6,02

6,14

6,43

6,79

7,17

7,39

7,79

8,00

8,54

8,74

Augmentation en  %

+ 9,6

+ 1,9

+ 4,8

+ 8,3

+ 5,5

+ 3,1

+ 5,5

+ 2,6

+ 6,8

+ 2,2

Part en  % du budget de l'enseignement supérieur dans le budget de l'éducation nationale

14,0

13,8

13,9

14,0

14,5

14,5

14,6

14,5

14,4

14,2

En dépit de cette évolution générale décevante, les créations d'emplois et les dépenses de fonctionnement restent relativement soutenues, même si leur poids dans le total du budget est modeste.

A. LA CRÉATION DE 3 500 EMPLOIS

Dans le cadre du plan pluriannuel de recrutement, le projet de budget permet la création de 3 500 emplois supplémentaires, dont 2 000 au titre des engagements dudit plan, et 1 500 au titre de la résorption de l'emploi précaire.

1. Les emplois enseignants : un progrès par rapport à 2001

Les crédits prévus permettront de créer à la rentrée 2002, 1 000 emplois dont :

- 600 emplois d'enseignants-chercheurs, soit 243 professeurs d'université ou équivalents et 357 maîtres de conférences ;

- 100 emplois de professeurs agrégés ;

- 261 postes d'attachés temporaires d'enseignement et de recherche (ATER) ;

- 39 assistants des disciplines médicales.

Le coût de la création des 700 emplois enseignants et enseignants-chercheurs est de 9,740 millions d'euros, soit 63,89 millions de francs, celui des 39 emplois d'assistants des disciplines médicales de 287 040 euros, soit 1,882 million de francs et celui des 261 ATER de 2,730 millions d'euros, soit 17,908 millions de francs.

Pour mémoire, on rappellera que le nombre total d'enseignants du supérieur est de 81 300 et que la loi de finances pour 2001 autorisait la création de 300 emplois de maîtres de conférence et de 256 postes d'ATER.

EVOLUTION DES EMPLOIS BUDGÉTAIRES DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

(en milliers)

Rentrée

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2001

Enseignants

64,5

68,0

69,1

70,2

72,8

74,2

77,1

78,6

79,8

80,3

81,3

IATOS

44,8

46,0

46,1

47,0

48,4

47,0

51,3

52,2

52,8

53,8

54,8

Total

109,3

114,0

115,2

117,2

121,2

121,2

128,4

130,8

132,6

134,1

136,1

Source : ministère de l'éducation nationale

L'effort budgétaire en matière de créations d'emplois d'enseignants n'est donc pas négligeable, même si 1 200 emplois d'enseignants-chercheurs ont été créés en 2000 et 1 500 en 1999.

2. Les emplois non enseignants : un effort substantiel

Le projet de loi de finances prévoit de créer, à la rentrée 2002, 1 000 emplois non enseignants dont 150 pour les bibliothèques.

Ces emplois nouveaux permettront d'accompagner la modernisation des établissements, l'accroissement des surfaces universitaires, notamment des bibliothèques qui sont encore trop souvent sinistrées, et d'améliorer l'environnement dans lequel évoluent les étudiants ainsi que la qualité du service qui leur est rendu en matière sanitaire et sociale : à ce titre seront créés 26 emplois d'infirmières dans les universités et 42 emplois, dont 10 emplois d'assistantes sociales, dans le réseau des oeuvres universitaires et scolaires.

En outre, au titre de la résorption de l'emploi précaire dans les établissements d'enseignement supérieur, 1 500 emplois nouveaux financés sur les ressources propres des établissements seront créés pour permettre la titularisation d'ayants droit.

Les principales créations d'emplois de personnels non enseignants peuvent être ainsi ventilées :

- 779 emplois de personnels IATOS : 6,2 millions d'euros (40,7 millions de francs) ;

- 148 emplois de personnels de bibliothèques : 1,043 million d'euros (6,842 millions de francs) ;

- 45 emplois sur les chapitres de subventions, dont 42 pour les CROUS : 519 millions d'euros (3,404 millions de francs) ;

- 1 500 emplois au titre du plan de mise en oeuvre de la résorption de l'emploi précaire (loi du 3 janvier 2001), dont 1 491 dans les établissements d'enseignement supérieur et 9 dans les CROUS.

Afin d'apprécier cet effort budgétaire, il convient de rappeler que l'enseignement supérieur compte quelque 53 000 personnels IATOS, et que la loi de finances pour 2001 autorisait la création de 1 000 emplois de personnels non enseignants, contre 500 en 2000 et 800 en 1999.

*

* *

Au total, l'effort entrepris en faveur des créations d'emplois peut donc être salué et devrait permettre, dans un contexte de stagnation démographique de retrouver des taux d'encadrement pour les étudiants proches de la situation antérieure à l'explosion de la démographie étudiante.

Votre commission tient toutefois à souligner que la résorption de l'emploi précaire dans les universités se traduit par la création d'emplois nouveaux financés sur les ressources propres des établissements, c'est-à-dire d'emplois gagés.

Elle ne peut se satisfaire d'une formule qui consiste pour l'Etat, par la titularisation des contractuels, à pérenniser une charge pour les universités alors que celles-ci n'ont pas de certitude sur leurs ressources propres futures, ce qui introduit une rigidité supplémentaire pour les établissements, alors qu'ils aspirent à davantage d'autonomie et de souplesse dans la gestion des personnels.

3. L'amélioration de la situation des personnels

Dans le cadre de la revalorisation des rémunérations, le projet de budget traduit, à hauteur de 127,2 millions d'euros (834,5 millions de francs), la revalorisation du point fonction publique.

S'agissant des mesures catégorielles, celles-ci bénéficieront de 7,14 millions d'euros (46,81 millions de francs). Les principales mesures sont les suivantes :

- la revalorisation de l'indice de fin de carrière des assistants (passant de 801 à 821) et la transformation de 250 emplois d'assistants en emplois de maîtres de conférences afin d'accélérer leur intégration dans le corps des maîtres de conférences ;

- l'amélioration du pyramidage des enseignants-chercheurs pour un montant de 1,07 million d'euros ( 7,02 millions de francs) ;

- la création d'une indemnité pour les membres du conseil national des universités variant d'un montant de 450 à 1 000 euros, pour un coût en année pleine de 0,9 million d'euros (5,9 millions de francs) ;

- le transfert au 1 er septembre 2002 des crédits dédiés à la prime de responsabilités pédagogiques et à la prime pour charges administratives, ces crédits devant être intégrés dans le budget des établissements ;

- un effort en faveur des personnels de recherche et formation (repyramidage des ingénieurs de recherche, ingénieurs d'études et agents des services techniques) pour 1,21 million d'euros (7,94 millions de francs) ;

- la poursuite de la réforme de la filière administrative de recherche et de formation par transfert des emplois des corps administratifs de recherche et de formation (750), soit vers les corps similaires de l'administration scolaire et universitaire, soit vers les corps de la filière technique de recherche et de formation pour un montant de 1,26 million d'euros (8,27 millions de francs) et l'achèvement du plan d'intégration des corps de la filière ouvrière et de service (y compris les personnels de laboratoire) des établissements dans les corps de la filière technique de recherche et de formation. Cette nouvelle tranche concerne 1 349 emplois ;

- la poursuite de l'effort en faveur de la filière des bibliothèques engagé en 2000, avec la revalorisation de la carrière des personnels de magasinage et la transformation de 130 emplois d'assistants de bibliothèque en emplois de bibliothécaires adjoints spécialisés ;

- la revalorisation du régime indemnitaire des personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires ainsi que diverses mesures en faveur de l'encadrement administratif des établissements d'enseignement supérieur et de la revalorisation des régimes indemnitaires.

Si la plupart de ces mesures catégorielles répondent aux souhaits exprimés par les personnels, s'agissant du repyramidage des enseignants-chercheurs, votre commission observera que la proportion entre professeurs d'université et maîtres de conférence s'est inversée en dix ans : le pourcentage des professeurs d'université est ainsi tombé de 60 à 30 % entre la fin des années 80 et aujourd'hui, tandis que celui des maîtres de conférence passait de 40 à 70 %, ces derniers n'assurant pas le même rôle que les premiers dans le domaine de la recherche.

4. Une gestion des enseignants-chercheurs critiquée et un statut à aménager

a) Les critiques de la Cour des comptes

Dans son rapport 2001 sur la fonction publique, la Cour des comptes formule diverses observations sur la gestion des enseignants-chercheurs, après enquête menée auprès de l'administration centrale et contrôle des établissements universitaires. On en trouvera la synthèse ci-après :

(1) Une gestion partagée

La gestion des enseignants-chercheurs est, de fait, une gestion partagée : la gestion des emplois et la gestion « administrative » sont de la responsabilité de l'administration centrale, alors que le recrutement et la gestion des personnes reviennent à la communauté universitaire, notamment au sein des établissements.

(2) Une gestion lourde et complexe

Si la mise en oeuvre par l'administration centrale d'outils de connaissance des personnels et de répartition des emplois, de gestion prévisionnelle des effectifs et de gestion prévisionnelle des carrières a permis d'indéniables progrès, leur efficacité reste limitée autant par la lourdeur des outils et les incohérences des systèmes d'information que par le poids de la communauté universitaire dans les processus de décision. Les procédures de gestion des personnes, modifiées à plusieurs reprises, restent particulièrement complexes et lourdes, qu'il s'agisse du recrutement, de l'avancement ou de la mobilité.

(3) Une mauvaise répartition des moyens

L'augmentation substantielle du nombre d'emplois a permis une amélioration du taux d'encadrement des étudiants mais des écarts très marqués subsistent tant au niveau géographique que disciplinaire. En amont, l'utilisation par l'administration d'un système analytique de répartition des moyens n'a pas été accompagnée d'un redéploiement des emplois entre établissements ou disciplines. Au demeurant, la liberté des établissements en matière de recrutement ne permet pas de garantir dans la suite du processus qu'un poste ouvert soit pourvu.

(4) Un contrôle défaillant

Le système indemnitaire a été rénové et étendu et permet désormais la reconnaissance des responsabilités particulières prises par les enseignants-chercheurs, notamment dans le domaine pédagogique. Le contrôle par les instances des établissements des activités des enseignants-chercheurs reste cependant succinct, voire défaillant. Des irrégularités en matière d'octroi de rémunérations accessoires étaient encore constatées récemment. Enfin, le régime particulier d'exercice des activités privées ouvert aux enseignants-chercheurs accroît les difficultés d'application de la réglementation générale sur les cumuls d'emplois et de rémunérations, mal connue et mal mise en oeuvre par les établissements.

b) Les réponses du ministère aux observations de la Cour des comptes
(1) Le « surnombre » des professeurs d'université

Le surnombre de professeurs des universités gagés sur des emplois de maîtres de conférences, résultant de l'application de l'article 62 du statut des enseignants-chercheurs est, à l'origine, de 2 000 postes. Il est chaque année résorbé à hauteur de 200 postes. Entre 1992 et 2001, cette résorption a concerné 1 515 surnombres et il en reste 485 à résorber.

(2) La gestion prévisionnelle des effectifs de l'enseignement supérieur

Cette gestion devrait être améliorée par la mise en place d'un nouveau système d'information et de gestion appelé à remplacer l'actuel système. Les travaux sont en cours, le nouveau système devant être fondé sur une base de données plus complète comportant trois niveaux (administration centrale, établissements, enseignants du supérieur) et permettre à l'administration centrale d'assurer ses missions de pilotage dans des conditions plus satisfaisantes.

Un outil de gestion (GESTPREV), doit permettre d'analyser les besoins de renouvellement des corps des enseignants-chercheurs à l'identique ou en intégrant les hypothèses d'évolution. Cet outil a intégré la programmation pluriannuelle de créations d'emplois.

(3) La mobilité des enseignants-chercheurs et les disparités en matière de recrutement

Des modifications récentes introduites par le décret du 16 mai 2001 ont pour objet de favoriser la mobilité des enseignants-chercheurs et de pallier les éventuelles difficultés de recrutement que connaîtraient certains établissements.

Ainsi la durée et les conditions d'exercice en délégation ont été modifiées : la délégation prononcée en application de l'article 25-1 de la loi du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique peut être renouvelée jusqu'à 6 ans. Par ailleurs, les récents aménagements ont prévu des possibilités d'effectuer la délégation à temps incomplet dans certaines conditions.

Afin d'encourager la mobilité européenne, une bonification d'un an est accordée aux enseignants-chercheurs après un an de mobilité effectuée dans un organisme d'enseignement supérieur ou de recherche d'un Etat de l'Union européenne. Les services effectués dans ce cadre sont également pris en compte au titre de l'ancienneté exigée des candidats pour se présenter aux concours de professeurs des universités offerts dans la limite du neuvième des emplois (article 46 -3° du décret du 6 juin 1984 modifié).

En revanche, n'est pas considérée comme une mobilité toute mutation vers un établissement situé dans l'académie de Paris ou toute mutation à l'intérieur de cette académie. Cette dernière disposition devrait réduire les difficultés de recrutement que peuvent connaître les établissements situés hors de cette académie.

(4) Une gestion nationale et locale en matière de recrutement et d'avancement

La double procédure, nationale et locale, ralentit certes les opérations de recrutement et d'avancement des enseignants-chercheurs, mais elle constitue une garantie d'objectivité et en même temps de prise en compte de l'ensemble de leurs fonctions, ainsi que le stipule l'article L. 952-6 du code de l'éducation : « L'appréciation, concernant le recrutement ou la carrière, portée sur l'activité de l'enseignant-chercheur tient compte de l'ensemble de ses fonctions ».

En effet, le conseil national des universités est enclin à s'appuyer sur des critères de recherche, qui peuvent être appréciés, au niveau national, par le biais des publications. L'intervention de l'instance locale (commission des spécialistes, conseil d'administration, conseil scientifique...), en raison de sa proximité, doit pouvoir compléter cette appréciation par une meilleure reconnaissance de l'investissement local (particulièrement en pédagogie).

c) Les propositions du rapport Espéret  tendant à aménager le statut des enseignants-chercheurs

Dans un rapport remis le 24 septembre dernier au ministre, M. Eric Espéret, président de l'université de Poitiers estime que le statut des enseignants-chercheurs n'est « plus adapté » à la réalité du métier et prône une transformation de leur statut et la mise en place de contrats individuels.

D'après le rapport, ces enseignants sont de plus en plus soumis à de nouvelles tâches (animation de cours à distance via internet, coordination pédagogique...) qui ne sont pas pris en compte dans leur rémunération, ce qui conduit les universités à « compenser partiellement ces charges par des artifices plus ou moins réglementaires ».

Leur statut actuel prévoit une obligation de service d'un volume annuel de 192 heures de cours en présence d'étudiants ou 384 heures de travaux dirigés ; le rapport estime que cette définition « n'apparaît malheureusement plus adaptée au métier actuel des enseignants du supérieur » et s'appuie sur plusieurs exemples d'autres pays européens.

Il est ainsi proposé d'intégrer certaines activités nouvelles des enseignants dans leur statut (enseignement à distance, suivi individualisé des étudiants, tutorat, stages, responsabilité administrative ou de filière, valorisation de la recherche...) au moyen d'un tableau d'équivalence établi par l'établissement. Le rapport souligne qu'il « devient de plus en plus difficile de trouver des volontaires » pour assurer ces tâches « qui sont souvent sans impact réel sur les promotions et les rémunérations » et estime que les recrutements à venir, du fait des départs en retraite « exigent que le métier d'enseignant dans le supérieur garde une attractivité suffisante ».

Tout en souhaitant le maintien d'une « norme nationale » pour déterminer la charge de travail, le rapport propose d'instituer un « contrat individuel pluriannuel » entre chaque enseignant et son établissement, qui ferait l'objet d'un bilan et d'une évaluation et suggère également des décharges de service pour les enseignants débutants.

Lors de son audition devant la commission, le ministre a souligné l'intérêt du rapport Espéret en annonçant son intention de faire étudier la réalisation de ses conclusions par une commission comprenant des représentants de tous les ministères concernés.

Il a indiqué que la mesure déjà retenue, consistant à globaliser une partie des primes attribuées aux enseignants, pour des activités autres que les cours magistraux, s'inspirait des conclusions du rapport, et qu'il convenait de reconsidérer le statut des enseignants-chercheurs dont l'activité ne se limite pas aux seuls cours magistraux, mais comporte aussi des travaux de recherche et des tâches multiples relatives à l'animation des premiers cycles, à l'encadrement des campus numériques et à la formation continue.

Dans le même sens, la mission d'information 2( * ) constituée à l'initiative de votre commission, sur l'information et l'orientation des étudiants dans les premiers cycles universitaires préconisait également une prise en compte de toutes les activités des enseignants-chercheurs, et pas seulement celles d'enseignement et de recherche, pour l'évaluation et le déroulement de leur carrière, aussi bien s'agissant de l'encadrement pédagogique des premiers cycles, qui sont trop laissés aux enseignants du secondaire, que de la formation continue ou de la direction d'établissement, ces tâches n'étant pas suffisamment prises en compte, dans le déroulement de la carrière des universitaires.Elle notait également que la formation pédagogique des enseignants-chercheurs était quasi inexistante.

Votre commission tient cependant à indiquer que le principal syndicat d'enseignants du supérieur s'oppose résolument à l'instauration de contrats individuels passés entre les établissements et les enseignants et considère inadmissible qu'un tel contrat puisse fixer des charges de service au-delà éventuellement du service statutaire actuel sans proposer aucune réduction du temps de travail : le contrat « ne peut être une réponse appropriée aux enseignants du supérieur qui demandent la diminution de l'ensemble de leurs charges de travail et en particulier un allègement des obligations d'enseignement, pour un meilleur équilibre de leurs missions ».

d) Plus de 16 500 enseignants-chercheurs à recruter dans les dix ans à venir
(1) Du fait des perspectives de départ en retraite

Les deux tableaux ci-après donnent la répartition, pour les dix prochaines années, des effectifs prévisibles de départs à la retraite des enseignants-chercheurs, par âge de départ théorique (60 et 65 ans), par grande discipline et corps.

Les besoins de recrutement devront également tenir compte de l'évolution des besoins d'encadrement des étudiants et de ceux de la recherche universitaire.

LES PERSPECTIVES DE DÉPART EN RETRAITE
DES PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS


Age théorique de départ

Discipline

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Total

60 ans

DROIT

86

80

92

92

135

157

106

88

63

53

53

1 005

LETTRES

200

245

228

209

245

280

219

188

157

132

112

2 215

SCIENCES

398

423

449

440

500

489

381

299

221

165

153

3 918

PHARMACIE

35

34

43

31

35

43

28

37

27

26

10

349

TOTAL

719

782

812

772

915

969

734

612

468

376

328

7 487

65 ans

DROIT

42

57

56

72

62

86

80

92

92

135

157

931

LETTRES

131

151

153

167

192

200

245

228

209

245

280

2 201

SCIENCES

155

225

260

333

352

398

423

449

440

500

489

4 024

PHARMACIE

25

19

28

28

29

35

34

43

31

35

43

350

TOTAL

353

452

497

600

635

719

782

812

772

915

969

7 506

Source DPE

LES PERSPECTIVES DE DÉPART EN RETRAITE DES MAÎTRES DE CONFÉRENCE


Age théorique de départ

Discipline

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Total

60 ans

DROIT

73

80

82

89

140

129

132

122

94

81

83

1 105

LETTRES

240

256

246

275

345

358

321

292

309

277

249

3 168

SCIENCES

437

500

555

467

546

542

392

332

253

195

197

4 416

PHARMACIE

40

46

53

37

42

55

53

41

40

25

31

463

TOTAL

790

882

936

868

1 073

1 084

898

787

696

578

560

9 152

65 ans

DROIT

20

18

34

39

52

73

80

82

89

140

129

756

LETTRES

87

118

142

180

188

240

256

246

275

345

358

2 435

SCIENCES

131

176

238

321

356

437

500

555

467

546

542

4 269

PHARMACIE

8

10

20

22

28

40

46

53

37

42

55

361

TOTAL

246

322

434

562

624

790

882

936

868

1 073

1 084

7 821

Source DPE

(2) Les incidences du plan pluriannuel de recrutement

Le plan pluriannuel pour l'éducation nationale (2001-2003), annoncé en novembre 2000, comporte un plan de programmation des recrutements et un plan de programmation des créations d'emplois.

Pour l'enseignement supérieur, il prévoit la création de 5 600 emplois :

- 2 600 emplois d'enseignants, l'effort inscrit en loi de finances 2001 s'amplifiant au cours des années 2002 et 2003 ;

- 3 000 emplois d'IATOS.

CRÉATIONS D'EMPLOIS INSCRITES AU PLAN PLURIANNUEL (2001-2003)

 

2001

2002

2003

 

Total des créations

2001/2003

Enseignants-chercheurs

Personnels ATOS & ITA

Attachés temporaires d'enseignement et de recherche (ATER sur crédits)

300

1 000

300

700

1 000

300

700

1 000

300

 

1 700

3 000

900

TOTAL ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

1 600

2 000

2 000

 

5 600

S'agissant de la programmation du recrutement des enseignants-chercheurs, près de 3 600 postes seront mis au concours au cours de chacune des trois années du plan, contre 3 200 en 2000. Cette progression s'inscrit dans la logique de la programmation de la gestion des emplois scientifiques menée en coordination avec le ministère de la recherche, mais ne tient pas compte de la politique des universités pour mettre au concours des emplois d'enseignants qui sont utilisés aujourd'hui pour rémunérer des personnels non permanents (enseignants invités, ATER).

La commission observe par ailleurs que la pyramide des âges des enseignants de l'enseignement supérieur est sensiblement différente de celle des enseignants des premier et second degrés : l'augmentation des recrutements d'enseignants-chercheurs entre 2001 et 2005 résulte moins directement de départs nombreux à la retraite, qui ne se produiront qu'au cours des années suivantes.

B. UNE HAUSSE ATTENDUE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT

1. Des moyens nouveaux

Les moyens nouveaux prévus pour 2002 devraient permettre d'assurer le rattrapage des crédits de fonctionnement pour les établissements d'enseignement supérieur sous-dotés.

Dans ce cadre, les crédits inscrits au chapitre 36-11 « Enseignement supérieur et recherche. Subventions de fonctionnement », augmentent de 83,89 millions d'euros (550,3 millions de francs), soit une hausse de 7,8 % par rapport à 2001.

Pour les établissements d'enseignement supérieur, les moyens nouveaux augmentent 2,5 fois plus que ces trois dernières années et représentent 71,2 millions d'euros, soit 467,04 millions de francs ; 6,03 millions d'euros, soit 39,54 millions de francs pour l'article 20 des bibliothèques et des musées.

Une partie des crédits de fonctionnement des établissements, 2,13 millions d'euros, soit 14 millions de francs, est réservée au financement de l'expérimentation de dévolution du patrimoine à certains établissements.

Un effort a par ailleurs été réalisé pour les relations internationales (2,46 millions d'euros, soit 16,12 millions de francs), notamment pour le financement des universités européennes d'été.

Enfin, 1,20 million d'euros, soit 7,87 millions de francs sont prévus pour l'établissement public du musée du quai Branly, 1,21 million d'euros, soit 7,95 millions de francs pour l'institut national de recherche pédagogique, 0,07 million d'euros, soit 0,44 million de francs pour l'établissement public du campus de Jussieu et 1,16 million d'euros, soit 7,6 millions de francs pour le conservatoire national des arts et métiers et la formation professionnelle et continue.

2. Un rattrapage nécessaire pour les universités sous-dotées

Si ces moyens nouveaux permettront d'améliorer les conditions de fonctionnement des universités, ils autoriseront aussi un rattrapage en faveur des établissements sous-dotés, notamment dans les filières littéraires et de sciences humaines et sociales.

Ce rattrapage était préconisé par le rapport Laugénie, remis au ministre en mai dernier, qui soulignait la nécessité d'une adaptation du système dit San Remo de répartition des moyens entre les établissements, dont l'objet est de mesurer les besoins théoriques en personnels et en crédits de fonctionnement des universités. Les critères de répartition devraient ainsi être plus équitables et adaptés, tandis qu'un renforcement des mécanismes de compensation ou de péréquation est susceptible d'être mis en place.

Il serait par ailleurs souhaitable que les règles de répartition des crédits prennent en compte une véritable évaluation des établissements et des indicateurs d'objectifs.

Devant votre commission, le ministre a indiqué que les filières littéraires devraient bénéficier, au titre du rattrapage, d'une dotation supplémentaire de 500 millions de francs.

Elle ne peut que se féliciter d'une telle augmentation des subventions de fonctionnement (7,8 %), alors que ces crédits n'avaient progressé en moyenne que de 4,6 % pour chacune des cinq années précédentes.

On rappellera que les subventions de fonctionnement représentent environ 44 % des ressources des universités et qu'un septième de celles-ci est attribué au titre de la politique contractuelle entre l'Etat et les établissements. A cet égard, la commission ne peut que partager les observations de la Cour des comptes qui dénonce l'insuffisance de l'évaluation de cette politique contractuelle, celle-ci ne permettant pas d'apprécier de manière satisfaisante l'emploi des moyens contractualisés au regard des objectifs et priorités définis.

C. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS D'INVESTISSEMENT

Le montant total des crédits prévus en 2002 pour les dépenses en capital s'élève à 904,15 millions d'euros (5,93 milliards de francs) en autorisations de programme et à 723,4 millions d'euros (4,74 milliards de francs) en crédits de paiement.

Le projet de budget pour 2002 a pour objectif d'accélérer les contrats de plan Etat-Régions, notamment en région parisienne et privilégie la maintenance des bâtiments et la recherche universitaire.

Afin d'accélérer la mise en oeuvre du plan de mise en sécurité des établissements, la totalité des autorisations de programme correspondantes sera ouverte en loi de finances rectificative 2001.

Le volume global des crédits de paiement a été recalibré pour les CPER ou les grands travaux en fonction du rythme effectif des paiements : le montant des crédits passe ainsi de 840 millions d'euros (5,495 milliards de francs) à 720 millions d'euros (4,745 milliards de francs).

1. Les priorités pour 2002

a) Une augmentation des autorisations de programme construction et premier équipement

Le montant des autorisations de programme prévu en 2002 au titre des engagements pris par l'Etat dans le cadre du volet enseignement supérieur des contrats de plan Etat Régions (CPER) 2000-2006 est en progression par rapport à 2001. Ainsi, aux 313,59 millions d'euros (2,057 milliards de francs) correspondant aux autorisations de programme inscrites en 2001 se substitue une ouverture d'autorisations de programme de 363,65 millions d'euros (2,385 milliards de francs), soit une augmentation de 16 %.

Ces crédits permettront de prendre en compte l'accélération de la mise en oeuvre des CPER, notamment en Île-de-France (ZAC Paris Rive gauche, restructuration du centre Assas).

b) L'accélération du plan sécurité et maintenance

Afin d'accélérer la mise en oeuvre du plan sécurité (410 millions d'euros soit 2,7 milliards de francs), l'ouverture de l'intégralité des autorisations de programme, soit 260 millions d'euros (1,728 milliard de francs) en loi de finances rectificative 2001, permettra aux établissements de réaliser leur programmation et de disposer des autorisations budgétaires pour pouvoir passer leurs marchés. Par ailleurs, le montant des crédits de paiements à ce titre s'élèvera en 2002 à près de 76,22 millions d'euros (500 millions de francs).

Dans le même temps, un effort est réalisé pour la maintenance, le montant des crédits prévus passant de 126,53 millions d'euros (830 millions de francs) en 2001 à un peu plus de 139,33 millions d'euros (914 millions de francs), auxquels il convient d'ajouter les 2,13 millions d'euros (14 millions de francs) au titre de l'expérimentation de la dévolution du patrimoine à certains établissements.

c) Les grands travaux

Les grands travaux (établissement public du campus de Jussieu, Muséum national d'histoire naturelle, établissement public du musée du quai Branly) mobiliseront 71 millions d'euros, soit 466 millions de francs en autorisations de programme et 72,1 millions d'euros, soit 473 millions de francs, en crédits de paiement.

d) La recherche universitaire

Après l'augmentation de 2001 (10,2 %), la subvention d'équipement de la recherche universitaire est augmentée de 5,9 % passant de 312,1 millions d'euros d'autorisations de programme (2,04 milliards de francs) à 330,4 millions d'euros (2,16 milliards de francs).

2. Une gestion peu satisfaisante des crédits d'investissement

Dans son rapport pour l'année 2000 sur l'exécution des lois de finances, la Cour des comptes signale que les conditions d'utilisation des crédits affectés aux constructions universitaires ne cessent de se dégrader, le niveau des reports atteignant en 2000 un montant égal à celui des dotations initiales.

De 1997 à 2000, les crédits de paiement disponibles sous l'effet de reports croissants, augmentent de 23 % en dépit d'un ajustement à la baisse des dotations initiales et le taux de consommation des dépenses se réduit en quatre ans de 75 % à 50 % ; d'après la Cour, cette sous-utilisation des moyens traduit aussi une maîtrise d'ouvrage défaillante et tend à retarder la mise en oeuvre des travaux et la consommation des crédits : il faut en moyenne deux ans et demi pour engager des autorisations de programme du fait d'une insuffisante finalisation des projets et d'un suivi approximatif par l'administration centrale de la gestion des crédits en région.

En conséquence, les crédits de paiement demandés pour la construction de bâtiment ont été recalibrés et enregistreront une baisse de 45 % en 2002, alors qu'ils progressaient encore de 7 % en 2001.

Compte tenu de la lourdeur du système de programmation des constructions universitaires, qui se traduit par un retard excessif dans la consommation des crédits de paiement, il apparaît indispensable d'engager une réflexion sur le contrôle de la mise en oeuvre des CPER, notamment au titre de la maîtrise d'ouvrage et de procéder à un réexamen du dispositif financier et fiscal.

A l'initiative de son président, M. Jacques Valade, votre commission a décidé de créer une mission d'information sur le patrimoine immobilier universitaire, qui serait notamment chargée d'établir un état des lieux, d'examiner les problèmes de maintenance et de développement des constructions et d'étudier les relations entre l'Etat, les collectivités territoriales et les établissements universitaires au travers du mécanisme des contrats de plan Etat-régions.

EVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU CHAPITRE 56-10
CONSTRUCTIONS SOUS MAITRISE D'OUVRAGE ETAT

(en millions d'euros)

LFI

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Crédits de paiement

197

141

132

70

92

74

Evolution

 

- 27,9  %

- 5,9  %

- 47,6  %

+ 31,5  %

- 20,0  %

II. UNE DÉMOCRATISATION DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR A RELATIVISER

S'il convient de se féliciter que l'université ne soit pas restée à l'écart de l'explosion démographique des années 80, force est cependant de s'interroger sur les conditions d'accueil des nouveaux étudiants, notamment dans les premiers cycles, et au regard de la stagnation des effectifs qui devraient en théorie permettre d'améliorer l'encadrement sur le plan qualitatif.

Il conviendra également de se demander si le système d'aides aux étudiants, alors que le plan social étudiant est arrivé à son terme, reste pertinent et comment les filières les plus sélectives pourraient davantage s'ouvrir aux bacheliers et étudiants méritants.

A. L'ÉVOLUTION DES EFFECTIFS ÉTUDIANTS : UNE DÉCROISSANCE DES FLUX D'ENTRÉE, UNE STABILISATION DU « STOCK »

ÉVOLUTION GÉNÉRALE DES EFFECTIFS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

(en milliers)

Année universitaire

1992-1993

1993-1994

1994-1995

1995-1996

1996-1997

1997-1998

1998-1999

1999-2000

2000-2001

2001-2002

2002-2003

Effectifs dépendants du budget de l'enseignement supérieur

dont IUT

dont IUFM

1 387

85

59

1 504

93

75

1 554

99

83

1 591

103

86

1 575

109

86

1 547

113

83

1 526

115

82

1 523

117

82

1 529

119

80

1 538

nc

nc

1 544

nc

nc

Nombre total d'étudiants

1 957

2 080

2 134

2 169

2 155

2 132

2 119

2 128

2 143

2 160

nc

Source : ministère de l'éducation nationale

(prévisions pour les années universitaires 2001-2002 et 2002-2003)

1. Une légère augmentation des effectifs en 2001 et 2002

En raison d'une progression générale des effectifs de 0,4 % dans les principales filières de l'enseignement supérieur à la rentrée 2000, le nombre d'étudiants en université (dont les IUT), IUFM, écoles d'ingénieurs, STS et CPGE s'élevait à 1 885 100.

Le nombre global d'inscriptions devrait encore légèrement augmenter (+ 10 000 en 2001 et + 8 000 en 2002). Le fléchissement du nombre de bacheliers, lié à l'évolution démographique, leur permettrait d'être mieux accueillis dans les filières sélectives (IUT, STS et CPGE) et leur taux de poursuite d'études progresserait. Grâce au développement des licences professionnelles, le deuxième cycle universitaire accueillerait plus d'étudiants et les effectifs du troisième cycle se maintiendraient à court terme.

2. Des prévisions contrastées selon les filières

En 2001 et 2002, le nombre de bacheliers devrait baisser et, dans le même temps, le nombre de places offertes en IUT, CPGE et STS devrait progresser. La « concurrence » serait moins importante dans ces filières sélectives et les bacheliers seraient relativement plus nombreux à pouvoir s'y inscrire.

Les bacheliers généraux seraient ainsi relativement plus nombreux à entrer en IUT (+ 0,5 point en 2001 après + 0,3 en 2000) et en CPGE (+ 0,5 point après une stabilité en 2000), tandis que les STS accueilleraient relativement plus de bacheliers technologiques (+ 1,7 point en 2001 et + 0,7 point en 2002 après une baisse de 0,4 point en 2000).

A l'université, hors IUT, la baisse des taux de poursuite des bacheliers généraux et technologiques se prolongerait en 2001 et 2002, mais serait moins prononcée (- 1,2 puis - 0,4 point après une baisse de 1,9 point en 2000). Pour les bacheliers généraux, la baisse du taux de poursuite d'études proviendrait du moindre attrait des sciences pour les bacheliers scientifiques (- 1 point en 2001), et des disciplines littéraires pour les bacheliers L (- 0,2 point en 2001). Les nouveaux bacheliers technologiques seraient, eux aussi, moins attirés par les disciplines littéraires.

Ces hypothèses d'orientation après le baccalauréat conduisent, sur le court terme, à une diminution sensible du nombre d'entrants dans les principales filières du supérieur en 2001 et 2002 (successivement - 8 600 puis - 2 000 étudiants), conséquence de la baisse importante du nombre de bacheliers. Cependant, c'est essentiellement à l'université, hors IUT, qu'ils seraient moins nombreux.

3. Une évolution diverse selon les cycles de formation

La baisse globale du nombre d'inscrits en premier cycle des principales filières du supérieur s'accentuerait en 2001 et 2002 (- 0,6 % puis - 0,8 %). Les tendances observées en 2000 se retrouveraient : baisse en université hors IUT, stabilité en CPGE et STS et progression en IUT.

Après trois années de baisse, le nombre d'étudiants en deuxième cycle a légèrement progressé en 2000 (+ 0,7 %), particulièrement en Sciences économiques et Administration Economique et Sociale -AES- (+ 5,9 %). Cette hausse est la conséquence d'une croissance de 19,7 % des entrants directs (première inscription à l'université en deuxième cycle), soit + 4 800 étudiants, et des arrivées d'IUT (+ 2 200 étudiants). Ces progressions s'expliquent vraisemblablement par la mise en place des licences professionnelles (4 400 étudiants s'y sont inscrits à la rentrée 2000). En revanche, le taux d'accès global en deuxième cycle diminue de 1,7 point.

Quant aux effectifs de troisième cycle, ils progressent pour la 3ème année consécutive, et encore plus fortement qu'en 1999 (+ 3,9 %).

Ces tendances, sur les deuxième et troisième cycles, ont été prolongées pour les deux rentrées à venir. Grâce au développement des licences professionnelles, les effectifs du deuxième cycle progresseraient successivement de 1,4 % puis 1,9 %. La croissance du nombre d'étudiants en troisième cycle devrait légèrement s'atténuer pour atteindre 2 % en 2002.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS PAR FILIÈRES ET PAR CYCLES DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

FILIERES DE FORMATION

CONSTAT

PRÉVISION

1995-1996

1996-1997

1997-1998

1998-1999

1999-2000

2000-2001

2001-2002

2002-2003

IUT

103 092

108 587

112 857

114 587

117 407

119 246

122 200

123 300

1er cycle

686 353

656 052

631 282

616 493

606 320

600 223

590 700

581 700

2ème cycle

490 090

496 029

494 423

487 621

484 243

487 583

494 500

504 000

3ème cycle

206 049

208 755

205 477

205 694

211 665

219 881

225 300

229 700

Formations ing. universitaires

24 186

24 839

25 979

27 282

29 378

30 795

32 000

33 200

UNIVERSITES*

1 382 492

1 360 836

1 331 182

1 309 808

1 302 228

1 307 687

1 310 500

1 315 400

Instituts ou écoles d'ingénieurs indépendantes

19 650

19 807

20 239

21 260

20 962

21 742

22 500

23 200

Sous-total Ens. Sup.**

1 505 234

1 489 230

1 464 278

1 445 655

1 440 597

1 448 675

1 455 200

1 461 900

IUFM

86 068

85 885

83 134

81 602

82 184

80 373

82 500

82 500

TOTAL Ens. Sup

1 591 302

1 575 115

1 547 412

1 527 257

1 522 781

1 529 048

1 537 700

1 544 400

Autres formations d'ing.

31 804

32 195

32 880

34 412

35 411

36 866

38 400

40 000

CPGE

70 288

72 656

73 102

71 373

70 855

70 263

70 100

70 200

STS

236 426

242 094

245 325

246 595

248 877

248 889

249 300

248 900

TOTAL GENERAL

1 929 820

1 922 060

1 898 719

1 879 637

1 877 924

1 885 066

1 895 500

1 903 500

* hors IUT y compris ingénieurs universitaires

**UNIVERSITES (y compris ingénieurs universitaires) + IUT+ Instituts ou Ecoles d'ingénieur indépendantes

PRÉVISIONS D'EFFECTIFS D'ÉTUDIANTS DES UNIVERSITÉS, PAR DISCIPLINE

Disciplines

Constat

Prévisions

1995-96

1996-97

1997-98

1998-99

1999-2000

2000-2001

2001-2002

2002-2003

Droit

197 664

191 940

186 356

183 839

184 586

182 542

181 600

180 600

Sciences Economiques, AES

161 709

156 116

153 327

153 171

158 135

165 329

173 000

180 600

Lettres et Sciences Humaines

529 412

522 887

512 449

502 498

493 797

489 850

486 200

482 200

Sciences exactes et naturelles (1)

320 346

315 195

302 755

289 712

283 709

284 156

284 400

285 800

STAPS

20 549

27 698

33 491

38 769

42 877

45 141

45 500

46 300

Santé (2)

152 811

147 000

142 803

141 819

139 124

140 669

139 800

139 900

TOTAL GENERAL

1 382 492

1 360 836

1 331 182

1 309 808

1 302 228

1 307 687

1 310 500

1 315 400

(1) Y compris formations d'ingénieurs.

(2) Médecine, pharmacie, odontologie.

4. Les projections à dix ans des effectifs d'étudiants : une démocratisation universitaire achevée ?

Les projections à dix ans élaborées par le ministère ne portent que sur quatre principales filières du supérieur, les effectifs d'IUFM et d'écoles d'ingénieurs étant exclus de cet exercice à long terme.

L'évolution de la population étudiante dépend, pour une grande part, du flux annuel d'arrivée de nouveaux bacheliers et des orientations choisies. Le nombre de nouveaux bacheliers est estimé à partir des effectifs des classes de terminales par série et prend en compte les variations démographiques.

a) Le taux d'accueil des bacheliers généraux et technologiques

Après une baisse de 2,1 points en 2000, le taux d'accueil des bacheliers généraux et technologiques dans les principales filières du supérieur augmenterait de 0,5 point pendant deux ans. En effet, la diminution du nombre de bacheliers et les ouvertures prévues de classes en IUT, STS et CPGE devraient réduire la «concurrence» à l'entrée de ces filières sélectives. Jusqu'en 2005, la tendance à la baisse des taux de poursuite en université ne serait plus compensée par des entrées relativement plus nombreuses en filières sélectives et le taux de poursuite global fléchirait pour se stabiliser ensuite au niveau de celui de l'année 2000.

Compte tenu de l'évolution du nombre de bacheliers et des taux d'accueil sur 10 ans, il y aurait 10 600 jeunes de moins en 2010 qu'en 2000 qui entreraient dans les quatre principales filières du supérieur. Cette baisse toucherait essentiellement les universités hors IUT. Elle serait importante les deux premières années, puis l'augmentation du nombre de bacheliers généraux et technologiques se traduirait par une progression des flux d'entrée en 2003 et 2004. Après une période de stabilité, l'effectif des nouveaux entrants fléchirait à nouveau à partir de 2008.

b) Les filières sélectives

En termes de nombre total d'étudiants, les filières sélectives, dans leur ensemble, verraient leurs effectifs augmenter de 5 700 étudiants sur 10 ans. C'est essentiellement en IUT et pendant les cinq premières années que les effectifs progresseraient.

c) L'évolution des effectifs universitaires selon les cycles et les disciplines

Le nombre d'étudiants en université hors IUT progresserait à peine, en moyenne sur la période de projection et cette filière accueillerait 1 800 étudiants de plus en 2010 (+0,1%). Au total, les effectifs universitaires, hors IUT, pourraient s'établir aux environs de 1 310 000.

Cependant, les effectifs du premier cycle universitaire diminueraient les trois premières années (- 6 800 étudiants par an, en moyenne, sur 3 ans). Puis ce cycle connaîtrait 5 années de stabilité avant de décroître à nouveau, en fin de période. Au total, il y aurait 22 200 étudiants de moins en 1er cycle, en 2010 par rapport à 2000.

Ce mouvement à la baisse ne se retrouverait pas dans les deux autres cycles : en 2010, il y aurait 10 400 jeunes de plus qu'en 2000, poursuivant des études en deuxième cycle universitaire et le nombre d'étudiants inscrits en troisième cycle serait plus élevé de 13 600.

Sous l'angle des disciplines, les effectifs devraient progresser fortement en sciences économiques et AES (+ 14,6 % sur 10 ans) et, dans une moindre mesure, en Sciences (+ 1,9 %) et en Staps (+ 1,3 %). En revanche, les formations littéraires verront sans doute leurs effectifs totaux diminuer (-  4,9 % sur 10 ans).

Dans l'ensemble, les quatre principales filières de l'enseignement supérieur compteraient 7 500 étudiants de plus en 2010, avec des progressions d'effectifs importantes en IUT, en 2ème et 3ème cycles universitaires.

PROJECTIONS D'EFFECTIFS DANS LES PRINCIPALES FILIÈRES DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

 

1990

1995

2000*

2001

2002

2005

2010

Université (hors IUT et IUFM)

1 108 456

1 382 492

1 307 687

1 310 500

1 315 400

1 315 600

1 309 500

- dont premier cycle

549 334

686 353

600 223

590 700

581 700

582 100

578 000

- dont deuxième cycle

376 011

490 090

487 583

494 500

504 000

497 400

498 000

- dont troisième cycle

183 111

206 049

219 881

225 300

229 700

236 100

233 500

 
 
 
 
 
 
 
 

IUT

74 328

103 092

119 246

122 200

123 300

125 100

124 500

- dont IUT secondaire

35 504

47 256

51 917

53 200

53 800

54 600

54 300

- dont IUT tertiaire

38 824

55 836

67 329

69 000

69 500

70 500

70 200

 
 
 
 
 
 
 
 

CPGE

64 514

70 288

70 263

70 100

70 200

71 200

70 600

 
 
 
 
 
 
 
 

STS

204 920

236 426

248 889

249 300

248 900

251 200

249 000

- dont STS production

63 809

87 049

89 686

89 700

89 800

89 900

89 000

- dont STS services (**)

141 111

149 377

159 203

159 600

159 100

161 300

160 000

Ensemble

1 452 218

1 792 298

1 746 085

1 752 100

1 757 800

1 763 100

1 753 600

EFFECTIFS UNIVERSITAIRES PAR DISCIPLINE

 

1990

1995

2000*

2001

2002

2005

2010

Droit

161 004

197 664

182 542

181 600

180 600

179 400

178 600

Sc. Eco., AES

126 907

161 709

165 329

173 000

180 600

189 600

189 500

Lettres, Sc. Humaines

410 739

529 412

489 850

486 200

482 300

471 500

466 000

Sciences

245 025

320 346

284 156

284 400

285 800

288 600

289 700

STAPS

11 716

20 549

45 141

45 500

46 300

45 900

45 700

Santé

153 065

152 811

140 669

139 800

139 800

140 600

140 000

Toutes disciplines

1 108 456

1 382 492

1 307 687

1 310 500

1 315 400

1 315 600

1 309 500

B. LES LIMITES DU SYSTÈME D'AIDES AUX ÉTUDIANTS

Après avoir rappelé les derniers développements du plan social étudiant mis en oeuvre depuis 1998, il conviendra de s'interroger sur l'efficacité du système actuel d'aides aux étudiants.

1. Le bilan du plan social étudiant

Le plan social étudiant visait à créer les conditions d'une meilleure reconnaissance de la place des étudiants dans la société, à leur apporter les bases d'une plus grande indépendance matérielle et morale, tout en leur permettant d'être responsabilisés dans la conduite des politiques et des institutions de la vie étudiante. Sa vocation était d'améliorer significativement, de manière qualitative et quantitative, les conditions de vie étudiante avec l'objectif de parvenir, sur une période de quatre ans (des années universitaires 1998-1999 à 2001-2002), à une proportion de 30 % d'étudiants aidés tout en relevant le montant des bourses de 15 %.

a) Le bilan de la dernière année universitaire

Pour la dernière année universitaire, le bilan du plan social étudiant peut être ainsi résumé :

- le nombre total de boursiers était de 475 502, soit une augmentation de 16 235 bénéficiaires (+ 3,41 % par rapport à 1999-2000) ;

- le nombre de boursiers à taux « zéro » s'élevait à 29 984, soit une augmentation de 147 %. Par ailleurs 8 347 « bourses de cycle », pour le redoublement en deuxième cycle, ont été attribuées ;

- 8 090 allocations d'études ont été attribuées sur un contingent de 9 000 ;

- 200 bourses de mérite ont été attribuées ce qui porte le nombre de boursiers de mérite depuis la rentrée 1998 à 497.

Ces résultats répondent à l'objectif visé pour la troisième année du plan social étudiant, puisque le pourcentage d'étudiants aidés était de 28 % en 2000-2001.

b) Les mesures mises en place à la rentrée 2001

Les mesures prises pour l'année universitaire en cours sont les suivantes :

- relèvement uniforme de 3 % du plafond des ressources pour les six échelons ;

- augmentation du taux des bourses de 8,1 % en moyenne (bourses sur critères sociaux et sur critères universitaires) pour atteindre l'objectif initial du plan social étudiant qui était de parvenir à une augmentation de + 15 % du montant des bourses par rapport à l'année universitaire 1997-1998 ;

- augmentation de 2 000 du nombre d'allocations d'études ;

- augmentation de 200 du nombre de bourses de mérite ;

- augmentation de 10 millions de francs de la participation du ministère au complément Erasmus ;

- création d'une bourse de mobilité destinée aux boursiers sur critères sociaux dans la limite d'un contingent annuel (4 000 bourses), afin de permettre aux étudiants boursiers sur critères sociaux de réaliser leurs projets de mobilité européenne et internationale dans le cadre de leurs études. Le montant mensuel de la bourse de mobilité est de 2 519 francs, ce qui correspond en année complète à une bourse de 5 ème échelon (22 670 francs). Ce montant s'ajoute à celui de la bourse sur critères sociaux initialement accordée, le dispositif pouvant également bénéficier aux étudiants bénéficiaires d'une allocation d'études ou d'une bourse à taux zéro.

En outre, on rappellera que les étudiants inscrits en troisième cycle pouvaient jusqu'à maintenant bénéficier d'une bourse de DESS, allouée en priorité aux étudiants les plus méritants et boursiers sur critères sociaux l'année précédente. Cependant, du fait du contingentement, tous les étudiants précédemment boursiers ne pouvaient pas prétendre à cette aide, alors que c'est à ce niveau d'études que les étudiants ont plus besoin d'autonomie financière.

Afin de remédier à cette situation, il a été proposé pour l'année 2001-2002, à la fois de maintenir le système actuel en conservant un contingent de bourses sur critères universitaires pour le DESS réservé aux étudiants les plus méritants, et en priorité à ceux qui étaient boursiers l'année précédente, mais également d'allouer une bourse sur critères sociaux aux étudiants éligibles à cette aide qui auraient été exclus du contingent.

c) L'évolution des crédits affectés aux bourses universitaires

Les crédits relatifs aux bourses d'enseignement supérieur inscrits sur le chapitre 43-71 article 10 de la section « enseignement supérieur » du budget du ministère de l'éducation nationale ont évolué comme suit :

- budget 1998 : 1 milliard d'euros (6,527 milliards de francs) ;

- budget 1999 : 1,09 milliard d'euros (7,135 milliards de francs) ;

- budget 2000 : 1,19 milliard d'euros (7,811 milliards de francs) ;

- budget 2001 : 1,29 milliard d'euros (8,458 milliards de francs), dont 38,31 millions d'euros (251,3 millions de francs) de mesures nouvelles pour la rentrée universitaire 2001 ;

- projet de budget 2002 : 1,30 milliard d'euros (8,54 milliards de francs), dont 23,17 millions d'euros (152 millions de francs) de mesures nouvelles.

2. Une évolution nécessaire du système d'aides aux étudiants

a) Un ralentissement des dépenses d'action sociale en faveur des étudiants

Votre commission constate que les dépenses d'action sociale enregistrent une progression très ralentie (10,37 milliards de francs, soit 1,581 million d'euros) de 1,3 % en 2002, alors que les crédits correspondants avaient augmenté de 8,2 % en 1999 et en 2000, puis de 6,8 % en 2001, soit un accroissement total de 25 % au cours de la période de mise en place du plan social étudiant.

Ce ralentissement vise surtout les aides directes qui ne progresseront que de 1,2 % en 2002, contre près de 30 % pour la période 1999-2001, alors que l'augmentation des aides indirectes (hébergement, restauration, transport...) en 2002 (1,6 %) est du même ordre que celle des trois années précédentes.

Le tableau ci-après récapitule les principales dépenses d'action sociale en faveur des étudiants au titre du seul budget de l'enseignement supérieur :

(en millions d'euros)

 

LFI 1998

LFI 1999

LFI 2000

LFI 2001

PLF 2002

Aides indirectes (fonctionnement du CNOUS et des CROUS)

253

263

269

265

269

Evolution en  %

+ 0,2

+ 4,0

+ 2,1

- 1,2

+ 1,6

Nombre de lits subventionnés (en milliers) 1

100,1

99,5

99,8

99,4

99,4

Nombre de repas subventionnés (en millions)

63,3

62,1

60,7

 
 

Aides directes (bourses, secours d'étude et contribution de l'Etat aux transports collectifs parisiens)

1002

1094

1197

1299

1315

Evolution en  %

+ 0,7

+ 9,3

+ 9,4

+ 8,5

+ 1,2

Etudiants boursiers (en milliers)

410

454

476

nc

 

Taux d'étudiants boursiers

24,1  %

27,2  %

28,2  %

30,0  %

 

Total pour l'action sociale

1255

1367

1466

1564

1584

Source : ministère de l'éducation nationale

La réalisation des objectifs du plan social étudiants conduit à s'interroger sur une refonte plus profonde du système d'aides sociales.

b) La nécessité de repenser le système d'aides sociales aux étudiants

Comme elle le signale depuis plusieurs années, votre commission regrette qu'aucune initiative véritable n'ait été engagée pour remédier au caractère anti-redistributif du système d'aide sociale aux étudiants, dénoncé notamment depuis 1997 par le rapport Cieutat, et pour réduire la part trop importante des aides attribuées sans conditions de ressources.

Elle constate par ailleurs que le système d'aides aux étudiants (aides au logement majorées, prestations familiales et complément familial versés aux familles, avantages fiscaux divers au titre du quotient familial et de revenus perçus à l'occasion d'emplois occasionnels...) est trop complexe et sans doute moins efficace, comme le montrent les rapports de l'OCDE, que ceux mis en place chez certains de nos voisins.

Elle tient par ailleurs à rappeler que si le tiers des étudiants français bénéficient d'une aide directe, 30 % d'entre-eux sont obligés de travailler pour financer leurs études, et ce au détriment de leur réussite universitaire, comme le note l'Observatoire de la vie étudiante.

Par ailleurs, elle tient à souligner le coût du logement pour les étudiants, et notamment pour ceux qui ne peuvent se loger en résidence universitaire : le montant des bourses ne couvre guère que les dépenses de logement.

Devant votre commission, le ministre a indiqué que la création d'une allocation d'autonomie pour les étudiants dépassait le seul cadre universitaire et que sa mise en place éventuelle entraînerait naturellement une refonte de tous les mécanismes d'aides dont peuvent bénéficier les jeunes.

Même si elle s'interroge sur le principe d'accorder une aide systématique à chaque étudiant, votre commission estime que le dispositif actuel doit impérativement être simplifié et clarifié. Elle attendra avec intérêt les conclusions de la commission nationale pour l'autonomie des jeunes qui doit rendre ses conclusions à la fin de cette année et qui devra se prononcer, au-delà des seuls étudiants, sur le principe de la création d'une allocation d'autonomie pour les jeunes de 18 à 25 ans accordée en contrepartie d'une formation ou d'une activité professionnelle, telles que celle-ci avait été préconisées notamment par le Commissariat général du Plan et par le Conseil économique et social.

C. DES UNIVERSITÉS OFFRANT DES CHANCES DE RÉUSITE TRÈS INÉGALES DANS LES PREMIERS CYCLES

S'il convient de se féliciter de l'accès massif des lauréats au baccalauréat, premier grade universitaire dans les premiers cycles, force est de constater que la réussite de ces étudiants au DEUG est très inégale et varie du simple au triple selon les établissements universitaires et les filières.

1. Un taux de réussite au DEUG très variable selon les universités

a) Le constat

Alors que le taux de réussite au DEUG est souvent décrié, il faut rappeler que parmi les quelque 112 000 étudiants de DEUG, 45,5 % ont obtenu en 1999 leur diplôme en deux ans.

Si le taux de réussite national approche globalement les 80 %, c'est en prenant en compte les 23,3 % d'étudiants qui obtiennent le DEUG en trois ans, les 8,7 % l'obtenant en quatre ans et les 2,2 % en cinq ans... L'enquête par université menée par la direction de la programmation et du développement (DPD) du ministère de l'éducation nationale montre que ce taux national varie de 41,8 % à 100 % selon les établissements, en retenant une période de cinq ans.

L'enquête comparative de la DPD, publiée le 17 octobre dernier, et portant sur les chances de réussite des étudiants à l'issue des deux premières années de DEUG, dessine un tableau très contrasté de nos 81 universités 3( * ) quant à leur efficacité pour compenser les handicaps sociaux ou scolaires des étudiants inscrits dans les premiers cycles universitaires.

Les résultats de l'étude montrent d'abord que les bacheliers scientifiques réussissent mieux que les autres dans toutes les filières, que les étudiants en retard dans leurs études échouent plus fréquemment au DEUG, que les bacheliers généraux réussissent sensiblement mieux que les bacheliers technologiques, alors que les bacheliers professionnels qui ont accès comme les autres à l'université, et qui se recrutent davantage dans les catégories moins favorisées, y connaissent massivement l'échec.

En retenant les exemples extrêmes, l'université de Paris X-Dauphine qui pratique une sélection de ses étudiants affiche un taux de réussite au DEUG en deux ans de 80,7 %, alors que celle de Paris VIII-Saint-Denis, qui accueille un tiers d'étrangers et un quart d'étudiants salariés enregistre un taux de 22,9 %.

Pour les autres établissements, alors que le taux de réussite moyen du DEUG en deux ans est de 45,5 %, la variation est de l'ordre de 5 % autour de ce taux moyen, celui-ci s'élevant à 68,8 % pour les DEUG réussis en trois ans.

Au regard des disciplines, le droit et les sciences sont plus sélectifs que les sciences économiques, les langues, les sciences humaines, les STAPS et les lettres. S'agissant des taux de réussite au DEUG au-delà de deux ans, l'étude constate une réussite élevée dans les universités à dominante scientifique (82,4 % en cinq ans), alors que seuls 39,4 % des étudiants réussissent en deux ans ; pour les études de droit, la sélection est encore plus forte puisqu'elles enregistrent 35,4 % de réussite en deux ans et 68,8 % en cinq ans.

b) Des résultats prenant en compte la « valeur ajoutée » de chaque université

Si l'étude de la DPD révèle que tous les premiers cycles n'offrent pas les mêmes chances aux étudiants, elle s'efforce aussi de mesurer leur « valeur ajoutée » c'est-à-dire l'écart entre le taux de réussite réel et un taux simulé à partir du profil des étudiants (série du bac, retards scolaires...) afin d'évaluer la mobilisation et l'efficacité des universités : Perpignan (+ 23,6), Avignon (+ 22,8), Lyon-II (+ 18,4) arrivent ainsi en tête alors que Paris VIII (- 28), Paris III (- 21,6), Bordeaux IV (- 11,7) et Bordeaux III (- 10,3) ferment la marche.

Si les sciences présentent des résultats relativement homogènes, en droit et en économie, l'écart entre un bachelier de 19 ans et un bachelier plus âgé est de 26 %, alors qu'en lettres et sciences humaines, les résultats sont les plus hétérogènes et les écarts négatifs les plus importants.

2. Des premiers cycles qui restent inchangés pour l'essentiel

Placée par le ministre sous « le signe de la souplesse et de la libération des initiatives », la dernière rentrée universitaire n'a comporté aucun aménagement pédagogique d'importance des premiers cycles universitaires, à l'exception de quelques mesures prises en application du rapport Petit.

Certes, le nombre de DEUG expérimentaux bi ou pluridisciplinaires, qui permettent aux nouveaux étudiants de s'orienter ou de se réorienter vers des parcours plus diversifiés est passé de trois à quinze depuis la rentrée 1999 et six nouveaux DEUG littéraires pluridisciplinaires ont été créés à ce titre.

En outre, trois filières doivent faire l'objet d'une rénovation :

- les sciences économiques, où l'importance des mathématiques serait réduite en s'inspirant des préconisations du rapport Fitoussi ;

- la première année de médecine qui devrait être commune dès 2002 à toutes les professions de santé ;

- les DEUG scientifiques, dont la rénovation engagée dans six universités (Bordeaux I, Grenoble I, Lille I, Littoral, Montpellier II et Paris XI) afin d'endiguer la crise des vocations, commence à porter ses fruits. La diminution des effectifs des filières scientifiques s'est quelque peu ralentie (- 1,2 % à la rentrée 2000 contre - 3,2 % à la rentrée 1999) et grâce aux mesures engagées à titre expérimental (cours en petits groupes, tronc commun en premier cycle, place donnée à l'expérimentation...), le taux de réussite en deux ans a progressé de près de 20 % dans les établissements concernés.

Il convient par ailleurs de noter que, pour inciter les enseignants à innover en DEUG, un label « équipe pédagogique » bénéficiant de crédits particuliers va être créé sur le modèle du label « équipe d'accueil » existant en matière de recherche. Les enseignants-chercheurs pourront faire évoluer leur participation à cette équipe dans leur dossier de promotion, comme le préconise le rapport Espéret.

Enfin, le développement du tutorat en premier cycle est à nouveau présenté comme une innovation, alors que celui-ci constituait l'un des éléments de la réforme pédagogique mise en place par M. François Bayrou.

3. Les observations de la commission

Votre commission constate que ces « mesurettes » ne répondent pas à la gravité des problèmes constatés dans les premiers cycles.

Elle regrette notamment que des formules plus ambitieuses, qui coexisteraient avec les DEUG, de type collèges universitaires décentralisés à forte composante de remédiation scolaire, orientés vers des formations plus professionnalisées et répondant aux besoins d'emploi locaux, n'aient pas été davantage explorées.

En l'absence de toute réforme d'envergure, les premiers cycles risquent d'être de plus en plus délaissés par les enseignants-chercheurs, la recherche universitaire n'y sera plus qu'un souvenir et l'enseignement supérieur véritable ne commencera qu'à la licence.

A cet égard, votre commission remarque que l'étude officielle de la DPD ne fait que confirmer que les premiers cycles ne sont pas en mesure de compenser les handicaps scolaires ou sociaux de leurs étudiants, ce qui n'est d'ailleurs pas leur rôle, mais observe qu'elle ne prend en compte que le profil des étudiants et non pas les caractéristiques de chaque université en matière de locaux, d'équipements et surtout d'encadrement. On peut ainsi faire un lien entre la sous-dotation des universités de lettres, de langues, de sciences humaines et sociales, notamment en équipements informatiques et leurs résultats médiocres.

Lors de son audition, le ministre a estimé que les inégalités constatées par la DPD dans les taux de réussite au DEUG entre les universités devaient être appréhendées avec prudence, même si la valeur ajoutée des établissements permet de prendre en compte la diversité des populations étudiantes accueillies et a rappelé que la vocation des premiers cycles était d'offrir une chance de réussite à tous les bacheliers, quelle que soit leur origine.

Votre commission considère, pour sa part, dans le droit fil des réflexions qu'elle a engagées en 1996 sur les premiers cycles universitaires, qu'un minimum d'orientation et de réorientation des étudiants est nécessaire, et fait trop souvent défaut et que l'encadrement pédagogique en DEUG, qui est de moins en moins le fait des enseignants-chercheurs, doit être renforcé et adapté aux nouveaux étudiants, sauf à voir ceux-ci se fourvoyer dans des études sans issue.

L'étude de la DPD a le mérite de souligner les imperfections d'un système qui conduit trop d'étudiants à passer jusqu'à cinq ans en DEUG dans des filières ne correspondant ni à leurs goûts, ni à leurs aptitudes, ainsi que le caractère hétéroclite de parcours universitaires qui finissent par mettre en cause la notion même de diplôme national.

En conséquence, il convient de s'interroger sur le maintien d'un moule unique qui ignore l'hétérogénéité de la population des bacheliers et d'engager une nécessaire réflexion sur l'avenir des premiers cycles universitaires afin de remédier aux inégalités et au gâchis humain constatés.

D. UNE DÉMOCRATISATION DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR À APPROFONDIR

1. Le constat : une démocratisation très inégale, y compris à l'université

Si l'évolution démographique de ces dernières décennies s'est traduite par une plus grande démocratisation de l'enseignement supérieur, force est de constater que de grandes inégalités persistent entre les filières, alors que la moitié de chaque classe d'âge accède désormais à cet enseignement.

Comme on le sait, les enfants des catégories sociales moins favorisées se retrouvent surtout dans les filières universitaires courtes et techniques tandis que les étudiants plus favorisés sur le plan culturel ou social ont davantage accès aux filières longues et générales.

Sur un plan général, on rappellera que les enfants de familles ouvrières, qui représentent encore 20 % de la population française, ne constituent que 10 % de la population étudiante, alors que les enfants d'enseignants, cadres et professions libérales, qui représentent moins de 10 % de la population globale constituent aujourd'hui 33 % de la population étudiante.

Dans le même sens, les enfants relevant de ces catégories « privilégiées » représentent 32,81 % des étudiants des premiers cycles universitaires et 52,26 % des effectifs des classes préparatoires aux grandes écoles.

Le tableau ci-après indique l'origine socio-professionnelle des étudiants dans les principales filières de l'enseignement supérieur :

(en pourcentage)

 

Total

Université

CGPE

STS

IUT

Agriculteurs

1,87

2,14

1,97

2,81

3,27

Artisans, commerçants, chefs d'entreprise

4,60

7,04

6,93

8,38

8,16

Professions libérales, cadres supérieurs, enseignants

9,04

32,81

52,26

14,23

26,23

Professions intermédiaires

14,35

16,53

15,69

17,31

20,20

Employés

21,46

12,67

8,99

16,61

15,18

Ouvriers

19,76

10,98

5,77

24,63

16,13

Retraités, inactifs

28,93

9,77

7,03

12,63

7,33

Indéterminé

-

8,6

1,35

3,40

3,50

Ces chiffres globaux ne doivent toutefois pas masquer la réalité de la sélection sociale également opérée dans les universités : la proportion d'étudiants issus de milieux moins favorisés diminue au fur et à mesure que le degré d'études s'élève, ce qui relativise l'écart constaté entre les grandes écoles et la seule université.

En effet, alors que les enfants d'employés représentent 14,5 % des étudiants de premier cycle, ils ne sont plus que 7,1 % en troisième cycle. De même, les enfants de familles ouvrières représentent 13,1 % des étudiants en DEUG mais ne sont plus que 4,9 % après la maîtrise.

A l'inverse, près de 40 % des étudiants de médecine et 49 % des étudiants de pharmacie sont des enfants de cadres, alors que ces derniers ne sont que 20 % dans la filière AES.

Le second facteur tient à la réussite scolaire des étudiants qui varie selon leur origine sociale : le taux de réussite au DEUG en deux ans est ainsi de 40,7 % pour les étudiants moins favorisés, de 45 % pour les catégories moyennes et de plus de 50 % pour les étudiants issus de milieux favorisés.

Force est donc de constater que la démocratisation de notre enseignement supérieur, au demeurant relativement satisfaisante sur le plan quantitatif, n'est qu'apparente au niveau de la réussite et que les chiffres globaux dissimulent des inégalités persistantes du fait notamment de la sélectivité des cycles supérieurs de l'université.

2. Les inégalités sociales dans le recrutement des grandes écoles

L'étude menée par la DEP 4( * ) , auprès de l'Ecole polytechnique, l'ENS, l'ENA et HEC publiée en 1995, montre que la proportion d'étudiants de familles modestes (père agriculteur, ouvrier, employé, artisan, commerçant) dans les quatre plus grandes écoles a diminué de manière importante depuis 40 ans : alors que la proportion de ces élèves était de 29 % au début des années 50, elle n'était plus que 9 % au début des années 90.

Ces chiffres doivent évidemment être appréciés au regard de la diminution de la place de ces catégories sociales dans la population française, qui s'est très fortement réduite entre 1950 et 1990.

Il reste qu'un jeune étudiant issu de ces catégories avait 23 fois moins de chances qu'un autre d'intégrer une de ces quatre grandes écoles en 1990, soit une situation comparable à celle observée il y a 40 ans.

Il convient aussi de souligner que le recrutement des grandes écoles est de plus en plus étroit et que le nombre de leurs élèves par rapport à celui des étudiants est de plus en plus faible. Selon le rapport Attali, les écoles d'ingénieurs ne représentent plus que 3,7 % du total des étudiants contre 14 % il y a un siècle ; le nombre de polytechniciens par promotion est aujourd'hui de l'ordre de 400 élèves, contre 250 en 1900, alors que si leur proportion dans la population étudiante était restée la même, il devrait être de près de 50 000.

Le rapport entre le nombre de diplômes des grandes écoles, distribués avec parcimonie et le nombre des diplômes délivrés par les universités, s'est donc considérablement réduit en un siècle et le problème du recrutement social dans les grandes écoles, qui n'a pas évolué depuis les années d'après-guerre, reste donc d'actualité.

3. Les mesures susceptibles d'améliorer la démocratisation de l'enseignement supérieur

a) Un maillage universitaire du territoire plus serré

On sait que les formations de proximité sont moins coûteuses pour les familles que les formations offertes dans les grandes villes universitaires, les transports et le logement étant les deux sources principales de dépenses pour un étudiant. Offrir une formation dans un lieu proche du domicile des parents favorise incontestablement la poursuite d'études dans l'enseignement supérieur.

A titre d'exemple, la commission rappellera que les sections de techniciens supérieurs (STS) sont très largement diffusées sur le territoire : sur un peu plus de 1 800 établissements qui comportent au moins une STS, près de 150 se situent dans des communes de moins de 10 000 habitants et près de 400 dans des communes entre 10 000 et 50 000 habitants. Au total, la moitié des établissements dans lesquels un étudiant peut préparer un BTS sont situés dans une commune de moins de 100 000 habitants.

De même, des départements d'IUT sont implantés dans la quasi-totalité des départements français et répartis sur plus de 170 sites différents, l'ouverture de départements nouveaux se faisant en priorité dans des villes moyennes.

Enfin, les antennes de DEUG, qui ont été très largement délocalisées dans les villes moyennes au cours des dernières années, participent du même souci d'offrir des formations supérieures de proximité.

b) Une plus grande ouverture des grandes écoles

Afin de faire accéder en classes préparatoires, mais également dans les grandes écoles, davantage d'enfants de familles sous représentées, ouvriers, employés, professions intermédiaires, plusieurs mesures sont susceptibles d'être proposées, d'une manière combinée :

- promouvoir les relations entre les lycées dits « prestigieux » et les lycées moins favorisés en permettant aux élèves de ces derniers qui ne comportent pas de CPGE d'y être recrutés sans ségrégation ni allongement de la durée des études. Cet objectif suppose une refonte des procédures actuelles d'admission en classes préparatoires qui éliminent du dispositif les élèves mal informés ;

- faciliter des échanges de professeurs, mener en commun des activités pédagogiques et d'autres activités culturelles et sportives lorsque ces lycées défavorisés disposent de CPGE ;

- développer les cycles préparatoires intégrés aux grandes écoles qui apportent des garanties de poursuite d'études aux élèves. Une telle mesure suppose de s'assurer que le recrutement de ces cycles privilégie les élèves de milieux modestes et que des enseignements complémentaires leur sont dispensés en tant que de besoin ;

- fournir une meilleure information sur les aides financières (bourses de mérite et bourses sur critères sociaux) et faire connaître l'internat comme solution pour l'hébergement. Comme il a été vu, plus de 450 000 étudiants bénéficiaient de bourses sur critères sociaux lors de la dernière année universitaire et 9 000 étudiants se trouvant dans une situation financière particulièrement difficile percevaient une allocation d'études. En revanche, moins de 700 étudiants ont bénéficié depuis 1998 d'une bourse de mérite, ce qui apparaît très insuffisant.

Afin de remédier au flou statistique existant concernant l'accès aux filières sélectives, la Conférence des grandes écoles a engagé une étude sur l'origine sociale de ses étudiants.

4. Une mesure symbolique : l'ouverture de l'IEP de Paris à quelques bacheliers méritants des ZEP

Afin de diversifier et de démocratiser le recrutement de ses étudiants, l'Institut d'études politiques de Paris a mis en place, à la rentrée 2002, une nouvelle procédure de sélection « hors concours », en partenariat avec sept lycées classés en zone ou réseau d'éducation prioritaire, ou présentant des caractéristiques socio-culturelles analogues.

L'opération repose sur une collaboration avec un petit nombre d'établissements volontaires, dont les modalités sont définies dans le cadre de conventions, celles-ci ayant vocation dans un second temps à être étendue à d'autres établissements.

La procédure de sélection retenue suppose de la part des candidats capacités intellectuelles, motivation et engagement. Elle comporte une phase d'admissibilité dont la responsabilité est déléguée aux établissements et une phase d'admission sous la responsabilité de l'IEP de Paris.

a) La phase d'admissibilité

Les proviseurs et les équipes enseignantes des lycées sélectionnés doivent apprécier les qualités et capacités des candidats et établir collégialement une liste de candidats admissibles sur la base des critères suivants : potentiel personnel, progression observée entre la classe de seconde et la terminale, capacité de travail, maîtrise de l'écrit et d'une langue étrangère, curiosité intellectuelle, capacité d'adaptation, motivation et résultats au bac. Ces choix sont précédés par une épreuve se déroulant dans les lycées consistant en la réalisation d'une revue de presse sur un thème choisi par le candidat. Cette revue de presse est complétée par une note de synthèse et une réflexion personnelle, ce travail étant présenté à l'oral par le candidat devant des enseignants et le proviseur de l'établissement.

b) La phase d'admission et les mesures d'accompagnement

Au terme de cette procédure d'admissibilité, les candidats présentent à l'IEP de Paris une épreuve orale d'admission devant un jury composé d'universitaires, de représentants d'entreprises et de membres de la direction de l'Institut. Ce jury fonde sa décision sur le parcours et les résultats scolaires du candidat, son travail écrit (la revue de presse), les résultats au bac, la motivation retenue par le jury d'admissibilité dans les lycées.

Des mesures d'accompagnement sont mises en place en amont sous la forme d'actions d'information et de sensibilisation des lycéens (visites de l'IEP de Paris, rencontres, diffusion d'informations actualisées et personnalisées, modules méthodologiques...). Ce dispositif de soutien spécifique se poursuivra pour les candidats reçus par l'organisation d'un suivi particulier (tutorat notamment) et la mise en place d'aides financières (bourse de mérite annuelle de 40 000 F et aide au logement de 20 000 F).

Sept établissements ont été choisis dans les académies de Créteil, Nancy-Metz et Versailles pour amorcer l'opération. Ils ont été sélectionnés sur recommandation des rectorats dans les zones et les quartiers socialement en difficulté (présence d'un grand nombre de boursiers et taux de catégories socioprofessionnelles défavorisées supérieur à la moyenne nationale).

Un autre critère déterminant a été la motivation des équipes enseignantes et des proviseurs. Ces établissements ont, en effet, mené des politiques d'innovation pédagogique, telles que l'ouverture d'une classe préparatoire aux grandes écoles ou de sections européennes.

c) Une mise au point laborieuse du dispositif

Sans reprendre les observations qu'elle formulait lors de l'examen pour avis du projet de loi portant diverses mesures d'ordre social, éducatif et culturel, dont l'article 14 avait pour objet de conforter les pouvoirs du conseil de direction de l'IEP en matière d'admission des élèves, la commission rappellera brièvement les étapes et les avatars juridiques de l'adoption du dispositif :

- 26 février 2000 : publication d'un projet de convention entre sept lycées de ZEP et l'IEP de Paris afin de pré-sélectionner des candidats ;

- 26 mars : le projet de convention est adopté par le conseil de direction à la quasi-unanimité ;

- 3 avril : une requête en référé visant à suspendre les conventions ZEP est déposée ;

- 20 avril : la requête est rejetée par le tribunal administratif de Paris, alors qu'une requête au fond est également déposée ;

- 28 juin : la loi portant DDOSEC est adoptée, et notamment son article 14 qui conforte les pouvoirs du conseil de direction de l'IEP en matière d'admission des élèves, compte tenu des observations de la commission des affaires culturelles du Sénat, et de son rapporteur pour avis, M. Jacques Valade, qui avait souligné le caractère discriminatoire d'une telle convention ;

- 2 juillet : le Conseil constitutionnel est saisi par 60 sénateurs sur la conformité de plusieurs articles de la loi ;

- 11 juillet : le Conseil constitutionnel valide l'article 14 de la loi en considérant qu'il est « loisible au législateur ... de permettre la diversification de l'accès des élèves du second degré aux formations dispensées par l'IEP ... » à condition que « les modalités particulières que fixera à cette fin, sous le contrôle du juge de la légalité, le conseil de direction de l'Institut, reposent sur des critères objectifs ».

- 3 septembre : le conseil de direction de l'IEP approuve à nouveau, à la quasi unanimité, les conventions avec les lycées situés en ZEP ;

- 13 septembre : 18 étudiants sont admis à Science-Po selon la procédure dérogatoire prévue par les conventions éducation prioritaire.

III. UNE NÉCESSAIRE PROGRAMMATION DES INVESTISSEMENTS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

L'enseignement supérieur est sans doute le seul service public national à bénéficier d'une double programmation pluriannuelle, pour les emplois et les recrutements d'une part, pour les investissements, d'autre part.

La politique d'investissement en faveur de l'enseignement supérieur s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre du plan U3M et des orientations du schéma des services collectifs pour l'enseignement supérieur.

A. LA MISE EN oeUVRE DU PLAN U3M

Succédant au plan Université 2000 qui avait permis entre 1991 et 1999, grâce à un effort partagé entre l'Etat et les collectivités locales, à hauteur de 40 milliards de francs, de remédier aux capacités d'accueil insuffisantes des étudiants, le plan « Université du 3 e millénaire », appelé à couvrir la période 2000-2006 a une ambition plus vaste : outre la construction de locaux universitaires, il vise à restructurer des sites existants, notamment les universités parisiennes, mais aussi à améliorer le logement, la restauration et les bibliothèques universitaires et concerne également la recherche.

1. Le financement du plan U3M et les principales opérations prévues en 2002

Dans le cadre des contrats de plan Etat-Régions établis pour la période 2000-2006, 42,5 milliards de francs seront mobilisés, dont 18,2 milliards provenant de l'Etat.

Le quart de ces crédits sera affecté au logement, à la vie étudiante et aux bibliothèques universitaires.

Avec les CPER et le plan sécurité, le plan U3M absorbe aujourd'hui la totalité des autorisations de programme du budget de l'enseignement supérieur, à l'exception des opérations courantes de maintenance et des subventions d'équipement aux laboratoires universitaires.

En dégageant 358,47 millions d'euros, soit 2,351 milliards de francs de crédits d'investissement pour les constructions universitaires en 2002, c'est-à-dire plus des 3/7 e des engagements prévus pour la période 2000-2006, l'Etat respectera les engagements fixés.

Alors que les deux premières années du plan U3M ont privilégié le lancement des projets, l'année 2002 devrait voir s'engager plusieurs opérations significatives :

- le démarrage des travaux de l'université de Paris VII sur la ZAC rive gauche ;

- la réhabilitation du centre Pierre Mendès-France de l'université de Paris I ;

- la construction de locaux pour l'accueil des étudiants en STAPS de l'Université de Paris XII ;

- le lancement de la réhabilitation du centre d'Assas de l'Université de Paris II ;

- l'extension et la restructuration du campus St-Jérôme à Marseille ;

- la construction de locaux pour l'unité de formation et de recherche STAPS de l'Université d'Aix-Marseille II ;

- la construction du centre inter-universitaire de production multimédia de Strasbourg.

Le plan U3M vise aussi à améliorer la situation des bibliothèques universitaires. Outre une augmentation de la subvention de fonctionnement (39,36 millions de francs) et la création de 150 emplois en 2002, les contrats de plan couvrant la période 2000-2006 prévoient 0,58 milliard d'euros, c'est-à-dire 3,8 milliards de francs pour les bibliothèques, dont près du tiers pour l'Ile-de-France, soit la construction et l'équipement d'environ 300 000 m 2 . Il convient de rappeler que les crédits d'investissement construction et premier équipement en faveur des bibliothèques sont passés de 23,61 à 39,23 millions d'euros entre 2000 et 2001.

2. La répartition des crédits d'investissement du plan U3M selon les régions

Le tableau ci-après retrace par région les investissements du plan U3M inscrits dans les contrats de plan Etat-Régions, tous financeurs confondus, rapportés à la population étudiante régionale et à la population régionale totale :

 

Population étudiante

Population totale en milliers

CPER-U3M en millions de francs

CPER-U3M par étudiant en francs

CPER-U3M par habitant en francs

Alsace

48 399

1 729,8

1 241

25 641

717

Aquitaine

70 866

2 902,4

1 900

26 811

654

Auvergne

29 598

1 307,4

665

22 468

508

Bourgogne

28 128

1 609,5

722

25 668

449

Bretagne

74 913

2 902,6

1 998

26 671

688

Centre

42 646

2 437,4

1 267

29 710

520

Champagne Ardennes

25 442

1 341,4

844

33 173

629

Corse

3 764

256

215

57 120

840

Franche Comté

24 130

1 115,6

720

29 838

645

Ile de France

400 515

10 925,6

9 300

23 220

851

Languedoc Roussillon

64 871

2 293,4

1 530

23 585

667

Limousin

15 173

710

593

39 082

835

Lorraine

58 540

2 308,1

1 450

24 769

628

Midi Pyrénées

82 689

2 548,6

2 150

25 998

843

Nord Pas de Calais

106 499

3 990,2

2 600

24 413

651

Basse Normandie

27 284

1 420,6

823

30 164

579

Haute Normandie

35 825

1 777,4

1 190

33 217

670

Pays de la Loire

64 286

3 218,5

1 900

29 555

590

Picardie

25 968

1 855,9

845

32 540

455

Poitou-Charentes

32 992

1 637,2

1 270

38 494

775

PACA

113 788

4 494,2

3 250

28 562

723

Rhône-Alpes

158 719

5 634,3

3 570

22 493

634

Total métropole

1 535 044

58 416,3

40 043

26 086

685

Le tableau ci-après relatif à la programmation des investissements indique les pourcentages de réalisation des contrats de plan Etat-Région, par région, en 2000 et en 2001.

Régions

% de réalisation
du CPER en 2000

% exécution
des CPER en 2001

Alsace (dont triennal)

16,47

35,05

Aquitaine

16,03

32,24

Auvergne

13,76

25,47

Bourgogne

16,50

31,27

Bretagne

13,66

25,84

Centre

16,66

33,10

Champagne-Ardennes

14,96

28,20

Corse

3,70

17,42

Franche-Comté

11,47

25,93

Languedoc Roussillon

17,68

40,17

Limousin

11,77

24,87

Lorraine

9,45

24,57

Midi-Pyrénées

16,25

31,77

Nord-Pas-de-Calais

10,26

25,02

Basse-Normandie

13,79

26,50

Haute Normandie

15,35

28,76

Pays-de-Loire

13,09

27,32

Picardie

23,04

30,32

Poitou-Charentes

16,54

29,06

PACA

15,23

31,05

Rhône-Alpes

12,31

25,46

Ile-de-France

13,99

27,82

On remarquera que le taux d'exécution des PER de 2001 se situe entre 28 et 40 % selon les régions, à l'exception de la Corse qui se situe très en-dessous du taux moyen.

B. LES ORIENTATIONS DU SCHÉMA DES SERVICES COLLECTIFS POUR L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Conformément à la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, les services collectifs d'enseignement supérieur et de recherche font partie intégrante de la politique d'aménagement du territoire. Un schéma de développement organise les modalités de leur répartition sur le territoire national, dans une perspective de long terme et arrête notamment les orientations pour renforcer les grands ensembles régionaux et les grands axes d'une gestion prévisionnelle des effectifs. Son contenu peut être résumé comme suit :

1. Une lisibilité insuffisante dans l'organisation territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche : deux logiques à concilier

L'absence de politique globale résulte d'abord du poids de l'histoire et de la distinction institutionnelle entre les établissements d'enseignement supérieur et les établissements de recherche. Elle résulte également des différences d'approche dans l'organisation territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche : un système d'enseignement supérieur traditionnellement piloté par une logique de formation, et naturellement enclin à s'implanter sur l'ensemble du territoire pour répondre à la demande sociale, au risque parfois d'une certaine dispersion et d'un manque de taille critique, et un système de recherche fondé sur l'excellence et la nécessité d'une compétitivité reconnue au niveau international, au risque d'une excessive concentration.

2. De nouvelles contraintes

L'ouverture des frontières et la mobilité croissante des étudiants, des enseignants et des chercheurs vont imposer à nos universités d'être reconnues en Europe et dans le monde et soumettre les laboratoires de recherche à une concurrence sur le plan international.

La stabilisation, voire la décroissance des effectifs étudiants, avec le déséquilibre qu'elles induisent entre les filières peut aboutir à une compétition excessive entre les établissements d'enseignement supérieur. Les départs à la retraite de chercheurs, d'enseignants-chercheurs et de personnels techniques et administratifs, qui seront particulièrement importants dans certaines disciplines (la physique, la chimie, les sciences humaines et sociales) et dans certaines zones géographiques (Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur...) risquent également d'entraîner le dépérissement de certains centres scientifiques et des fractures nouvelles entre les territoires.

Dans le même temps, le développement des nouvelles technologies permet de mettre en place un certain nombre de ressources partagées à différentes échelles et accroît les possibilités de mise en réseau de différents sites universitaires autour de centres plus importants.

L'objectif du schéma de services collectifs est ainsi d'éviter l'apparition et le développement de nouveaux déséquilibres, en organisant l'offre d'enseignement supérieur et de recherche sur l'ensemble du territoire et en définissant pour chaque échelle territoriale la forme de service et d'équipement adaptée.

3. Une organisation de l'enseignement supérieur plus cohérente

Cette organisation doit se faire par un développement des réseaux qui ont vocation à mieux articuler les différents niveaux du système d'enseignement supérieur :

Les grands centres universitaires pluridisciplinaires doivent regrouper souvent plusieurs établissements, qui offrent sur l'ensemble des champs disciplinaires des formations supérieures de haut niveau et des laboratoires de recherche dotés des infrastructures nécessaires et répondant aux standards internationaux ; ces centres doivent être compétitifs avec les grandes villes universitaires (Munich, Oxford ou Barcelone) et contribuer au développement des métropoles régionales.

Les autres pôles universitaires sièges d'universités doivent proposer un éventail large de formation, offrir des formations de troisième cycle plus spécialisées et disposer de capacités de recherche sur quelques créneaux d'excellence.

Les implantations universitaires, IUT et antennes universitaires des villes moyennes devront être renforcées en coordination avec la carte des STS : il s'agit moins de créer de nouveaux sites que de structurer les implantations existantes pour renforcer le développement économique local, en s'appuyant sur les formations professionnalisantes, sur l'insertion de ces formations dans le tissu économique local et sur la création de plate-formes technologiques en lien avec les PME-PMI.

4. Une recherche mieux répartie

Le développement des métropoles régionales impose de rééquilibrer le potentiel de recherche sur le territoire, notamment en direction des régions à dynamique universitaire forte où les organismes de recherche restent encore peu implantés : le Nord-Pas-de-Calais ou la Bretagne par exemple. Cette stratégie d'aménagement du territoire repose sur un soutien accru aux équipes scientifiques locales, dès lors qu'elles sont évaluées positivement et qu'elles s'insèrent dans un réseau de centres d'excellence.

Elle s'appuie également sur la mise en place d'une gestion prévisionnelle des effectifs, permettant d'optimiser la répartition disciplinaire et géographique des compétences, sur un rapprochement accru entre les organismes de recherche et les universités et sur l'implantation d'équipements structurants.

5. Un système d'enseignement supérieur et de recherche davantage inséré dans le tissu local

Depuis le plan U2000, l'université est devenue une composante essentielle du développement urbain. Si l'augmentation des capacités d'accueil peut être considérée comme achevée, à l'exception de la région parisienne et de Paris, cette politique de construction doit cependant dans les années à venir, laisser la place au renouvellement, à la rénovation et à la mise en sécurité du patrimoine universitaire. Elle devra contribuer à améliorer la qualité de vie et de travail des étudiants et des personnels (logements étudiants, bibliothèques, équipements culturels, équipements sportifs, vie associative...). Cet objectif constitue, comme il a été vu, un volet important des contrats de Plan Etat-région conclus pour les années 2000-2006.

En outre, il est souhaitable que l'enseignement supérieur et la recherche jouent un rôle croissant dans le développement économique local : la création d' « incubateurs » en lien avec les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, la constitution de centres nationaux de recherche technologique associant laboratoires publics et privés, l'instauration de plates-formes technologiques entre les établissements d'enseignement professionnel, les départements d'IUT et les entreprises devraient y contribuer.

6. Une cohérence territoriale fondée sur la mise en réseau

La mise en réseau des différents centres d'enseignement supérieur et de recherche constitue une priorité pour l'organisation territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Cette mise en réseau suppose une identification des principaux pôles de compétence sur l'ensemble du territoire, quel que soit le domaine considéré (réseau des génopôles, des maisons des sciences de l'homme, des centres de recherche technologique...). Elle passe également par la multiplication des échanges entre les différents centres, au moyen notamment de l'infrastructure de télécommunication à très haut débit que constituera Renater III, qui permettra à tous les sites d'être interconnectés aux réseaux européens du même type.

7. La prise en compte des observations de la délégation du Sénat

Ce schéma a été soumis à une concertation, tant au plan national que régional, notamment avec la délégation du Sénat à l'aménagement et au développement durable du territoire. Des modifications importantes ont été apportées notamment sur l'ouverture internationale, le développement des nouvelles technologies et la formation tout au long de la vie, les regroupements interrégionaux...

Certaines observations faites par la délégation du Sénat ont été prises en compte en particulier celles relatives aux nouvelles technologies et à la culture scientifique et technique, au rôle du CNAM en matière d'accueil de nouveaux publics et à la nécessité de mener des études à caractère prospectif en vue de la révision du schéma. En revanche, les annexes ont été maintenues même si elles ne comportent pas toutes un aspect prospectif ou normatif.

Au total, le schéma n'étant pas un document de programmation mais d'orientation, il ne participe pas directement au processus d'allocation des crédits. Cependant, le projet de loi de finances pour 2002 permet de respecter les engagements des contrats de plan qui couvrent la première période du schéma, maintient une priorité pour l'enseignement supérieur et comporte des mesures qui vont dans le sens d'une programmation des recrutements ou de l'ouverture internationale.

IV. UNE ADAPTATION INÉLUCTABLE DES UNIVERSITÉS AU MONDE ACTUEL

Trop longtemps repliée sur elle-même, l'université doit aujourd'hui impérativement s'ouvrir sur l'extérieur, développer ses potentialités en usant de davantage d'autonomie et accepter une évaluation de ses formations.

A. L'OUVERTURE DU SYSTÈME UNIVERSITAIRE SUR L'EXTÉRIEUR

Cet objectif passe par la construction d'un espace européen de l'enseignement supérieur, c'est-à-dire une harmonisation des cursus universitaires et un développement des échanges étudiants, qui implique notamment de mieux accueillir les étudiants étrangers dans nos universités.

1. Vers l'harmonisation européenne des cursus

a) Le système 3-5-8 : une fragilisation des diplômes intermédiaires ?

Le processus d'harmonisation européenne des cursus d'enseignement supérieur sur le modèle anglo-saxon, engagé à l'initiative de M. Claude Allègre à la Sorbonne et prolongé à Bologne et à Prague s'est progressivement élargi à 29 puis à 32 pays. Il déborde aujourd'hui les limites de l'Union Européenne et se traduit par l'adoption, au niveau des ministres de l'éducation d'orientations qui doivent présider à la mise en place d'un espace européen de l'enseignement supérieur. Dans le même temps, les conférences nationales des présidents d'universités ont constitué, à l'échelle européenne, une association commune, l'Association de l'Université Européenne (AUE), présidée par M. Eric Froment, professeur à l'Université de Lyon.

La principale orientation retenue porte sur la recherche des niveaux de diplômes qui permettent d'organiser de manière plus satisfaisante la mobilité des étudiants en cours et en fin de cursus. Pour les différents pays, ces niveaux de référence ont été définis à bac + 3 (licence ou bachelor), à bac + 5 (mastaire ou master) et à bac + 8 (doctorat).

Des réformes ont été engagées, dans plusieurs pays européens, pour situer les diplômes majeurs par référence à ces trois niveaux.

b) Les incidences pour les diplômes nationaux

Pour la France, ce processus européen d'harmonisation des diplômes a conduit :

- à bac + 3, à réactiver la licence notamment à la faveur d'une campagne d'habilitation qui a permis d'introduire plusieurs centaines de licences professionnelles dans les établissements ;

- à créer le grade de mastaire qui constitue le cadre de référence permettant de « positionner » à bac + 5 divers types de diplômes et notamment les DEA, les DESS et des diplômes d'ingénieur ou les écoles de commerce.

En accédant à la fois aux diplômes concernés et au grade de mastaire, les titulaires de ces titres auront plus de facilité pour faire reconnaître leur niveau soit par des établissements universitaires étrangers, soit par des entreprises étrangères lorsqu'ils sont à la recherche d'un emploi.

Au cours de son intervention devant la conférence des présidents d'université, le 5 juillet 2000, le ministre a proposé aux établissements l'ouverture d'une concertation en vue de simplifier la gamme des diplômes délivrés et de réduire le nombre de ces derniers en privilégiant des intitulés plus lisibles au plan international. En lieu et place du DEA, du DESS et du magistère, il a proposé de créer un mastaire recherche et un mastaire professionnel, voire un mastaire appliqué.

On rappellera que le mastaire créé en juin 1999 par M. Claude Allègre pour harmoniser les diplômes supérieurs européens correspond à cinq années d'études après le baccalauréat. Comme le mastaire est le seul grade qui ne soit pas un diplôme, à la différence du baccalauréat, de la licence ou du doctorat, le ministre a suggéré de rassembler les diplômes universitaires de troisième cycle, DEA et DESS sous l'appellation unique de mastaire, celui devenant dans le même temps un véritable diplôme universitaire. Il a en outre suggéré de simplifier les dénominations des licences en les limitant à une dizaine d'intitulés.

Alors que l'harmonisation européenne des cursus avait pour objectif selon M. Claude Allègre, outre la création du mastaire, de « surligner » les diplômes existants, votre commission constate que ce système risque aussi de fragiliser les diplômes intermédiaires comme le DEUG et la maîtrise.

Elle souligne le manque de clarté, voire la confusion du discours officiel quant aux conséquences de l'harmonisation européenne des cursus sur les diplômes français et exprime la crainte que celle-ci ne mette en cause les diplômes post-baccalauréat (DEUG, DUT et BTS) en deux ans, ainsi que la maîtrise, effectuée en quatre ans.

Elle note en particulier qu'un allongement éventuel d'un an de la durée de la scolarité modifierait radicalement la nature des diplômes des filières sélectives courtes et professionnalisées, dont la vocation première reste l'insertion professionnelle immédiate, même si des diplômés d'IUT et de BTS, de plus en plus nombreux, poursuivent des études supérieures ultérieures.

S'agissant des premiers cycles, un allongement d'un an de la scolarité du DEUG se pose sans doute en d'autres termes, dans la mesure où moins de 50 % des étudiants l'obtiennent en deux ans.

Sans être opposé au principe même de l'harmonisation des cursus, votre commission souhaiterait obtenir des explications claires du ministre quant à l'avenir des diplômes nationaux qui n'entrent pas dans le moule européen.

2. La création d'un diplôme à points cumulables : la nécessité de garde-fous

Les établissements universitaires ont été incités à s'engager à titre expérimental dans un processus d'harmonisation qui suppose la traduction des programmes en unités, sur la base du découpage en crédits ECTS (European credit transfer system). Une circulaire a défini les règles d'accumulation des unités validées permettant aux étudiants de conserver le bénéfice des unités de formation acquises et a formulé des règles de conservation et de compensation.

Une telle formule est destinée à améliorer la fluidité des échanges universitaires internationaux, puisqu'elle devrait permettre de faciliter la reconnaissance des périodes de formations suivies à l'étranger. En outre, elle devrait faciliter une plus grande mobilité entre les périodes de formation effectuées dans des établissements de plusieurs pays mais aussi des alternances entre des périodes d'activité professionnelle et des périodes de formation. Cette pratique du retour périodique dans des cursus d'enseignement s'inscrit par ailleurs dans un projet de formation tout au long de la vie.

Devant la commission, le ministre a présenté ce diplôme à points, qui devrait être généralisé dans les trois ans à venir, comme une mesure phare pour l'enseignement supérieur et a indiqué que cette nouvelle organisation des diplômes, qui ne porte pas atteinte à leur caractère national était destinée à faciliter la mobilité des étudiants, notamment entre universités françaises et européennes, celle-ci étant d'ailleurs encouragée par la création de 12 000 bourses spécifiques, y compris dans le cadre de la formation continue.

Il a par ailleurs rassuré son rapporteur, qui s'inquiétait de la compatibilité de ce système à points avec la réforme pédagogique intervenue en 1997.

On peut cependant craindre qu'à l'occasion de la mise en place expérimentale du système européen de transfert de crédits (ECTS), qui découpe les cursus non plus en années universitaires, mais en unités de compte, les universités en profitent pour remettre en question le droit à la compensation des notes prévu par l'arrêté de 1997 (un étudiant peut en effet compenser une note inférieure à la moyenne par une note supérieure à dix dans une autre discipline) et que le droit à une seconde session d'examen soit remis en cause.

Consciente de la nécessité de développer la mobilité des étudiants entre les universités, qu'elles soient françaises ou étrangères, votre commission exprime également la crainte que la mise en place du système ECTS sans garde-fous porte atteinte à la cohérence des parcours universitaires, en créant une sorte de libre-service des formations universitaires.

A cet égard, elle rappellera le caractère parfois « exotique » du choix par certains étudiants de valeurs libres lors de la mise en place déjà ancienne des DEUG et s'interroge sur les recommandations qui seront données par le ministre pour résoudre le délicat problème de la « conversion » des évaluations, qui sont souvent très dépendantes des approches culturelles nationales.

Alors que le système actuel, tout en laissant aux étudiants une place aux options de leur choix, garantit la cohérence de la formation et l'homogénéité des niveaux sanctionnés par des diplômes nationaux, une organisation en modules, avec un système de points ou de crédits capitalisables, risque de porter atteinte à cette cohérence et de menacer la nécessaire homogénéité des niveaux atteints dans nos universités, voire de mettre en cause le caractère national des diplômes.

Elle souhaiterait obtenir des explications du ministre quant aux modalités de mise en oeuvre de ce diplôme à points, qui semblent susciter de nombreuses interrogations dans nos universités et qui devront rapidement être précisées compte tenu de la généralisation annoncée à court terme du nouveau système.

3. L'université en ligne : l'expérimentation des campus numériques

Les campus numériques doivent permettre de favoriser l'ouverture internationale, la pluridisciplinarité, la formation tout au long de la vie, mais aussi la coopération entre les universités afin notamment de permettre au système universitaire de répondre au défi de l'internationalisation des formations. Dix premiers campus numériques ont ouvert leurs portes à titre expérimental à la dernière rentrée universitaire.

Ces structures nouvelles ne sont pas des établissements autonomes mais des consortiums regroupant des centres de formation professionnelle ou à distance et des universités françaises ou étrangères.

a) Les appels à projets

Constitués à la suite d'un appel à projets lancé par le ministère de l'éducation nationale en 2000 et 2001, ces campus numériques résultent de regroupements entre universités, françaises et/ou étrangers, le CNED, des entreprises privées, éditeurs ou sociétés de service et doivent être en mesure de développer une offre de « formation ouverte et à distance » et de lui donner des prolongements commerciaux, notamment au plan international.

Au total, l'appel à projets a suscité plus de 200 réponses de la part des universités et fait l'objet de plus de 480 conventions de partenariat entre établissements français ou avec des universités étrangères et de 178 partenariats avec des associations et des entreprises privées.

Sur les 117 projets présentés en 2001, 66 ont été retenus dont 27 feront l'objet d'une étude de faisabilité, 39 étant en phase de réalisation.

b) Les formations proposées

Si les ambitions affichées pour cette première rentrée universitaire restent encore modestes, des modules d'économie, de gestion, de sciences, de droit, de médecine ou de sciences de l'éducation seront proposées aux étudiants sous forme de cours en ligne ou en vidéo, en formation initiale et continue avec un système de tutorat.

Ces enseignements en ligne pourront être suivis en complément de cours traditionnels, ou de façon intensive, pour l'obtention de diplômes et ces modèles devraient s'intégrer dans la nouvelle organisation européenne de diplôme à points dite ECTS (European credits transfer system).

Des enseignants de Grenoble, Nice, Paris et Nancy ont ainsi participé à la conception des modules du campus d'économie et de gestion Canege, ouvert à la dernière rentrée universitaire.

c) Une formule encore coûteuse

En 2000, 27 projets avaient déjà été financés à hauteur de 18 millions de francs. L'appel à projet 2001 a été doté de 50 millions de francs, dont 30 millions de francs accordés au titre du budget de l'enseignement supérieur et 20 millions apportés par le Fonds de recherche technologique.

Le ministère de l'emploi et de la solidarité, la DATAR et l'agence universitaire de la francophonie se sont également associés à l'opération des campus numériques en apportant des subventions par projet.

Dans un certain nombre de projets, les universités s'associeront au CNED pour développer le service de télé-accueil des étudiants qui suivront ces formations en ligne.

Au total, l'éducation nationale aura débloqué 11,13 millions d'euros (73 millions de francs) en deux ans pour financer 77 projets.

Votre commission tient à souligner le coût de la formule pour l'éducation nationale, puisqu'elle implique le recrutement de nombreux enseignants pour animer les formations, mais aussi pour les étudiants en ligne : le coût d'une année d'étude au Canege s'élève au moins à 2 000 euros, soit 13 119 francs, sans compter les frais d'équipement et de connexion à internet, c'est-à-dire dix fois plus que le coût moyen d'une année universitaire dans un établissement traditionnel.

4. Un nécessaire développement des échanges d'étudiants

a) Le bilan de l'agence Edufrance : des résultats encore modestes et des moyens trop limités

La création de l'agence Edufrance, en 1998, avait pour objet de faciliter l'accueil des étudiants étrangers dans nos universités en leur proposant des formations et des services d'accueil spécifiques. Ses activités peuvent être ainsi résumées :

(1) Les actions de communication et de promotion

L'agence a participé en 2000 à des manifestations au salon de l'éducation et dans une dizaine de pays d'Amérique du Nord, d'Amérique Latine, d'Asie, en particulier en Inde. Ces actions sont relayées localement par le réseau des 71 « espaces Edufrance » installés dans les ambassades ou les alliances françaises, affectés à l'accueil et à l'information des étudiants étrangers. L'agence a également développé son site internet, une plate-forme d'information et d'orientation et un catalogue général des formations.

(2) L'accueil direct des étudiants étrangers

En 2000, l'agence a pris en charge directement l'accueil en France de 359 étudiants étrangers auxquels elle a proposé un "produit complet" incluant une formation supérieure et les prestations d'accueil proposées par ses partenaires (EGIDE, CNOUS...). Les « produits » vendus ont concerné pour 75 % des formations longues : la moitié de ces formations longues portait sur l'étude du français langue étrangère, pour 20 % sur les universités d'été, et sur le programme regroupant des écoles d'ingénieurs de plusieurs pays européens.

La répartition géographique des actions de l'agence montre l'importance des étudiants d'origine asiatique (226 étudiants, dont 201 chinois, soit 63 % de l'effectif accueilli). Viennent ensuite les étudiants d'Amérique latine (28 %, surtout du Mexique et du Brésil), puis ceux originaires de pays européens (8 %).

(3) L'ingénierie pédagogique

L'agence Edufrance a mis en place en 1999 un département d'ingénierie pédagogique. En 2000, les activités de ce département ont consisté notamment :

- à mener des études de faisabilité concernant des projets bilatéraux avec l'Égypte (Université française d'Égypte), la Côte d'Ivoire (utilisation du télé-enseignement dans les universités) et le Mexique (création d'un centre de formation aux métiers de la plasturgie) ;

- à participer à la semaine du développement humain de la Banque Mondiale en vue de promouvoir l'expertise française auprès des bailleurs de fonds internationaux, de manière à mieux répondre aux appels d'offres en 2001.

Edufrance a également participé à la promotion de l'expertise française, notamment en matière d'enseignement à distance, en proposant un catalogue de produits pédagogiques spécifiques.

Enfin, l'agence a répondu à l'appel d'offre EUMEDIS, lancé par la Commission Européenne en vue de créer un campus électronique réunissant les pays européens et ceux de la rive sud de la méditerranée. A la tête d'un consortium comprenant divers opérateurs européens, dont le CNED, Edufrance joue un rôle logistique d'« ensemblier » afin d'aider ce consortium à gagner l'appel d'offres qui s'élève à 3,5 millions d'euros.

(4) Des perspectives de développement entravées par des moyens trop limités

L'agence Edufrance est confrontée depuis deux ans et demi à la nécessité de se placer sur le marché mondial de l'éducation et d'y réaliser des bénéfices, tout en exerçant une mission de service public de promotion à l'étranger du système éducatif français.

Dans ce contexte, elle a su acquérir une certaine crédibilité, comme en témoigne la progression de ses adhérents : Edufrance est en effet passée de 61 adhérents en 1999 à 132 en 2000, dont 65 universités françaises. L'agence a également contribué à faire venir en France un nombre accru d'étudiants étrangers (128 000 en 1999-2000) alors que ce nombre connaissait une baisse continue depuis plusieurs années (de 136 000 en 1990-1991 à 121 500 en 1998-1999).

En 2001, les missions d'Edufrance ont évolué : l'agence centre plus particulièrement son activité sur la promotion internationale des formations supérieures françaises et sur le recrutement personnalisé d'étudiants étrangers. Le GIP développe également davantage, auprès des établissements, des actions de lancement et d'harmonisation de leurs politiques internationales.

S'agissant de son fonctionnement, l'agence a renforcé son équipe gestionnaire, s'est dotée d'un système budgétaire comptable plus efficace et met actuellement en place un contrôle de gestion.

Pour 2001, le budget primitif de l'agence était de 78,39 millions de francs en recettes, dont 56,55 millions de francs de ressources propres, 19,15 millions de francs de subventions (10 millions de francs du ministère des affaires étrangères, 8,8 millions de francs du ministère de l'éducation nationale et 0,35 million de francs de l'ENSAM), 1,794 million de francs de cotisations des adhérents et 0,9 million de francs de recettes en capital.

En dépenses, la prévision s'élève à 77,43 millions de francs : 48,27 millions de francs de frais issus de l'activité commerciale, 28,37 millions de francs de dépenses de fonctionnement (6,44 millions de francs de dépenses de personnels et 21,93 millions de francs de fonctionnement dont 2,58 millions de francs de frais de déplacement) et 0,79 million de francs de dépenses d'investissement.

En 2002, la dotation budgétaire sera reconduite et s'élèvera à 8,8 millions de francs.

Le personnel de l'agence est constitué de contractuels rémunérés sur fonds propres et d'agents mis à disposition par différents organismes ou administrations. Fin 2000, l'effectif de l'agence était de 27 agents ainsi répartis :

- 11 agents rémunérés sur son budget ;

- 16 agents mis à disposition, dont 3 par le ministère de l'éducation nationale, 2 par le ministère des affaires étrangères , 6 par le CIEP qui dispose de 9 emplois pour Edufrance dont 3 n'ont pas été pourvus en 2000, 5 par d'autres adhérents du GIP (CNAM, ENSAM, Université Paris VI, CCIP, Association Institut Vatel).

L'agence a disposé également d'une enveloppe annuelle de 30 mois de contrats saisonniers et de 400 demi-journées de vacations de collaborateurs extérieurs.

b) Le bilan des universités européennes d'été

Créés en 2000, les universités européennes d'été réunissent, à la suite d'un appel à projet adressé aux établissements d'enseignement supérieur, les étudiants avancés dans leur cursus, ainsi que des enseignants-chercheurs de plusieurs pays européens, pour des activités de formation, auxquelles s'ajoutent des animations culturelles et des activités de découverte du patrimoine. Organisées par les universités ou d'autres établissements, ces universités d'été mettent en oeuvre de nombreux partenariats, dont celui de collectivités territoriales.

Elles sont destinées à promouvoir la mobilité des enseignants et des étudiants à l'échelle européenne.

Dès les sessions 2000, le programme regroupait sur 12 sites, plus de 850 étudiants, dont 53 % provenaient de pays européens, et mobilisait plus de 165 enseignants (dont 30 % provenant de pays européens).

Sur le fondement de l'expérience acquise, et compte tenu du processus d'évaluation relatif aux sessions 2000, le programme des sessions 2001 de ces universités d'été a été élargi à une quarantaine de sites répartis sur le territoire français et a permis de regrouper entre 1 500 et 2 000 étudiants, provenant de France, des autres états européens ou d'autres pays étrangers.

Les sessions 2001 abordent des thèmes mêlant les champs d'enseignement et de recherche, tels que les sciences de la vie, le droit, les lettres et les sciences humaines, les sciences politiques, les technologies de l'information et de la communication, l'histoire, la sociologie, l'anthropologie et la psychologie.

5. Vers une amélioration de l'accueil des étudiants étrangers

Au cours des dernières années, de nombreuses mesures ont été introduites en vue d'améliorer les conditions d'accueil des étudiants étrangers en France. Ces mesures ont notamment porté :

- sur l'amélioration des conditions d'attribution des visas et des titres de séjour pour les étudiants étrangers, ainsi que sur l'élargissement de leurs possibilités d'accès à des emplois à temps partiel en cours de cursus ;

- sur la mise en place de nouveaux dispositifs de bourses de haut niveau dans le cadre du programme Eiffel (300 nouvelles bourses par an, 900 en nombre cumulé pour un budget de l'ordre de 15 millions d'euros) ;

- sur la création de l'Agence Edufrance qui se consacre, comme il a été vu, à la promotion de l'offre française d'enseignement supérieur à l'étranger et qui assure des prestations d'accueil spécifiques pour certains étudiants étrangers.

a) Les propositions du rapport Cohen

A la suite de la mission qui lui a été confiée, le professeur Elie Cohen, ancien président de l'université de Dauphine, a proposé cinquante mesures destinées à améliorer l'accueil des étudiants étrangers. Les propositions s'articulent autour de quatre priorités :

- la première vise à inciter les établissements à formuler une politique de développement de leurs actions internationales et à adopter des mesures d'amélioration des conditions d'accueil des étudiants étrangers. Ces mesures portent à la fois sur la définition d'un plan d'action à l'international, la structuration des services chargés de l'accueil des étudiants étrangers et la généralisation des guichets uniques ou des dépôts groupés de demandes de titres de séjour. Le rapport recommande que la déclaration internationale puisse servir de support à la négociation du contrat quadriennal, non seulement entre les établissements et le ministère de l'éducation nationale, mais également avec le ministère des affaires étrangères. Enfin, le rapport souligne la nécessité de la mise en place d'un système d'information interne aux établissements permettant le suivi des réalisations en matière de mobilité ;

- la deuxième priorité vise à mettre en place, ou à renforcer, les instruments d'information, de coordination, d'orientation et d'évaluation concernant les politiques d'accueil des étudiants étrangers ;

- la troisième priorité porte sur l'amélioration de la chaîne de l'accueil. En amont du cursus, elle propose de porter une attention particulière aux procédures de préinscription, notamment dans le cas des élèves des lycées français de l'étranger, dont les candidatures devraient être traitées de façon plus rapide. A cet égard, le ministre a indiqué à la commission que ces élèves pourront désormais bénéficier d'une préinscription en temps utile, c'est-à-dire dès le mois de février dans les établissements universitaires français. En cours de cursus, les préconisations concernent tant les aspects pédagogiques (généralisation des systèmes de crédits, semestrialisation véritable, effort de lisibilité sur la gamme des diplômes, tutorat) que des aspects administratifs (accès plus facile à un emploi à temps partiel). En aval du cursus, les mesures proposées visent à aider les étudiants étrangers à préparer leur retour dans le pays d'origine grâce à une aide à l'élaboration de projets d'activité ;

- la dernière priorité porte sur l'amélioration de l'hébergement des étudiants étrangers. Le rapport recommande notamment qu'un bilan soit réalisé sur les projets inscrits dans le cadre du plan U3M et que des inflexions soient apportées à ce dernier pour traduire dans les faits le caractère prioritaire reconnu à l'amélioration des conditions d'accueil des étudiants étrangers.

b) Des progrès à accomplir

A la rentrée 1999, 159 000 étudiants étrangers s'étaient inscrits dans un établissement d'enseignement supérieur français. Le nombre d'étudiants étrangers inscrits à l'université a progressé de 6 % lors de l'année 1999-2000.

Comparés à leurs homologues français, les étudiants étrangers optent davantage pour les disciplines littéraires, économiques et de santé, au détriment des sciences et des IUT et suivent plus fréquemment des formations de 3 e cycle, alors qu'ils s'orientaient davantage vers les études scientifiques et médicales, et plus encore vers le troisième cycle il y a une quinzaine d'années.

Entre 1985 et 1999, la part des étudiants africains (49 % en 1999 contre 58 % en 1985) et en particulier maghrébins (28 % contre 33 %) s'est réduite au profit des étudiants européens (30 % contre 17 %) ; par ailleurs, la présence des étudiantes étrangères s'est accrue au cours des quinze dernières années, passant de 34 % en 1985 à 51 % en 1999 5( * ) .

En dépit des progrès enregistrés, notre pays reste néanmoins loin derrière les Etats-Unis (560 000), le Royaume-Uni (350 000), l'Allemagne (200 000) même s'il précède encore l'Australie qui a réussi à attirer 110 000 étudiants étrangers en cinq ans.

L'objectif annoncé par le directeur de l'agence Edufrance est de doubler le nombre de ces étudiants en cinq ans. Outre les conséquences en résultant pour le rayonnement de notre université et la présence française dans le monde, un tel objectif représente également un marché évalué à quelque 18 milliards de francs.

6. Des programmes d'échanges européens à développer

On rappellera pour mémoire que plusieurs programmes européens d'échanges concernent l'enseignement supérieur, notamment le volet Erasmus du programme Socrates, qui a pour objet de développer la mobilité des étudiants et la coopération entre les universités européennes.

Par ailleurs, le programme Tempus apporte un soutien au développement de l'enseignement supérieur des pays d'Europe centrale, tandis que le programme Leonardo Da Vinci porte sur les échanges en matière de formation professionnelle.

En dépit du développement de ces programmes, seuls quelque 17 000 étudiants français font le choix d'étudier chaque année, pendant un semestre ou deux, dans une université européenne.

On notera que le bénéfice d'une allocation Erasmus conduit à reconnaître par l'université d'origine la période d'étude effectuée dans un établissement d'un autre pays de l'Union et que les étudiants bénéficiaires sont dispensés des frais de scolarité dans leur établissement d'accueil : le montant moyen de l'allocation mensuelle est de l'ordre de 820 francs et le ministère de l'éducation nationale complète l'aide communautaire par des crédits qui ne représentaient que 20 millions de francs dans la loi de finances pour 2001, ce qui reste dérisoire.

Les principaux pays de destination pour des étudiants français sont le Royaume-Uni (37 %), l'Espagne (18 %) et l'Allemagne (16 %).

Votre commission ne peut que souhaiter que la mise en place de bourses européennes de mobilité et la mise en oeuvre des futurs diplômes à modules capitalisables contribuent à renforcer ces échanges européens au bénéfice de nos étudiants.

B. UNE NÉCESSAIRE MODERNISATION DES UNIVERSITÉS

L'adaptation de notre système universitaire aux réalités d'aujourd'hui passe nécessairement par une modernisation de leur gestion, le développement de leur autonomie et l'évaluation des établissements.

1. Des responsabilités à développer

a) Une gestion en cours de modernisation

On rappellera que la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur confère aux universités la personnalité morale de droit public et une autonomie pédagogique et scientifique, administrative et financière.

Dix ans après, le décret du 14 janvier 1994 a permis de mettre en place une nouvelle réglementation budgétaire, financière et comptable tendant notamment à réaffirmer le rôle du président de l'université, ordonnateur principal et du conseil d'administration dans la gestion des établissements, dont le budget est par ailleurs complété par un budget de gestion.

Dans le même sens, la refonte des instructions relative à la comptabilité des établissements avait pour objectif de rendre plus lisibles les comptes des universités, notamment en matière d'engagement et d'amortissement et de permettre de créer des services d'activités industrielles et commerciales, en application de la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche.

b) Une autonomie qui reste limitée

La politique menée depuis 1997 vise à renforcer l'autonomie et la responsabilité des universités et de leurs présidents dans le respect des diplômes nationaux, à développer une instance compétente pour la carrière des enseignants-chercheurs et à mieux évaluer les diplômes et la recherche. L'accroissement de l'autonomie des établissements rejoint d'ailleurs la demande formulée par la conférence des présidents d'université (C.P.U.) à son colloque de Lille en mars 2001, dont les suggestions ont recueilli un accord de principe du ministre dans plusieurs domaines.

(1) La gestion des personnels

Une des premières mesures mise en oeuvre dès décembre 1997 a consisté à modifier la procédure de recrutement des enseignants chercheurs, en redonnant le dernier mot aux établissements. Cette mesure s'ajoute à la détermination au niveau de l'établissement de la moitié des contingents de promotion et à la déconcentration vers les établissements d'actes de gestion (ATER, assistants, enseignants associés). En matière indemnitaire, le nouveau régime des primes pédagogiques instaure la détermination des bénéficiaires au niveau de l'établissement et la possibilité de substitution entre primes et décharges, comme c'est déjà le cas concernant les primes pour charges administratives.

Cette déconcentration a également touché les personnels non enseignants avec la création de la commission paritaire d'établissement en 1999.

(2) Le développement des liens avec le monde économique

La loi du 12 juillet 1999 sur la recherche et l'innovation a facilité les conditions de création de structures favorisant les liens avec le monde économique : assouplissement des créations de GIP-filiales et possibilité de créer les services d'activités industrielles et commerciales. Par ailleurs, le décret du 1er août 2000 fixant les conditions dans lesquelles les établissements publics d'enseignement supérieur peuvent transiger et recourir à l'arbitrage, pris en application de l'article 7 de ladite loi, autorise les établissements à transiger afin de mettre fin aux litiges de toute nature les opposant à d'autres personnes publiques privées. L'instauration de ces procédures permet de prévenir certains litiges et de régler le contentieux de manière plus rapide.

(3) Le rôle du contrat d'établissement

Le contrat d'établissement constitue l'instrument essentiel de cohérence entre les projets des établissements et les objectifs nationaux. Depuis 1997, sont incluses dans le contrat d'établissement, les formations doctorales, les relations avec la totalité des organismes de recherche (et non plus seulement celles avec le CNRS) et l'ensemble de la gestion patrimoniale. Une importance particulière est accordée à l'offre de formation, à la gestion prévisionnelle des emplois et des personnels et au développement de l'évaluation des contrats.

(4) Une autonomie domaniale

La responsabilisation des universités touche également le secteur domanial, tant dans les domaines de la maintenance et la sécurité que dans celui des constructions :

- les crédits de maintenance sont alloués aux établissements dans le cadre de leur contrat quadriennal avec l'Etat, ce qui favorise une approche globale des besoins et des travaux à réaliser. Le ministère incite les établissements, lors de la préparation du contrat, à élaborer un schéma directeur de maintenance ;

- la répartition des crédits de mise en sécurité (plan sécurité 2000-2006) s'est effectuée sur la base de schémas directeurs de mise en sécurité que les établissements ont dû élaborer en définissant leurs besoins et un échéancier prévisionnel de travaux. Le montant de l'enveloppe allouée à chaque établissement résulte d'une négociation qui a été conduite par les recteurs avec les présidents d'université et qui a également permis de déterminer la participation propre des établissements ;

- les établissements sont invités à adopter une gestion informatisée de leur patrimoine et peuvent à ce titre recevoir un soutien financier du ministère dans le cadre des négociations contractuelles ;

- en matière de construction, les établissements, depuis 1990, peuvent s'ils le souhaitent exercer la maîtrise d'ouvrage de leurs opérations.

c) Un développement souhaitable des relations avec les collectivités territoriales et de la décentralisation

La procédure des CPER, particulièrement depuis le plan Université 2000, a permis d'instituer un partenariat avec les collectivités territoriales, notamment les régions. Le dernier contrat de plan 2000-2006 dans le cadre du schéma U3M en témoigne par l'importance de son montant, par la nature des activités soutenues et par l'implication des collectivités territoriales, notamment la Ville de Paris et la Région Île-de-France qui ont consenti un effort important.

D'une manière générale ce partenariat illustre, comme il a été vu plus haut, le rôle de l'enseignement supérieur et de la recherche, dans le développement économique et urbain du territoire.

S'agissant en revanche du transfert du patrimoine universitaire aux régions, qui a été proposé par le rapport de la commission pour l'avenir de la décentralisation, remis par M. Pierre Mauroy au Premier ministre le 17 octobre 2000, cette option n'a pas été retenue par le ministère.

Votre commission rappellera que le rapport Mauroy, outre la mise à disposition des personnels IATOS aux collectivités territoriales et une représentation des régions aux conseils d'administration des universités, préconisait de transférer aux régions la construction et l'entretien des établissements d'enseignement supérieur, l'Etat conservant la maîtrise de l'implantation des universités, du contenu des enseignements, de la responsabilité des personnels enseignants, des programmes et des diplômes nationaux.

Pour leur part, les présidents d'université ont souhaité que s'instaure progressivement la dévolution du patrimoine aux établissements, afin de donner aux établissements les droits et obligations du propriétaire.

Tout en prenant acte des évolutions et des progrès enregistrés pour adapter l'université aux réalités du moment et pour accroître les responsabilités des établissements, votre commission considère que ces efforts trop timides doivent être poursuivis, et que la véritable garantie de l'efficacité de notre enseignement supérieur passe d'abord par le renforcement de l'autonomie des universités, c'est-à-dire la maîtrise de leurs moyens, y compris des ressources humaines. Cet objectif suppose, en contrepartie, une véritable évaluation des établissements d'enseignement supérieur et de leurs formations.

2. La nécessité d'une véritable évaluation des universités

L'autonomie des universités doit s'accompagner d'une véritable évaluation des résultats des établissements, notamment dans la perspective de l'élaboration des contrats quadriennaux passés entre ces derniers et le ministère.

Force est de constater que cette évaluation est aujourd'hui embryonnaire et que les moyens consacrés à cette action sont dérisoires, notamment par le biais du comité national d'évaluation (CNE) et de l'IGAEN, qui est pourtant chargée, depuis la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur, d'une mission générale d'évaluation, et notamment des formations.

Un nouvel élan devrait être donné à l'évaluation à titre expérimental pour les contrats quadriennaux couvrant la période 2003-2006, qui devraient être évalués par le CNE et l'inspection générale avant leur renégociation ; par ailleurs, l'évaluation des formations, qui a été étendue aux écoles d'ingénieurs en 1998, devrait être étendue aux IUT.

Devant la commission, le ministre a indiqué que le CNE serait profondément rénové, en s'ouvrant notamment à des personnalités étrangères, et que l'autonomie des universités supposait en retour une véritable évaluation dans le cadre d'une politique nationale, la conférence des présidents d'université souhaitant par ailleurs que l'évaluation soit partagée sur la base d'indicateurs fournis par les établissements.

Votre commission considère que ces efforts doivent être poursuivis, non pour établir un classement nécessairement controversé des universités, comme en témoignent les réactions qui ont suivi la publication de l'étude de la DPD sur les chances de réussite des étudiants des premiers cycles dans chacune des universités françaises, mais pour apprécier la véritable « valeur ajoutée » de chaque établissement, en termes de formations dispensées, un tel contrôle étant la contrepartie naturelle des crédits publics qui sont octroyés à chaque université.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenu le mercredi 14 novembre 2001 , sous la présidence de M. Jacques Valade, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Léonce Dupont sur les crédits pour 2002 de l'enseignement supérieur .

Un débat a suivi l'exposé du rapport.

M. Michel Thiollière s'est inquiété des conséquences financières pour les collectivités territoriales des retards enregistrés du fait de l'administration centrale dans le démarrage des travaux universitaires sous maîtrise d'ouvrage d'Etat dans le cadre du CPER, dont l'exécution à une date donnée conditionne l'attribution de crédits européens.

Il a également souligné le dérapage des budgets de construction universitaire par rapport aux prévisions initiales, qui conduit les régions à accroître leur part de financement en raison d'un plafonnement de la participation de l'Etat.

S'appuyant sur l'exemple d'étudiants chinois qui ont été conduits à abandonner rapidement leurs études à l'université de Saint-Etienne, en raison d'une préparation insuffisante, il a estimé que l'accueil des étudiants étrangers dans nos établissements universitaires devrait comporter un dispositif d'accompagnement adapté.

M. Jacques Legendre s'est enquis des aides éventuellement prévues en faveur des écoles d'ingénieurs privées pour alléger la participation financière des élèves et de leur famille.

Rappelant les objectifs assignés à l'agence Edufrance par l'ancien ministre de l'éducation nationale et par l'actuel ministre des affaires étrangères, qui prévoyaient l'accueil dans nos universités de 400 000 à 500 000 étudiants étrangers en quelques années, il a regretté que les moyens trop faibles accordés à l'agence n'aient pas permis de réaliser ces objectifs sans doute trop ambitieux.

Il a par ailleurs fait observer que les conditions d'accueil de nos universités étaient moins attractives qu'au Royaume-Uni, alors que des capacités existent du fait de la stagnation des effectifs étudiants, la France se privant ainsi des retombées, notamment économiques, de l'accueil d'un nombre plus important d'étudiants étrangers.

M. Louis Duvernois a estimé que le système universitaire français pâtissait d'un déficit d'image à l'étranger et qu'il convenait d'harmoniser les cursus universitaires européens.

Soulignant, lui aussi, l'importance de la mission de l'agence Edufrance et les mauvaises conditions d'accueil des étudiants étrangers, il a noté que plusieurs milliers de bacheliers étrangers formés dans le réseau des 500 établissements français à l'étranger seraient susceptibles de poursuivre des études supérieures en France, et que l'agence aurait vocation à assurer l'accompagnement de ces étudiants, en développant un accueil inspiré de celui des universités anglo-saxonnes.

Mme Danièle Pourtaud a estimé que la conclusion du rapporteur pour avis était contradictoire avec la présentation, à bien des égards, positive du projet de budget. Elle a rappelé que l'accélération des dépenses d'investissement à Paris et dans la région Ile-de-France résultait d'un refus initial de participer au financement du plan université 2000, cette attitude étant à l'origine de l'état actuel de délabrement de certaines des universités parisiennes ; elle a estimé que la collaboration aujourd'hui heureusement engagée entre la ville de Paris et la région dans le cadre du plan U3M devrait permettre de remédier à cette situation.

Elle a souhaité obtenir des précisions sur les dysfonctionnements évoqués en matière de maîtrise d'ouvrage et a fait observer que la sous-consommation des crédits d'investissement résultait aussi d'appels d'offres infructueux ou de défaillances d'entreprises.

Elle a par ailleurs noté que l'action de l'agence Edufrance avait permis d'accueillir 3.000 étudiants étrangers supplémentaires au cours des deux dernières années universitaires, ce qui est certes loin des objectifs annoncés, et que son efficacité devait également être appréciée, au-delà des seuls moyens budgétaires, en tenant compte de la politique contractuelle engagée avec les universités françaises, qui doivent en effet se tourner davantage vers l'extérieur et améliorer la qualité de leur accueil, avec l'aide sans doute des collectivités territoriales.

M. Michel Guerry a rappelé que les lycées français à l'étranger scolarisaient 40 % d'élèves étrangers et que certains établissements bilingues accueillaient de nombreux étudiants susceptibles de poursuivre des études supérieures en France à la condition de bénéficier de conditions d'accueil satisfaisantes. Il est convenu que le message de nos universités passait difficilement à l'étranger et a estimé que la seule comparaison significative en termes d'accueil d'étudiants étrangers devait être faite avec l'Allemagne.

S'appuyant sur des informations recueillies lors d'un récent colloque sur la coopération franco-marocaine, M. Jacques Valade, président , a regretté que le processus de sélection des étudiants étrangers susceptibles d'être accueillis en France reste fondé sur la maîtrise de la langue française, au détriment de la volonté exprimée par de nombreux étudiants de suivre des études supérieures dans nos universités, ceux-ci étant susceptibles d'acquérir rapidement une maîtrise suffisante de notre langue avant d'entamer un cursus universitaire. Il a estimé qu'une réflexion devait être engagée sur ce sujet.

Il a par ailleurs souhaité que la commission mette rapidement en place une mission d'information sur le patrimoine immobilier universitaire, qui serait notamment chargée d'établir un état des lieux, d'examiner les problèmes de maintenance et de développement des constructions et d'étudier les relations entre l'Etat, les collectivités territoriales et les établissements universitaires au travers du mécanisme des contrats de Plan Etat-régions.

Répondant à ces interventions, M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a indiqué que la conclusion de son rapport résultait logiquement de l'analyse des insuffisances du projet de budget, celles-ci ayant d'ailleurs été soulignées par la principale organisation représentative des enseignants-chercheurs qui lui a fait part de ses inquiétudes concernant notamment le renouvellement des personnels appelés à partir en retraite dans les années à venir. Il a ensuite apporté les précisions suivantes :

- les défaillances constatées en matière de maîtrise d'ouvrage conduisent à des retards dans la réalisation des travaux et à un dépassement des coûts d'objectifs fixés par l'Etat ; la création d'une mission d'information sur le patrimoine immobilier universitaire apparaît en conséquence particulièrement opportune ;

- les chiffres fournis relatifs à l'accueil des étudiants étrangers visent les inscriptions universitaires et non les effectifs « en stock » ;

- nos universités souffrent en effet d'un déficit d'image à l'étranger, du fait d'une promotion insuffisante de notre système universitaire ;

- le refus de la région Île-de-France et de la Ville de Paris de participer au financement du plan Universités 2000 doit être replacé dans le débat de l'époque sur la répartition des compétences, ce refus s'expliquant aussi par la densité des équipements universitaires parisiens et franciliens, très supérieure à celle constatée en régions ;

- la situation de la France au regard des étudiants étrangers doit en effet plutôt être comparée à celle de l'Allemagne qu'à celle des pays anglo-saxons où les conditions d'accueil « linguistique » ne se posent pas dans les mêmes termes ; il serait envisageable de mettre en place dans nos universités des formations accélérées de français précédant la rentrée universitaire, voire de dispenser certains enseignements en langue étrangère ;

- alors que l'enseignement supérieur conditionne l'avenir et le développement de notre pays, on peut regretter qu'il ne constitue pas une priorité budgétaire du Gouvernement.

M. Jacques Valade, président, a confirmé que la mise en place du plan Universités 2000 avait suscité un large débat sur le problème de la répartition des compétences, et que de nombreuses régions, comme l'Aquitaine, avaient accepté, contraintes et forcées du fait de leur sous-équipement universitaire, de déroger à cette répartition fixée par les lois de décentralisation et de participer au financement de ce programme, comme d'ailleurs elles sont conduites à le faire de manière récurrente, dans d'autres domaines, par exemple ceux des infrastructures routières et des transports.

Au terme de ce débat, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur pour 2002 .

CONCLUSION




1 0,57  % pour les seuls crédits relevant du ministère de l'éducation nationale

La dépense par an et par étudiant en France est de 7 000 dollars contre 9 000 dollars en moyenne dans les grands pays industriels d'Europe

2 S'orienter pour mieux réussir - Sénat n° 81-1996-1997

3 Note d'information - n°1-4-7 - octobre 2001

4 le recrutement social de l'élite scolaire en France - Évolution des inégalités de 1950 à 1990 - DEP - Revue française de sociologie 1995.

La DEP (direction de l'évaluation et de la prospective) est l'ancêtre de l'actuelle DPD (direction de la prévision et du développement) du ministère de l'éducation nationale.

5 Source : DPD - Note d'information 01 - 22 mai 2001


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