IV. L'ARMÉE DE L'AIR FRANÇAISE CONFORTE, EN 2003, SA VALEUR SPÉCIFIQUE AU SEIN DES NATIONS OCCIDENTALES

L'année 2003 a été marquée par la poursuite de l'opération « Licorne », en Côte d'Ivoire, et par l'opération « Artémis », à l'est de la République démocratique du Congo (région de Bunia).

La brièveté de cette dernière opération (mai-septembre 2003) s'est accompagnée d'une organisation humaine et logistique très minutieuse et délicate, du fait de l'éloignement de la zone d'intervention de toute base d'opération.

Un accord a pu être trouvé entre l'Union européenne, puissance intervenante, et l'Ouganda, pour l'utilisation de l'aéroport d'Entébbé.

Cette opération a été menée sous l'égide de la France, qui disposait du statut de nation-cadre. Son bon déroulement, dans des conditions difficiles, a démontré la capacité française à assumer des responsabilités de cet ordre. Lors de son audition par la commission, le général Wolsztynski a rappelé que c'était l'armée de l'air qui avait établit, à cette occasion, un dispositif opérationnel à la fois interarmées et multinational adapté ; il a souligné qu'avaient été ainsi démontré le renforcement des capacités C3R (commandement, contrôle, communication et renseignement) qui confère à la France une autonomie en matière de planification et de conduite des opérations.

1. Des capacités de projection démontrées

Cette avancée concrète rejoint les objectifs à remplir par l'armée de l'air en matière de projection de forces, objectifs fixés tant au niveau national qu'au niveau d'engagement de la France à la Force de réaction rapide de l'OTAN.

a) La participation requise de l'armée de l'air en matière de projection au niveau français

La LPM retient la possibilité d'intervention sur un théâtre extérieur éloigné de 5.000 km ou plus. Dans cette perspective, l'objectif général est de disposer d'une capacité de projection autonome d'une force de réaction immédiate constituée de 1.500 hommes et de leur matériel, déployable en 72 heures.

L'armée de l'air participe à cette force avec la capacité de projection de trois bases aériennes, capables de s'intégrer dans un dispositif interallié avec une centaine d'avions de combat. Cette capacité s'appuie sur les dispositifs adéquats de soutien (C3R, protection, infrastructure).

Cette projection requiert, en outre, des capacités de transport aérien stratégiques (possibilité de se rendre sur le théâtre d'opérations) et tactiques (intra-théâtre).

C'est dans cette perspective que doivent être appréciés les besoins de l'armée de l'air en matière de transport à long rayon d'action, qui doit également prendre en compte la nécessité de disposer d'avions ravitailleurs, nécessaires au déploiement des avions de combat.

L'éventuelle dualité d'emploi des futurs avions ravitailleurs, qui pourraient également posséder une configuration de transport de troupes et de matériels est à inscrire dans cette perspective, avec des acquisitions envisagées postérieurement à l'actuelle LPM, car portant sur les années 2009 à 2012.

b) La participation à une force européenne

Pour satisfaire aux objectifs définis à Helsinki, la France s'est engagée à fournir :

- 75 avions de combat,

- 22 avions embarqués,

- 29 avions de transport à long et moyen rayon d'action,

- 8 avions de ravitaillement en vol,

- et des éléments de commandement et d'évaluation des situations.

La contribution française représente ainsi :

- 25 % des avions de combat (soit 32 % des contributions proposées, car l'objectif n'est réalisé pour l'instant qu'à 79 %),

- 37 % des avions embarqués (65 % des contributions proposées ; objectif réalisé à 57 %),

- 19 % des avions de transport à long et moyen rayon d'action (24 % des contributions proposées, objectif réalisé à 80 %),

- 11 % des avions de ravitaillement en vol (22 % des contributions proposées ; objectif réalisé à 49 %),

- 50 % des éléments de commandement et 20 % des éléments d'évaluation de situation (AWACS).

La contribution en matière d'éléments de commandement et de conduite des opérations place la France en position privilégiée pour revendiquer le rôle de nation cadre. La capacité française de gestion de l'activité aérienne satisfait le minimum requis dans le HFC 3 ( * ) . Les objectifs d'Helsinki comportent trois niveaux :

Niveau 1 : 50 sorties/jour

Niveau 2 : 200 sorties/jour avec renfort de personnel

Niveau 3 : 600 sorties/jour avec renfort de personnel de pays tiers.

Le niveau 3 sera porté à 1.000 sorties/jour en 2005. La France satisfera alors ce niveau de contribution avec le C3M.

2. Une participation soutenue à des exercices nationaux et multinationaux

La participation de l'armée de l'air à des exercices nationaux est décrite dans le tableau suivant :

NOM & TYPE

PARTICIPATION AIR

BILAN 2002/2003 - PREVISIONS 2004

OPERA

Exercice majeur de conduite d'une
opération interarmées contribuant à l'entraînement de niveau opératif
et tactique

2002 : - 20 jours
- 65 personnes dans les
structures de commandement
- 06 aéronefs

2003 : - 15 jours
- 600 personnes dans les
structures de commandement
- 150 aéronefs

Participation de moyens étrangers

2002 : Exercice de niveau opératif ayant contribué
à l'entraînement des structures de commandement

2003 : Exercice réalisé dans la continuité de la
version 2002 assurant l'entraînement des
structures de commandement et unités tactiques.

2004 : Exercice non planifié.

POKER

Exercice d'ensemble des forces
aériennes stratégiques (FAS).

Toutes les unités FAS
20 aéronefs par exercice
4 x 5 jours/an

2002-2003 : 08 exercices réalisés

2004 : 04 exercices planifiés

VOLFAC

Exercice tactique de mise en
oeuvre des moyens du comman-
dement de la force aérienne
de combat (CFAC )

4 x 1 jour/an
30 aéronefs de combat
Participation occasionnelle de moyens
alliés

2002 : 04 exercices réalisés.
2003 : 04 exercices réalisés.
2004 : 04 exercices planifiés.

L'exercice Opéra, effectué en 2003, a particulièrement contribué à tester l'extension des capacités des structures de commandement.

Parmi les nombreux exercices multilatéraux, le général Wolsztynski a relevé, devant la commission, les acquis de « Croix du Sud ».

La coopération avec l'armée de l'air indienne est également significative, du point de vue opérationnel et politique. Les exercices multinationaux auxquels la France a participé en 2002 et 2003, et les perspectives pour 2004, sont présentés dans le tableau suivant :

NOM & TYPE

PARTICIPATION AIR

BILAN 2002/2003 - PREVISIONS 2004

CROIX DU SUD (Brésil)
Exercice aérien, bisannuel,
quadripartite (Brésil, Argentine,
Chili, France) de niveau opératif et
tactique.

2002 : - 02 semaines
- 150 personnes
- 06 aéronefs

2002 : Participation de 12 équipages et entraîne-
ment de 25 personnes dans les structures de
commandement.

2004 : Participation française planifiée pour un
volume de moyens similaire.

GARUDA (Inde)
Exercice aérien de défense aérienne

2002 : - 10 jours en Inde
- 60 personnes

- 04 avions de combat

2002 : Participation de 10 équipages

2004 : Participation similaire à celle de 2002

COOPERATIVE KEY
Exercice annuel organisé par le
commandement air de la région sud
de l'OTAN au profit des nations du
partenariat pour la paix.

2002 : - 02 semaines en France
- 1600 personnes de 22 nations
- 700 français

2003 : - 02 semaines en Bulgarie
- 100 personnes
- 05 aéronefs

2002 : 20 équipages français et 100 personnes
dans les structures de commandement.

2003 : Participation de 10 équipages

2004 : participation similaire à 2003

3. La réduction des effectifs et du parc de l'armée de l'air française la rapproche de l'armée britannique

Le tableau suivant récapitule, pour 2003, la répartition des effectifs et des aéronefs entre les principales puissances occidentales :

COMPARAISON DES RATIOS EFFECTIFS/AÉRONEFS POUR LA FRANCE ET LES PRINCIPAUX PAYS OCCIDENTAUX EN 2003

Pays

France

Allemagne

Royaume-Uni

Italie

Espagne

Grèce

Pays-Bas

Etats-Unis (6)

Nombre d'avions de combat (1)(5)

330

419

297

313

139

350

135

1508

Nombre d'avions de transport (2)(5)

145

96

116

123

141

64

11

851

Nombre d'hélicoptères (5)

84

83

110

121

41

28

94

121

Nombre d'avions Ecoles (5)

280

74

168

119

190

75

13

965

Total aéronefs

839

672

691

676

511

517

253

3 445

Effectifs (3) (4)

63 596

67 418

53 160

53 000

22 200

25 000

11 062

359 000

Ratio

75,80

100,32

76,93

78,40

43,44

48,36

43,72

104,21

(1) Avions de combat : chasseurs et chasseurs-bombardiers ; avions de reconnaissance ; avions de guerre électronique ;

(2) Avions de transport : avions de transport tactique (ex : C160 . C130) ; ravitaillement en vol ; patrouille maritime ou lutte contre les incendies si cette mission est réalisée par l'armée de l'air ; systèmes de détection et de contrôle aéroportés (AWACS) ; avions d'écoute électronique ; ...

(3) Effectifs : effectifs militaires pour l'année 2003

(4) Les effectifs militaires de la Royal Air Force (RAF) ne prennent pas en compte les effectifs « air » détachés au sein de la Defense Logistic Organization (DLO), organisme chargé de l'ensemble des tâches de soutien au profit des armées

(5) Parc en ligne

(6) Armée de l'air américaine uniquement, ne comprend pas la garde nationale (Air National Guard) et les réserves (Air Force Reserve Command) qui comprennent des moyens personnels et des aéronefs

Ce tableau est à comparer avec la situation prévalant sur ces points en 2002 .

Pays

France

Allemagne

Royaume-Uni

Italie

Espagne

Grèce

Pays-Bas

Etats-Unis (6)

Nombre d'avions de combat (1)(5)

355

437

311

300

174

372

138

1518

Nombre d'avions de transport (2)(5)

151

98

113

128

142

64

10

937

Nombre d'hélicoptères (5)

87

83

102

120

41

28

79

117

Nombre d'avions Ecoles (5)

299

76

218

140

192

75

13

1056

Total aéronefs

892

694

744

688

549

539

240

3628

Effectifs (3) (4)

62 966

71 000

53.200

57.291

22.290

25.000

11.470

359.000

Ratio

70.58

102.30

71.50

83.3

40.60

46.38

47.79

98.95

(1) Avions de combat : chasseurs et chasseurs-bombardiers ; avions de reconnaissance ; avions de guerre électronique ;

(2) Avions de transport : avions de transport tactique (ex : C160 . C130) ; ravitaillement en vol ; patrouille maritime ou lutte contre les incendies si cette mission est réalisée par l'armée de l'air ; systèmes de détection et de contrôle aéroportés (AWACS) ; avions d'écoute électronique ; ...

(3) Effectifs : effectifs militaires pour l'année 2002

(4) Les effectifs militaires de la Royal Air Force (RAF) ne prennent pas en compte les effectifs « air » détachés au sein de la Defense Logistic Organization (DLO), organisme chargé de l'ensemble des tâches de soutien au profit des armées

(5) Parc en ligne

(6) Armée de l'air américaine uniquement, ne comprend pas la garde nationale (Air National Guard) et les réserves (Air Force Reserve Command) qui comprennent des moyens personnels et des aéronefs

On observe que la réduction progressive de la flotte d'avions de combat est une évolution que suivent tous les pays européens. L'efficacité de ces flottes est, en effet, basée sur les performances croissantes de chacun des appareils, dont le nombre peut être ainsi réduit sans dommage. A terme, le nombre optimal d'avions de combat retenu par les deux grandes puissances militaires européennes que sont la Grande-Bretagne et la France tournera autour de 300, ce qui démontre la similitude de leurs démarches respectives.

4. Une participation active à l'opération Licorne, et décisive pour le succès de l'opération Artémis

Ces deux opérations extérieures menées sur le sol africain, dans des conditions très difficiles de quasi guerre civile, démontrent le savoir-faire de l'armée française.

a) L'opération Licorne

Entreprise du fait des menaces que faisaient peser sur la communauté étrangère (dont environ 14 000 Français) présente en Côte d'Ivoire, et notamment à Abidjan, les hostilités entre la sécession menée au nord du pays par les « Forces Nouvelles », et l'armée régulière relevant du gouvernement du président Laurent Gbagbo, l'opération Licorne mobilise près de 4 000 soldats français. L'armée de l'air les appuie par ses appareils de transport basés à Dakar (Sénégal), N'Djamena (Tchad) , Libreville (Gabon) et Djibouti, ainsi qu'à Abidjan.
Ainsi, du 19 septembre 2002 à début novembre 2003, les Transall ont effectué 514 sorties et 1 630 heures de vol, ; les Casa ont effectué 170 sorties et 415 heures de vol et les hélicoptères Fennec, 259 sorties pour 419 heures de vol.

L'appui logistique fourni par l'armée de l'air a été déterminant pour le déploiement de nos forces dans un contexte difficile.

L'opération Licorne se poursuit, avec le renfort de 1 400 hommes de la CEDEAO (Communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest).

b) L'opération Artemis

Cette opération s'est déroulée du 4 juin au 15 septembre 2003, en République démocratique du Congo (RDC).

La force multinationale intérimaire d'urgence qui s'est alors déployée, à Bunia, à l'est de la RDC (conformément à la résolution 1484 de l'ONU), a opéré à partir de l'aéroport d'Entebbe, situé en Ouganda, à 300 km de Bunia. Il s'agissait de la première opération militaire autonome dirigée par l'Union européenne hors d'Europe , et la France y occupait le statut de nation-cadre, démontrant sa capacité de conduire et commander, de façon autonome, l'ensemble des opérations.

Sur 1 855 hommes impliqués, 1 500 étaient français, dont un détachement des forces spéciales qui a, préalablement à l'opération, sécurisé la ville en proie à de sanglants affrontements inter-ethniques.

Puis un pont aérien a acheminé d'Entebbe plus de 13 tonnes de fret, grâce à une coordination effectuée par la base de soutien à vocation interarmées située à Entebbe.

La réussite de cette opération , aujourd'hui relayée par des troupes de la MONUC (mission de l'ONU pour le Congo), illustre les capacités opérationnelles de la France dans un milieu hostile et éloigné de sa base logistique , avec une forte implication des éléments de commandement et de transport de l'armée de l'air.

* 3 HFC : Helsinki headline goal Force Catalogue.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page