III. L'ÉQUIPEMENT DES FORCES NAVALES

A. LE BUDGET D'ÉQUIPEMENT POUR 2006

1. Mission Défense et loi de programmation

Le «  bleu budgétaire » retrace, pour chaque programme, les crédits consacrés à la mise en oeuvre de la loi de programmation militaire.

Ces crédits peuvent être mis en regard des crédits inscrits pour les principaux programmes, de la façon suivante :

Equipement des forces navales (en milliers d'euros)

Titre 2

Titre 3

Titre 5

Total

AE

16 426

45 087

2 931 260

2 992 773

CP

16 426

44 684

2 352 396

2 413 506

AE LPM

-

44 931

2 931 260

2 976 191

CP LPM

-

44 547

2 352 396

2 396 943

Préparation et emploi des forces navales

AE

2 834 8 93

1 672 223

116 792

4 623 909

CP

2 834 893

1 494 269

119 400

4 448 563

AE LPM

-

1 215 909

116 792

1 332 701

CP LPM

-

1 056 493

119 400

1 175 893

Total CP LPM pour les deux programmes

-

1 101 040

2 471 796

3 572 836

Pour la marine, les écarts avec l'annuité prévue tiennent, pour l'essentiel, à l'imputation de crédits au programme 212 « Soutien de la politique de défense ». Sur l'ensemble de la mission défense, les crédits de l'ancien agrégat marine au titre de la loi de programmation militaire se répartissent comme suit :

En M€ 2006

Programme

AE

CP

Commentaires

144

0,00

0,90

ETO marine

146

3 021,50

2 429,23

167

1,80

1,80

Subvention Musée de la Marine

178

1 332,70

1 175,90

212

357,20

311,40

Total

4 713,22

3 919,21

Globalement, le suivi des annuités peut donc être réalisé.

Comme précédemment indiqué, les modifications du périmètre les plus importantes en volume sont relatives à l'entretien programmé des matériels et au soutien des forces (385 et 658 millions d'euros d'après les chiffres fournis par l'état-major de la marine), pour une large part transférés au titre 3.

Les indicateurs associés au programme « Équipement des forces », le taux de réalisation des équipements principaux de la marine et l'indice de réalisation des besoins en autres équipements participant à la cohérence opérationnelle de la marine, affichent des valeurs cibles mais, compte tenu de leur nouveauté, ne comprennent pas d'indications de réalisation pour les années passées. Ils ne sont pas directement corrélés à la loi de programmation militaire, dont le suivi du contenu physique reste malaisé.

D'une façon générale, votre rapporteur regrette que les modifications intervenues dans le calendrier de réalisation des programmes ne figurent que rarement dans les tableaux descriptifs, alors même qu'y figure la notion de « référence initiale ». L'année 2006 est certes une « année zéro » en termes de nomenclature mais elle n'en abolit pas pour autant les jalons définis lors de l'examen de la loi de programmation militaire.

Ces références, précisées pour le second porte-avions, sont absentes pour l'hélicoptère NH 90 dont le premier exemplaire était attendu dans la marine cette année, pour les sous-marins Barracuda et les frégates multimissions dont les dates de commandes, et de livraisons, ont été décalées de façon significative.

2. Les contours de l'enveloppe d'équipements dans le cadre de la LOLF : une clarification bienvenue

L'action « équipement des forces navales » comprend des dépenses de personnel et des dépenses de fonctionnement clairement identifiées. A la différence de l'ancien titre V, le titre 5 actuel correspond à de véritables dépenses d'investissement.

Cette clarification est tout particulièrement bienvenue pour la marine dont l'enveloppe d'investissements comprenait jusqu'alors, les crédits destinés à la restructuration de DCN , via le compte de commerce  « constructions navales de la marine militaire », dont la clôture aura lieu au plus tard le 31 décembre 2005.

La proximité historique des deux entités a longtemps justifié cette confusion qui conduisait à afficher un effort d'investissement supérieur à la réalité. Votre rapporteur avait plaidé pour que ces dépenses, qui constituaient dans leur grande majorité des mesures d'accompagnement de la réduction des effectifs, soient comptabilisées selon un mode plus conforme à leur nature. Il se félicite de ce que la mise en oeuvre de la LOLF permette ce changement d'imputation.

Sur la durée de la période de programmation, ainsi que l'a rappelé le chef d'état-major de la marine lors de son audition devant votre commission, le 19 octobre 2005, l'accompagnement de la restructuration de DCN aura représenté un prélèvement de 1,3 milliard d'euros sur les crédits d'équipement.

Pour 2006, 96 millions d'euros sont inscrits au titre 2, dépenses de personnel, et correspondent au financement du Fonds d'adaptation industrielle (77,3 millions d'euros) et du volet social (19 millions d'euros).

3. La répartition par nature de l'effort d'équipement

Le nombre et la nature des programmes d'équipement n'ont pas varié entre 2005 et 2006, mais les comparaisons entre le titre V de l'ancienne nomenclature (3,8 milliards d'euros au PLF 2005), l'actuel titre 5 « équipement des forces navales » (2,41 milliards d'euros pour 2006) et l'enveloppe d'équipements correspondant à la loi de programmation militaire, laquelle ne correspond pas strictement à la nomenclature rénovée (2,7 milliards d'euros) sont malaisées. Seule l'ancienne nomenclature qui continue à servir de référentiel pour cette année, première année de nomenclature LOLF, permet d'effectuer des comparaisons.

DÉTAIL PAR CATÉGORIES DE PROGRAMME

LFI 2005

PLF 2006

Evolution en %

Chap

Intitulé

AP

CP

AE

CP

AE

CP

5161

Espace et SIC

160

132

143

120

-11%

-9%

5171

Forces nucléaires

772

849

965

999

+25%

+18%

5281

Etudes

1

2

0

1

-100%

-55%

5371

Equipements communs des armées

296

700

197

738

-34%

+5%

5381

Equipements des armées

3 175

963

2 052

929

-35%

-4%

5441

Infrastructures

87

93

81

83

-7%

-11%

5511

Soutien des forces

479

418

428

385

-11%

-8%

5521

EPM

1 070

695

841

658

-21%

-5%

Total titre V (ancienne nomenclature)

6 040

3 852

4 707

3 913

-22%

+2%

6650

Autres équipements Marine

3

3

4

4

+76%

+40%

6710

Subvention musées Marine

2

1

2

2

+0%

+80%

Total titre VI (ancienne nomenclature)

4

4

6

6

+50%

+50%

TOTAL TITRES V-VI

(ancienne nomenclature)

6 044

3 856

4 713

3 919

-22%

+2%

Cette comparaison fait apparaître une légère progression des crédits de paiements et une diminution des autorisations d'engagement qui s'explique par les volumes considérables mobilisés ces dernières années pour les besoins du programme des frégates multimissions et des sous-marins nucléaires d'attaque. Ces chiffres ne tiennent pas compte des reports, très importants, notamment sur ces deux programmes.

4. Les livraisons attendues

L'année 2006 marque, pour ce qui concerne les livraisons attendues, un début de renouvellement des équipements les plus anciens, avec le remplacement de deux transports de chalands de débarquement par les bâtiments de projection et de commandement et l'arrivée programmée de la première des frégates anti-aériennes Horizon, le Forbin, qui devrait être pleinement opérationnelle en 2007.

5. Le démarrage simultané de programmes de grande ampleur

L'examen des commandes appelle une appréciation contrastée. L'ampleur des autorisations de programmes mobilisées témoigne de l'effort consenti pour le renouvellement de la flotte tandis que le lancement simultané de programmes structurants fait apparaître la nécessité de soutenir durablement cet effort.

C'est le décalage intervenu dans le calendrier des programmes qui conduit à concentrer de façon aussi spectaculaire le renouvellement de capacités de grande ampleur et conduit à s'interroger sur la soutenabilité de la charge pour le budget de l'Etat.

a) Les frégates multimissions

Le programme de frégates multimissions (FREMM) a été lancé par décision ministérielle du 30 avril 2002 approuvant le dossier de faisabilité.

Les coûts de ce programme ont été étudiés pour une cible de 17 plates-formes, afin de remplacer trois types de bâtiments actuels (2 frégates F67 et 6 F70, 10 avisos A69, soit 18 bâtiments), avec une cadence de fabrication élevée (1,5 par an) pour profiter de l'effet de série.

La phase de définition est lancée depuis le 26 décembre 2002, en coopération avec l'Italie qui cherche à construire 10 bâtiments de même catégorie.

Cette coopération a fait l'objet, le 7 novembre 2002, d'une déclaration d'intention des ministres français et italien, suivie d'un accord cadre signé le 16 juin 2003.

Le niveau de convergence entre la France et l'Italie a permis une première annonce lors du salon Euronaval en octobre 2004 mais la phase de réalisation n'était alors annoncée que pour le courant de l'année 2005.

La loi de programmation militaire prévoyait, quant à elle, le lancement de la réalisation en 2004, en vue d'une admission au service actif de la première frégate dans la version anti-sous-marine, en 2008.

Ce programme a finalement été notifié par l'OCCAR, le 16 novembre dernier, pour un montant global de 11 milliards d'euros, dont 6,45 milliards pour la part française. Ce contrat inclut une garantie de disponibilité sur les six premières années suivant la mise en service. Il comprend une tranche ferme de 3,5 milliards d'euros correspondant aux huit premiers bâtiments (six dans la version anti-sous-marine et deux dans la version action vers la terre) et des tranches conditionnelles pour les autres bâtiments dont la commande ferme interviendra sur la prochaine période de programmation.

Les premières livraisons devraient intervenir vers 2011 et s'échelonner jusqu'à 2021 ; par rapport au calendrier prévu par la loi de programmation, il enregistre un retard de près de trois ans, les bâtiments existants devant être prolongés d'autant .

Le coût unitaire d'une frégate, développement et période initiale de soutien compris, s'élève à 382 millions d'euros, ce qui représente un coût global de 6,5 milliards d'euros pour l'ensemble du programme.

Le projet de loi de finances consacre 199 millions d'euros à ce programme en crédits de paiement et 23 millions d'euros en autorisations d'engagement. Ces chiffres ne rendent pas compte des dotations effectivement affectées à ce programme : un cumul de 4,5 milliards d'euros d'autorisations d'engagement, mobilisées en vue de l'éventuelle mise en place d'un financement « innovant » fin 2004, a été engagé.

Votre rapporteur se félicite de la notification très attendue de ce contrat qui représente à la fois le franchissement d'un cap vers le renouvellement des capacités de la marine et une charge de travail déterminante pour l'activité « navires armés » de DCN.

De nombreux programmes sont associés à celui des frégates multimissions qui constituent un élément essentiel de la cohérence des équipements de la marine.

b) Les sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda

La phase de définition de la prochaine génération de SNA a été lancée en 1998 et le dossier d'orientation validé en novembre 2001. Les Barracuda sont nécessaires à la sûreté de la FOST et du groupe aéronaval, ils rempliront également des missions de renseignement et seront dotés de capacités de frappe de la profondeur avec le missile de croisière naval.

Ce programme, pour lequel la loi de programmation militaire prévoyait 1,2 milliard d'euros sur un montant total de 5,4 milliards d'euros, a, lui aussi, pris du retard pour des raisons d'indisponibilité des crédits mais aussi de relèvement du degré d'exigence des normes de sûreté nucléaire. Ces normes imposent désormais des études préalables garantissant la sûreté, avant tout début de réalisation mais aussi des redondances d'équipements qui ont conduit à augmenter le déplacement du bâtiment et donc à renchérir les coûts et les délais.

En outre, le coût du programme défini en 2002 n'intégrait ni les taxes, ni le système de combat.

Lors de son audition devant la Commission, le jeudi 10 novembre, le délégué général pour l'armement, M. François Lureau a estimé que le devis actuellement proposé par l'industrie « ne pouvait être qualifié de raisonnable » ; les négociations se poursuivent avec l'objectif de lancer effectivement le programme au cours de l'année 2006.

La première livraison devrait intervenir en 2014. Si aucune réduction de cible n'est envisagée, ainsi que l'a affirmé le délégué général pour l'armement devant votre Commission, une réduction temporaire du nombre de SNA en parc pourrait être nécessaire si le coût nécessaire au prolongement des unités les plus anciennes est trop élevé.

A la fin de l'année 2005, 1,1 milliard d'euros d'autorisations d'engagement devront faire l'objet d'un report, en vue de la notification du programme en 2006.

Le projet de loi de finances consacre 188,5 millions d'euros en autorisations de programmes et 159 millions d'euros de crédits de paiements à ce programme. 1,3 milliard d'euros d'autorisations d'engagement devraient être consommées en 2006.

c) Le missile de croisière naval

Associé aux programmes des frégates multimissions et des sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda, le programme de missile de croisière naval a pour objet de disposer d'une capacité de frappe dans la profondeur depuis la mer, capacité nouvelle apportant une diversification des options militaires à l'appui de l'action du gouvernement.

La notification du contrat de réalisation de ce programme est prévue pour 2006, avec une commande portant sur 50 unités, avec l'objectif d'une première livraison en 2012.

Le projet de loi de finances consacre 551,9 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 10 millions d'euros en crédits de paiements.

d) Le second porte-avions

La construction d'un second porte-avions a été décidée en 2003, avec l'adoption de la loi de programmation militaire, qui lui consacrait 600 millions d'euros, destinés aux études de faisabilité. Le calendrier envisagé était 2005 pour le début de la phase de réalisation et 2014 pour l'admission au service actif, avant la deuxième grande indisponibilité pour entretien du porte-avions Charles de Gaulle.

Le président de la République a fait connaître son choix d'un mode de propulsion classique le 13 février 2004 qui « ouvre les meilleures perspectives de coopération avec le Royaume-Uni ». Le Royaume-Uni a lancé un processus d'acquisition de deux porte-avions selon un calendrier comparable.

Depuis, le phasage des programmes français et britannique semble particulièrement malaisé. Alors que la France a pris la décision de se doter d'un second porte-avions après le Royaume-Uni, le programme britannique a été retardé à plusieurs reprises. La communalité des besoins entre les deux marines a été estimée à plus de 80 % par le délégué général pour l'armement, en dépit du choix britannique de l'aéronef à décollage court américain F 35, qui induit pour la France une adaptation du pont d'envol pour prévoir l'installation de catapultes et brins d'arrêt.

La notification du contrat de réalisation est prévue en 2006, pour une livraison en 2014.

Le projet de loi de finances consacre 925,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 52,6 millions d'euros en crédits de paiement, à ce programme.

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